28 Jan

Le Couteau dans l’arbre : La 26e aventure de Jérôme K. Jérôme Bloche

9782800170985Il devait partir pour un week-end en amoureux à Venise avec sa douce et tendre Babette mais il n’ira pas. Ou plus exactement, ils n’iront pas. Alors forcément Babette est un peu furax mais c’est pour la bonne cause. La fille du patron de l’oncle de Jérôme a disparu et il faut bien quelqu’un pour la retrouver…

« Babette, j’ai une bonne et une mauvaise nouvelle. La bonne, c’est qu’on peut se faire rembourser nos réservations en ligne pour Venise ». La suite, on la devine. Il n’est pas fier notre Jérôme mais quand même il ne peut décemment pas jouer au touriste moyen alors qu’une gamine de 11 ans a disparu !

Direction Bergues, charmante bourgade du département du Nord où son oncle, sa tante et sa grand-mère l’accueillent chaleureusement, enfin les accueillent puisque Babette a suivi le mouvement. Mais l’heure n’est pas aux palabres. Il faut retrouver la gamine et l’affaire ne s’annonce pas aussi simple qu’il y paraissait au départ. La fugue pressentie un moment n’en serait pas une…

Bon, vous pouvez me dire ce que vous voulez sur cette série créée par Dodier il y a maintenant 36 ans, mon idée est faite depuis longtemps. Jérôme K. Jérôme Bloche est un personnage unique dans le monde du neuvième art, un être de papier délicieusement attachant, humain, sensible, peut-être un peu lunaire, un détective privé qui n’aime pas les intrigues mais adore les résoudre. Pas de courses poursuites tonitruantes, pas de gros calibres, pas de grosses Chevrolets, pas d’héroïnes aux super-pouvoirs ou à la poitrine surdimensionnée, non, les aventures de notre Jérôme national, son créateur est belge mais bon, sont toujours proches de nous, jamais loins de nos préoccupations, en tout cas à portée de solex, son moyen de transport préféré, même si, pour les besoins du scénario, il a dû cette fois troquer son fameux Solex pour une authentique Motobecane équipée biplace. Le quotidien, toujours le quotidien…

Coté narration et graphisme, c’est du Dodier, du grand Dodier, pas de mauvaises surprises, l’ensemble est cohérent, maîtrisé jusqu’aux couleurs toujours douces malgré le propos parfois un peu plus grave.
Eric Guillaud

Le Couteau dans l’arbre, Jérôme K. Jérôme Bloche (tome 26), de Dodier. Éditions Dupuis. 12€

© Dupuis / Dodier

© Dupuis / Dodier

24 Jan

Le journal de Marianne : Le Nantais Baptiste Chouët au chevet d’une République déprimée

Journal-de-MarianneAttentats, état d’urgence, Brexit, crise des migrants, Trump, montée du FN… oui, il y a de quoi voir la vie en noir depuis quelques temps. Pour Marianne, c’est bien simple, c’est la déprime totale. Sous la plume et le pinceau de Baptiste Chouët, la figure symbolique de la République française accepte de nous confier ses humeurs, ses joies, ses peines, dans un journal intime qui pourrait paradoxalement nous remonter le moral ou en tout cas nous faire remonter les manches…

« Dieu, Mais que Marianne était jolie, Quand elle marchait dans les rues de Paris, En chantant à pleine voix, « Ça ira, ça ira, toute la vie ». Ces quelques vers vous parlent ? Ils sont de Michel Delpech, une chanson en hommage à notre belle Marianne. C’était en 1972 ! Le ton est déjà à la mélancolie, à la nostalgie des « printemps qui brillaient sous son soleil », allusion bien évidemment à mai 1968.

Depuis, Marianne en a vu de toutes les couleurs, de quoi parfois en perdre la tête, de quoi surtout se payer une bonne déprime. Le récit de Baptiste Chouët commence le 21 septembre 2015, le jour de son anniversaire. 223 ans et pas un pékin moyen pour le lui souhaiter. Et comme si tout ça ne suffisait pas, il pleut !

