28 Mai

Dragon rouge, le nouveau volet de Jour J par Duval, Pécau et Denys

496c16aec55c492110cc812d675a5afeAprès USA über alles, nous restons dans l’uchronie avec le nouvel épisode de Jour J, une série lancée en 2010 par les scénaristes Jean-Pierre Pécau, encore lui, et Fred Duval. Vingt tomes au compteur, pas mal de périodes de l’histoire revisitées et à chaque fois des dessinateurs différents. Cette fois, et pour la deuxième fois, c’est le Guérandais Denys (7 Survivants, Le Casse, Dans la nuit…) qui s’est collé à la mise en images. Un dessin simple et percutant qui donne une touche polar au récit. Et ça tombe bien car Dragon rouge est justement un polar qui se déroule dans l’Amérique des années 50 avec dans les rôles principaux Lawrence S. Ivory, détective privé de son état, rescapé de la guerre de Corée et alcoolique notoire, présentement chargé par une jeune et riche chinoise de retrouver son père disparu. Rien de bien singulier pour une uchronie, me direz-vous sauf que ces années 50 ne sont pas tout à fait comme celles que nous avons connu ou appris à connaître sur les bancs de l’école.

Dès les premières pages en effet, le récit nous apprend que l’armée française a été sauvée du piège de Diên Biên Phù par une frappe nucléaire, trois bombes A qui ont explosé à la frontière chinoise, provoqué la colère de Mao, enclenché une troisième guerre mondiale et des pogroms anti-chinois sur le sol américain. Alors forcément, travailler pour une Chinoise, même riche, aux Etats-Unis dans ce contexte n’est pas tout à fait anodin… Du très bon divertissement !

Eric Guillaud

Dragon rouge, Jour J (tome 20), de Duval, Pécau, Denys et Scarlett. Editions Delcourt. 14,95 €

26 Mai

USA über alles : et si Hitler était mort dans un attentat ? Une uchronie signée Pécau et Maza

usa uber allesEt si Hitler était mort dans un attentat ? Et si les forces alliés avaient signé une paix séparée avec l’Allemagne et poursuivi la guerre, unies, contre l’URSS ? Et si la France avait été occupée par les Américains ?

Non, ce n’est pas le dernier scénario d’un épisode de Jour J même s’il aurait pu le devenir mais le premier volet d’une nouvelle série emmenée par le scénariste Jean-Pierre Pécau, le dessinateur Maza et le coloriste Jean Verney. A l’instar de Jour J, USA über alles est ce qu’on appelle une uchronie qui, comme l’explique si bien wikipédia, « repose sur le principe de la réécriture de l’Histoire à partir de la modification d’un événement du passé ». Nous sommes en 1947, Georges Charlier, un grand aviateur français du groupe Normandie, évadé du bagne, refait surface à la frontière soviéto-finlandaise. Alors que l’avionneur Marcel Bloch Ferdinand, connu aujourd’hui sous le nom de Marcel Dassault, lui propose de rejoindre ses équipes pour travailler sur le dossier sensible d’un nouveau bombardier, d’autres doutent de sa loyauté. Georges Charlier pourrait-il être un agent soviétique ? Réponse en trois volumes.

Eric Guillaud

USA über alles, de Pécau, Mama et Verney. Editions Delcourt. 14,95 €

Mezzo et Jean-Michel Dupont lauréats du 26e prix des libraires de bande dessinée pour l’album Love in vain

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Sublime ! C’est par cet adjectif que nous achevions notre chronique de Love in vain au moment de sa sortie en librairie en septembre 2014. Et nous maintenons. Sublime tant dans la forme que dans le fond. Love in vain, pour ceux qui ne l’auraient pas encore lu raconte la vie du légendaire bluesman Robert Johnson mais pas seulement, le dessinateur Mezzo et le journaliste Jean-Michel Dupont nous offrent tout au long de cet album au format à l’italienne la photographie d’un pays ségrégationniste où la vie d’un noir ne vaut pas grand chose… 

Le prix des libraires de bande dessinée vise à promouvoir la diversité de la bande dessinée et encourager la liberté de ses créateurs. Pendant une année, les libraires des réseaux Canal BD et Album soutiendront les auteurs et le livre primé, et mettront à leur service l’ensemble de leurs supports de communication.

