Non seulement Luc Leroi se fait tutoyer par Gauguin, Paul Gauguin, mais encore il est prié de venir jouer de la musique chez l’artiste peintre qui lui offre en remerciement un dessin, oh trois fois rien, une simple étude, quelques traits qui dessinent le visage d’une femme.
Et Luc Leroi de rentrer chez lui avec le dessin sous le bras et de le poser en bonne place dans son appartement, sur la cheminée. Un Gauguin quand même !
Sauf que nous ne sommes plus au XXIe siècle mais au XIXe et l’oeuvre de Gauguin n’est pas encore mondialement connue et reconnue, tout juste bonne à récolter quelques menues monnaies au mont-de-piété. Mais que fait Luc Leroi au XIXe siècle me direz-vous ? Il s’est tout simplement perdu dans l’espace temps au retour d’un voyage à Tahiti. L’avion s’est posé avec beaucoup d’avance, tellement d’avance qu’il s’est retrouvé en 1894 et que son chemin a fini par croiser celui du célèbre peintre. Un sacré décalage horaire. Mais notre ami a toujours été décalé…
Habitué à traîner ses guêtres dans un univers assez ordinaire et contemporain, Luc Leroi se retrouve ici à voyager dans le passé tout en restant l’anti-héros primaire que tout le monde connaît, ou du moins que les plus vieux d’entre nous connaissent. Nous n’avions pas vu effectivement sa tignasse rousse et son costard mal fagoté depuis 2000 et l’album Toutes les fleurs s’appellent Tiaré. Autant dire une éternité ! C’est donc avec un plaisir non dissimulé que nous retrouvons ce personnage singulier, loin des aventuriers et autres héros formidables, créé en 1980 par le Grand Prix d’Angoulême Jean-Claude Denis. 36 ans de carrière donc, un double de papier pour son auteur qui lui permet régulièrement (huit albums à ce jour) de poser un regard parfois désabusé, parfois amusé, toujours avec légèreté, sur notre monde…
Eric Guillaud
Plutôt plus tard, Luc Leroi, de Jean-C. Denis. Editions Futuropolis. 16,50 €