15 Jan

1984 : le chef d’oeuvre de George Orwell adapté en bande dessinée

À quoi reconnaît-on une oeuvre littéraire majeure ? Peut-être aux mots qu’elle laisse dans son sillage et aux images qu’elle fait naître dans la pensée des lecteurs. En ce sens, 1984 est un pur chef-d’oeuvre, un livre qui a marqué son époque et reste farouchement d’actualité. Les quatre adaptations BD qui se disputent actuellement les étagères de nos librairies préférées en sont peut-être la preuve la plus éclatante. Big Brother is watching you !

Longtemps, les ayants droits de George Orwell ont voulu contrôler le nombre 1984, guettant d’un oeil tout orwellien l’utilisation qu’il pouvait en être fait bien au-delà du seul monde littéraire. Ainsi, un animateur de webradio, créateur d’un tee-shirt « 1984 is already here » en garde un amère souvenir, obligé il y a une poignée d’années de retirer son oeuvre de la vente.

Mais aujourd’hui, quelque chose a changé. Tout simplement, le roman publié en 1949 quelques mois avant la mort de son auteur, est tombé dans le domaine public, libre de droits depuis le 1er janvier de cette année.

Résultat ? C’est la guerre des adaptations, elles sont au nombre de quatre en ce mois de janvier. Si 1984 a été maintes fois adapté au cinéma, à la télévision, au théâtre ou encore décliné en chanson, il ne l’avait étrangement jamais été en bande dessinée. Le retard est rattrapé et bien rattrapé.

Parmi ces quatre adaptations, un livre de Xavier Coste, paru aux éditions Sarbacane. L’auteur des – déjà – remarqués Egon Schiele vivre et mourir, Rimbaud l’indésirable ou encore A comme Eiffel, signe une adaptation qui fera date dans l’histoire de la bande dessinée, quasi-monumentale, 224 pages en quadri accompagnées d’un magnifique pop-up réalisé par un ingénieur papier du nom de Nicolas Codron, réservé – prévient l’éditeur – à la seule version originale.

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L’interview de Xavier Coste à lire ici

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D’où l’importance de se jeter rapidement sur la bête mais que les retardataires se rassurent, l’album ne perd en rien de sa qualité et de sa compréhension en son absence. C’est un plus, un bonus, un cadeau qui couronne une très belle adaptation que l’auteur a voulue la plus fidèle possible à l’oeuvre d’Orwell avec des dialogues pratiquement pas modifiés, des décors oppressants à souhait, des couleurs ternes, sans vie, un rythme volontairement lent et un format carré qui apporte un supplément de déshumanisation à l’ambiance générale.

Dans un format et un style plus classique, le 1984 de Jean-Christophe Derrien et Rémi Torregrossa paru chez Soleil apporte lui-aussi une relecture de l’oeuvre culte d’Orwell avec pour les auteurs une volonté affichée de mettre le texte à la portée du plus grand nombre en en simplifiant certains passages. L’album est traité en noir et blanc avec ici ou là, sur certaines pages et certaines cases, des touches de couleur qui apportent un peu d’espoir dans ce monde très sombre.

En ces temps de pandémie, de distanciation sociale, de restriction des libertés individuelles, ces adaptations nous rappellent combien le roman de George Orwell pouvait être visionnaire. Bien évidemment, ce que le contexte sanitaire impose aujourd’hui est très éloigné de ce que pourrait amener une dictature avec le contrôle de la pensée mais 1984 est là pour nous rappeler – si besoin est – que l’avenir est une histoire qui reste à écrire, pour le pire ou pour le meilleur.

Eric Guillaud

Le 1984 de Derrien et Torregrossa est paru aux éditions Soleil (17,95€), celui de Coste est sorti chez Sarbacane (35€). Deux autres adaptations sont aujourd’hui disponibles, celle de Fido Nesti et Josée Kamoun aux éditions Grasset (22€), celle de Sybille Titeux de la Croix et Ameziane Hammouche aux éditions du Rocher (19,90€)

14 Jan

Walking Dead – L’étranger : les zombies ne meurent jamais

Ne jamais croire un auteur lorsqu’il vous annonce son envie de tuer sa série star, surtout lorsqu’elle est en pleine forme. Jamais. Donc même si son créateur historique n’est plus à la barre, Walking Dead revit sous la forme de ce premier tome d’un spin-off pour l’instant aussi alléchant que diablement frustrant…