Naître le premier jour de l’automne, ça vous prédestine à la dépression

Coiffée de son bonnet phrygien et très très légèrement vêtue, notre belle Marianne a décidé de nous raconter sa vie ou plus exactement les trois dernières années de sa vie, c’est peu eu égard son grand âge mais il faut bien reconnaître qu’il y en a des choses à dire et des larmes à sécher.

Fini le bon temps où tout le monde se battait pour elle. Marianne fait tellement partie du paysage qu’on l’aurait presque oubliée. Mais elle s’est subitement rappelée à nous en novembre 2015 avec les attentats meurtriers de Paris. Marianne était-elle à nouveau en danger ? Le peuple allait-il devoir battre une nouvelle fois le pavé comme en janvier après l’attentat contre Charlie Hebdo ?

Tu dirais que mon problème c’est que je suis : A/ auto-centrée, B/ Peu sûre de moi, C/ trop narcissique ?

Marianne s’interroge, doute, ne dort plus, pleure, s’énerve… L’actualité se bouscule, les attentats se succèdent, l’Angleterre annonce son départ de l’Europe, les exilés meurent par milliers dans la Méditerranée, le Front National arrive au deuxième tour de l’élection présidentielle…, son journal intime est un chapelet de mauvaises nouvelles qui pourraient nous faire sombrer dans la morosité nous aussi pauvres lecteurs.

Mais c’est finalement le contraire qui se passe. Bien sûr, on peut la critiquer, avoir envie parfois d’en changer ou carrément d’en finir avec elle mais le livre de Baptiste Chouët, son premier, et les confidences de son héroïne Marianne ont pour effet de nous réveiller. Il faut être fier de Marianne, la protéger, lui chanter des chansons, lui fêter son anniversaire tous les jours, lui offrir des fleurs, lui dire qu’on l’aime… parce que concrètement, est-ce qu’on a fait mieux que la République quelque part ? Est-ce qu’on a mieux que Marianne ? Non ? Et puis merde, un buste de Marianne, ça a quand même plus de gueule qu’une statue de Kim Jong-un…

Non mais allô quoi! T’es une République et t’es pas corrompue ? Aaallô!

En conséquence je déclare Le Journal de Marianne livre d’utilité publique. « Dieu, Mais que Marianne était jolie, Quand elle embrasait le cœur de Paris, En criant dessus les toits : Ça ira ! Ça ira ! Toute la vie. »

Eric Guillaud

Le journal de Marianne, de Baptiste Chouët. Éditions Marabout. 17,95€

23 Jan

Cinq Branches de coton noir : entre deuxième guerre mondiale et lutte contre la ségrégation raciale, le parcours de trois soldats noirs raconté de main de maître par Yves Sente et Steve Cuzor

Capture d’écran 2018-01-21 à 16.17.05Et si le tout premier drapeau des États-Unis avait comporté une étoile noire en hommage au peuple afro-américain pour sa participation à la construction de l’Union. C’est à partir de ce postulat, de ce « Et si… » en quelque sorte, que les auteurs Steve Cuzor et Yves Sente ont déroulé l’histoire de Cinq branches de coton noir, un roman graphique extraordinaire qui vient à point nommé marquer les 30 ans de la collection Aire Libre des éditions Dupuis…

Trente ans. Et quelques-unes des plus belles réussites de la bande dessinée franco-belge à son actif ! La collection Aire Libre, c’est Voyage en Italie de Cosey, SOS Bonheur de Van Hamme et Griffo, Le Bar du vieux français de Stassen et Lapière, Le Photographe de Guibert, Lefèvre et Lemercier ou encore Portugal de Pedrosa, c’est beaucoup de one shots et quelques séries courtes qui partagent la même exigence et sont pour la plupart devenus des références.

