Après Cosey en 2017, Richard Corben en 2018 et Rumiko Takahashi en 2019, c’est au tour d’Emmanuel Guibert de se voir attribuer le prestigieux Grand Prix d’Angoulême, le premier auteur français depuis Jean-Claude Denis en 2012…
Ils étaient trois en lice après le vote début janvier des auteurs et autrices de bande dessinée, un Américain, Chris Ware, et deux FrançaisCatherine Meurisse et Emmanuel Guibert. C’est finalement sur ce dernier que le choix s’est porté à la veille de l’ouverture de la 47e édition du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême.
Emmanuel Guibert est un auteur complet signant parfois le dessin, parfois le scénario, souvent les deux. La Guerre d’Alan (L’Association) est certainement l’un de ses meilleurs récits. Il raconte la guerre à travers le quotidien du GI californien Alan Ingram Cope, débarqué en France le 19 février 1945, précisément le jour de ses 20 ans, après des mois d’entrainement sur sa terre natale.
La vie d’Alan Ingram Cope n’a rien de fondamentalement extraordinaire ou héroïque. Emmanuel Guibert nous en livre pourtant plusieurs épisodes avec une façon à lui qui rend l’ordinaire passionnant. Tout commence en 2000 avec le premier volet de La Guerre d’Alan. L’auteur pose en une centaine de pages, un peu moins peut-être, les bases de ce qui le fera connaître du grand public.
Un trait sobre et épuré, une narration simple et efficace, une écriture aussi limpide que l’eau d’une rivière de montagne, un récit qui oscille entre la biographie et le documentaire. Cette signature-là se retrouvera dans tous les albums de la série (La Guerre d’Alan, L’Enfance d’Alan, Martha & Alan) mais aussi dans la trilogie Le Photographe, publiée entre 2003 et 2006.
Emmanuel Guibert, c’est aussi Le Capitaine écarlate avec David B, Ariol avec Marc Boutavant, Les Olives noires, Sardine de l’espace ou encore La Fille du professeur avec Joann Sfar…
Pour tous les amoureux du neuvième art, le Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême est Le rendez-vous incontournable qui réunit chaque année des dizaines de milliers de passionnés et de professionnels. Dédicaces, expos, concerts de dessins, rencontres, conférences, projections… le programme est gargantuesque. Alors, y aller ou pas, la question ne se pose même pas mais pour quoi faire, c’est une autre histoire…
Il faut une bonne dose de courage pour sortir à pareille saison de sa bulle, affronter le froid, la neige, la grippe, la gastro, les trains fantômes, les manifestations… mais la passion est plus forte que tout, plus forte que l’appel de la couette. Rendez-vous donc à Angoulême du 30 janvier au 2 février pour la 47e édition du festival de la Bande Dessinée qui affiche comme tous les ans un programme dense à en perdre la tête. On vous aide à y voir plus clair en dix points…
Le festival en chiffres
2000 auteurs et autrices invités, 892 journalistes français et étrangers, 6600 professionnels, 282 maisons d’édition francophones, 32 pays représentés, 400 rencontres, ateliers, conférences, projections, 230 tonnes de livres, 230 tonnes de matériel acheminé à Angoulême, 26900 mètres carrés dédiés, plus de 20 sites sur la ville… et plus de 200 000 visiteurs attendus. Voilà pour les chiffres concernant cette nouvelle édition, la 47e, dont le lancement jeudi 30 janvier marquera aussi celui de « L’Année de la bande dessinée », manifestation instaurée par le ministère de la Culture.
Le Grand Prix 2019
Après Katsuhiro Otomo en 2015, Rumiko Takahashi est le deuxième mangaka à remporter le Grand Prix au terme d’un vote qui a réuni 1672 auteurs de bande dessinée. Rumiko Takahashi se déplaçant très peu, il n’y aura pas d’expo consacrée à son oeuvre, simplement un grand entretien exclusif entre Stéphane Beaujean et le mangaka qui sera projeté le jeudi à 18h00 au Manga City, rediffusé le samedi à 18h30. Il y aura également une table ronde hommage à son travail.
Le grand Prix 2020
Trois auteurs sont cette année en compétition pour le Grand Prix : l’Américain Chris Ware, les Français Emmanuel Guibert et Catherine Meurisse à laquelle le festival consacre une grande exposition célébrant « un parcours unique, où art et humour ont amené à l’expression d’une intimité sans masque ».
