27 Fév

Vous rêvez d’un avenir meilleur ? De lendemains qui chantent ? Une sélection de BD SF pour se faire une idée de ce qui nous attend ou pas…

Impossible de commencer cette chronique sans avoir une pensée émue pour la famille et les amis de Thierry Cailleteau décédé la semaine passée. Ce scénariste normand a rencontré Olivier Vatine sur les bancs du lycée à Rouen. Avec lui, il imagine Les Aventures de Fred et Bob dont le premier volet Galères balnéaires marque la naissance d’une nouvelle maison d’édition, Delcourt. Suivent Les Aventures cosmiques de Stan Pulsar et surtout la saga SF à tonalité écologique et humaniste Aquablue (Alph-Art jeunesse au festival d’Angoulême 1989) qui compte aujourd’hui 17 albums. Il s’essaie avec le même succès au western signant Wayne Redlake, au polar avec Wayne Shelton, à l’heroïc fantasy avec Fuzz et Fizzby en gardant toujours un oeil et une plume sur la SF avec Cryozone ou encore Habana 2150. Il travaillait à l’écriture du tome 18 d’Aquablue en compagnie du dessinateur Stéphane Louis. Avec son talent et son caractère hors normes, Thierry a imprimé sa marque sur le neuvième art à travers des récits influencés par le manga, le comics, la bande dessinée européenne et même le cinéma à grand spectacle hollywoodien, un sacré mélange des genres qui a depuis fait école…

De quoi sera fait demain ? Demain ? C’est justement le titre de cette série de Léo, Rodolphe et Louis Alloing. Après Centaurus et Europa, les auteurs poursuivent leur exploration du futur. Pas de voyage dans l’espace pour le moment mais un va et vient entre deux périodes, les années 50 d’un côté et un futur proche post-apocalyptique ravagé par les guerres et les épidémies de l’autre, avec à chaque période son adolescent, Jo dans le passé et Fleur dans le futur. Rien ne les réunit pour le moment, rien sauf leurs rêves respectifs. À suivre…  (Demain Acte 2, de Leo, Rodolphe et Alloing. Delcourt. 13,50€)

« Kosmograd veille sur vous ! Ensemble, bâtissons notre futur ». La propagande est bien rodée mais cette fois le message ne passe plus. À quelques heures d’une nouvelle tempête, encore plus dévastatrice, la population ce cette ville refuge au milieu d’un monde dévasté par les catastrophes climatiques a bien l’intention de manifester sa colère et tant pis si la Korpo, le gouvernement, lui promet une répression sévère. Au centre du conflit, l’ascenseur orbital qui doit permettre à chacun de quitter cette Terre en fin de vie mais qui serait au final réservé à l’élite. Zoya, Paouk et Ev, trois jeunes nanas de Kosmograd sont dans la rue bien décidées à se faire entendre et à révéler une vérité pas jolie jolie… Gros coup de cœur pour cette bande dessinée qui plaira bien au-delà des seuls passionnés de SF. Le récit est vif, dynamique, les trois héroïnes attachantes, le trait semi-réaliste séduisant, les couleurs bien senties et bien évidemment l’histoire en elle-même assez classique mais plaisante avec en fond une réflexion sur l’amitié, la trahison, la manipulation… (Kosmograd, de Bonaventure. Casterman. 18€)

Halen Brennan n’est ni racisée, ni trans, ni vegan, autant dire qu’elle n’a pas vraiment sa place dans la société matriarcale écolo-techno-bobo qui régit désormais la vie sur notre planète Terre. Mais elle est une femme, alors on la tolère. C’est une femme et surtout c’est une mercenaire avec un sacré tempérament et une sacrée réputation. La présidente de la compagnie de tourisme interstellaire Stella vient justement de la recruter pour une mission délicate : récupérer des documents ultra-confidentiels volés par un certain Jean-Claude Belmondeau, amateur de viande bien rouge et de moteur à explosion, bref tout ce qui n’existe plus ou presque dans ce nouveau monde. De là à penser que ça risque d’être sacrément rock’n’roll voire acrobatique pour Halen, il n’y a qu’un pas… Une très bonne comédie SF qui déménage sec dans un univers qui pourrait – presque – nous faire regretter le XXe siècle, un monde en tout cas où les écologistes et les féministes ne sont pas forcément ceux qui le revendiquent le plus fort ! (No Future, de Corbeyran et Jef. Delcourt. 20,95€)

