28 Juil

Pages d’été. Hollywood menteur, une incursion dans la machine à rêves signée Luz

C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Si vous n’avez jamais vu The Misfits, Les Désaxés en français, je ne saurais vous conseiller de le télécharger fissa et de le visionner avant d’ouvrir ce livre de Luz publié chez Futuropolis en avril dernier.

Hollywood menteur nous plonge en effet dans les coulisses de cette pépite du 7e art au casting d’enfer. John Huston à la réalisation, Arthur Miller au scénario, Clark Gable, Marilyn Monroe, Montgomery Clift et Eli Wallach dans les rôles principaux.

En tout cas, si vous ne l’avez pas vu, Luz, lui, l’a vu une bonne vingtaine de fois au point d’en développer une obsession. Il faut dire que The Misfits a tout pour être mythique, le casting bien sûr mais aussi le tournage sacrément « erratique » comme le souligne l’auteur et enfin l’histoire en elle-même qui devait briser l’image qu’on avait jusque là de Marilyn. Luz nous montre la face cachée du film et, au-delà, la face cachée de la fabrique à rêves hollywoodienne. Avec ses illusions et ses mensonges. Et de rêve justement, il en est question ici. Après avoir été « la grande machine de propagande du rêve américain », comme le souligne Virgine Despentes, le cinéma, à travers The Misfits, pourrait dorénavant en refléter sa déliquescence.

Étrangement, ou pas d’ailleurs, le film fut un échec commercial lorsqu’il sortit en 1961. Il faudra attendre quelques années, pour ne pas dire des décennies, afin qu’il soit enfin considéré à sa juste valeur, un film crépusculaire, un film marquant en tout cas la fin d’une époque. Clark Gable meurt avant même la sortie du film, Marilyn disparaît quelques mois plus tard. L’Amérique perdait coup sur coup deux références, celle du mâle dominant, le cowboy, et celle de la femme fatale, objet de tous les fantasmes.

Dans cet envers du décor, écrit à partir de nombreux écrits et témoignages sur le tournage, Luz tente lui-aussi de donner une autre image de Marilyn. « Marilyn, c’est est un symbole, un fantasme… mais j’avais envie d’en faire un symbole de courage et de ténacité », déclare-t-il à nos confrères du figaro.fr.

Et de montrer dès la couverture Marilyn avec une expression que vous ne lui verrez sur aucune photo. Marilyn en colère. Une des scènes du film. En colère après les hommes, après la société, après le monde, après elle-même peut-être aussi. En colère, explique l’auteur, comme peuvent l’être finalement toutes les femmes hier et aujourd’hui… Très beau bouquin !

Eric Guillaud

Hollywood menteur, de Luz. Futuropolis. 19€ (sorti en avril)

@ Futuropolis / Luz

Pages d’été. Un album collectif pour fêter les 50 ans des éditions Glénat

C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Glénat a 50 ans ! Et ce n’est pas rien 50 ans. Ça représente quelques milliers de projets signés, des millions de planches, une belle brochette de héros de papier, des centaines d’auteurs et autrices qui font désormais partie de nos références culturelles, c’est encore, aujourd’hui, plus de 800 nouveautés par an, un catalogue de plus de 10000 titres… et toujours le même passion du boss, Jacques Glénat, pour cet art devenu majeur grâce notamment à l’action de gens comme lui. À travers les tempêtes et les pétoles, Jacques Glénat a su mener sa barque et fêter aujourd’hui ce bel anniversaire.

Et comment fêter l’anniversaire d’une maison d’édition comme celle-ci si ce n’est en bande dessinée ? Tout juste sorti avant la période des grandes transhumances estivales, cet album collectif dont on remarque immédiatement la magnifique couverture signée Nicolas Pétrimaux a été voulu comme un véritable hommage à la maison d’édition mais aussi à ses auteurs et autrices, à ses héros et héroïnes.