Les Fauve
Quarante-trois albums ont été retenus dans la sélection officielle et seront donc en compétition pour les différents Fauve, à savoir les Prix du meilleur album, Prix spécial du jury, Prix révélation, Prix de la série, Prix de l’audace et Prix du public France Télévisions.
Parmi ces albums : Acte de Dieu de Giacomo Nanni, Algues vertes d’Inès Léraud et Pierre Van Hove, Berlin, Ville de lumière de Jason Lutes, Blueberry tome 1 de Blain et Star, Clyde Fans de Seth, Dédales de Charles Burns, Le Dernier Atlas de Blanchard, Tanquerelle, Vehlmann et de Bonneval, Il était 2 fois Arthur de Nine Antico et Grégoire Carlé, Les Indes Fourbes de Alain Ayroles ou Juanjo Guarnido, Le Loup de Rochette ou encore Le Roi des Bourdons de David de Thuin.
À cela s’ajoutent… Le Fauve Polar SNCF, six albums sélectionnés dont l’excellent Grass Kings de Matt Kindt et Tyler Jenkins. Le Fauve Prix du patrimoine, 7 albums en compétition, parmi lesquels Les Fleurs rouges de Yoshiharu Tsuge et Stray Bullets de David Lapham. Le Fauve Prix jeunesse et Le Fauve Prix Jeunes adultes, 8 albums sélectionnés dans chaque catégorie.
Le Palmarès officiel du festival International de la Bande dessinée sera dévoilé le samedi 1er février 2020 à 19 h à l’occasion de la cérémonie officielle des Fauve au Théâtre d’Angoulême.
Le Fauve Prix du Public France Télévisions
C’est un Prix qui nous tient bien évidemment à cœur. Un jury de 9 téléspectateurs doit choisir le lauréat parmi 8 titres sélectionnés par des journalistes et spécialistes de la littérature de France Télévisions.
Ces titres sont : Dans l’Abîme du temps, de Gou Tanabe (Editions Ki-oon), In Waves, de AJ Dungo (Casterman), Le Loup, de Jean-Marc Rochette (Casterman), Les Entrailles de New-York, de Julia Wertz (L’Agrume), Les Indes fourbes, de Alain Ayroles et Juanjo Guarnido (Delcourt), Préférence système, de Ugo Bienvenu (Denoël Graphic), Révolution, Tome 1 Liberté, de Florent Grouazel et Younn Locard (Actes Sud/L’An 2), Saison des roses, de Chloé Wary (Flblb)
Les expositions
Une quinzaine d’expositions est au menu de cette 47e édition. La première est consacrée à Catherine Meurisse, lauréate du prix de la BD scolaire au Festival d’Angoulême en 1997, fan de Gotlib, illustratrice pour Charlie Hebdo et autrice de plusieurs albums dont le dernier en date, Les Grands espaces (Dargaud), est une chronique de l’enfance tendre, poétique, érudite et pleine d’humour emmenée par un trait au crayon sensuel (Musée du papier du 30 janvier au 1er mars).
Attention, les morts-vivants débarquent à Angoulême sous la plume de Robert Kirkman, scénariste et créateur de la célèbre série Walking Dead. Une exposition de 450 m2 présentera ses œuvres les plus célèbres dans une scénographie immersive et ludique qui questionnera les thèmes favoris de l’auteur (L’Alpha, médiathèque du grand Angoulême du 30 janvier au 2 février).
Deux expositions seront consacrées au manga, l’une à travers la série culte de Yukito Kishiro, Gunnm (espace Franquin du 30 janvier au 2 février), l’autre à travers l’oeuvre d’une figure majeure de la bande dessinée, Yoshiharu Tsuge (Musée d’Angoulême du 30 janvier au 15 mars).
