17 Juil

Pages d’été. 14 BD jeunesse à dévorer pendant les vacances

De l’action, de l’humour, de la magie, de l’histoire, du fantastique… voici une sélection de quatorze albums pour vous faire oublier la météo capricieuse. À lire sur la plage ou sous la couette…

On commence avec Lisou, le premier volet du diptyque baptisé Quand la nuit tombe de Marion Achard et Toni Galmès. Lisou est une grande tante de Marion Achard et ce récit est le sien. Lisou et sa grande sœur, Mylaine, de confession juive, ont connu la guerre, la débâcle, l’invasion allemande, les lois anti-juives et la fuite vers le sud de la France où elles trouvent un temps refuge avec leurs parents dans un chalet isolé. Mais les Allemands finissent par les dénicher, Mylaine est arrêtée, le reste de la petite famille parvient à fuir et à rejoindre la Suisse où ils attendront la Libération. Sans savoir ce qu’il est advenu de Mylaine… Quand la nuit tombe est un témoignage très fort sur ces années noires. Un témoignage de plus me direz-vous ? Oui et un témoignage aussi essentiel que les précédents, quand on sait que près de 20% des jeunes ne connaissent pas la Shoah, selon une récente étude OpinionWay. Un récit captivant et un dessin séduisant !(Quand la nuit tombe – Lisou, de Galmès et Achard. Delcourt. 19,99)

Cédric le retour ! 36 albums et 38 ans d’existence pour ce – toujours – gamin né d’une rencontre entre le regretté scénariste Raoul Cauvin, bien connu pour ses Tuniques Bleues, et le dessinateur Laudec. 36 albums, tous conçus sur le même principe de l’histoire courte, drôle et tendre, des aventures du quotidien qui, mine de rien, parlent de vous, de nous, de la famille, de la société, avec amour et fantaisie. Des millions d’albums vendus, un classique de la BD franco-belge aujourd’hui emmené par le seul Laudec. (Transports à risques, Cédric tome 36, de Laudec. Dupuis. 12,50€)

Vous avez aimé Raowl, histoire d’un prince pas vraiment charmant, super violent et vraiment moche, sauveur de princesses en détresse ? Alors vous aimerez La Méthode Raowl, une véritable bible pour tout savoir de la vie. Comment faire ses devoirs en trente secondes ? Comment devenir un bon méchant ? Comment plonger avec classe ? Comment acheter des chips pas chères ? Autant de questions fondamentales qui trouvent ici sous la plume et les pinceaux du génialissime Tébo des réponses pleines d’humour. Il y a du génie derrière tout ça ! (La Méthode Raowl tome 2, de Tebo. Dupuis. 12,50€)

Moon la chauve-souris, vanille la chouette, Bazil le grillon, Shadow l’araignée, Fog le corbeau, Snow et Winter les lapins, Honey le renard, Cotton le chat, sans oublier Urania la sorcière… Bienvenue dans l’univers de Barbara Canepa et sa série-concept faite pour sensibiliser les jeunes à la nature, à l’écologie. Un univers anthropomorphique de toute beauté mis en images pour ce premier volet par Florent Sacré, ex-directeur artistique d’Ubisoft, à l’origine des jeux vidéos Assassin’s Creed, Les Lapins crétins ou encore Rayman. C’est drôle, c’est beau, c’est tendre et c’est éducatif ! Au fil de l’histoire, les auteurs proposent de découvrir les secrets de la nature, des araignées aux betteraves en passant par une recette de grand-mère pour soigner les dents. Coup de cœur ! (Le Chant des grenouilles, de Canepa, Halard et Sacré. Editions Oxymores. 14,95€)

