Il faut bien le reconnaître, face à la quantité pléthorique de nouveautés chaque année, peu de titres finalement nous interpellent instantanément et nous marquent durablement. La Parenthèse, album paru aux éditions Delcourt dans la collection Encrages, fait pourtant bien partie de ce club très fermé dans lequel on compte des gens comme Davodeau, Baru, Guibert, Delisle et quelques autres qui savent parler de la vie, la vraie, avec une simplicité et une évidence qui ne s’apprennent pas à l’école. La Parenthèse, donc, est un miracle, un cadeau de Noël en plein mois de mai, un petit bijou d’écriture et de mise en images. Même si le thème abordé dans ses 224 pages n’a rien de drôle. Pas même de léger ! Elodie Durand, son auteur, y aborde en effet une partie de sa vie, une parenthèse particulièrement douloureuse qui a bien failli lui coûter la vie. A l’époque, Elodie a une vingtaine d’années et la vie devant elle. Enfin, théoriquement ! Depuis peu, Elodie perd la mémoire et multiplie les crises d’épilepsie. De scanner en IRM, les médecins finissent par déceler une petite tumeur cérébrale. C’est cette vie là qu’elle raconte, l’arrivée de la maladie, l’effacement des souvenirs, le monde médical et hospitalier, l’entourage de ses proches, de sa mère et de son père, la vie qui bascule, qui continue… et qui finalement reprend. « Ce projet est né… », précise Elodie, « d’une nécessité, d’un besoin, d’un désir très fort de rassembler des souvenirs confus, d’éclaircir un passé douloureux mais aussi incroyable. Puis, plus tard, c’est l’envie de partager, de témoigner, et de bâtir ce récit qui m’a animée. Je voulais que ces souvenirs deviennent autre chose. J’ai attendu d’avoir suffisamment de recul par rapport au sujet pour me lancer réellement dans son élaboration, ce qui explique le temps qui s’est écoulé entre mes toutes premières recherches et le moment de sa réalisation ». Grâce à son écriture particulièrement douce, à des pages en noir et blanc au graphisme alternant traits légers et torturés, Elodie parvient à happer littéralement le lecteur, à lui faire partager, lui expliquer sa maladie sans le mettre en situation de voyeur, avec « peut-être une volonté informative, mais pas du tout didactique, ludique parfois parce que certains passages sont durs, éprouvants. Je ne souhaitais pas donner un ton larmoyant à ce récit. Il y a beaucoup d’humour dans cette histoire. ! Je raconte les scènes médicales le plus simplement possible, sans commentaire ». Un témoignage poignant et un bel album ! E.G.
25 Mai