De Boucq à Tebo, de Fabcaro à Manara, de Loisel à Chabouté, une quarantaine d’auteurs y ont participé en imaginant une histoire sur deux pages à partir d’un postulat simple : Un auteur frappe à la porte des éditions Glénat… 

Eric Guillaud

Glénat, 50 ans d’édition. Collectif. 20€ (sorti en juin 2019)

26 Juil

Pages d’été. Grasskings : une leçon de polar signée Matt Kindt, Tyler Jenkis et Hilary Jenkis

C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Si vous aimez les récits noirs qui plongent le lecteur dans le trou du cul du monde avec une brochette de dingues et de paumés en guise de héros, alors vous allez être servis. Ce triptyque signé Tyler Jenkins et Matt Kindt est un polar sans concession où l’on flingue sans sommation…

« En raison de l’augmentation du prix des munitions, il n’y aura pas de tir de sommation ». Ça a le mérite d’être clair. Mieux vaut ne rien avoir à faire à Grass Kingdom, il y a peu de chance que vous y soyez le bienvenu. Et c’est comme ça depuis la nuit des temps. Certains s’en souviennent encore, ou du moins s’en souviendraient s’ils n’étaient pas morts et plantés au fond du lac. « Ce n’est pas le genre d’endroit qu’on prend à la légère. Il y a un prix à payer pour avoir le droit de vivre de ce côté du rivage ».

Mais alors, me direz-vous, qui a le droit de vivre dans ce bled pourri au milieu de nulle part ? Des privilégiés ? Pas vraiment. Ici vit une petite communauté, un casting de dingues et de paumés, quelques squatters, un gus fada des avions de la première guerre mondiale, un ancien sniper de l’US Navy, peut-être même un tueur en série… et trois frangins dont le plus jeune, Robert, tente d’oublier la disparition de sa fille dans l’alcool, et le plus vieux, Archie, se prend pour LE flic du coin.

Et tout ce petit monde vit en – très relative – quiétude jusqu’au jour où débarque une jeune-femme qui s’avère être la compagne du shérif de Cargill, un patelin voisin. Et là, tout finit par dégénérer…

Des dialogues percutants, un dessin taillé à la serpe, une atmosphère lourde, des personnages qui ne manquent pas de caractère et une réflexion entre les lignes et les traits sur la peur de perdre un enfant… Tyler Jenkins et Matt Kindt nous offrent l’un des polars les plus forts de l’année 2019. Et comme promis, les trois volets ont été publiés en moins de six mois.

Eric Guillaud

Grasskings, de Matt Kindt, Tyler Jenkis et Hilary Jenkis. Futuropolis. 22€ le premier volet, 20 les deuxième et troisième

@ Futuropolis / Kindt & Jenkins

25 Juil

Pages d’été. Les Fleurs de grand frère, une belle histoire signée Gaëlle Geniller

C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

« Je voulais écrire et dessiner une histoire bienveillante, douce et un peu nostalgique ». Mission remplie ! Gaëlle Geniller, dont c’est ici le premier album de bande dessinée, signe une très belle histoire sur l’enfance, aussi délicate que poétique, celle d’un petit garçon qui se réveille un beau jour de printemps avec des fleurs sur la tête. De quoi l’inquiéter, pas longtemps, avant de prendre la chose comme une belle expérience de la vie et de la partager chaque jour avec son petit frère et ses parents.

Le temps d’un été, le jeune garçon va donc vivre au quotidien avec ses fleurs sur la tête au point de finir par les aimer et les écouter. Car oui, les fleurs lui parlent, lui racontent des tas ce choses, des histoires drôles, parfois tristes, douces, nostalgiques, joyeuses ou moroses.

Mais au moment de retourner en classe, le jeune garçon se demande comment cette différence va être accueillie par ses camarades…

Pour un premier album, Gaëlle Geniller nous offre une histoire véritablement subtile et une mise en images sublime conjuguant un trait délicat et des couleurs douces. Une actrice à suivre !

Eric Guillaud

Les Fleurs de grand frère, de Gaëlle Geniller. Delcourt. 14,95€ (sorti en mars 2019)

@ Delcourt / Gaëlle Geniller

Pages d’été. L’Abolition, le combat de Robert Badinter raconté par Marie Gloris Bardiaux-Vaïente et Malo Kerfriden

C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Bon ok, vu comme ça, cette histoire-là n’a rien du bon polar qu’on aime consommer avidement sous le soleil exactement. Mais sa lecture est aujourd’hui aussi essentielle que le combat qui y est raconté. Un combat qui s’est soldé il y a presque 40 ans par l’abolition de la peine de mort. Un combat qui s’est fait dans la douleur et grâce au courage d’un homme, Robert Badinter, presque seul contre tous, tout au moins seul face à une opinion publique majoritairement opposée.