Avec Cinq Branches de coton noir, les auteurs Steve Cuzor et Yves Sente signent le dernier album en date de la collection mais surtout un récit époustouflant, une fiction qui prend racine dans l’histoire avec un grand H, la guerre d’indépendance des États-Unis d’un côté, la deuxième guerre mondiale de l’autre. Avec des allers-retours entre les deux époques et une même question : pourquoi l’homme noir ne vaudrait pas l’homme blanc ? Une question qui dénonce bien évidemment la ségrégation raciale qui fût active aux États-Unis jusqu’au milieu des années 60 et connait encore aujourd’hui quelques soubresauts nauséabonds. Ça, c’est l’histoire avec un grand H.

© Dupuis / Cuzor et Sente

© Dupuis / Cuzor et Sente

Pour ce qui est de l’histoire avec un petit h, Cinq branches de coton noir propose une fiction mais une fiction de l’ordre du possible, du vraisemblable.

« je me suis documenté pour traiter les scènes situées dans les années 1770… », explique Yves Sente, « J’ai fait en sorte que rien ne puisse être démenti par un historien. Pour le reste, j’ai cherché à tisser des liens entre divers faits avérés. Le rôle d’un scénariste consiste aussi à inventer et à « combler les trous » laissés par la recherche historique ».

Cette fiction commence en mai 1944 en Angleterre dans un camp militaire fantôme, un leurre pour détourner l’attention des forces allemandes. C’est l’opération Fortitude. Ici, les chars alignés par centaines sont aussi légers que l’air et le nombre de soldats est réduit au strict minimum, une poignée de soldats, noirs pour la plupart, non désirables sur le front où se battent les « vrais » Américains, les Blancs.

Parmi ces hommes noirs, Lincoln. Son rêve ? Participer comme tout Américain à la victoire et en devenir un de ses héros. L’occasion lui est finalement donné de rejoindre le front avec deux de ses camarades pour une mission périlleuse : infiltrer les colonnes allemandes et récupérer le tout premier drapeau américain conçu en 1776 par Betsy Ross, à la demande de George Washington, volé sur un champ de bataille par un mercenaire allemand dont le descendant serait aujourd’hui officier dans la Wehrmacht. Outre le fait que ce drapeau serait le premier, il aurait dit-on comporté une étoile noire cousue à l’époque par une servante de Betsy Ross. Tout un symbole !

« Il s’agit d’une pure fiction… », poursuit Yves Sente, « Mais je connaissais l’histoire de Betsy Ross et, à partir de là, mon imagination s’est mise en route. À l’origine d’un scénario, on retrouve toujours la même question : « Et si… ? » Et si le tout premier drapeau américain n’avait pas disparu ? Puisque les Anglais avaient fait appel à des mercenaires d’origine germanique, il pouvait très bien se trouver quelque part en Allemagne… ».

© Dupuis / Cuzor et Sente

© Dupuis / Cuzor et Sente

Au delà du périple des trois soldats noirs américains sur les champs de bataille de l’après débarquement, Cinq Branches de coton noir témoigne avec force de l’obscurantisme, du racisme et de la ségrégation à travers les siècles pour nous interroger au final sur ce monde que nous façonnons chaque jour.

« À travers cet album, j’ai voulu raconter le parcours de trois hommes qui ont envie d’exister. Pour un militaire noir engagé dans l’armée américaine, dans les années 1940, les possibilités d’être un héros étaient réduites. Le plus souvent, il risquait de se retrouver à porter des caisses ou à balayer les latrines… Le racisme est un thème important du récit. Et il est toujours d’actualité, à en juger par les meurtres de Noirs commis par des policiers blancs aux États-Unis. Mais nous n’avons pas voulu délivrer un message : j’espère que l’album se lit d’abord comme une bonne histoire d’aventures ».

Pensé à l’origine en plusieurs volumes, Cinq Branches de coton noir n’en fait finalement qu’un. Une bonne nouvelle pour tous ceux qui n’aiment pas attendre mais un travail énorme qui a nécessité quatre ans de travail aux auteurs et notamment au dessinateur Steve Cuzor. Mais le résultat est là : un scénario intelligent et captivant, un graphisme et des atmosphères incroyablement maîtrisés, des personnages qui ont de la profondeur… C’est absolument magnifique de bout en bout.