La Terre est à bout de souffle ! Le niveau de l’eau monte, changeant à jamais la face de la planète. Partout des vagues de chaleur, de froid, de pluie s’enchaînent, l’immigration explose, les manifestations violentes se multiplient, le manque de nourriture et d’eau potable se fait sentir… Dans ce chaos indescriptible, les grandes entreprises cherchent à sauver leurs ressources, les riches, à protéger leur fortune, et quelques groupes révolutionnaires, à contrarier le scénario qui est en train de s’écrire sur le dos des plus pauvres. C’est l’un de ces groupes que rejoint la jeune Atari qui, depuis la mort de sa mère tuée par la police sous ses yeux d’enfant, rêve de se venger. Avec Tika, une autre orpheline, Atari se fait Robin des Bois et promet de sauver l’espèce humaine et la planète Terre. Une saga post-apocalyptique dynamique, colorée et à tonalité sociale signée par l’auteur espagnol Efa. (Nocéan, d’Efa. Dupuis. 14,95€)

La remarquable couverture annonce la couleur : La Compagnie rouge est un space opera à grand spectacle. Ici, le moindre déplacement se compte en années-lumière et les guerres sont devenues un sport intergalactique qui oppose prioritairement des robots et autres drones appartenant à de grandes unités de mercenaires. La Compagnie rouge est l’une d’entre-elles. Avec son grand vaisseau rouge, elle voyage à travers la galaxie pour conquérir des planètes comme Antiopos V, un grenier à blé sur laquelle vit le jeune agriculteur Flint Robinson Robin. Il n’a que 16 ans lorsque la guerre s’abat sur sa planète, l’occasion pour lui d’intégrer la Compagnie rouge et d’en devenir l’archiviste, garant de sa mémoire. Aucun doute que ce récit complet au dessin hyper-réaliste ultra-léché, proche de la photo en ce qui concerne les visages des protagonistes, et à l’histoire captivante ravira les amateurs du genre… (La Compagnie rouge, de Simon Trens et Jean-Michel Ponzio. Delcourt. 15,50€)

Prêt(e)s pour une énorme claque graphique ? Après Blame 0 (Noise), la série Abara a elle-aussi les faveurs de la maison d’édition Glénat qui nous offre aujourd’hui cette œuvre essentielle dans une édition deluxe intégrale grand format propice à la contemplation du graphisme de Tsutomu Nihei. Fan du créateur des décors et monstres d’Alien HR Giger, le mangaka s’est fait connaître au Japon et en Europe avec des récits SF sombres, désespérés, violents, oppressants, organiques, reconnaissables entre tous. Abara met en images des combats de créatures monstrueuses, les gauna blancs d’un côté, les gauna noirs de l’autre, avec une sauvagerie spectaculaire, le tout dans un monde urbain en décadence. Une référence ! (Abara deluxe, de Tsutimu Nihei. Glénat. 14,95€ – Blame 0 (Noise), de Tsutimu Nihei. Glénat. 14,95€)

Vertiges est le deuxième volet d’une série réalisée par les auteurs de Centaurus, un nouveau cycle plus exactement baptisé Europa du nom de la lune glacée de Jupiter. Là-bas, une mission scientifique est venue se poser pour étudier son sol et surtout son sous-sol qui abriterait un océan interne (véridique!) dans lequel la science place de grands espoirs. Mais cette mission ne répond plus. Un silence radio inquiétant, d’autant qu’une première mission avait été victime d’un terrible accident. Une nouvelle expédition est organisée en urgence avec pour pilote de navette la jeune et réputée peu sociable Suzanne Saint-Loup et pour commandant Paul Douglas, alcoolique assumé. Elle aura pour mission d’élucider le mystère qui entoure la ces deux premières missions échouées. Une chose est sûre, sur Terre ou sur Europa, quelqu’un tente de cacher quelque chose…Un bon scénario, un dessin réaliste efficace, des personnages aux caractères trempés, un suspens intenable et un deuxième volet qui illustre le conflit entre religion et science. Que du bon ! (Vertiges, Europa tome 2, de Léo, Rodolphe et Janjetov. Delcourt. 12€)