L’album Love in vain rejoint Les Vieux fourneaux de Cauuet et Lupano (2014), Le singe de Hartlepool de Moreau et Lupano (2013), Portugal de Pedrosa (2012), Polina de Vivès (2011), Blast de Larcenet (2010)…

Eric Guillaud

La chronique de l’album ici

24 Mai

Roi ours, un premier album griffé par la Franco-mexicaine Mobidic

couvblogMobidic. Avec un nom pareil, on peut s’attendre à un grand récit maritime, plus encore lorsqu’on sait que l’auteur a effectivement choisi ce pseudo en hommage au roman d’Herman Melville.

Pourtant, pas un océan à l’horizon, pas un cachalot même tout petit, non, mais un ours, blanc, tout de même, le fameux Roi Ours du titre de l’album, qui va sauver de la mort une jeune fille offerte en sacrifice à la déesse Caïman. Vous suivez ? Et la mettre dans une situation délicate ! En effet, impossible après ça de retourner dans son village qui verrait en elle la responsable de tous les maux à venir. La déesse Caïman risque d’être très en colère. Bref, Xilil, c’est son nom, est condamnée à errer dans la forêt. À moins que… À moins que le Roi Ours lui propose de devenir son épouse !

Il a de la gueule cet album, surtout pour un premier album, et plus encore pour un album réalisé à une main, celle de Mobidic, une jeune Franco-mexicaine qui devrait jouer dans la cour des grands auteurs complets. Le graphisme est racé et dynamique, les couleurs, profondes à souhait, le casting, très réussi, la mise en scène limpide et l’histoire, bougrement intelligente. Sous une couche épaisse de jungle et de rites sacrificiels qui nous ramènent forcément aux civilisations précolombiennes, l’auteure nous parle de différence, de tolérance, d’amour… Bravo !

Eric Guillaud

Roi Ours, de Mobidic. Editions Delcourt. 16,95 €

© Delcourt / Mobidic

© Delcourt / Mobidic

22 Mai

Embarqué à bord du Floréal, Christian Cailleaux rencontre les gars et les filles de la Marine

couve-embarque-tel« Qu’est ce qui pousse un jeune de 16/17 ans au XXIe siècle à s’engager dans la marine pour aller s’enfermer dans un bateau militaire ? », s’interroge Christian Cailleaux dans une interview récemment accordée à France Inter. Et c’est à cette question justement et à quelques autres que l’auteur apporte des réponses dans Embarqué, son nouvel album paru aux éditions Futuropolis. Car au fond, comme il le souligne lui-même, malgré notre passé maritime et nos 7000 km de littoral, nous connaissons peu, très peu, notre marine…

Si Christian Cailleaux a toujours été en proximité avec la mer, c’est en 2005, quand il rencontre l’acteur Bernard Giraudeau dont il souhaite raconter la jeunesse de mécanicien dans la Marine nationale, qu’il embarque pour la première fois sur un bateau militaire, le porte-hélicoptères Jeanne d’Arc. Trois semaines de mer au départ de Brest et une arrivée à New York la veille de Noël. De quoi marquer son homme !

Ensemble, l’acteur et l’auteur signent deux albums, R97 chez Casterman et Les Longues traversées chez Dupuis. Deux albums qui racontent la mer, l’aventure, le voyage, la marine et Bernard Giraudeau, décédé en 2010.

Mais Christian Cailleaux a attrapé le virus à son tour. Le voyage est une idée qui lui a toujours plu. Mais pour lui, le voyage sur un bateau est encore différent. A défaut de paysages changeant, il doit imaginer à quoi ressemblera la prochaine escale. Et ça, c’est déjà en soi un voyage.

La mer l’attire, le monde de la marine l’interroge, le fascine. Il va alors partager pendant quelques temps le quotidien des mousses au Centre d’instruction naval de Brest avant d’embarquer à bord de la frégate Floréal, alors en mission du côté des terres australes et antarctiques françaises, puis à bord d’un sous-marin à propulsion nucléaire.