Sachez pour finir qu’il existe trois versions de l’album, une version classique à 24€, une édition spéciale au tirage limité à 777 exemplaires avec frontispice numéroté et signé, jaquette originale à 40€ et une édition en noir et blanc au tirage limité à 1000 exemplaires à 49€.

Eric Guillaud

Cinq branches de coton noir, de Steve Cuzor et Yves Sente. Editions Dupuis. 24€

20 Jan

90 minutes : un incroyable match de football arbitré par Yannick Grossetête

90minutesSi je vous dis 90 minutes, vous pensez à quoi ? À un match de football ? Bravo. C’est aussi le titre d’une bande dessinée savoureuse sur le monde du ballon rond signée par un passionné, un vrai, et publiée en ce tout début d’année aux éditions Delcourt…

Il faut l’être passionné pour avoir ce regard aiguisé et dégainer un humour pareil sur l’univers du ballon rond. Yannick Grossetête – on ne rit pas des noms de famille s’il vous plait – est un passionné, un vrai, et même plus que ça puisqu’il est devenu gardien titulaire au FC Saulieu dès l’âge de 11 ans. Sa bio précise même qu’il a été remarqué par Guy Roux – oui absolument – et qu’il a ainsi intégré le centre de formation de l’AJ Auxerre. Ce n’est plus de la passion à ce niveau là, c’est de la dévotion. Bon, l’histoire dit aussi que son penchant pour le pâté en croûte aurait finalement eu raison de son désir de carrière internationale. Ce n’est pas moi qui l’en blâmerait. J’ai toujours eu un faible pour le pâté en croûte et autres petites gourmandises caloriques, beaucoup moins pour le foot.

Mais je m’égare. Même s’il s’agit là d’une reconversion un peu forcée, Yannick Grossetête – on ne rit pas des noms de famille s’il vous plait je vous l’ai déjà dit – signe avec 90 minutes un premier album franchement hilarant mettant en scène des arbitres de touche qui auraient préféré être majorettes, des supporters qui chantent la chenille, des stadiers prêts à confier leurs femmes à n’importe qui le soir des matchs et des footballeurs qui jouent comme des pieds, prennent le ballon à pleines mains, mangent de la raclette à la mi-temps, changent d’équipe en plein match pour rééquilibrer le score… bref du grand n’importe quoi, on se marre à toutes les pages, le dessin participe à la rigolade, je ne dirai pas que l’album est génial de peur que l’auteur s’empresse de prendre la grosse tête (non pardon désolé je n’aurais pas dû!) mais quand même !

Eric Guillaud

90 minutes, de Yannick Grossetête. Editions Delcourt. 15,95€

© Delcourt / Grossetête

© Delcourt / Grossetête

 

19 Jan

Festival international de la bande dessinée d’Angoulême du 25 au 28 janvier : les 10 bonnes raisons d’y aller

C’est LE rendez-vous de la bande dessinée en France et plus largement en Europe, un festival unique en son genre où se côtoient chaque année des dizaines de milliers de passionnés et de professionnels. Dédicaces, expos, concerts de dessins, rencontres, conférences, projections… le programme est gargantuesque. Qu’y faire, qu’y voir ? On vous donne dix bonnes raisons d’y aller faire un tour. Mais il y en a beaucoup d’autres…

©MaxPPP - Fabien Cottereau

©MaxPPP – Fabien Cottereau – Angoulême 2017

 1 – La ville d’Angoulême et le farci charentais

Ben oui, mine de rien, c’est important le cadre d’une manifestation comme celle-ci. La ville d’Angoulême s’y prête bien, ni trop grande, ni trop petite, de vastes places pour dresser chaque année les fameuses bulles du festival, mais aussi des petites placettes qui ont conservé le charme d’antan, des restos sympas pour se restaurer, une vieille ville avec des ruelles tortueuses, une gare, des hôtels… et une atmosphère paisible, du moins en temps normal. Parce que bien sûr au moment du festival, ça se bouscule un peu beaucoup énormément. Reste que la ville est belle, levez les yeux, admirez l’architecture, profitez-en pour visiter les monuments et manger du melon charentais. Bon ok, ce n’est pas vraiment la saison. Par contre, le farci charentais…

Où ? Angoulême 45° 38′ 56 » nord, 0° 09′ 39 » est

2 – L’expo Cosey

Bernard Cosendai, dit Cosey, est un auteur majeur du neuvième art et un auteur singulier, non pas parce qu’il est suisse et que les auteurs de BD suisses sont finalement relativement peu nombreux (ouuuu la mauvaise langue!)  mais parce qu’il a su développer en cinquante ans d’écriture et de dessin une oeuvre exceptionnelle, belle, réaliste, intimiste, humaniste. 