Marie Gloris Bardiaux-Vaïente, notamment scénariste et docteur en histoire militante pour l’abolition de la peine de mort, et Malo Kerfriden, dessinateur, nous racontent cette histoire en remontant au petit matin du 28 novembre 1972, jour de l’exécution de Claude Buffet et Roger bontems, accusés respectivement de meurtre et de complicité de meurtre dans une affaire de prise d’otages sanglante à la centrale de Clairvaux.

Robert Badinter, alors avocat de Bontems, ne put rien pour son client. Même Georges Pompidou, alors président de la République française, ne lui accorda la grâce présidentielle. Mais de ce procès et de cette exécution, naîtra en l’homme une profonde détermination à combattre la peine de mort. Ce qui l’amènera quelques années plus tard à défendre « l’indéfendable » Patrick Henry et lui éviter l’échafaud.

Le procès de Patrick Henry est également relaté dans les pages de cet album, tout comme la nomination de Badinter au titre de garde des Sceaux et bien évidemment la promulgation de la loi abrogeant la peine de mort en France le 9 octobre 1981. Enfin, par le jeu de flashbacks, on en apprend un peu plus sur Badinter et notamment sur son père disparu dans les camps de la mort.

Un récit passionnant au graphisme réaliste très sobre et efficace.

Eric Guillaud

L’Abolition, de Marie Gloris Bardiaux-Vaïente et Malo Kerfriden. Glénat. 17,50€ (sorti en février 2019)

24 Juil

Pages d’été. L’art du sushi, une gourmandise à vous faire saliver les papilles jusqu’au bout de l’été signée Franckie Alarcon

C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Pourquoi ne pas profiter de l’été pour se lancer dans la cuisine et s’essayer au sushi ? Plus qu’un art, le sushi représente l’âme du Japon pour nombre d’Européens. Nous en avons tous dégustés un jour ou l’autre et généralement apprécié. Preuve en est la multiplication des boutiques à sushis dans toutes les villes de France, même les grandes surfaces s’y sont aujourd’hui mises.

Mais que connaissons-nous réellement de ce plat ? Pour la grande majorité d’entre nous, pas grand chose. Alors voilà justement de quoi parfaire notre éducation en la matière avec cette bande dessinée, oui oui il s’agit bien d’une bande dessinée, traitant de l’art du sushi.

Aux baguettes, Franckie Alarcon, un auteur de bande dessinée passionné par la cuisine. Il est d’ailleurs illustrateur pour l’édition culinaire et à signé il y a quelques années aux éditions Delcourt Les secrets du chocolat, une incursion dans l’atelier du pâtissier-chocolatier Jacques Génin.

Pour ce nouvel ouvrage, Franckie Alarcon a mené son enquête à travers le Japon pendant trois semaines, rencontré tous les acteurs oeuvrant à la fabrication du sushi, depuis les pêcheurs jusqu’aux chefs les plus étoilés, en passant par les commerçants des allées de Tsukiji, le plus grand marché au poisson du monde.

Au fil des pages, on parle bien évidemment de la fabrication des sushis mais aussi du saké, de la préparation du riz, de l’art de la découpe du thon, de l’importance des ustensiles et notamment des sabres, avant de terminer sur les sushis made in France, bref de quoi bien saliver et passer à l’action. Ça tombe bien, le livre de Franckie Alarcon se referme sur une série de recettes, temaris, poulpe au thé vert d’okawa ou encore chirashis… on vous laisse choisir !

Eric Guillaud

L’art du sushi, de Franckie Alarcon. Delcourt. 18,95€ (sorti en avril 2019)

@ Delcourt / Alarcon

Pages d’été. Le Livre de Jessie ou le périple d’une famille de patriotes et de résistants coréens pendant la guerre sino-japonaise par Park Kun-Woong

C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Sorti en janvier dernier, Le Livre de Jessie est un beau pavé de plus de 350 pages, un format, je vous l’accorde, pas forcément idéal pour les longs déplacements estivaux, mais un récit que vous aurez tout le loisir de savourer en ces moments de farniente. Non pas que le livre de Park Kun-Woong soit dense et complexe au point d’exiger beaucoup d’attention et de temps, non, au contraire, il se lit finalement assez rapidement et ce même si vous ne connaissez absolument pas le contexte historique du récit.