Disponible le 8 mars prochain dans les meilleures libraires de France et d’ailleurs, le 19e et avant-dernier volet des aventures de Carmen Mc Callum nous embarque pour le Japon, Tokyo pour être précis, où notre mercenaire a décidé de se ranger des affaires et de vivre dans l’anonymat le plus total. Mais c’était sans compter sur l’évolution du monde et notamment du pays du Soleil Levant qui se retrouve coincé entre deux entités autoritaires, l’état militarisé et les Yakuzas devenus maîtres des centrales nucléaires et donc de la distribution de l’électricité. Face à ce nouveau monde qui se dessine pour le meilleur et surtout le pire, une opposition humaniste germe à l’ombre des cerisiers en fleur…  Comme toujours, le scénariste Fred Duval, accompagné ici et pour la quatrième fois au dessin de Stéphane Louis, nous offre une histoire d’anticipation avec une énorme dose d’action et mine de rien de réflexion, ici sur l’énergie et le pouvoir qu’elle pourrait représenter entre de mauvaises mains… (Made in Japan, Carmen Mc Callum tome 19, de Duval, Louis et Scarlett. Delcourt. 14,95€)

On termine avec Les Futurs de Liu Cixin, une collection des éditions Delcourt lancée en mars 2022 et qui réunira à terme 15 nouvelles adaptées en bande dessinée de celui qu’on présente comme le plus grand écrivain contemporain de science-fiction, auteur notamment de la trilogie des Trois corps, prix Hugo 2015 et actuellement adaptée en série télévisée. Dix de ces nouvelles sont d’ores et déjà disponibles, une publication à marche forcée et d’envergure internationale puisque des auteurs français et étrangers se partagent la tâche, notamment Bec, Stefano Raffaele, Thierry Robin, Wu Quinsong, Marko Stokjanovic, Sylvain Runberg, Ma Yi. Au programme de L’Ère des Anges, titre à paraître le 1er mars, l’histoire d’un scientifique africain qui trouve dans la génétique le moyen de sortir son pays de la misère et de la dépendance. Mais bien évidemment, qui dit génétique dit questions éthiques… (Les Futurs de Liu Cixin, 10 tomes parus. Delcourt. Prix variables)

Eric Guillaud

19 Fév

Friday : une enquête aux frontières du réel signée Ed Brubaker, Marcos Martín et Muntsa Vicente

Si le duo que forment Ed Brubaker et Sean Phillips a fortement impressionné le monde du comics avec plusieurs titres marquants, en voici un autre qu’il est tout aussi urgent de découvrir. Au scénario, toujours Ed Brubaker, au dessin, Marcos Martin, à l’arrivée, un polar à l’atmosphère aussi étrange que raffinée…

Friday Fitzhugh est de retour à Kings Hill, le village où elle a passé une bonne partie de son enfance avant de le quitter pour l’université. Elle doit y retrouver sa mère pour les fêtes de Noël mais aussi et surtout son meilleur ami d’enfance, Lancelot Jones. Son meilleur ami et peut-être un peu plus que ça ! Dans le train, Friday a passé son temps à imaginer ce qu’elle allait lui dire. Marre de ces échanges téléphoniques pour parler de tout, de rien. Il allait bien falloir attraper le taureau par les cornes et se dire des choses.

Et c’est justement sur lui qu’elle tombe en arrivant à Kings Hill, encore fourré avec le shérif qu’il aide régulièrement à résoudre les affaires occultes du coin. Et de se retrouver embarquée avec eux aux trousses d’un voleur.

L’affaire sera vite réglée, pour le reste, pour dénouer le nœud émotionnel qui bloque leur relation, il faudra encore attendre un peu…

Inspiré par la fiction pour jeunes adultes des années 60/70, Ed Brubaker développe ici un récit policier aux belles atmosphères et au mystère bien épais dans un décor qui pourrait être celui de la Nouvelle-Angleterre. Un polar mâtiné d’une bonne dose de fantastique déjà couronné de l’autre côté de l’Atlantique par le Prix Eisner 2021 de la meilleure série numérique.