Au menu également, des expositions consacrées à Nicole Claveloux, Wallace Wood, pionnier de la bande dessinée de genre américaine, lauréat du Prix du dessinateur étranger à Angoulême en 1977, mort en 1981, Pierre Christin, Jean Frisano, Cécile Bidault…
Rencontres et masterclass
6600 professionnels présents, 2000 auteurs et autrices invités, c’est le moment ou jamais d’en profiter pour les interroger et les écouter parler de leur métier, de leur passion, de leur art. Des rencontres internationales seront organisées pendant toute la durée du festival avec notamment Catherine Meurisse, Charles Burns, Robert Kirkman, Ukito Kishiro, Sfar, Enki Bilal ou encore Joe Sacco. Des rencontres mais aussi des masterclass en compagnie de Pierre Christin, Mézières, Bilal, Kirkman…
Spectacle
Si vous avez lu et aimé Les Carnets de cerise, vous pourrez retrouver l’univers de la série imaginée en 2012 par Joris Chamblain et Aurélie Neyret pour les éditions Soleil sur la scène du théâtre d’Angoulême jeudi 30 janvier. L’histoire, recomposée à partir des cinq albums, mêle théâtre, musique, vidéo et bande dessinée dans un opéra BD joué par deux musiciens.
Spin Off, un festival dans le festival
Le Spin Off est le pendant underground du festival d’Angoulême. Il réunit la micro-édition et l’auto-édition, un véritable laboratoire de recherche tous azimuts… Ici, les auteurs « expérimentent en toute liberté et cherchent à décloisonner la bande dessinée, à en repousser les frontières en la confrontant aux techniques et aux nouvelles technologies ainsi qu’aux autres arts – musique, dessin, art contemporain, design, mode –, tout en apportant un soin particulier à la fabrication et à l’impression des œuvres » (Mission locale du Grand Angoumois).
Et tout le reste…
Le festival, c’est aussi, bien évidemment, l’occasion de rencontrer ses auteurs préférés en dédicaces, de découvrir la richesse du neuvième art à travers toute une série d’animations et d’arpenter une ville qui depuis 47 ans accueille l’un des rendez-vous phares du neuvième art…
Plus de 500 millions d’euros de chiffre d’affaires, 44 millions d’albums vendus… Visiblement, le marché de la BD se porte à merveille. Le marché oui, les auteurs, moins. À quelques heures du grand rendez-vous de la BD à Angoulême, Gwen de Bonneval remet l’humain au centre…
Ce combat-là n’est pas nouveau, il remonte même à plusieurs années et concerne les auteurs, tous secteurs de l’édition confondus. Mais à quelques heures du grand raout angoumoisin et alors que le ministère de la Culture a décrété 2020 année de la bande dessinée, la colère des auteurs de bande dessinée est montée d’un cran.
On le sait, le western qui n’a jamais totalement disparu du rayon neuvième art, effectue un retour en force depuis quelques temps. La reprise de Lieutenant Blueberry par Sfar et Blain en est peut-être la preuve la plus éclatante mais pas la seule. Plusieurs projets fleurissent à gauche et à droite comme ici avec le Français Thierry Gloris et le Québécois Jacques Lamontagne qui inaugurent une nouvelle série aux Éditions Dupuis. En selle pour l’Ouest avec Wild West et la jeunesse d’une légende…
Regardez cette frimousse en couverture, elle n’est pas magnifique notre Martha? Pas vraiment un visage d’ange, plutôt un visage endurci par la dure loi de l’Ouest, un visage qui laisse entrevoir en tout cas un sacré caractère. Et il en fallait du caractère pour vivre et survivre dans l’Ouest américain du XIXe siècle.
Martha Jane Cannary, plus connue sous le nom de Calamity Jane, fût de son vivant une véritable légende. Et le temps n’a rien effacé, bien aux contraire, ajoutant quelques lignes de mystère et de romantisme à sa biographie.
C’est à la vie de cette célébrité que se sont intéressés Jacques Lamontagne et Thierry Gloris, ou plus exactement à la première partie de sa vie, avant qu’elle ne devienne justement célèbre. Martha n’est alors qu’une gamine orpheline qui découvre la vie par le petit trou de la serrure d’un bordel. Pas comme prostituée, du moins dans un premier temps, non plutôt comme femme à tout faire. Elle nettoie les chambres entre les passes et guide les clients.
Violée, violentée, abusée, Martha se forgera un caractère qui donnera naissance à la Calamity Jane que l’on connaît encore aujourd’hui. Un western qui nous embarque pour une chevauchée fantastique au cœur de l’Ouest américain, grâce au magnifique dessin réaliste de Jacques Lamontagne et au scénario bien ficelé de Thierry Gloris. À suivre…
Eric Guillaud
Martha Jane, Wild West tome 1, de Gloris Lamontagne. Dupuis. 14,50€
Le débat a récemment refait surface à l’occasion de la sortie du dernier album d’Astérix : une œuvre doit-elle survivre à son auteur ? Philippe Druillet a décidé d’y répondre à sa façon en confiant les rênes de son personnage de ‘rebelle cosmique’ Lone Sloane à deux jeunes auteurs tout en gardant un œil protecteur sur sa création. Le premier fruit de ce passage de témoin, Babel, vient de sortir.