Du simple moussaillon au commandant, Christian Cailleaux va accompagner et interroger ces hommes et ces femmes qui font la Marine nationale d’aujourd’hui pour tenter de comprendre ce qui les motive profondément. Est-ce Le voyage ? La découverte ? La guerre ? L’argent ? Ont-ils un esprit romanesque ou au contraire très cartésien ?

En retour de cette expérience unique, l’auteur nous offre un album passionnant qui tient tout autant du documentaire en immersion que du carnet de voyage. Un album très riche et très documenté qui ne peut que réveiller en nous l’envie d’aventure et de voyage !

Eric Guillaud

Embarqué, de Christian Cailleaux. Editions Futuropolis. 24 €

L’info en +

Christian Cailleaux est l’invité d’honneur du festival Regard 9 qui se tiendra du 25 mai au 7 juin à Bordeaux et proposera d’entrer au coeur de la création en bande dessinée avec des expositions, des performances, des créations. Plus d’infos ici

16 Mai

La Corse, île des Justes ? Piatzszek et Espé répondent oui avec une très belle histoire…

501 L'ILE DES JUSTES[BD].inddDe tous les départements français, la Corse est le seul qui n’a pas arrêté et déporté de juifs, « sauf peut-être un, accidentellement« , si l’on en croit l’avocat et historien Serge Klarsfeld. Pourtant, les ordres de Vichy étaient les mêmes pour tout le monde dès 1941 : rafler les juifs étrangers. Alors la Corse serait-elle l’île des Justes comme certains le prétendent ou l’espèrent ?

Pour le scénariste Stéphane Piatzszek et le dessinateur Espé, la Corse est bien l’île des Justes. En tout cas, les auteurs l’affichent en toutes lettres dès la couverture, comme une certitude. L’île des justes raconte comment une jeune femme juive, Suzanne Cohen, et son fils, Sacha, ont quitté Marseille en 1942 pour se réfugier en Corse. Comment elle s’est fait arrêtée par la police à son arrivée et comment elle est parvenue à s’échapper, à se cacher dans un petit village et à passer entre les mailles d’un commissaire particulièrement zélé. Un préfet bienveillant, des villageois insoumis qui protègent des familles juives, des hommes qui rejoignent le maquis… cette fiction s’appuie sur une réalité historique même si, bien sûr, l’ensemble de la population n’était pas à 100% opposée à la politique anti-juive et qu’elle comptait en son sein nombre de collaborateurs. Noëlle Vincensini, ancienne déportée, présidente de l’association anti-raciste Ava basta précisait dans une interview à Corse Net Infos en 2013 : « île des Justes, c’est un peu exagéré parce que la Corse a connu nombre de collaborateurs, mais ce qui a dominé chez les Corses, c’est le sentiment de protection de la population par rapport aux juifs ».

Un graphisme sobre et élégant, de très belles couleurs signées Irène Häfliger, des personnages principaux attachants, des décors somptueux, un scénario carré… Au-delà de l’aspect historique déjà fort intéressant, L’île des Justes offre un bon moment de lecture et un autre regard sur la Corse. Lu et approuvé !

Eric Guillaud

L’île des Justes de Patzszek et Espé. Editions Glénat. 18,50 €

L’info en +

Pour en savoir un peu plus sur cette notion d’île des Justes, un article de Corse Net Infos

© Glénat / Espé & Piatzszek

© Glénat / Espé & Piatzszek

14 Mai

Les esclaves oubliés de Tromelin, le témoignage d’une tragédie silencieuse signé Savoia

couverture-les-esclacves-oublie-s-de-tromelinL’île de Tromelin ne vous dit peut-être pas grand chose. Et c’est normal. Tromelin est un caillou ou plus précisément un banc de sable posé au milieu de l’océan indien à 500 kilomètres de la terre la plus proche.

1700 m du nord au sud, 700 m d’est en ouest, une végétation assez réduite, des oiseaux, des Bernard-L’Hermite par dizaines de milliers et les traces presque imperceptibles mais bien réelles d’une présence humaine ancienne.