Eric Guillaud

Friday, de Ed Brubaker, Marcos Martín et Muntsa Vicente. Glénat. 19€

© Glénat / Brubaker, Martin & Vicente

16 Fév

Les Cahiers ukrainiens, le récit poignant d’une invasion signé Igort

Il y a un an, les forces militaires russes envahissaient l’Ukraine avec l’espoir de s’emparer de Kiev et de faire tomber le gouvernement de Volodymyr Zelensky très rapidement. Le scénario de guerre éclair écrit par le Kremlin s’est révélé illusoire. Pire encore, la guerre semble aujourd’hui s’installer dans la durée et a déjà fait des dizaines de milliers de morts de part et d’autre en marquant durablement chacun de nous… À partir de témoignages de gens ordinaires, Igort nous raconte les 100 premiers jours de cette guerre…

Igor est le véritable prénom de l’auteur de ce livre. Igor sans t, un prénom russe mais un nom, Tuveri, qui ne l’est pas. Igor n’est pas russe. Il est italien. Mais ses parents étaient profondément amoureux de la littérature et de la musique russes. Ceci explique cela et l’auteur l’expose dès le début de l’album, histoire de lever toute ambiguïté.

Igort avec un t, l’auteur, n’en est pas à ses premiers cahiers puisqu’il avait déjà exploré ce type de journal de bord avec Les Cahiers russes : La guerre oubliée du Caucase en 2012, Les Cahiers japonais : Un voyage dans l’empire des signes en 2015 et déjà, il y a une douzaine d’années, Les Cahier ukrainiens : Mémoires du temps de l’URSS, qu’il présenta à l’époque comme le compte rendu d’un voyage qui avait duré presque deux ans et pendant lequel il épousa sa dulcinée, une Ukrainienne.

© Futuropolis / Igort

Autant dire qu’Igort connaît son sujet, que les noms de Kiev, Odessa, Sebastopol, Yalta… lui étaient familiers bien avant la guerre, qu’il y a tissé un réseau familial et amical, et que bien entendu, dès l’invasion russe, son téléphone n’a cessé de sonner.

C’est ainsi que débute l’album, par des appels depuis une Ukraine désormais en guerre. Sveta, Maskim, Yulia… Des gens comme vous et moi, « des gens qui vivaient une existence normale ». Jusqu’à ce jour !

« Le téléphone sonne et les nouvelles s’accumulent, en désordre. Les questions fusent. De la part de ceux qui te demandent des informations qui là-bas n’arrivent sans doute pas. Alors toi, qui est loin et qui écoutes tous les reportages, lis tous les journaux, regardes toutes les émissions spéciales à la télé, tu t’informes, tu sentes de rassurer. Et tu mens. Tu t’entends donner des versions édulcorées de nouvelles qui ne sont pas bonnes ».

© Futuropolis / Igort

Igort prend sa plume et ses pinceaux et se lance spontanément dans la réalisation de ces nouveaux Cahiers. Et de remonter le temps pour tenter de trouver une explication à l’indicible. 1994, la première guerre de Tchétchénie, 2008, l’invasion de la Géorgie. 2014, l’annexion de la Crimée, la guerre du Dombass…

Des dates, des faits, mais aussi des hommes, Igort nous raconte ici la vie ou plus exactement la survie des civils, jour après jour, les pénuries, le froid, la faim, les alertes aériennes, le bruit des bombes, la peur, le désespoir, les larmes, les morts, les fosses communes,

Témoignage après témoignage, Igor bâtit un récit poignant qui n’oublie pas que pour faire une guerre, il faut être deux, n’oubliant pas de parler des mouvements déviants ukrainiens d’inspiration nazis, des atrocités commises sur les pro-russes, du massacre d’Odessa…

Comme l’écrit Igort dans les premières et dernières pages de l’album, « Une guerre n’est jamais qu’une saloperie de guerre. Il n’y a pas d’épopée, pas de gloire, que de la misère ». Tout est dit…

Eric Guillaud

Les cahiers ukrainiens, Journal d’une invasion, d’Igort. Futuropolis. 22€

13 Fév

Chroniques de vacances. Perpendiculaire au soleil de Valentine Cuny-Le-Callet : une amitié épistolaire à l’ombre du couloir de la mort

Vacances. Du temps pour lire et rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente comme celui-ci sorti en août 2022, un énorme bouquin de plus de 400 pages dont on dit le plus grand bien ici et là. C’est le moment…

Il faut prendre le temps, le temps de le lire, le temps de le regarder, le temps de le savourer, l’ouvrage est costaud et le thème à première vue pas facile. Perpendiculaire au soleil est construit sur la correspondance entretenue pendant plusieurs mois entre l’autrice, Valentine Cuny-le-Callet, et un condamné à mort américain, Renaldo McGirth, incarcéré dans une prison de Floride.

