31 Juil

Quand souffle le vent des îles, adaptation de la nouvelle d’Anatole Le Braz, par Debois et Fino. Editions Soleil. 13,50 euros.

Direction la Bretagne et plus précisément la région de Perros-Guirec pour cette aventure qui se déroule au coeur de la lutte des douaniers bretons contre les fraudeurs. Nous sommes à la fin du XIXe siècle, Julien le Denmat, de retour de la guerre de Crimée, y est nommé lieutenant des douanes. Mais personne ne semble l’attendre. Ni les douaniers déjà sur place qui trompent l’ennuie dans l’alcool, ni le maire local qui aurait su imposer une loi martiale dans sa ville et, donc, mettre fin à toutes infractions. C’est pourtant une contrée merveilleusement aménagée pour la fraude, se dit Le Denmat en prenant ses nouvelles fonctions. Etrange ! Etrange, d’autant que son prédécesseur à été retrouvé assassiné…

Quand souffle le vent des îles est l’adaptation en bande dessinée d’une nouvelle signée Anatole Le Braz, auteur de nombreuses oeuvres poétiques ou romanesques qui mettent en scène la Bretagne et les mystères de son époque. Le scénariste François Debois (Les contes de Brocéliande, Les Contes de l’Ankou, la Quête du Graal…) et le dessinateur Serge Fino (Zodiac killer, L’Etrangleur de Boston, Cerbères…) ont mené à bien ce projet donnant à l’album cette atmosphère si particulière aux terres celtes. Pour les amoureux du vent, de la mer et des légendes… E.G.

Sicilia bella, Cosa Nostra (tome 1), de Clarke. Editions Le Lombard. 10,95 euros.

La Sicile : son soleil, sa mer, ses églises, son huile d’olive et… sa mafia, connue aussi sous le nom de Cosa nostra, de Camorra ou encore, comme l’écrit Clarke en ouverture de cet album, de « Mêle-toi de tes oignons, le touriste, ou ton chien va devoir apprendre à nager ». Mieux vaut en rire ! C’est justement le parti pris par l’auteur dans cette nouvelle série lancée en avril dernier. Clarke, que l’on connaît déjà pour Mélusine (éd. Dupuis) mais aussi pour les excellents volumes publiés sous les titres Durant les travaux, l’exposition continue puis Histoires à lunettes, nous livre ici une série d’histoires courtes de 3 à 5 pages à mourir… de rire !  Racket, omerta, corruption, trafic en tout genre, règlement de compte, rapt, le parrain, les femmes, les hommes politiques, les journalistes… tout et tout le monde passe à la moulinette de l’humour façon Clarke. Une parodie bourrée de clins d’oeil et de références. Et forcément, ça fait mouche ! E.G.

26 Juil

L’Ordre naturel des choses, Le Tueur (Tome 8), de Jacamon et Matz. Editions Casterman. 10,40 euros.

Le tueur est de retour pour la suite et fin de cette aventure qui nous aura entraîné du Venezuela à Montréal, en passant par Cuba. Un diptyque réunissant tous les ingrédients qui ont fait le succès de la série, à commencer par le texte et les dialogues finement ciselés façon polar, le graphisme racé, la narration énergique et le personnage principal, solitaire, froid et cynique à souhait. Comme un tueur ! Précis aussi. Très précis et très méthodique. Capable de toucher sa cible de très loin comme ici. Un général, le général Contreras. Depuis le toit d’un building voisin, le tueur est en position. Il sait que son domaine est plutôt les maris jaloux, les juges trop curieux, les témoins gênants, les hommes d’affaires, les politiciens ou encore les autres truands. Mais les relations internationales, c’est franchement pas son truc. Ca l’ennuie ! Alors pourquoi tirer sur ce général ? Juste un espoir, celui de se sortir d’une très fâcheuse posture…

Lancé en novembre 1998, il y a maintenant douze ans, Le Tueur fait aujourd’hui partie des grands classiques de la bande dessinée noire. Plus de 200 000 exemplaires ont déjà été vendus sur l’ensemble de la série et une option aurait été prise pour son adaptation au cinéma par David Fincher, réalisateur notamment de Seven, et Brad Pitt. En attendant, le dessinateur Luc Jacamon et le scénariste Matz signent un huitième opus 100% énergique et efficace ! E.G.
 