Et c’est bien là tout le talent de l’auteur, déjà connu en France pour sa magnifique trilogie Fleur parue elle-aussi aux éditions Casterman ou plus récemment le diptyque Je suis communiste publié par Cambourakis. Dans ces récits comme dans celui qui nous intéresse aujourd’hui, Park Kun-Woong évoque son pays, son histoire tourmentée et ses traumatismes à travers des parcours d’hommes et de femmes, une approche humaniste à la fois intimiste et universelle.

Le Livre de Jessie nous embarque pour l’Asie des années 30. Jessie est le nom d’une enfant née de parents coréens patriotes et résistants, réfugiés en Chine après l’annexion de leur pays par le Japon. L’arrivée de Jessie est source de bonheur et d’espoir pour le jeune couple mais lorsque la guerre sino-japonaise éclate, toute la petite famille doit à nouveau fuir devant l’avancée des armées nipponnes au milieu des bombardements et des cadavres.

Des années d’errance, de privations diverses et d’angoisses… c’est ce périple, cette véritable épreuve, qui durera jusqu’en 1945 que raconte le roman graphique de Park Kun-Woong. À la fois chronique familiale et journal de guerre, Le Livre de Jessie nous parle de l’exil, de la solidarité, de la transmission, de l’engagement politique, de l’amour, de la mort, de l’espoir de jours meilleurs, de la vie au milieu du chaos…

Côté graphisme, on pense bien évidemment à Marjane Satrapi et son Persepolis avec des planches en noir et blanc au trait épais et de caractère, un dessin simple et efficace. Le Livre de Jessie est adapté du journal personnel de Yang Wu-Jo et Choi Seon-Hwa et publié en France à l’occasion du centenaire du soulèvement des indépendantistes coréens.

Eric Guillaud

Le Livre de Jessie, de Park Kun-Woong. Casterman. 24€ (sorti en janvier 2019)

@ Casterman / Park Kun-Woong

05 Juil

1989, Le grand Tour : un hommage au Tour de France signé Max Cabanes

Dans quelques heures maintenant, le Tour de France 2019 s’élancera de Bruxelles. En attendant, Max Cabanes nous invite à revivre celui de 1989, un rétropédalage de 30 petites années pour un plongeon au coeur d’un Tour complètement fou qui se disputa jusqu’à la dernière seconde, jusqu’au dernier mètre…

Les amoureux du Tour, même ceux qui n’étaient pas nés à l’époque savent que 1989 fût une édition singulière dans son histoire. Le « Tour le plus fou » comme le qualifie la presse sportive,  avec un casting de dingue, Greg LeMond, Stephen Roche, le vainqueur sortant de l’épreuve Pedro Delgado et le favori Laurent Fignon qui céda la plus haute place du podium à Greg LeMond sur les derniers mètres de la course avec 8 secondes d’écart.

Ce Tour-là, ce Tour de rêve, Max Cabanes eut l’opportunité de la suivre de l’intérieur, au plus près des coureurs, au plus près de la légende.

« En matière de rêve… », explique-t-il, « j’ai appris à être patient. J’ai fini par admettre qu’il existe bien une harmonie du hasard plus ou moins favorable aux accomplissements. J’ai fini par admettre qu’un simple coup de fil peut vous installer à l’arrière d’une limousine du Tour de France, avant même de réaliser que l’enchanteur s’appelle Pierre Christin, éditeur ex machina de mon rêve d’enfant? C’était en 1989… »

Pendant une vingtaine de jours, l’auteur se fait auteur se fait reporter pour partagera avec nous à la manière d’un carnet de voyage le quotidien de la Grande boucle, la caravane, la vie sur sur le village du Tour, les fans sur le bord de la route et bien sûr la course et les coureurs, avec leurs moments de joie et de peine.