C’est par l’intermédiaire de l’ACAT, une ONG de lutte contre la torture et la peine de mort, que Valentine entre en contact avec Renaldo. S’en suivent des mois d’échange de lettres manuscrites et au bout d’un moment l’envie pour Valentine de laisser une trace de cette correspondance et de cette amitié naissante dans un livre. C’est chose faite en 2020. Le livre s’appelle Le Monde dans 5m2, il parait chez Stock.

Mais les choses ne s’arrêtent pas là. Aussitôt le livre paru, Valentine a en tête d’en faire une bande dessinée, de mettre des images sur les mots, des visages et des corps sur cette relation. Et le résultat est là, Perpendiculaire au soleil, 400 pages en noir et blanc réalisées au crayon gras et à la gravure de bois, avec ici et là quelques illustrations au stylo bille et à la gouache – les seules touches de couleur du livre – réalisées par Renaldo lui-même.

La teneur de cette correspondance ? La vie, le sens de la vie, le sens de l’espoir. Depuis sa cellule, Renaldo raconte son quotidien, le système carcéral, la vie qu’il aurait aimé avoir, la vie qu’il a finalement dans le couloir de la mort.

Et de nous amener à réfléchir sur le milieu carcéral, la peine de mort. Nous avons la chance en France de ne plus l’appliquer depuis de nombreuses années mais ce n’est pas le cas partout et surtout rien n’est jamais définitif. Pour ça, Perpendiculaire au soleil fait partie de ces livres essentiels qui n’imposent aucune pensée mais titillent notre humanité.

Comme l’explique l’autrice en ouverture du récit, le nom de Renaldo ne figure pas sur la couverture, aucune personne condamnée ne pourrait tirer profit de son crime. Mais il est fortement présent à commencer par la couverture et ce portrait envahi de végétaux, une façon peut-être d’apporter un contraste fort avec l’univers glacial de la prison. Un magnifique récit, d’une puissance rare, qui a reçu le Prix BD Fnac France Inter !

Eric Guillaud

Perpendiculaire au soleil, de Valentine Cuny-Le-Callet. Delcourt. 34,95€

© Delcourt / Cuny-le-Callet

05 Fév

Aro Satoe de Frank Le Gall: Théodore Poussin pour la vie !

Avec sa bouille et ses lunettes rondes, ses trois poils sur le caillou en guise de chevelure, Théodore Poussin est devenu l’archétype du héros malgré lui. Embarqué sur un bateau à Dunkerque il y a maintenant une paire d’années, 39 pour être tout à fait précis, il nous revient dans une quatorzième aventure insulaire pleine de révélations…

Les héros ne meurent jamais ! Les anti-héros non plus, à en croire la longévité de celui-ci. Trente-cinq ans d’aventures pour 14 albums seulement diront les mauvaises langues, oui mais 14 albums qui en valent 100 ou même 1000 car Théodore Poussin est un personnage unique et ses aventures se méritent.

Certes, il nous aura fallu attendre plus de dix ans entre le 12e et 13e volet, c’est beaucoup, mais à peine cinq entre le 13e et 14e, juste un moment nécessaire pour nous lecteurs de rêver la suite, une suite, un chemin forcément différent de ce qu’il allait finalement être sous le crayon et la plume du génial Frank Le Gall.

Et ce chemin là nous emmène à l’autre bout du monde, du côté de la mer de Chine où on retrouve Théodore Poussin, bien vivant, tel qu’il avait promis de l’être dans la dernière case du Dernier voyage de l’Amok paru en 2018. Bien vivant et en charmante compagnie. 