24 Juil

Rue des Chiens marins, de Constant. Editions Le Lombard. 14,50 euros.

C’est un album surprenant. Très surprenant ! Michel Constant, son auteur, nous invite en effet à bord d’un U-Boot de la Kriegsmarine pendant la Seconde guerre mondiale. Un univers clos où les odeurs de sueur et de vomi ne font que rajouter à une tension déjà fortement palpable entre les hommes d’équipage. Parmi eux, Josef, un jeune homme issu des quartiers pauvres de l’Allemagne. Ses parents, ses deux frères et lui partageaient une petite maison face à la mer baltique, rue des Chiens marins. Un drôle de nom ! Et un drôle d’oiseau ce Josef qui, pour ne pas sombrer totalement dans la folie, s’invente un compagnon, un confident, un phoque, à qui il raconte sa jeunesse, ses parents, ses frères, leurs jeux… et la belle Emma, une jeune juive qui habitait sa rue et dont il était tombé amoureux. Entre le quotidien du sous-marinier, seulement rythmé par les remontées à la surface et les poursuites de navires ennemis, et une jeunesse à l’insouciance brisée nette par les circonstances, Michel Constant nous montre toute l’horreur de la guerre avec des gamins allemands qui se demandent bien ce qu’ils font là. Et c’est l’un des points forts de Rue des Chiens marins qui offre une vision de la guerre côté allemand, ce qui n’est pas encore si courant. « Aujourd’hui, on peut commencer à en parler… », constate l’auteur, « Le traumatisme bien entretenu par Hollywood est apaisé. Il n’y a bien sûr rien d’excusable, mais je tenais à dire que, oui, c’était avant tout beaucoup d’innocents – en tout cas d’ignorants. A deux ou trois arrangements près, j’aurais pu situer quasiment la même histoire dans un char américain au Vietnam. La vraie question, pour le héros, c’est : qu’est-ce que je fous là ? ». Une histoire finalement universelle ou la réalité historique est juste agrémentée d’un brin de loufoquerie ! E.G.

22 Juil

La vallée du Rift, Les Munroe (tome 1), de Perrissin et Pavlovic. Editions Glénat. 13 euros.

Direction le Kenya pour cette grande saga familiale proposée par le dessinateur croate Boro Pavlovic et le scénariste Christian Perrissin, à qui on doit déjà quelques albums remarquables comme Martha Jane Cannary (éditions Futuropolis), El Nino (éd. Humanoïdes Associés) ou encore les derniers récits de Barbe rouge (éd. Dargaud). Dans cette nouvelle série, publiée aux éditions Glénat, les auteurs nous invitent dans le secret d’une famille de Blancs aristocrates, les Munroe, à la tête d’une plantation de café vieillissante. Alors que Robert, le père, s’apprête à faire un beau mariage qui pourrait sauver son entreprise, son fils Sean emprisonné pour le meurtre de sa petite amie issue des bidonvilles de Nairobi, se fait la belle. Un problème de plus pour Robert…

D’une facture assez classique, La vallée du Rift offre une belle ouverture à cette série qui respire l’Afrique à toutes les cases. E.G.
 

20 Juil

2 Expressos, de Kan Takahama. Editions Casterman. 14 euros.

Kan Takahama, l’auteure de cet album, n’est pas une inconnue en France. Les éditions Casterman ont déjà publié deux de ses ouvrages dans la collection Sakka, intitulés Kinderbook et L’eau amère, ainsi que Mariko parade, un récit mis en images par le dessinateur français Frédéric Boilet. Justement, 2 Expressos est l’histoire d’un auteur de bande dessinée français de 42 ans, Benjamin, parti à la recherche d’une jeune femme asiatique, un amour d’une nuit qui remonte à 17 ans ! Sa quête le conduit à longer en pleine nuit  une voie de chemin de fer quelque part au Japon, à la recherche d’une gare qui n’existe pas et d’une ville pour le moins fantôme. Il finit par rencontrer un patron de café, Michihico, grand spécialiste du plus mauvais expresso de la planète. Mais entre les deux hommes se noue rapidement une relation amicale. L’un et l’autre vivent un passage difficile dans leur vie sentimentale et vont se confier leurs difficultés respectives…

Publié dans la collection Ecritures emmenée par l’immense Jirô Taniguchi, 2 Expressos parle bien évidemment de l’amour et du désenchantement amoureux, thème de prédilection de Kan Takahama. Des personnages savoureux, une histoire subtile, un graphisme élégant… 2 Expressos est un bel album de divertissement, idéal pour la plage ! E.G. 