En 2019, son créateur Robert Kirkman annonce la fin de la saga de Walking Dead, véritable phénomène culturel publié en France depuis 2007 et qui a donné naissance, en plus de la BD, à de nombreuses déclinaisons, dont plusieurs très populaires séries TV. Mais tout comme les zombies qu’il a croqué pendant seize longues années, ‘ces morts marchant’ refusent de mourir. Et à peine leur mise en bière réalisée, ils préparaient déjà un retour dont ce volume indépendant ne serait que l’avant-garde. Sauf que cela commence plutôt mal…

Ce n’est pas que L’Etranger soit une mauvaise BD, loin de là. Au contraire même : avec ces cadrages très larges, ces pleines pages contemplatives, son noir et blanc classieux et son découpage très cinématographique, son sens narratif est même plutôt aiguisé. Surtout que l’action a été délocalisée en Europe, à Barcelone pour être plus précis, avec de nouveaux personnages dont on soupçonne déjà les parts d’ombres. Là aussi, les morts-vivants ont envahi les rues dans une ville-fantôme où les faibles périssent et où seuls les plus forts et les plus malins survivent…    

Non en fait, le souci, le gros souci même est que le tout semble fini avant même d’avoir commencé. Le récit est court, très court, trop même. On a l’impression de lire un prologue plus qu’autre chose. Et même si la série nous a habitué à l’idée qu’elle n’hésitait jamais à sacrifier régulièrement ces personnages, aussi aimés soient-ils par les fans, là le couperet tombe franchement trop tôt. Autant cela passe pour le fascicule offert (un petit récit centré sur Negan, l’un des méchants les plus populaires de la série principale) qu’on lit comme une sorte de bonus cadeau, autant ce goût d’inachevé laissé par cet Etranger donnera trop l’impression à certains fans qu’on profite d’eux. Â moins que le tout appelle à une suite qui permettra de rectifier le tir mais pour l’instant, rien n’est moins sûr.

Olivier BADIN

Walking Dead – L’Etranger de Brian K. Vaughan & Marcos Martin. Delcourt. 13,50 euros

© Delcourt / Vaughan & Martin

13 Jan

Fauve d’Angoulême – Prix du Public France Télévisions 2021: huit albums en lice

Pour la deuxième année consécutive, France Télévisions s’associe au Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême pour décerner le Fauve d’Angoulême – Prix du public. Huit albums ont été présélectionnés. Le lauréat sera connu le 29 janvier…

En raison de la pandémie, on le sait, le Festival international de la Bande Dessinée d’Angoulême déclinera pour sa 48e édition une forme un peu particulière, en deux temps, un festival espéré sur site en juin, une exposition d’envergure consacrée à Emmanuel Guibert et la remise des prix, les Fauves, dès la fin janvier. 

La suite ici

 

Sélection officielle Angoulême 2021. Le Mystère de la maison brume : le polar énigmatique sans cadavre et sans meurtrier de Lisa Mouchet

C’est l’un des récits de bande dessinée les plus surprenants de la sélection officielle 2021, un récit entièrement réalisé en vue subjective avec le décor d’une maison pour unique personnage visible et un mystère aussi épais que la brume ambiante…

La couverture annonce la couleur. Et la forme. Le Mystère de la maison brume n’est pas un album ordinaire avec un découpage en forme de gaufrier, des bulles pour les dialogues, une belle galerie de personnages et une aventure à la Spirou et Fantasio, pleine de rebondissements, d’actions et d’humour.

Ici, pas de personnages. Ou plutôt si. Trois. Mais vous ne les verrez jamais. Ils portent des numéros, n°2, n°5 et n°8, ont en commun d’habiter le même lotissement d’un hameau perdu quelque part entre l’hémisphère sud et l’hémisphère nord, un hameau généralement noyé sous une brume épaisse jusqu’au jour où le soleil décide de faire une percée et dévoile la grande maison d’un certain Mr.zéro que vous ne verrez pas non plus. Et que les trois autres numéros n’ont jamais vu.

Une maison bien curieuse, immense, moderne, abandonnée, un personnage en soi, de quoi attiser la curiosité des voisins et notamment des n°2, n°5 et n°8 qui par une belle nuit d’été décident de franchir le pas et de s’aventurer dans la fameuse maison, au risque de s’y perdre ou de faire une mauvaise rencontre…

Surprenant par sa forme, ce premier livre de Lisa Mouchet se révèle franchement séduisant, l’autrice s’y autorisant une belle exploration des possibilités du médium, une expérimentation narrative et graphique tous azimuts avec une histoire entièrement en vue subjective, de quoi nous plonger corps et âme dans le récit. Il y a de l’Agatha Christie dans tout ça et bien plus encore… Captivant !