En 1966 à son apparition, sous la France d’avant-Mai 68, aucun personnage de BD ou presque ne ressemblait à cet étrange mercenaire aux yeux rouges, ce « rebelle cosmique » tel qu’il avait été désigné, apparaît comme l’héritier azimuté des délires les plus cosmiques de Jack Kirby mais avec, déjà, la ‘patte’ du alors pourtant jeune Philippe Druillet.
Plus de quarante-six ans plus tard, après neuf aventures, dont une délirante et mythique relecture très libre de Salammbö de Gustave Flaubert, il s’était, a priori, envolé pour une dernière fois sous la houlette de son créateur en 2012 pour Delirius 2. Sauf que bien que plus ou moins retiré des voitures, du moins en ce qui concerne la BD, Druillet a décidé de laisser deux petits jeunes ressusciter en quelque sorte son personnage tout en gardant une sorte de rôle de conseiller spécial. Un geste malin car avoir ainsi confié les reines à deux quasi-inconnus du grand public leur permet de se fondre plus facilement dans la mythologie. Mais un geste aussi casse-gueule, tant son style complètement baroque et démesuré aux myriades de détails et s’étalant en cinémascope est iconique et donc très lourd à porter. Une configuration donc un peu bâtarde (qui est le vrai patron dans l’histoire ?) qui a fini par aboutir à une œuvre intrigante car plus intermédiaire que définitive.
Alors autant le dire tout de suite, même si Babel n’a pas été dessiné ni scénarisé par Philippe Druillet, il est marqué au fer rouge du sceau du maître dont le nom apparaît d’ailleurs tout en haut de l’affiche. On retrouve dans ce qui semble être une nouvelle fois presque une geste, dans le sens presque moyenâgeux du terme, chevaleresque le même souffle grandiose. Un bouillonnement de couleurs et de formes qui, régulièrement, laisse une seule image s’étaler sur une pleine page, voire deux. Un univers toujours très SF où l’organique se mélangeant à la Giger aisément à la chair et où tout est démesuré, jusqu’en dans la composition des pages.
Sauf que si l’on retrouve un certain nombre des héros récurrents de la saga – notamment l’ennemi absolu de Sloane, Shaan – des petits encarts discrets ont été insérés ci et là pour donner quelques clefs aux nouveaux venus. On apprécie d’ailleurs cette volonté affichée de parler à la fois aux vieux fans et aux nouveaux. Ainsi que ces discret apports personnels sur le plan graphique, comme ce lifting réussi de Dame Légende, la compagne du héros. Ou ce choix de couleurs plus sombres et moins ‘psychédéliques’ si l’on peut dire, qui ancre bien le tout dans son époque.
Mais là où Babel reste le plus ‘Druillet’, c’est dans son approche quasi-littéraire des textes, quelque chose de très verbeux et référencés, en phase avec le délire graphique sans borne qu’il sert mais forcément, à sa façon, complètement excessif. Le résultat est donc une espèce de gigantesque space cake aux effets hallucinogènes, un machin XXL qui vous embarque au fin fonds de la galaxie dans un tourbillon de lumière ou qui, au contraire, laissera à quai les plus réfractaires à ce genre de déluge cosmique. Un peu comme toute la saga en somme…
Olivier Badin
Babel de Xavier Cazaux-Zago, Dimitri Avramoglou et Philippe Druillet, Glénat, 19€
Joe Sacco ! Ce prénom et ce nom suffisent à dire le sérieux de l’affaire. Joe Sacco est un journaliste et un auteur de bande dessinée américain largement réputé et apprécié des amateurs de BD-reportages, genre qu’il a impulsé pour ne pas dire initié dès 1993 en publiant aux États-Unis l’album Palestine. Il est de retour en 2020 avec Payer la terre, un récit qui nous emmène à la rencontre des Indiens dénés, l’une des Premières Nations du Canada…
Les Premières Nations, quèsaco ? Un petit tour rapide sur internet, merci Wiki, suffit à nous renseigner, les Premières Nations sont les peuples autochtones canadiens qui ne sont ni des Inuits, ni des Métis. Ils seraient plus d’un million répartis dans une cinquantaine de groupes linguistiques et plus de 600 communautés. La grande majorité vivant aujourd’hui dans des zones urbaines et non plus dans des réserves.