Élu Grand Prix du Festival d’Angoulême en 2017, le créateur de la série culte Jonathan, auteur par ailleurs d’une bonne quinzaine de one shots plus essentiels les uns que les autres (À la recherche de Peter Pan, Le voyage en Italie, Le Bouddha d’azur…), publiait il y a quelques semaines un nouvel album chez Futuropolis, Calypso, un Cosey un peu différent des autres, en noir et blanc, surprenant, sublime, délicat, et d’ores et déjà incontournable. Nous vous en parlions ici-même.

Avec Cosey, l’aventure est souvent intérieure mais elle embarque tout de même le lecteur pour d’autres horizons, le Tibet bien sûr qui imprègne son oeuvre d’une subtile touche de spiritualité, et les États-Unis qui l’ont fortement influencé dans l’écriture, notamment à travers le cinéma.

La rétrospective qui lui est consacrée cette année à Angoulême nous permettra d’admirer plus d’une centaine d’originaux et de documents exceptionnels.

Où et quand ? Hôtel Saint-Simon du 25 au 28 janvier 2018

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3 – L’expo Titeuf et la masterclass Zep

Encore un Suisse, comme quoi ils sont plus nombreux qu’on le pense, celui-ci s’appelle Zep, le papa du phénomène Titeuf. Des millions d’albums vendus dans 25 langues différentes, une série animée, un long métrage… et un personnage qui fête ses 25 ans.

À cette occasion, le festival lui consacre une rétrospective qui reviendra sur les débuts controversés du personnage et sur l’influence de ce garnement sur la bande dessinée.

Zep sera présent au festival, il y présentera le quinzième album de Titeuf, À fond le slip!, sorti en août dernier. Il proposera surtout une masterclass express en public.

Où et quand ? Exposition sur le parvis de l’Hôtel de ville d’Angoulême du 25 au 28 janvier 2018 – masterclass à l’Espace Franquin le 28 janvier à 10h30

4 – Une dédicace de Spirou

Bon ok, obtenir une dédicace de Spirou sera difficile ! De Tintin aussi. Des Nombrils pareil. Qu’on se le dise, les héros de papier ne dédicacent jamais. Mais leurs auteurs par contre… 2000 d’entre eux et d’entre elles sont annoncés sur le festival prêts à dégainer les pinceaux, vous devriez donc trouver dédicace à votre goût. Il faut simplement être patient, très patient, et surtout pas agoraphobe. Prévoyez de l’eau, un petit en-cas, de la lecture… et des sujets de conversation pour discuter avec votre voisin de file d’attente.

Où et quand ? Un peu partout et un peu tout le temps

5 – Le concert dessiné

Mettre le dessin en musique ou l’inverse, mettre la musique en images, c’est le challenge de cet événement organisé par le FIBD en partenariat avec le festival Jazz à Vienne. Cette année, la scène du théâtre d’Angoulême assistera à la rencontre de deux artistes atypiques, le dessinateur Rubén Pellejero d’un côté et la chanteuse Rokia Traoré de l’autre. Sachez que le concert dessiné sera retransmis en direct sur le site Culturebox ici-même.