C’est l’histoire d’un OVNI, mais pas comme vous l’imaginez. Cet OVNI-là est un Organisme Vivace Non Identifié, un être humain en quelque sorte, mais un être humain un peu différent. Elle s’appelle Mitsuko, vit seule, ne parle pas ou peu, fait les poubelles du village, récupère des objets cassés, bref de quoi alimenter les interrogations, pour ne pas dire les ragots et les moqueries des habitants. C’est sûr, elle a un secret, se disent-ils. Et c’est vrai, elle a un secret, un secret bien gardé jusqu’au jour où elle décide de l’exposer au grand jour… Mitsuko est le neuvième volet des Contes des cœurs perdus et on s’en lasse pas, LoÏc Clément posant un regard toujours aussi tendre et sensible sur la vie, l’enfance, la nature, avec ici, cerise sur le gâteau, un magnifique dessin de l’illustratrice jeunesse Qin Leng.  (Mitsuko, Les Contes des cœurs perdus, de Clément et Leng. Delcourt. 11,50€)

Et de neuf pour la série Frnck. Une nouvelle fois, direction la préhistoire, non pas pour un cours d’histoire mais pour une aventure un peu dingo avec pour héros un gamin de 13 ans qui s’est retrouvé propulsé là en cherchant ses parents. Frnck, je sais, c’est difficile à prononcer mais vous pouvez l’appeler Franck, est un ado d’aujourd’hui, moderne, jean, baskets rouges au pied, du genre à avoir tout le temps le nez sur les écrans. Sauf que là, dans la préhistoire, il n’y a pas de réseau, pas d’internet, pas de Facebook, pas de TikTok… mais des bestioles monstrueuses en pagaille, des hommes poilus qui mangent les voyelles et de jolies filles. Toujours aussi poilant ! (Apocalypse, Frnck tome 9, de Cossu et Bocquet, Dupuis, 12,50€)

Unique survivant d’un terrible accident de la route qui a couté la vie à ses parents et peut-être à sa sœur qui reste depuis lors introuvable, Thomas a été placé dans un foyer pour ados où il tente tant bien que mal de surmonter le traumatisme. Toujours affublé d’un casque à cornes qui lui vaut son surnom de Torot, Thomas se réfugie dans un premier temps dans sa bulle, ne s’exprimant que par quelques rots, jusqu’au jour où il évoque à ses camarades de foyer un monde secret, le Royaume de Tiketone, et les cinq reliques qui en permettraient l’accès. Avec ses amis, Eliott, Florian, Marianne, Robin et Virgile, Thomas se lance dans la quête de ces reliques… Une aventure fantastique qui nous plonge dans le monde l’enfance et ses traumas, un livre conçu, selon l’autrice Mélissa Morin, comme « un réconfort pour ceux qui se sentent isolés, pas à leur place, victimes d’humiliations, de petites blessures ».   (Les reliques des morts vivants, Les Royaumes de Tiketone (tome 1), de Morin. Casterman. 19€)

Ils auraient pu nous raconter les aventures des Preux, cinq héros aux super-pouvoirs lancés dans une lutte sans merci contre tous les brigands et les monstres du royaume ! Ils auraient pu, oui, mais les auteurs de cette BD ont finalement préféré s’intéresser à leurs apprentis, des héros pas vraiment finis, pas vraiment prêts à affronter l’adversité et qui se lanceront malgré tout dans une incroyable aventure, à la recherche de leurs maîtres mystérieusement disparus. De quoi nous promettre une belle partie de rigolade en mode Fantasy ! (Les Apprentis, Du miel et des cailloux, de Gay et Boiscommun. Drakoo. 18,90€)

Et hop, 30 ans, tout rond, oui 30 ans que Midam nous fait marrer avec les gags sur une ou deux pages de son Kid Paddle. 30 ans, 12 millions d’albums vendus, des adaptations en série animée, en jeux vidéo, en jeux de cartes, une multitude de produits dérivés et bientôt une exposition au musée de la BD à Angoulême. Bref, Kid Paddle est un vrai phénomène éditorial. Pourquoi un tel succès ? Tout simplement parce que l’auteur, Michel Ledent, aka Midam, a su créer un personnage d’aujourd’hui, passionné de jeux vidéo et de monstres en tout genre, souvent gluants et visqueux. Pour fêter cet anniversaire dignement, les éditions Dupuis nous offrent un deuxième tome de Kid Paddle Best-of, une sélection des meilleurs gags savoureusement gores. (Jurassic Paddle, Kid Paddle Best-of tome 2, de Midam, Dupuis. 12,50€)