L’album figure dans la sélection officielle du Festival International de la bande dessinée d’Angoulême 2021 et il est en compétition pour le Prix du Public France Télévisions

Eric Guillaud

Le Mystère de la maison brume, de Lisa Mouchet. Magnani. 24€

Atom Agency, un polar comme au bon vieux temps dessiné par le Nantais Olivier Schwartz

Valeur sûre en bande dessinée et en littérature d’une façon générale, le polar bien noir reprend des couleurs avec le scénariste Yann et le dessinateur Olivier Schwartz. Enquêtes criminelles, recherches de personnes disparues, filatures diverses… Atom Agency relève le défi.

Le Choucas, Jérôme K. Jérôme Bloche, Gil Jourdan, Nestor Burma, Canardo, Blacksad, Ric Hochet, Dick Tracy…  Les détectives privés sont légion dans le monde du neuvième art, preuve de l’extrême fascination que peut exercer ce métier vieux comme le monde. Qui n’a jamais effectivement rêvé de partir sur une filature et de démasquer le méchant. Rien qu’en France, aujourd’hui, il existe plus de 1000 agences en activité. 

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11 Jan

X-O Manowar : Wisigoth et fier de l’être !

Deuxième édition (après une première en 2017) pour cette intégrale en trois volumes d’Aric le wisigoth, guerrier du 4e siècle devenu par erreur un demi-dieu grâce à une armure extra-terrestre et dont le destin le pousse à d’abord sauver son peuple puis l’humanité entière. Une preuve supplémentaire que le petit Poucet Valiant en a revendre face aux mastodontes DC Comics et Marvel.

D’accord, on vous voit venir à trois kilomètres. Et oui, vous avez raison sur le papier, le point de départ ici est disons capilotracté, même du point de vue d’un fan de comics pourtant habitué aux trucs un peu tiré par les cheveux : en l’an 402, Aric, impétueux héritier du trône des Wisigoths, se fait kidnapper par des extra-terrestres qui l’emmènent sur leur vaisseau spatial en orbite pour y devenir leur esclave. Lorsqu’il réussit enfin à provoquer une révolte, il fusionne avec une sorte d’armure consciente érigée en relique sacrée par ses geôliers qui le transforme en une arme surpuissante et quasi-indestructible. Mais une fois de retour sur Terre, il se rend alors compte que seize siècles sont passés et que les choses ont bien changées…

Les héros torturés, l’écurie VALIANT aime ça : BLOODSHOT, LE GUERRIER ETERNEL, RAI etc. Mais celui-ci est à part car on a d’abord du mal à être en empathie avec cette grande gueule, arrogante toujours prompt à répondre avant tout par les poings. Et puis au début, son monde paraît bien monochrome, avec les méchants clairement identifiés d’un côté et les gentils de l’autre. Or vu que comme d’habitude VALIANT ne fait dans la dentelle lorsqu’elle parle d’intégrale – plus de 800 pages ici, et encore ce n’est que le premier volume ! – on se demande d’abord comment tout cela va tenir sur la longueur…

© Valiant/Bliss – Venditti, Kindt, Nord, Garbett & Braithwaite

Sauf que la première moitié du volume est assuré au dessin par le grand, que dis-je l’immense Cary Nord, prix Eisner 2004 connu pour son travail sur THOR et surtout CONAN THE BARBARIAN. Même si son trait n’est peut-être pas aussi profond ici, il sait apporter à la fois de l’humanisme et des couleurs qui donnent du corps à l’histoire. Et surtout, le scénariste Robert Venditti prend son temps pour installer sa mythologie en quelque sorte, tout en multipliant les aller-retours entre le passé et le présent pour mieux expliquer comment son personnage central s’est construit.

Mieux : en le faisant revenir sur Terre avec son peuple pour essayer de se réapproprier leurs anciennes terres, provoquant l’ire des armées du monde, il se permet même une métaphore sur le sort actuel des réfugiés apatrides et leurs difficultés à trouver leur place dans le monde moderne.

Certes, cela fait beaucoup, beaucoup à encaisser. Et le cahier des charges imposé de façon systématique par VALIANT avec un héros, quel qu’il soit, devant impérativement à un moment ou à un autre croiser d’autres personnages maison (ici NINJA K, LE CHAMPION ETERNEL ou encore la saga UNITY) ne fait pas toujours des merveilles. Mais grâce au talent Cary Nord et au côté compacte/économique de l’objet (autant de pages qu’avec les Omnibus de son grand frère MARVEL mais deux fois moins cher presque), au bout du bout, X-O MANOWAR s’impose comme l’un des héros les plus atypiques de VALIANT, petite mais costaude alternative aux géants du circuit.