Où et quand ? Concert dessiné le 26 janvier à 21h au théâtre d’Angoulême. 30€

6 – Les bulles

Les fameuses bulles du festival abritent les éditeurs sur la place du Champ de Mars. Casterman, Glénat, Delcourt, Dupuis… tous les plus grands éditeurs y tiennent un stand pour accueillir le public, exposer leurs BD et proposer des séances de dédicaces autour de leurs auteurs. Les mangas, le para-BD et la BD alternative ont leur propre espace. Indispensable, munissez-vous d’un plan et vous verrez que c’est toute la ville qui est aux couleurs de la BD avec de multiples espaces d’expositions, de rencontres, d’animations…

Où et quand ? Un peu partout du 25 au 28 janvier

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7 – Le concours de cosplay

Pour la 4e année consécutive, le festival vous propose de participer ou d’assister à un concours de cosplay. C’est quoi un concours de cosplay ? C’est un concours, jusque là c’est assez simple, voué à départager des passionnés donnant vie à des personnages de manga qu’ils affectionnent particulièrement en se maquillant, se déguisant, se coiffant, imitant leur attitude. Les inscriptions pour y participer sont ouvertes jusqu’au vendredi 27 janvier 2017 à 23h59.

Où et quand ? samedi 27 janvier à 17h aux Cinémas CGR

© extrait affiche concours Cosplay - Axel

© extrait affiche concours Cosplay – Axel

8 – Les rencontres internationales, conférences…

Elles sont nombreuses et rythment la vie du festival sur des thématiques variées, l’occasion d’approfondir vos connaissances sur le medium bande dessinée et d’approcher des auteurs d’envergure nationale ou internationale tels que Cosey, Emmanuel Guibert, Hiro Mashima, Gipi, Dave McKean, Naoki Urasawa…

Où et quand ? Un peu partout un peu tout le temps

9 – Les fauves

Composé de 9 Prix dénommés les Fauves d’Angoulême, le Palmarès officiel du Festival international de la bande dessinée récompense des livres publiés en langue française, quel que soit leur pays d’origine, et diffusés dans les librairies des pays francophones entre début décembre et fin novembre de l’année suivante. 

Les lauréats des Fauves d’Angoulême composant le palmarès officiel du Festival seront dévoilés sur la scène du Théâtre d’Angoulême lors de la cérémonie des Fauves, samedi 30 janvier 2016 à 19 h. Soirée très très très attendue et courue par le tout neuvième art, il est bien évidemment très difficile de décrocher une place. Mais rien n’est perdu puisqu’elle est retransmise sur le site internet du festival.

Où et quand ? Samedi 27 janvier au Théâtre d’Angoulême

© Rue de Sèvres / Sfar

© Rue de Sèvres / Sfar

10 – Le bal des Vampires

Attention, attention, les petits et grands morts-vivants seront de sortie dimanche pour le bal de vampires à l’occasion de la résurrection aux éditions Rue de Sèvres du Petit Vampire de Joann Sfar. Atelier costumes le matin, atelier maquillage l’après-midi, bal à l’heure du goûter ! Pensez à réserver.

Où et quand ? Au Magic Mirror dimanche 28 janvier de 15 à 17h

Eric Guillaud

Plus d’infos sur le festival ici

Le Prix franceinfo 2018 attribué à Brigade des mineurs de Raynal Pellicer et Titwane aux éditions de La Martinière

Brigade-des-mineursC’est l’un des Prix les plus importants dans le monde du neuvième art. Il récompense chaque année depuis 24 ans le travail d’auteurs posant un regard sur l’actualité. Brigade des mineurs de Raynal Pellicer et Titwane nous embarque aux côtés des policiers de la Brigade de protection des mineurs (BPM) pour un récit aussi poignant que pudique…

Après Joe Sacco, Tignous, Marjane Satrapi, Denis Robert, Emmanuel Lepage, Emmanuel Guibert ou encore Luz, ce sont Raynal Pellicer et Titwane qui recoivent le Prix franceinfo de la bande dessinée d’actualité et de reportage pour leur album Brigade des mineurs paru aux éditions de la Martinière.

Ce roman graphique est le troisième d’une série consacrée au travail des services de police. Raynal Pellicer et Titwane se sont d’abord intéressés à la Brigade de répression du banditisme (BRB) puis à la Brigade criminelle du 36, quai des Orfèvres avant de suivre pendant plusieurs mois dans leur quotidien les policiers de la Brigade des mineurs. Affaires d’inceste, de bébés secoués, de prostitution infantile… les deux auteurs témoignent du travail de ces hommes et femmes confrontés quotidiennement à l’horreur.