Et si ça ne vous suffit pas, les mêmes éditions Dupuis ont publié deux ouvrages autour de la série, Midam L’art du gag, un très long entretien largement illustré dans lequel l’auteur revient sur sa méthode de travail, ses personnages, la mécanique du gag, ses influences… et Les Modèles mathématiques de Midam, un étrange bouquin signé par le Mathématicien Daniel Justens où il est question d’arithmétique, de paradoxe de Zénon, de conception poppérienne, des équations d’Einstein et autres joyeusetés du genre, le tout à la lumière des aventures de Kid Paddle… Il fallait oser ! Pour les amoureux des maths ! (Midam, L’art du gag et Les Modèles mathématiques de Midam. Dupuis. 25€ l’album)

Depuis que son grand-père l’a emmené voir Superman au cinéma pour son anniversaire, Xavier ne vit plus que par et pour les super-héros. Au point de se croire lui-même doté du pouvoir de voler et d’envisager de le vérifier en se jetant par la fenêtre de l’appartement. L’intervention de son père évite le drame mais Xavier ne s’arrête pas là. Grâce à son imagination débordante, le petit garçon s’invente des histoires qui lui permettent d’échapper un moment à son quotidien, d’oublier la sévérité de son père et surtout le harcèlement dont il est victime à l’école. Une histoire aux thématiques actuelles emmenée par un dessin moderne. (Invulnérable, de Damián, Sanz et Ceballos. Bamboo Édition. 16,90€)

Avec Le Métier le plus dangereux du monde, les auteurs souhaitaient explorer le monde des super-héros avec un côté social et un contexte ordinaire. De fait, leurs deux héros, Ziad et Louna, sont issus d’un milieu populaire et qui plus-est d’une famille issue elle-même de l’immigration ! L’idée est simple : dans un monde légèrement futuriste avec des super-héros à gogo, plus préoccupés par leur image sur les réseaux sociaux que par le sort de la veuve et l’orphelin, Louna et Ziad se mettent à rêver eux aussi de super-pouvoirs. Le costume sera-t-il à leur taille ? Rien n’est moins sûr ! (Le Métier le plus dangereux du monde, tome 2 de Bocquet et Lai. Dupuis. 12,95€)

Alexandra a une passion : le football. Et pas devant son petit écran. Non, pour elle, ça se joue sur un terrain, celui de son village, Angebois de la Source. Avec une spécialité que beaucoup lui envient : le dribble et notamment la technique du grand pont. Tout le monde l’admire, ses adversaires la respectent, de quoi rêver d’un bel avenir footballistique. Jusqu’au jour où, dans un accident de la circulation, Alexandra perd une jambe. Terminé le football ? Pas vraiment. Après le choc et la rééducation, Alexandra ne s’avoue pas vaincue. Retour sur le terrain… Une belle histoire, une leçon de vie, qui aborde le handicap avec beaucoup d’humanité et d’humour. (Remise en jeu, Balle au pied tome 1, de Lylian et Lesdeuxpareilles. Glénat. 12,50€)

Yoko Tsuno, le retour ! 54 ans d’aventures, 31 albums, mais toujours pas une ride, pas un cheveu blanc, pas un petit bourrelet, Yoko fait partie de ces héros et de ces héroïnes qui ne vieillissent pas, aussi intemporelle qu’universelle. Et c’est un nouveau voyage dans le temps que nous propose L’Aigle des Highlands, un retour vers le XIIIe siècle où la belle électronicienne japonaise va tenter de lever un mystère autour de l’abbaye de Loch Castle et de l’existence d’un animal satanique. Un grand classique des éditions Dupuis !(Anges et Faucons, Yoko Tsuno tome 29, de Leloup. Dupuis. 10,95€)

