24 Août

Page noire, de Frank Giroud, Denis Lapière et Ralph Meyer. Editions Futuropolis. 17 euros.

Carson McNeal ! Dans le petit monde de la littérature new-yorkaise, on ne jure plus que par lui. Des livres qui se vendent comme des petits pains et une plume comme on n’en a plus vu depuis Steinbeck. C’est peu dire ! Bref un écrivain de génie comme le suggère Kerry Stevens, critique littéraire au grand magazine Tales & Writers. Un écrivain de génie mais totalement inconnu. McNeal n’est jamais paru en public, ne s’est jamais déplacé pour recevoir ses nombreux prix et n’a jamais été interviewé par qui que ce soit. De quoi alimenter tous les fantasmes et éveiller la curiosité naturelle de Kerry. Celle-ci va donc monter un stratagème pour récupérer l’adresse de Carson McNeal et provoquer leur rencontre. En plein travail d’écriture pour son prochain roman, McNeal accepte de lui ouvrir sa porte… et son coeur. En apparence du moins car McNeal va utiliser cette rencontre pour son héroïne du moment, Afia, une jeune Palestinienne qui a vu toute sa famille se faire massacrer par les Phalangistes au Liban…

Trois grands noms de la bande dessinée et à l’arrivée un album tout à fait remarquable, tant par son écriture que par sa mise en images. Et son histoire ? Franchement singulière et captivante avec ces deux récits racontés en alternance et ces trois personnages principaux très attachants et à forte épaisseur humaine, l’ambitieuse Kerry, le très secret Carson et la paumée Afia . « Page noire raconte l’histoire de deux femmes et d’un homme », explique Denis Lapière. « Le récit met en scène deux enquêtes qui, à un moment donné, vont se télescoper. Avec Frank, nous avons écrit chacun notre partition, lui les scènes avec Kerry, moi celles concernant Afia, soit les deux tiers du livre. Puis, ensemble, nous avons écrit le dernier tiers ». Un travail à deux mains très important selon Frank Giroud pour qui « l’écriture est au centre du récit à travers une réflexion sur la relation entre fiction et réalité. C’est un thème qui m’est cher et autour duquel je tourne depuis plusieurs années, notamment dans Le Décalogue ». Ajoutez à cela le traitement graphique de Ralph Mayer, imposant deux styles différents pour chaque récit, styles fusionnant lorsque les deux femmes, la critique littéraire et l’héroïne du roman, se rencontrent, et vous obtiendrez l’une des très belles surprises de la rentrée. Absolument incontournable ! E.G.

23 Août

Libérale attitude, de Pluttark. Editions Fluide Glacial. 10,40 euros.

Privatiser les forces de l’ordre pour créer un nouveau secteur concurrentiel, maintenir le pouvoir d’achat en élargissant le crédit à tous les aspects de la consommation, y compris au paquet de nouilles, reculer l’âge de la retraite à 98 ans, autoriser la vente d’organes pour que ceux qui n’ont plus rien aient quand même quelque chose à monnayer, organiser les Oscars des Ressources humaines pour récompenser les meilleurs plans sociaux… Aucun doute, Pluttark a quelques idées pour sortir notre beau pays de la crise, remettre tout le monde au travail, enfin surtout les plus pauvres, et relancer la consommation de luxe… Un beau pays où l’ultralibéralisme serait roi et décomplexé…

Vous rêviez d’un monde meilleur ? Pluttark l’a imaginé ! Comme son aîné et homonyme, le célèbre Plutarque, l’auteur de Libérale attitude pourrait bien marquer son époque et influencer lourdement notre devenir collectif si notre Président à tous tombe par hasard sur ce livre et décide de s’en inspirer ! Un grand merci donc à Pluttark qui avait signé précédemment Bipèdes, un documentaire fascinant sur le plus célèbre des mammifères, album déjà remarqué à l’époque pour le ton cynique employé avec force et – il faut bien l’avouer – avec un certain talent. Bien sûr, chaque histoire, en strip ou en illustration pleine page, est faite pour rire… et on rit même si c’est souvent bête et méchant ! A lire cet été avant de retourner au boulot et retrouver nos chefs préférés… E.G.

09 Août

Sous le ciel d’Atacama, de Christin et Balez. Editions Casterman. 15 euros.

Tout le monde connaît Christin. Pierre Christin ! Fameux scénariste qui a notamment collaboré avec Bilal, Mézières ou encore Annie Goetzinger. Mais cette fois, l’homme ne nous propose pas un récit de science fiction ou d’espionnage mais un reportage, un reportage en bande dessinée bien sûr, intitulé Sous le ciel d’Atacama et portant sur un projet un peu fou, baptisé Alma (Atacama Large Millimeter Array). Il s’agit en fait d’un chantier gigantesque situé à 5000 mètres d’altitude et estimé à un milliard d’euros financé par l’Europe, l’Amérique du Nord, le Chili, l’Australie, le Japon… A terme, un spectaculaire réseau d’antennes géantes, braquées vers le ciel, devrait permettre d’écouter les étoiles. Et les étoiles, Christian Mézières en connait un rayon, lui qui a promené son mythique personnage Valerian à travers toute la galaxie.  Récit de bande dessinée, prépublié dans le magazine XXI, Sous le ciel d’Atacama propose aussi un carnet illustré du voyage des auteurs ainsi que des photos, des croquis et des textes. E.G.