19 Juil

L’Impertinence d’un été (tome 2), de Pellejero et Lapière. Editions Dupuis. 14,50 euros.

L’Impertinence d’un été n’est pas une biographie pure mais plus exactement un récit inspiré de deux destins, ceux d’Edward Weston et de sa maîtresse Tina Modotti. Lui, reconnu comme l’un des plus grands photographes du XXe siècle, co-fondateur notamment du groupe f/64, elle, qui débuta une carrière d’artiste à Hollywood avant de se révéler dans la photographie. C’est au Mexique que les deux amants vont s’aimer, Edward Weston abandonnant femme et enfants pour la rejoindre. Ils vont s’aimer, aimer la liberté, aimer l’art, aimer la vie, aimer la politique et surtout aimer la révolution.  Nous sommes dans les années 20 et les muralistes comme on les appellera plus tard, Diego Rivera et Xavier Guerrero en tête, font rimer création avec révolution sur les murs de Mexico…

Deuxième et dernier volet de ce récit signé par le dessinateur Ruben Pellejero et le scénariste Denis Lapière. Après Un Tour de Valse et Un peu de Fumée bleue, L’Impertinence d’un été offre une nouvelle histoire d’amour singulière entre deux artistes épris de liberté, de convictions mais aussi de doutes. Au début de ce nouvel album, Edward Weston est retourné aux Etats Unis poursuivre son art tandis que Tina Modotti est ballotée entre son désir de changer le monde et son refus de se laisser enfermer dans un choix. Une très très belle histoire aux ambiances sensuelles, charnelles, où le trait et les couleurs de Ruben Pellejero nous transportent ailleurs! E.G.

L’info en +

Parrallèlement à cette édition, il existe un tirage limité et numéroté à 777 exemplaires avec un frontispice inédit imprimé sur papier d’art et jaquette, vendu au prix de 30 euros.

17 Juil

Le Corbusier, architecte parmi les hommes, de Rébéna, Baudouï et Thévenet. Editions Dupuis. 11,50 euros.

La Villa Savoye à Poissy, c’est lui. La chapelle de Ronchamp, c’est également lui. Tout comme la Cité radieuse à Marseille et la construction de la nouvelle capitale du Penjab, Chandigarh. Lui, c’est Le Corbusier, de son vrai nom Charles-Edouard Jeanneret, architecte mondialement reconnu, qui a marqué profondément son temps et influencé l’architecture contemporaine. A l’occasion de l’exposition Archi & BD – la ville dessinée, présentée à Paris, les éditions Dupuis en partenariat avec la Cité de l’Architecture et la Fondation Le Corbusier proposent de découvrir l’homme mais aussi son oeuvre dans un album documentaire réunissant un récit dessiné, qui revient sur les quinze dernières années de sa vie, et un dossier de plus de 20 pages proposant une chronologie et de nombreux documents particulièrement rares (photographies, croquis, peintures, couvertures de livres…). Un petit ouvrage très instructif, dans la veine de l’album Rose Valland, Capitaine Beaux arts, paru chez Dupuis fin 2009. E.G.

L’info en +

L’expo Archi & BD – la ville dessinée est à découvrir à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine jusqu’au 28 novembre 2010. Plus d’infos ici!

15 Juil

La Cité de l’arche, Animal lecteur, Petits bonheurs… quelques nouveautés en bref !

C’est l’été… un moment de relâche pour les éditeurs, un moment de rattrapage pour les lecteurs. Petit coup d’oeil rapide sur quelques albums parus ces derniers temps…

… en commençant par La Cité de l’Arche et son premier volet, Ville lumière, un récit d’anticipation aux accents romantiques signé O.G. Boiscommun, avec dans le premier rôle une ville, une sorte de Paris décrépie, rongée, trouée comme un morceau de gruyère, et des habitants soumis à un régime totalitaire qui sépare les hommes des femmes. Fort heureusement, un petit groupe résiste et  une rumeur annonce l’arrivée d’un homme, le passeur, qui trouvera la voie  qui mène à la porte de lumière et à la Cité de l’Arche où hommes et femmes vivront en harmonie.