Eric Guillaud

Budule : une nouvelle plateforme pour vendre et acheter des BD entre particuliers

Tous les amateurs de bande dessinée vous le diront, leur passion remplit les étagères et vide les portefeuilles. Une quadrature du cercle mise à mal par l’émergence des sites de vente en ligne et notamment Budule, une plateforme conçue à Nantes et spécialement dédiée au neuvième art.

Wilhem Vandyck, créateur de la plateforme Budule © France 3 Pays de la Loire / Eric Guillaud

Wilhem Vandyck a la bande dessinée dans le sang. Dans le sang et un peu partout dans sa maison ! Des chambres au salon, plus de 4000 albums attendent sagement sur leurs étagères d’être lus ou relus. Alors forcément, au fil des ans et des nouvelles acquisitions, la question de tous les garder s’est inévitablement posée. Une véritable « lutte des places », s’amuse aujourd’hui Wilhem.

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08 Juin

80ᵉ anniversaire du massacre d’Oradour-sur-Glane : une BD pour se souvenir !

Tous ceux qui ont visité Oradour-sur-Glane vous le diront : impossible d’en revenir intact ! Au milieu des ruines de ce bourg limousin, règne depuis précisément 80 ans un silence comme nulle part ailleurs, un silence lourd de larmes et de sang. Retour sur un acte de barbarie figé pour l’éternité…

Nous sommes le 10 juin 1944. Le débarquement des Alliés en Normandie a surpris les Allemands par son lieu et son ampleur, celui en Provence se prépare.

Appelée à rejoindre le nouveau front ouvert par les Alliés, la division Waffen SS Das Reich remonte vers la Normandie en semant l’horreur sur son passage, à Tulle tout d’abord, où 99 hommes furent pendus, puis à Oradour-sur-Glane.

Dans ce bourg relié par le tramway à Limoges, jusqu’ici à bonne distance des violences de la guerre, 643 morts, des hommes, des femmes et des enfants, meurent sous les balles ou dans les brasiers allumés par les Allemands, faisant d’Oradour-sur-Glane un village martyr dont les ruines sont aujourd’hui visitées par 300 000 personnes chaque année.

© Eric Guillaud

C’est cette histoire que raconte Oradour, L’Innocence assassinée, une bande dessinée de Jean-François Miniac pour le scénario, Bruno Marivain pour le dessin et Cerise pour les couleurs. Par la volonté et avec l’aide du dernier rescapé, Robert Hébras, malheureusement décédé le 11 février 2023, les auteurs reconstituent ici le déroulé de cette terrible journée. Avec une ambition forte et aujourd’hui plus que nécessaire : la transmission de la mémoire aux jeunes générations.

© Eric Guillaud

Réticente jusqu’ici à utiliser la bande dessinée comme médium de transmission, l’Association nationale des Familles des Martyrs d’Oradour-sur-Glane a finalement accepté et accompagné ce projet qui a obtenu la labellisation « 80 ans de la Libération », un gage de sérieux.

© Eric Guillaud

Et de fait, l’album Oradour, L’Innocence assassinée a été réalisé avec une grande rigueur documentaire dans le déroulement des faits, une grande pudeur dans la représentation de l’horreur et un grand respect pour toutes les victimes de ce qui reste comme le plus grand massacre de civils perpétré par les nazis.

Côté graphisme, Bruno Marivain, qui a déjà signé plusieurs ouvrages sur cette sombre période (Normandie Juin 44, Julia von Kleist…) signe ici une belle mise en images, réaliste, sobre et bougrement efficace. Un dossier historique d’une dizaine de pages réunissant photos et documents accompagne judicieusement le récit.