C’est lune des ces Premières Nations que Joe Sacco est allé rencontrer. Les Dénés vivent au Nord-Ouest du Canada, dans une région grande comme la France et l’Espagne réunies mais peuplée de seulement 45000 personnes. Un désert humain aussi beau que sauvage, forêts et neige à volonté.
Autrefois, les Dénés vivaient avec la nature, suivant son rythme, se levant tôt, « en général à l’aube, pour saluer le soleil », se couchant de bonne heure pour « laisser les autres esprits faire leurs affaires pendant la nuit ».
Une vie, une culture intimement liée à la terre, jusqu’au jour où l’industrie pétrolière débarque, s’approprie les richesses de cette terre et enclenche un changement profond des mentalités. Argent, alcoolisme, drogue, prostitution, les Dénés sont dès lors confrontés aux mêmes problèmes sociétaux que dans les grandes villes canadiennes…
Avec les problèmes environnementaux en sus ! Car, les industriels du pétrole abandonnent les forages classiques pour la fracturation hydraulique, impliquant l’injection de produits chimiques toxiques dans la terre.
C’est l’histoire de ce peuple qui est ici racontée, les traditions ancestrales, l’humilité devant la nature, l’arrivée des premiers colons, l’abandon de ses droits sur le sol contre quelques promesses, le vaste plan d’assimilation lancée à marche forcée et qui se poursuit jusque dans les années 80, l’acculturation…
Combien sont-ils aujourd’hui à maîtriser encore leur langue d’origine, à connaître et défendre leur culture ?
Journaliste de formation, auteur de plusieurs bandes dessinées reportages telles que Palestine, Goradze, Gaza 1956 ou encore Jours de destructions jours de révolte…, Joe Sacco a traîné ses guêtres et ses crayons sur pas mal de fronts, de terrains minés, dans tous les sens du terme, avec toujours le même volonté de rechercher la vérité et de témoigner.
« Je réalise un travail de journaliste en essayant de penser comme un historien », expliquait l’auteur il y a quelques années au site du9, ce qui se concrétise par une immense curiosité et une extrême rigueur dans sa façon d’aborder les choses, d’aller au contact, de croiser les infos, de recueillir les témoignages, une rigueur qui se prolonge dans son dessin réaliste ultra-léché, méticuleux.
Publié initialement en deux fois trente pages dans la revue XXI, Payer la terre paraît aujourd’hui en album en France avant même de paraître aux États-Unis. C’est tellement rare que ça mérite d’être signalé. L’auteur sera d’ailleurs en terre charentaise à la fin du mois de janvier à l’occasion du Festival International de la Bande Dessinée à Angoulême. Juste le temps de lire Payer la terre à tête reposée, il le mérite amplement !
Eric Guillaud
Payer la terre, de Joe Sacco. Futuropolis et XXI. 26€
En octobre dernier, cinq éditeurs s’associaient pour créer un lieu dédié à l’édition BD indépendante régionale sur Nantes. Son nom : Les Boucaniers. Le chantier avance mais il manque encore quelques pépites d’or dans le coffre-fort pour finaliser le projet.
Le festival approche à grandes enjambées, la preuve avec la révélation des albums sélectionnés pour le Prix Public France Télévisions hier et la réveiller révélation ce matin des trois auteurs en compétition pour la Grand Prix…
Et ces trois auteurs, ou plus exactement ces deux auteurs et cette autrice, sont : l’Américain Chris Ware, la Française Catherine Meurisse et le Français Emmanuel Guibert.
L’organisation du festival rappelle dans son communiqué que « le Grand Prix est attribué à la suite d’un vote de la communauté des auteurs et autrices professionnels de bande dessinée ».
« Tous les auteurs et autrices de bande dessinée professionnels, quelles que soient leurs nationalités et dont les œuvres sont traduites en français et diffusées dans l’espace francophone, sont admis à voter pour l’élection du nouveau Grand Prix du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême. Le vote s’effectue en deux tours et sous forme électronique. Le lauréat est un auteur ou une autrice vivant au moment du vote, récompensé(e) pour l’ensemble de son œuvre et son empreinte sur l’histoire de la bande dessinée ».