Certains d’entre vous ont peut-être déjà vu certains dessins de ce livre, une partie du matériel a en effet connu une première édition en 1989 aux éditions Dargaud sous le titre La Boucle Magique. Elle est ici enrichie de nombreux dessins, le texte a été lui revu et augmenté. Un très bel ouvrage, un regard singulier sur l’une des plus grandes épreuves sportives.

Eric Guillaud

1989, Le grand Tour, de Max Cabanes. Dupuis. 26€

@ Dupuis / Cabanes

2112 : la société trop parfaite du XXIIème siècle et ses secrets par le dessinateur de comics culte John Byrne

Si Jack Kirby fut la star de Marvel des années 60 et John Buscema celle des années 70, la décennie suivante fut tout acquise à John Byrne. Ce dessinateur né en Angleterre mais qui a d’abord émigré au Canada à l’âge de huit ans avant d’être naturalisé américain a tout fait chez le géant américain, en commençant par Iron Fist avant d’enchaîner avec les X-Men, Spiderman ou Les Quatre Fantastiques. Une fois passé chez le concurrent DC, il s’est alors attaqué à Miss Hulk, Wonder Woman ou encore Superman. Il est surtout responsable de certains épisodes les plus mythiques de ces différentes sagas. Rien que ‘La Mort de Phoenix’ publié en 1984, point d’orgue de l’histoire des X-Men où Jean Grey se sacrifie pour éviter de détruire l’univers, est entré au Panthéon des meilleurs comics jamais sortis (si).

En France, les lecteurs assidus de Strange et Spidey connaissent aussi bien ce nom mais l’ont ensuite un peu perdu de vue, la seconde partie de carrière étant moins connue de ce côté-ci de l’Atlantique. Pourtant, là où d’autres vétérans auraient accepté un poste en or de chef artistique où directeur de collection histoire de se couler douce après des années de travail acharné, lui a préféré prendre dans les années 90 la tangente en faisant plusieurs aller-retour entre DC et Marvel tout en s’autorisant quelques apartés chez des éditeurs plus modestes, dont ce 2112 paru initialement en 1991 et jusqu’à lors jamais traduit en français.

Byrne a toujours vu Kirby comme son modèle et consciemment ou pas, il a essayé avec 2112 en gros de suivre à peu près la même voie que le maître avec Le Quatrième Monde. Comme lui, si en tant que dessinateur son style reste ici immédiatement reconnaissable avec son trait très droit et ses personnages au physique très rectiligne, en tant que scénariste ce fut vraiment sa première tentative de prendre un peu de distance avec le monde parfois Bisounours de Marvel/DC et d’ébaucher une critique sociale. Et quoi de mieux que cette description acide d’une société ultra-moderne a priori parfaite mais où les ratés et erreurs du passé ont été mises sous le tapis comme de la poussière. Comme le lecteur, le personnage principal, un jeune cadet des forces de l’ordre issu de la bonne société et plein de bons sentiments, va découvrir petit-à-petit l’envers du décor et le mensonge sur lequel tout ce monde soi-disant utopique s’est bâti.

Histoire indépendante servant aussi de prologue à la série des Next Men (qui devrait elle aussi avoir enfin droit bientôt à sa première traduction française) 2112 met certes un peu de temps à démarrer et souffre parfois d’un scénario un chouia linéaire. Mais c’est aussi le lien, manquant jusqu’à lors, entre la première et la seconde partie de la carrière d’un grand auteur de comics toujours actif de nos jours et qui a su se remettre en question au bon moment. Le tout sortant bien sûr on a presque envie de dire sur Delirium, petit mais (très) costaud éditeur indé français qui, décidément, a le chic pour combler nos lacunes…

PS : pour l’anecdote, Byrne a toujours su glisser dans ses œuvres des références à ce Canada si cher à ses yeux, dixit la Division Alpha chez les X-Men. Le fan de musique et notamment de musique des années 70 aura donc reconnu la date symbolique, 2112. Soit aussi le nom du quatrième album du groupe de rock progressif canadien Rush sorti en 1976…

Olivier Badin

2112 par John Byrne, 15 euros, Delirium

@ Delirium / Byrne

02 Juil

Frnck, Spirou, La Rose écarlate, L’Île au trésor, Mimosa, Raowl… une sélection de BD Jeunesse pour les vacances