Eric Guillaud

Oradour, L’Innocence assassinée, de Miniac, Marivain et Cerise. Editions Anspach. 20€

© Anspach / Miniac, Marivain & Cerise

03 Juin

INTERVIEW. « Je suis hanté par les mêmes obsessions depuis bien longtemps », rencontre avec Fabien Vehlmann, un scénariste BD qui met le monde en fiction

Spirou et Fantasio, Le Dernier Atlas, Seuls, Green Manor… son imaginaire n’a semble-t-il aucune limite, sa volonté de gratter la surface des choses non plus, le scénariste nantais Fabien Vehlmann revient avec trois albums d’un coup, l’occasion d’échanger avec lui sur son approche de l’écriture, ce qui l’inspire ou l’obsède, ses projets…

Fabien Vehlmann et ses derniers livres • © Rita Scaglia (photo Fabien Vehlmann)

Nous l’avons rencontré en 2014 pour la 54ᵉ aventure de Spirou et Fantasio, en 2019 pour Le Dernier Atlas, en 2020 pour Supergroom. Bien sûr, sa biographie ne s’arrête pas là. Loin de là. Il est également le scénariste de la série à succès Seuls, portée au cinéma par David Moreau, de Paco les mains rouges, de Samedi et Dimanche, du Marquis d’Anaon, de Green Manor, de L’Herbier sauvage et de tant d’autres.

Une bonne soixantaine de livres au total dans des genres très différents. Et pas mal de récompenses, notamment le prestigieux Prix René-Gosciny 2020 qu’il partage avec Gwen de Bonneval pour Le Dernier Atlas. Bref, de quoi donner le tournis. Comment passe-t-on d’un univers à l’autre sans y laisser quelques neurones ? C’est la première question que nous lui avons posée…

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31 Mai

Eerie Et Creepy présentent Alex Toth : tapis rouge pour un maître de la BD d’horreur des années 70

Après Richard Corben et Bernie Wrightson, le dessinateur américain Alex Toth a droit, à son tour, à une rétrospective de toutes ses histoires réalisées pour la crème de la crème des magazines d’horreur des années 60 et 70.

Vous connaissez sûrement son trait mais peut-être pas son nom. Comme cela a été très bien dit par le créateur de Métal Hurlant et des Humanoïdes Associés lui-même Jean-Pierre Dionnet, Alex Toth était « le dessinateur préféré des autres dessinateurs ». Dixit la biographie assez conséquente que l’on peut retrouver dans la présente édition en appendice, il avait également ses humeurs et a fait pas mal d’aller-retour entre plusieurs maisons d’édition, mais aussi entre la bande dessinée et la télévision. Une grande gueule comme on dit. Mais aussi un grand artiste, spécialiste reconnu d’un noir et blanc stylisé et dauphin quasi-officiel du grand Milton Caniff, le créateur de Terry Et Les Pirates et Steve Canyon.

© Delirium / Alex Toth

Or justement, même si Toth s’est essayé dans sa carrière à pas mal de styles différents (même le dessin animé pour enfant avec Le Fantôme De L’Espace !), c’est peut-être dans le registre horreur et fantastique que son trait tout en nuance, où l’ombre a autant d’importance la lumière, qu’il a fait briller le mieux. Les deux magazines phares de l’écurie Warren Publishings Eerie et Creepy étaient à ce propos taillés sur mesure pour lui : là, aux côtés d’illustres collègues comme Frank Frazetta, Richard Corben ou Ken Kelly, il a pu laisser parler son goût pour le macabre et les ambiances gothiques à la Edgar Allan Poe.