Olivier Badin

X-O Manowar – Intégrale tome 1 de Robert Venditti, Matt Kindt, Cary Nord, Lee Garbett & Dough Braithwaite, Valiant/Bliss, 49 euros    

© Valiant/Bliss – Venditti, Kindt, Nord, Garbett & Braithwaite

10 Jan

Nouveauté 2021. A Fake story, Jean-Denis Pendanx et Laurent Galandon au coeur du mensonge

La plupart d’entre nous n’étions pas nés en 1938 lorsque le prodigieux Orson Welles fit trembler l’Amérique dit-on avec une pièce radiophonique adaptée de son roman La Guerre des Mondes. Mais nous connaissons tous cette histoire, cette fausse histoire, qui peut en cacher beaucoup d’autres..

États-Unis, le 30 octobre 1938. La radio américaine CBS vient de l’annoncer et le retransmet en direct, les extra-terrestres envahissent notre bonne vieille Terre. C’est la panique dans les foyers, l’hystérie collective, la presse écrite parle d’émeutes à travers le pays. Mais tout ceci est faux. Aucun extra-terrestre à l’horizon, nulle invasion, pas de scène de panique… Rien si ce n’est une fiction signée Orson Welles et une légende qui s’est écrite avec le temps.

C’est de cet épisode malgré tout mythique de l’histoire radiophonique que sont partis Jean-Denis Pendanx et Laurent Galandon pour écrire ce récit publié chez Futuropolis. Ils y abordent le thème du fake à travers les médias en déroulant une sombre histoire de meurtre que certains auraient voulu maquiller en suicide collectif en réaction à cette arrivée imminente d’extra-terrestres. Mais c’était sans compter sur la diligence de Douglas Burroughs, journaliste vedette de la CBS, qui débarque dans le bled paumé où a eu lieu l’affaire pour enquêter et démêler le vrai du faux.

Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’histoire tient sacrément bien la route grâce à un scénario parfaitement huilé et des planches aux atmosphères finement travaillées. De ce qui aurait pu faire une bonne SF bascule rapidement dans le polar et nous tient en haleine jusqu’à la dernière page avec en sus un regard affuté et assez pessimiste sur la société américaine ségrégationniste, raciste, prête à croire celui qui parle le plus fort ou ment le plus effrontément, ce qui en tout cas l’arrange, comme on a pu encore le voir très récemment avec Trump et ces fake news produites à la chaine.

Un récit adapté du roman de Douglas Burroughs à en croire la couverture. Mais même là, rien n’est moins sûr !

Eric Guillaud

A Fake story, de Jean-Denis Pendanx et Laurent Galandon. Furutopolis. 17€ (en librairie le 13 janvier)

07 Jan

Passion femmes : l’hommage de Manara à la féminité

Si vous vous demandez encore où sont les femmes comme un certain chanteur populaire du siècle précédent, ne cherchez plus, elles sont là, dans ce magnifique ouvrage des éditions Glénat sorti en décembre, plus de 300 pages et autant de représentantes de la gente féminine goulûment croquées par Manara…

Certains dessins se passent de commentaires, c’est le cas ici. Tout au long des 300 pages de ce livre, pas un mot, pas une phrase, pour expliquer l’immense talent de l’auteur, l ‘extrême beauté du graphisme, en un mot ou presque le génie de la chose, mais des illustrations, autant que de pages, des illustrations effectivement signées par un auteur hyper-talentueux, l’un des géants de la bande dessinée européenne passé maître en bande dessinée érotique, adepte d’un trait réaliste d’une très grande clarté, Manara.

Le Déclic, Le Parfum de l’invisible, Candide caméra, L’été indien, El Gaucho… l’auteur italien a signé plusieurs albums qui appartiennent d’ores et déjà au patrimoine mondial de l’imaginaire et du fantasme avec toujours, au centre de tout, la femme. Ce livre réunit des illustrations qui couvrent toute sa carrière et seraient, à en croire l’éditeur, majoritairement inédites en livre en France, des portraits d’actrices, des projets d’affiches, des créations pour la presse ou la publicité… Sensuel jusqu’au bout du trait !

Eric Guillaud

Passion femmes, de Manara. Glénat. 39€

06 Jan

Mirages et folies augmentées : du Druilllet pour la nouvelle année

Quand on évoque Philippe Druillet, on pense immédiatement à La Nuit ou Salammbô, deux albums qui ont, il est vrai, révolutionné le neuvième art en leur temps. Mais Druillet, c’est beaucoup plus que ça. Les éditions Glénat nous le rappellent aujourd’hui à travers ce magnifique ouvrage de plus de 360 pages réunissant des récits peut-être moins connus, certains oubliés, mais tout aussi révélateurs d’un certain génie…

Un dessin de couverture flamboyant et fantastique sur fond argenté, des pages de garde d’un noir profond… bienvenue dans l’univers du grand, de l’immense, de l’unique Philippe Druillet. Impossible de le confondre avec un autre, même de loin, même de nuit, un dessin du créateur de Lone Sloane se reconnaît facilement par tous, bien au-delà du seul cercle des férus de bandes dessinées.