De l’action de l’humour, de la poésie, de la parodie, du fantastique, douze albums à potasser pendant les vacances. Interro à la rentrée… 

On commence avec Spirou, le personnage emblématique des éditions Dupuis se fait défenseur des droits de l’homme avec cet album récemment publié et reprenant l’essentiel du matériel proposé dans le journal Spirou du 10 octobre 2018, un numéro spécial qui célébrait alors les 70 ans de la Déclaration des droits de l’homme. Au sommaire, la déclaration (et tout ce qui la touche) illustrée par les auteurs et avec les héros du journal.Tous les bénéfices et les droits d’auteurs seront reversés à une organisation liée à l’ONU. Spirou défenseur des droits de l’homme, collectif. Dupuis. 12,50€

Cinq albums en un peu plus de deux ans, un premier cycle bouclé et un deuxième qui débute, ça gaze pour le tandem Cossu / Bocquet et la série Frnck. Une nouvelle fois, direction la préhistoire, non pas pour un cours d’histoire mais pour une aventure un peu dingo avec un gamin de 13 ans comme héros qui s’est retrouvé propulsé là en cherchant ses parents. Frnck, je sais c’est difficile à prononcer mais vous pouvez l’appeler Franck, est un ado d’aujourd’hui, moderne, jean, baskets rouges au pied, du genre à avoir tout le temps le nez sur les écrans. Sauf que là, dans la préhistoire, il n’y a pas de réseau, pas d’internet, pas de Facebook… mais des bestioles monstrueuses en pagaille, des hommes poilus qui mangent les voyelles et de jolies filles. Poilant! Frnck tome 5, de Cossu et Bocquet, Dupuis, 10,95€

Sorti en avril, ce quinzième album de La Rose écarlate arrive à point nommé pour célébrer le quinzième anniversaire de la série. Avec plus d’un million deux cents mille exemplaires vendus en langue française, les aventures de Maud et de son compagnon Guilhem sont un des grands succès de la bande dessinée franco-belge. Leur recette ? Du cape et d’épée avec une bonne dose de romantisme. Le tome 16 est annoncé pour octobre et le tome 7 du spin-off La Rose écarlate – Missions devrait sortir en août. La Rose écarlate tome 15, de Patricia Lyfoung. Delcourt. 10,95€

Que ce soit pour le cinéma, la télévision ou la bande dessinée, on ne compte plus ses adaptations. L’île au trésor est une pièce maîtresse du patrimoine littéraire mondial, un grand classique du roman d’aventure que tout le monde connaît, que tout le monde ou presque a lu. Aurélien d’Almeida et Benjamin Bachelier en proposent ici leur propre vision dans un style graphique nerveux au trait épais. En bonus, l’album comporte dans les dernières pages un petit dossier sur Robert Louis Stevenson et son roman. L’Île au trésor, de Bachelier et D’Almeida. Casterman. 14,95€
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Après Le blog de Charlotte et Le blog de Nina, voici Le blog de Léonie, troisième opus de cette série signée Beka pour le scénario et Grégoire Mabire pour le dessin. Avec toujours le même principe, une subtile association d’aventure classique, de journal intime et de thématiques sociétales comme cette fois les migrants et notamment le sort des mineurs isolés étrangers. Pour occuper leurs vacances, Nina, Charlotte et Léonie découvrent le géocaching, une sorte de chasse au trésor avec GPS. Léonie crée un blog pour y retracer ces trouvailles. mais au fil de ses pérégrinations, la jeune fille rencontre Yedo, un jeune migrant. Elle décide de l’aider…  Le blog de Léonie, de Beka et Mabire. Bamboo Edition. 14,90€
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Que de chemin parcouru depuis sa première apparition dans une aventure de Spirou et Fantasio. C’était en1952 sous le pinceau du talentueux Franquin. Depuis, l’animal a imposé son pelage jaune et noir, sa queue préhensile démesurée et ses Houba! Houba! dans le neuvième art et au-delà. Bienvenido a Bingo est la 32e aventure en album à paraître chez Marsu Productions. Au programme, un très vieux cactus, une botaniste venu le sauver d’un projet immobilier, une ville de machos, une prison pour femmes qui distribue de l’électroménager pour distraire ses pensionnaires et une petite Marsupilamie bien loin de chez elle… Marsupilami tome 32, de Franquin, Batem et Colman. Marsu Productions. 10,95€