© Delirium / Alex Toth

L’intégralité des vingt-et-un histoires réalisées pour le compte de ces deux mythiques revues, et publiées entre 1965 et 1982, est pour la première fois compilées en français ici. Si celles scénarisées par LA star de Creepy et Eerie Archie Goodwin restent assez classiques (mais réussies) dans leur construction, d’autres sont de véritables œuvres d’art, notamment dans leur découpage reflétant la claustrophobie des personnages (Pris Au Piège ! digne d’un très bon épisode de La Quatrième Dimension) ou cette subtile façon de suggérer l’immutable plutôt que de le montrer. Surtout que Toth aime les détails, ces regards effrayés qui en disent long ou ces ombres portées menaçantes…

© Delirium / Alex Toth

Quant la plus longue histoire du lot, la mini-saga du Hachoir, c’est un véritable script détaillé de slasher (type de film d’horreur prédéfini où un tueur sans pitié accumule les victimes, à la Vendredi 13) mais dans un cadre victorien où, derrière le raffinement et la fortune, se cache la pire des perversités.

Olivier Badin

Eerie Et Creepy Présentent Alex Toth. Delerium. 25€

27 Mai

La baie des Cochons : une nouvelle aventure explosive de Spirou et Fantasio

Entre la série mère, les hors-séries, et maintenant la série classique, il y a de quoi s’y perdre mais on ne va pas bouder notre plaisir de retrouver les légendaires héros des éditions Dupuis dans une nouvelle aventure qui nous entraîne cette fois-ci à Cuba…

Alors que nous attendons toujours la suite de La Mort de Spirou, cinquante-sixième album de la série mère signé Olivier Schwartz, Benjamin Abitan et Sophie Guerrive, c’est un deuxième album de la série classique qui sort en ce mois de mai 2024. La baie des Cochons, tel est son nom, se déroule dans le Cuba du tout début des années 60, Fidel Castro s’apprête à prononcer son fameux discours historique au siège des Nations Unies et les États-Unis, un peu plus tard, à débarquer dans la baie des Cochons.

Voilà pour le contexte historique ! Côté fiction, Elric au dessin et au scénario, Clément Lemoine et Michaël Baril au scénario, imaginent une pure comédie autour de Castro, du Che Guevara et de nos intrépides Spirou, Fantasio et Seccotine, envoyés pour les deux premiers couvrir le discours à l’ONU tandis que la dernière est chargée de réaliser un reportage sur la Révolution à La Havane. Bien évidemment, rien ne se passera comme prévu, les agents de la CIA, les révolutionnaires et contre-révolutionnaires s’invitant à la fête dans un joyeux désordre bourré d’action et d’humour.

Deux autres titres sont d’ores et déjà annoncés dans cette collection dite classique, Zorgrad avec le même trio d’auteurs et Le Trésor de San Inferno avec Tarrin et un certain Lewis Trondheim.

Eric Guillaud

La baie des Cochons, Les aventures de Spirou et Fantasio, de Baril, Lemoine et Elric. Dupuis. 12,95€

© Dupuis / Elric, Lemoine & Baril

25 Mai

Les Tribulations de Félix Mogo : un désir d’ailleurs signé Christian Cailleaux

Auteur-voyageur, Christian Cailleaux appartient au paysage comme dirait Bernard Lavilliers. Un jour ici, un jour là, à découvrir d’autres cultures, d’autres peuples, chaque retour au pays étant l’occasion de publier une aventure bien évidemment inspirée par ses périples. Comme ce recueil, Les Tribulations de Félix Mogo, qui réunit quatre récits épuisés depuis longtemps…

Publiés initialement aux éditions Treize Étrange entre 1998 et 2007, Harmattan le vent des fous, Le Café du voyageur, Le Troisième thé et Tchaï Masala sont réunis ici dans un format légèrement supérieur à l’original et sous pavillon Glénat, Treize Étrange n’étant plus qu’une collection de l’éditeur. Un beau petit livre de plus de 600 pages à la couverture de couleur vert amande qui nous permet de replonger dans l’univers de Christian Cailleaux, un dessin proche de la ligne claire, épuré, élégant, et des histoires qui nous emmènent en voyage vers des horizons lointains.