  

Dans un registre différent, aux éditions Dupuis, vient de paraître un album au format particulier, tout en longueur, adapté aux strips verticaux des auteurs Salma (Surimi, Nathalie…) et Libon (Jacques, Hector Kanon…) Ces strips, publiés depuis quatre ans dans les pages du journal Spirou, mettent en scène le monde de la BD avec beaucoup d’humour. Vous êtes libraire spécialisé, collectionneur ou lecteur fou, vous écumez les festivals, n’oubliez jamais de visiter les librairies BD lorsque vous voyagez, vous êtes prêts à appeler vos enfants Lanfeust ou Largo, vous rêvez de Natacha… Aucun doute, vous devriez vous reconnaître dans l’un ou l’autre de ces personnages. Un album dont vous êtes le héros !

  

Direction le Sud-Ouest de la France et plus précisément le Lot-et-Garonne pour une histoire en deux tomes qui nous plonge au coeur des années noires de la Seconde guerre mondiale. D’un côté les collabos, de l’autre les Résistants, et au milieu, des enfants qui tentent de vivre normalement même si les événements ne leur en donnent pas toujours la possibilité. Comme Rémi et Mathilde qui vont tomber par hasard sur toute une cargaison d’armes et d’explosifs, cargaison qu’ils vont décider de cacher. Publié dans la collection Terres d’origine et réalisé par H. Tonton, Petits bonheurs parle aussi de l’enfance et de cette insouciance mise à mal par la guerre. Un très bel album au graphisme inspiré par l’oeuvre de Loisel. E.G.

  

Dans le détail :

Ville lumière, La Cité de l’Arche (tome 1), de Boiscommun. Editions Drugstore. 13,90 euros.

Ca va cartonner !, Animal lecteur (tome 1), de Libon et Salma. Editions Dupuis. 13,50 euros.

Petits bonheurs (tome 1), de H. Tonton. Editions Vents d’Ouest. 13,50 euros.

14 Juil

Les Yeux d’Edith (tome 2), de Djian et Ryser. Editions Vents d’Ouest. 13,50 euros.

Retour au coeur de la campagne normande pour la suite et fin de cette très belle histoire écrite par le Normand d’adoption Jean-Blaise Djian et le dessinateur Nicolas Ryser. Nous sommes dans les années 50 du côté de Cambremer, dans le Calvados. Gérard et Fernand sont jumeaux mais, au-delà de l’aspect physique, les deux frères ne se ressemblent guère. Fernand est plutôt à l’aise en société, même s’il se réfugie à longueur de temps dans le grenier de la maison pour feuilleter ses illustrés ou jouer avec son train miniature. Gérard, lui, est plus renfermé et, surtout, il bégaye. Un petit handicap qui ne l’empêche pas de vivre jusqu’au jour où il tombe amoureux de la belle Edith, une jeune parisienne fraîchement débarquée à Cambremer. Incapable de surmonter et d’assumer son bégaiement, il demande à son frère de séduire Edith pour lui, en jouant sur leur ressemblance. Mais lorsque Gérard souhaite reprendre sa place, Fernand ne l’accepte pas. L’étonnante histoire d’amour va alors tourner au drame…

Le petit village de Cambremer mais aussi Beuvron en Auge ou encore Caen servent de décor à cette histoire en deux volets. Dans l’atmosphère magnifiquement reconstituée des années 50, les auteurs traitent de l’amour mais aussi et surtout de la perte de l’innocence, de la jalousie, de cette jalousie capable de reveiller chez l’homme les plus sombres desseins. A l’instar du premier épisode, le travail du scénariste Jean-Blaise Djian (Les Maîtres du hasard, Fleurs carnivores, Tard dans la nuit…), du dessinateur Nicolas Ryser (Hariti… ) et de la coloriste Catherine Moreau se révèle tout à fait remarquable. Un récit qui tient en haleine le lecteur avec, dans ce second volet, une tournure inattendue ! E.G.