« Chaire journale, je m’appelle Mimosa, j’ai deux frère et une seur, et un chat moche et aveugle qui s’appelle Janloui. Plus tard, je veux faire jardinière, ou arqéologue… ou incroyable hulk ». Voilà – avec les fautes d’orthographe – les premiers mots de Mimosa, une héroïne complètement mimi née de l’imagination de Catmalou et Edith. De l’imagination mais pas que. Pendant des années, Catmalou a noté sur des carnets les mots, les phrases, de sa fille. En une succession de strips, Mimosa met le quotidien de la gamine en cases avec un sens de l’observation et de la répartie hors du commun. C’est drôle, fin, intelligent et graphiquement sublime. Un très bel album à l’italienne pour tous. Mimosa, de Catmalou et Edith. Soleil. 22,95€

Les Cochons dingues de Laurent Dufreney et Miss Prickly sont de retour pour une deuxième aventure. Et cette fois, nos héros ont décidé de partir en vacances. Mais comment faire pour s’échapper sans être vu par les maîtres de la maison ? Et surtout, comment faire avec Dodo qui, comme son nom peut le laisser supposer, dort en permanence ? Le réveiller pourrait le mettre de mauvaise humeur. La solution : le traîner dans sa couverture. Des vacances qui ne s’annoncent pas de tout repos… Les Cochons dingues, de Dufreney et Miss Prickly, Delcourt, 10,95€

Nos amis les bêtes, il en est également question avec ce premier volet de la série Comme des bêtes emmené par le tandem Goum – Lapuss’, adaptation en BD du film produit par Universal Pictures et illumination Entertainment. Des gags en une page mettant en scène nos animaux domestiques préférés en notre absence. Mais oui, que font-ils quand on n’est pas là ? Une question essentielle, des réponses qui ne le sont pas moins. Comme des bêtes, de Goum et Lapuss’. Dupuis. 9,90€

Comment se prémunir d’une attaque de moules ? En brandissant des frites bien croustillantes. Bon, ça ne marche pas à tous les coups mais là, dans ce sixième volet de Naguère les étoiles réalisé par Bourhis et Spiessert, ça le fait, de quoi permettre à nos deux héros de survivre et d’atterrir dans la bouche d’un blobfish où ils vont tenter de sauver le sénateur. Vous me suivez ? Non ? Le mieux est de vous jeter sur cette parodie de Star Wars où les héros ont pour noms Arlekin, Jean-Michel Jar-Jar, Seigneur Slip, Pricesse Leïca, Yann Kersolo, Jean-Luc, Ravi Ravi dit R2… Naguère les étoiles tome 6, de Bourhis et Spiessert. Delcourt. 10,95€

Pendant que certains parodient Star Wars, d’autres dégomment les contes de fées. Mais quand on s’appelle Tebo, on a le droit. On en a même le devoir. Et il ne s’en prive pas avec ce premier volet de sa toute nouvelle série Raowl publiée chez Dupuis. Raowl est un prince pas vraiment charmant, super violent, vraiment moche. Même la première princesse passant par là préfère embrasser une éponge avec du gras. C’est dire… Mais pour l’aventure, il n’y a pas mieux, Raowl nous embarque dans une histoire complètement déjantée imaginée par le créateur de Samson et Néon et de Captain Biceps dont le septième tome est annoncé pour septembre. Raowl tome 1, de Tebo. Dupuis. 12,50€

Un one-shot pour finir, Légendes zurbaines de Nick Bruno, Paul Downs et Michael Yates, trois Américains travaillant dans l’animation, notamment pour Pixar et Blue Sky Studios. Légendes zurbaines est une aventure inédite mettant en scène un groupe de jeunes justiciers en lutte contre de terribles monstres qui ont décidé d’attaquer Brooklyn.  Légendes zurbaines de Nick Bruno, Paul Downs et Michael Yates. Les Humanoïdes Associés. 14,99

Eric Guillaud