© Dupuis / Le Gall

Après avoir repris son île et sa cocoteraie au capitaine Crabb et à sa horde de pirates, Théodore Poussin se la joue « repos du guerrier » dans les bras de la ravissante Aro Satoe, ex-mannequin devenue par le plus grand des mystères trafiquante d’armes. Le calme avant la tempête car notre employé de bureau devenu aventurier est à la fois recherché par les autorités de Singapour et l’armée britannique pour actes de piraterie…

On présente souvent Théodore Poussin comme un fameux mélange de Tintin et de Corto Maltese. Il y a de ça, c’est certain, l’aventure, le monde marin, les pirates, tout ça, tout ça… mais avec le temps, avec l’âge, notre anti-héros national, ou non-héros comme le définissait l’auteur lui-même lors d’une interview à retrouver ici, a pris de la rondeur dans le trait et du caractère dans le fond, devenant un personnage à part entière, reconnaissable entre tous dans la profusion de héros que nous offre aujourd’hui le neuvième art avec des aventures au long cours iodées, romanesques, romantiques et poétiques.

Un bonheur ! Un bonheur qui fêtera en 2024 ses quarante ans avec, dit-on dans les milieux autorisés, un beau livre concocté par les éditions Dupuis. Certains l’imaginaient mort et enterré mais non, Théodore Poussin est plus que jamais en vie, prêt pour nombreuses aventures…

Eric Guillaud

Aro Satoe, Théodore Poussin tome 14, de Frank Le Gall. Dupuis. 16,50€

© Dupuis / Le Gall

02 Fév

Rencontre avec Sole Otero, lauréate du Fauve d’Angoulême Prix du public France Télévisions pour son album Naphtaline

Elle est argentine, autrice de bande dessinée et de livres jeunesse et depuis peu lauréate du prestigieux Fauve d’Angoulême Prix du Public France Télévisions, rencontre avec la talentueuse Sole Otero qui ne boude pas son bonheur…

Sole Otero sur la scène du théâtre d’Angoulême le 28 janvier 2023 pour la remise de son Fauve Prix du Public France Télévisions • © Antoine Guibert pour FIBD / 9eArt+

Pour tout vous dire, l’affaire n’a pas demandé des heures et des heures de joutes verbales, le jury du Fauve d’Angoulême Prix du Public France Télévisions composé de neuf lecteurs passionnés de bande dessinée a souhaité saluer à l’unanimité le travail de l’Argentine Sole Otero pour son album Naphtaline paru aux éditions ça et là.

La suite ici

01 Fév

Le 50e : coup d’oeil sur l’histoire du Festival international de la bande dessinée d’Angoulême

50 ans. Le Festival international de la Bande Dessinée en a vu passer des auteurs, des éditeurs, des grands prix, des livres, des petits bonheurs, des grands clashs, des passionnés, des hommes et femmes politiques, des promesses, des revendications… Philippe Tomblaine en offre un très beau panorama dans ce livre essentiel paru à l’occasion du dernier festival…

Les plus âgés d’entre vous, et j’en fais partie, se souviendront avec une certaine émotion et une pointe de nostalgie du Grand 20e publié en 1993 à l’occasion des 20 ans du festival. Sous une couverture faisant référence aux Alfred et Alph’Art, les ancêtres des Fauve, Hervé Cannet nous offrait pour la première fois un bel historique de l’événement.

Trente ans plus tard, c’est Philippe Tombelaine qui relève le défi. Ce passionné de la première heure, chroniqueur, auteur notamment de monographies consacrées à des auteurs de BD, nous invite dans les coulisses de ce qui est devenu le plus grand rendez-vous BD au monde.

Dans un format de roman graphique, Philippe Tombelaine passe en revue les 50 éditions du festival en s’appuyant sur de nombreuses illustrations, photographies, visuels d’affiches…On y découvre l’histoire avant l’histoire, les Semaines de la bande dessinée puis la Quinzaine de la bande dessinée et du livre de la jeunesse préfigurant le salon qui tiendra sa première édition en 1974 avec une affiche signée Hugo Pratt.

Et tout s’enchaine, les années défilent avec pour chacune d’elles, les invités de marque, les anecdotes, les livres et auteurs primés… Un live à boulotter du début à la fin, en attendant la 100e édition.

Eric Guillaud

Le 50e, de Philippe Tomblaine. PLG & Association FIBD. 20€