Eric Guillaud

14 Jan

L’Or maudit, la nouvelle chevauchée de Bouncer signée Boucq

9782344009604-LEn selle pour les grands espaces ! Cinq ans après le diptyque To Hell et And back, le cultissime Bouncer est de retour pour une dixième aventure dessinée mais aussi, c’est une première, scénarisée par Boucq…

« C’est un personnage extrêmement intéressant, psychologiquement, mais aussi physiquement à dessiner… », explique Boucq dans une interview récente, « Pour moi, c’est un héros parfait. Même s’il lui manque un bras ».

On comprend dès lors pourquoi l’auteur de La Femme du magicien, de Bouche du diable ou encore de la trilogie Face de Lune ne pouvait décemment pas attendre plus longtemps pour remettre son personnage en selle, quitte à s’emparer du scénario jusque là écrit par son comparse Alejandro Jodorowsky actuellement accaparé par le cinéma.

« Me retrouvant seul au scénario, on a beaucoup collaboré avec mon éditeur sur la rigueur et la cohérence… », précise l’auteur. Et fort logiquement, les amoureux de la série, plus largement du western, ne devraient pas être dépaysés, encore moins déçus. Le justicier manchot nous embarque dans une nouvelle chevauchée fantastique à travers les décors saisissants de beauté et de sauvagerie de l’Ouest américain. Avec son ami Job, le Bouncer part à la recherche d’une bande d’affreux salles et méchants qui a agressé l’horloger de Barro City, tué sa fille et kidnappé une autre gamine, tout ça dans le but de retrouver trace d’un trésor caché, le fameux trésor maudit du titre de l’album. Et si le Bouncer s’est promis de les retrouver et de leur faire mordre la poussière, la poursuite sera loin d’être une promenade de santé. Dans un pays où la nature et les hommes ont conservé un instinct sauvage, il faut se méfier de tout et de tout le monde…

« Ce que je trouve intéressant dans le western, c’est qu’il pose un cadre qu’on n’a pas besoin de définir. Le western, c’est l’homme dans ce qu’il a de plus pur. L’homme face à la nature, face aux animaux, face à tout ce qu’il peut lui-même déployer en bon comme en mauvais. Dans le western, on sait que la cruauté la plus excessive comme les actes les plus héroïques peuvent apparaître. On n’a pas besoin d’expliquer pourquoi. Tout cela est par essence présent. Ainsi, on peut aller directement dans le coeur du récit ».

Des paysages à pleurer de bonheur, des personnages au caractère trempé, un graphisme racé et inimitable, des dialogues ciselés et une histoire sans faille qui verra sa conclusion dans une deuxième volet à paraitre le 7 mars 2018, dans exactement deux mois… Que demandez de plus si ce n’est une part du trésor !

Eric Guillaud 

L’Or maudit, Bouncer (tome 10),  de Boucq. Éditions Glénat. 18€

© Glénat / Boucq

© Glénat / Boucq

11 Jan

Vivre en terre occupée : un voyage en Palestine, de Naplouse à Gaza, signé José Pablo Garcia

album-cover-large-35235Ce n’est pas la première fois que la bande dessinée s’intéresse à la Palestine, loin de là. Le journaliste et auteur de BD Joe Sacco pour ne citer que lui a signé quelques albums pour le moins remarquables sur la situation dans cette région du monde. Dans un style graphique très différent et une approche plus pédagogique que journalistique, l’Espagnol José Pablo Garcia nous offre aujourd’hui un nouveau témoignage tout aussi essentiel sur ce conflit qui n’en finit pas et ses conséquences directes sur la population…

Que connaissons-nous de la Palestine ? Assez peu de choses finalement. Bien sûr, les médias nous en parlent dès qu’une intifada pointe le bout de son museau, dès que l’aviation israélienne procède à des frappes sur la bande de Gaza en représailles à des tirs de roquettes, dès qu’un président se permet contre l’avis de tous – ou presque – de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël. Mais pour le reste ? Pour ce qui est de la vie quotidienne des gens ? Les difficultés pour se déplacer, travailler, se loger, nourrir les enfants, trouver de l’eau potable ? Rien, ou presque.