Fou de littérature et voyageur infatigable, Christian Cailleaux a toujours aimé aller à contre-sens de l’histoire, proposer des récits ambitieux, très littéraires, qui se déroulent avec une certaine lenteur et économie de mots, le tout avec une seule volonté affichée : raconter le monde.

L’Afrique, les Indes, l’exotisme, l’aventure, le mystère, l’amour, le voyage… Christian Cailleaux explore le monde et ses sentiments depuis une trentaine d’années maintenant. Il a récemment dessiné Le Flèche ardente, une suite au Rayon U d’Edgar P. Jacobs, signée Jean Van Hamme pour le scénario.

Eric Guillaud

Les Tribulations de Félix Mogo, de Cailleaux. Glénat. 35€

© Glénat / Cailleaux

 

22 Mai

Ma vie de rêves : une autobiographie de Fournier à croquer à pleines dents !

Signe de l’importance du bonhomme dans le monde du neuvième art, Ma Vie de rêves est le deuxième album consacré à sa vie. Le premier, Dans l’atelier de Fournier, avait été écrit par Nicoby et Joub et revenait principalement sur sa carrière d’auteur BD, le second est signé par Fournier lui-même et revient sur toute une vie en dix-huit souvenirs…

Jean-Claude Fournier. Tous ceux qui s’intéressent un tant soit peu à la bande dessinée et à son histoire connaissent le personnage, un sacré personnage qui a commencé sa carrière avec Bizu, lui aussi un sacré personnage, un poète sonneur de biniou logeant dans la forêt de Brocéliande.

Mais c’est surtout avec sa reprise de la série Spirou et Fantasio entre 1970 et 1980, qu’il s’est fait connaître du grand public. Neuf albums en tout qui, sans révolutionner le genre, ont amené une belle touche de poésie et de magie aux aventures du duo longtemps emmenées par André Franquin, le maître à tous.

Un Franquin qui apparaît bien évidemment dans les souvenirs réunis ici, tout comme Spirou et Fantasio, Morris, Tillieux, Will, Kris… et tant d’autres. C’est souvent drôle, parfois un peu amer, notamment lorsqu’il aborde la fin de l’aventure Spirou, toujours très instructif sur le parcours de cet auteur pas comme les autres.

Au-delà des dix-huit souvenirs, Ma Vie de rêves propose un cahier d’archives, une trentaine de pages réunissant illustrations, planches ou encore projets de couverture. Une petite douceur pour les amoureux du bonhomme !

Eric Guillaud

Ma Vie de rêves, de Fournier. Daniel Maghen. 26€

© Maghen / Fournier

20 Mai

RENCONTRE. « Ronds rouges ! », quand la fiction croise la réalité, une BD de Bruno Bazile

Elle est considérée comme la plus grosse opération marketing que la France ait connue, la nuit des ronds rouges est au centre de cette nouvelle aventure en bande dessinée signée par le Nantais Bruno Bazile. Une histoire qui ne manque pas de carburant ! Rencontre…

© France Télévisions / Eric Guillaud

Nous sommes en 1967. Bien avant le choc pétrolier. La France vit alors ses 30 glorieuses et l’industrie pétrolière florissante s’organise pour répondre aux enjeux de la seconde moitié du XXe siècle. À coups d’achats et de fusions, des géants voient le jour. C’est le cas de l’UGD qui concentre les marques Avia, Caltex, ButaFrance, Lacq et quelques autres. Mais face à Shell et Esso, l’UGD doit réunir toutes ces entités sous une seule appellation. Ce sera Elf !

Pour marquer les esprits, le groupe organise une opération marketing hors norme. Elle commence par une campagne d’affichage avec des slogans énigmatiques affublés d’un énorme rond rouge et se termine par la fameuse « nuit des ronds rouges » qui voit 1250 stations-service rebaptisées et repeintes aux couleurs d’Elf.

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