L’auteur est de retour avec une nouvelle édition de Mirages, une édition revue et judicieusement sous-titrée Et folies augmentées. Mais que trouve-t-on exactement dans ses – presque – 400 pages ? Des oeuvres de jeunesse, des documents inédits dont même l’auteur avait oublié l’existence tels que La faune de l’espace réalisé avec Jean-Pierre Dionnet, des histoires courtes inscrites dans sa période noir et blanc, Le garage à vélo, Vuzz, Le Messager des ombres avec Lob, Demain peut-être, Le Mage acrylic… en couleurs cette fois Firaz et la ville fleur avec Picotto au dessin et Druillet au scénario, de nombreuses illustrations et couvertures de livres, de magazines et d’albums.

Forcément indispensable pour tous ceux qui aiment Druillet, pour tous ceux qui s’intéressent à l’histoire du neuvième art, à son évolution, notamment à cette période des années 70 où tout était à inventer, à transgresser, où tout était finalement possible. Magnifique !

Eric Guillaud

Mirages et folies augmentées, de Philippe Druillet. 35€

03 Jan

Deadpool ou le joyeux de la couronne

Deadpool, le héros, est un mercenaire aux capacités régénératrices aussi infinies que son sens de la tchatche. Deadpool, la série, ne cesse elle aussi de mourir pour mieux ressusciter. Après son crossover très réussi avec Spiderman et son passage chez les Avengers, sa nouvelle série le voit… monter sur le trône.

 

Alors pas de panique : bien sûr qu’il y a de grosse bagarre et bien sûr que MARVEL n’oublie pas de sortir de son placard plein à craquer de bad guys quelques jolis représentants, comme par exemple ici Kraven le chasseur dont la première apparition remonte, quand même, à 1965. On a même droit à Captain America et aux X-Men en fin de parcours… Mais on ne va pas se mentir, ce n’est pas vraiment cela que l’on va chercher du côté de Deadpool. Non, ce que l’on aime chez le mercenaire disert c’est son débit mitraillette, son attitude goguenarde, sa tchatche perpétuelle, son humour ultra-grinçant et son sens de la réparti. Sans parler de ces 8795 clins d’œil, cette façon qu’il a de tout le temps charrier ses copains super-héros, son manque de moral assumé ou même cette façon qu’il a de briser le quatrième mur en s’adressant directement au lecteur.

Oui, c’est tout cela que l’on vient chercher chez Deadpool. Pour chacun des nombreux scénaristes et dessinateurs qui se sont succédés à son chevet, la feuille de route est donc très claire et à ce petit exercice, la scénariste Kelly Thompson s’en sort plutôt pas mal, notamment en démarrant cette nouvelle série sur un pitch improbable : engagé pour occire le ‘roi des monstres’ qui occupe Staten Island à côté de New York, il réussit tellement bien son boulot qu’il est élu souverain à sa place par tous ses sujets… Avec toutes les emmerdes qui ont avec. Et oui, la présence d’un requin de terre (ne posez pas de question) en guise d’animal de compagnie et d’un mutant nommé Gerbe dont la particularité est de vous téléporter en vous, et bien, gerbant dessus ne sont que deux des (très) nombreuses loufoqueries que l’on retrouve ici. 

C’est du n’importe quoi ? Presque, oui mais justement, c’est pour ça que cela marche. Surtout avec un dessinateur comme Chris Bachelo qui s’amuse beaucoup avec les cadrages et les couleurs, sans oublier de semer plein de micro-détails sur ses pages et surtout d’accentuer le côté loufoque du personnage. D’ailleurs, c’est surtout drôle, très drôle même. Â condition, certes, de connaître les codes et d’apprécier la surabondance de joutes verbales qu’est l’une des images de marque de cet anti-héros qui détonne toujours autant au sein du monde sinon trop souvent très politiquement correct de MARVEL.

Olivier Badin

Deadpool – Longue Vie Au Roi de Kelly Thompson, Chris Bachalo, Gerardo Sandoval et Kevin Libranda, Marvel/Panini Comics, 18€

© Marvel/Panini Comics – Thompson, Bachalo, Sandoval & Libranda

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