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L’interview de l’auteur à lire ici

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L’île a en effet été habitée au XVIIIe siècle pendant 15 ans par des esclaves laissés là après le naufrage du navire qui devait les emmener vers un destin tout aussi funeste. 15 ans à tenter de survivre et au bout du compte, huit rescapés, 7 femmes et un enfant de 8 mois sauvés en 1776 après plusieurs tentatives de sauvetage. Une histoire incroyable mais bien réelle que nous raconte avec passion et talent l’auteur de bande dessinée Savoia, déjà connu du grand public pour avoir mis en images le récit autobiographique de la Polonaise Marzena Sowa, Marzi (éd Dupuis).

© Dupuis / Savoia

© Dupuis / Savoia

Et plus que le simple mais déjà conséquent récit de ce naufrage et des quinze années passées sur l’île, Savoia met également en images la mission archéologique qu’il a accompagnée sur l’île de Tromelin en 2008, mission chargée justement de comprendre comment avait pu être la vie de ces naufragés.  Et c’est passionnant de bout en bout, le lecteur suit les découvertes de l’équipe d’archéologues en même temps qu’il vit la lente tragédie silencieuse des esclaves. Un album très soigné et un témoignage indispensable qui vient à merveille compléter les diverses manifestations qui ont émaillé la journée commémorative de l’abolition de l’esclavage le 10 mai dernier. 

Eric Guillaud

Les esclaves oubliés de Tromelin, de Savoia. Editions Dupuis. 20,50 €

L’info en +

Une exposition intitulée Tromelin, l’île des esclaves oubliés  sera présentée au Château des Ducs de Bretagne à Nantes du 17 octobre 2015 au 20 avril 2016. L’itinérance la mènera à Lorient, Bordeaux, Bayonne et Marseille.

Une autre exposition, consacrée à l’album Les esclaves oubliés de Tromelin est présentée au Centre belge de la bande dessinée à Bruxelles jusqu’au 21 juin.

© Dupuis / Savoia

© Dupuis / Savoia

12 Mai

La couverture du prochain album de Corto Maltese dévoilée ce matin

_photo(1)Nos confrères du Figaro ont dévoilé ce matin la couverture du prochain album de Corto Maltese, le mythique héros du géantissime Hugo Pratt doit en effet reprendre du service sous la plume de Juan Diaz Canales et les pinceaux de Ruben Pellejero.

Cette nouvelle aventure attendue pour la rentrée, très attendue même et parfois attendue au tournant par quelques détracteurs qui estiment impossible la reprise des aventures du célèbre marin par quelqu’un d’autre que son créateur, s’intitule Sous le soleil de minuit et devrait, comme le confie au Figaro le directeur éditorial de Casterman Benoît Mouchart « se dérouler en 1915 dans le froid... ». La couverture laisse d’ailleurs entrevoir en second plan une montagne enneigée. Pour le reste, mystère…

Un article à retrouver ici

10 Mai

Quand l’artiste italien Liberatore illustre Les Fleurs du mal de Baudelaire…

501 LES FLEURS DU MAL[LIV].inddTous ceux qui s’intéressent un tant soit peu à la bande dessinée connaissent RanXerox, publié au début des années 80. Une bande dessinée mythique, violente, au graphisme inhabituel à l’époque, très moderne, qui marquera plusieurs générations d’auteurs au point d’en faire aujourd’hui encore une référence dans le milieu du Neuvième art. Pourtant, Liberatore ne fera par la suite que de très rares incursions dans le monde de la bande dessinée privilégiant le cinéma, collaborant notamment sur le film Astérix & Obélix : Mission Cléopâtre de Chabat, et l’illustration. Pochette de disques, artbook… Liberatore libère son trait de tout carcan pour nous offrir une oeuvre cohérente, ultra-réaliste, charnelle.

Après avoir illustré le texte pornographique de Guillaume Apollinaire, Les Onze mille verges, Liberatore s’attaque une nouvelle fois à la littérature française avec Les Fleurs du mal de Baudelaire. 30 poèmes sélectionnés, autant d’illustrations, la plupart du temps sur deux pages, et de nombreuses recherches graphiques constituent ce très bel ouvrage grand format de 88 pages. Une véritable pièce de collection pour tous les amoureux de la littérature, de l’illustration et de l’érotisme qui se prolonge par une expo à la galerie Glénat à Paris jusqu’au 30 mai !

Eric Guillaud

Les Fleurs du mal de Baudelaire, de Liberatore. Editions Glénat. 39 €