« L’ensemble de la communauté des autrices et auteurs est éligible, à l’exception de ceux déjà récompensés par un Grand Prix, qu’il soit exceptionnel (prix du 10e, 20e, 40e anniversaire ou du millénaire – sauf le prix du trentenaire dit prix des fondateurs) ou non ».
Il avait disparu des écrans radar depuis six ans, de quoi nous laisser craindre le pire pour sa personne mais le revoici en grande forme, plus sombre et cynique que jamais, le Tueur reprend du service dans une nouvelle série baptisée Le Tueur Affaires d’état…
Terminées les missions à l’étranger. Au rayon souvenirs l’Argentine, Cuba, le Chili, le Mexique ou encore le Venezuela. Le Tueur est de retour à la maison et s’est même dégoté un job des plus honnêtes dans une entreprise installée sur le port de ce qui ressemblerait bien à la bonne ville du Havre en Normandie.
Un job honnête, oui, mais à temps partiel. Une couverture en fait qui lui laisse tout le temps nécessaire pour vaquer à d’autres occupations beaucoup moins… comment dire… honorables. Car le Tueur n’a pas raccroché les flingues. Bien aux contraire. Lui le solitaire, à son compte, est dorénavant aux ordres de la DGSE. Il n’a pas eu vraiment le choix. C’était ça ou on retrouvait son squelette au fin fond de la Patagonie.
« Je ne sais pas comment ils avaient fait pour me retrouver, mais j’avais reçu le message cinq sur cinq, d’une ils me retrouveraient n’importe où, et deux, j’avais la chance qu’ils avaient besoin de moi… »
Oui, la DGSE avait besoin de lui. Pour des dossiers épineux, des règlements à l’amiable, enfin… à l’amiable comme peut l’exiger la raison d’état.
Et ça tombe bien parce que notre tueur n’a aucune problème de conscience, il n’en a jamais eu. Alors la DGSE ou un autre, peu importe, il reçoit des ordres, il exécute…
Pour le premier épisode de cette nouvelle saison, le plaisir est bien au rendez-vous. Le scénario est carré, limpide, rythmé, et la mise en images moins clinique que dans les derniers albums parus, Luc Jacamon ayant troqué sa tablette graphique qu’il utilise depuis le deuxième tome contre des pinceaux et de l’encre. Quant au personnage, rien de changé véritablement, son cynisme hache menu notre société, ses petits travers et ses grandes lâchetés. Un beau retour !
Eric Guillaud
Le Tueur Affaires d’état tome 1, de Jacomon et Matz. Casterman. 18€ (en librairie le 15 janvier)
Le jury de pré-sélection constitué de journalistes et de spécialistes de la littérature du groupe France Télévisions vient de dévoiler les huit titres qui seront en lice pour le Fauve d’Angoulême – Prix du public France Télévisions…
Huit titres viennent d’être choisis par des journalistes et spécialistes de la littérature de France Télévisions à partir de la sélection officielle du festival. Ces titres sont :
Révolution, Tome 1 Liberté, de Florent Grouazel et Younn Locard (Actes Sud/L’An 2)
Saison des roses, de Chloé Wary (Flblb)
Place maintenant à un autre jury, constitué cette fois de 9 téléspectateurs, qui aura pour mission de voter et élire le lauréat de ce nouveau Prix du Public France Télévisions. Celui-ci sera décerné lors de la cérémonie de remise des prix du Festival samedi 1er février à partir de 19h au Théâtre d’Angoulême, Scène Nationale.
Les 9 membres du jury public : Pierre Cordier (Angoulême), Cécilia Correia (Agen), Yoann Debiais (Jaunay-Marigny), Adrien Kieronczyk (Cenon), Jean-François Mariet (Magnac sur Touvre), Maud Michel-Amadry (Arc-et-Senans), Pierre Piganiol (Saint Martin de Ré), Mathilde Saphore (Saujon) et Nathalie Sougnoux (Barsac)
Le jury de pré-sélection France Télévisions : Michel Field, président du jury de sélection, Delphine Chaume, Un livre un jour – France Télévisions, Jérôme Deboeuf, France 3 Poitou-Charentes, Elodie Drouard, FranceInfo, Francis Forget, FranceInfo culture, Eric Guillaud, France 3 Pays de la Loire