Pour Olivier Longué, directeur général d’Action contre la faim Espagne, il était nécessaire d’offrir « un autre point de vue sur la situation après cinquante ans d’occupation en donnant à voir les effets de cette occupation sur la vie quotidienne de plus de quatre millions de personnes ». C’est dans cette perspective qu’il a demandé à l’auteur de bande dessinée espagnol José Pablo Garcia de les accompagner une dizaine de jours en Palestine et d’en faire au retour une bande dessinée à destination du public.

Sensibiliser l’opinion, tel est l’objectif de cet album. « Notre volonté n’est pas de pointer du doigt des coupables… », dit encore Olivier Longué,« Nous nous contentons de rassembler des preuves, des faits, et d’être témoins des répercussions qu’engendre une occupation sur les personnes les plus vulnérables ».

De Naplouse à Hébron, en passant par Ramallah, Jérusalem ou la bande de Gaza, José Pablo Garcia nous raconte ce périple avec une approche didactique mais aussi très humaine. Sur près de 90 pages, Vivre en terre occupée témoigne de la difficile vie au quotidien de toute cette population avec des situations souvent intolérables, parfois ubuesques, incompréhensibles vues de l’Europe mais clairement exposées dans les pages de ce livre au graphisme sobre accompagné parfois d’un trait d’humour. On apprend beaucoup sans que ce soit un instant ennuyeux. un bouquin à acheter, laisser traîner, prêter, offrir…

Eric Guillaud

Vivre en terre occupée, de José Pablo Garcia. Éditions La Boîte à Bulles. 15€

© La Boîte à bulles / José Pablo Garcia

© La Boîte à bulles / José Pablo Garcia

07 Jan

Le Voile noir : une aventure au coeur de l’intégrisme religieux et du fanatisme signée Dodo et Cha

Couv LE VOILE NOIR.inddPeut-on rire de tout ? Du fanatisme religieux ? De la barbarie organisée au nom d’un dieu ? De la radicalisation des jeunes ? Ça peut sembler difficile de prime abord tant ces sujets sont forcément graves, sensibles et complexes. Pourtant Dodo et Cha en ont fait le pari. Le Voile noir, disponible dès le 17 janvier dans toutes les bonnes librairies, est une BD d’humour et d’aventure au coeur de l’actualité la plus sombre…

Bienvenue en Syrakie ! Ne cherchez pas sur une carte, vous perdriez votre temps, la Syrakie n’a pas d’existence concrète mais peut s’imaginer quelque part entre la Syrie et l’Irak. Dans ce pays presque imaginaire sévit un certain Bachad, qui passe son temps et ses nerfs à massacrer son peuple, mais aussi le Grand Khalifat, le G.K. pour les intimes, une organisation qui s’est donnée pour mission divine de combattre tous les mécréants du monde. Bref, une véritable poudrière comme on sait si bien en inventer dans la vraie vie.

D’ailleurs, ceux qui voient là une allusion à la Syrie, à son président Bachar el-Assad et à l’organisation État islamique ont tout compris. Le Voile noir est une fiction mais une fiction quasi-documentaire, en tout cas profondément ancrée dans la réalité, une fiction qui nous raconte le parcours d’une jeune femme moderne et courageuse, Gina, partie rejoindre les combattants d’Allah pour exfiltrer sa cousine Pauline radicalisée.

Sur le terreau d’un contexte abominable, d’une réalité insoutenable, Cha et Dodo parviennent à construire un récit franchement drôle, par le dessin, par les situations, par les dialogues, drôle mais jamais déplacé ou vulgaire. Le rire est une chose sérieuse avec laquelle il ne faut pas plaisanter, disait Raymond Devos. Cha et Dodo nous rappellent qu’il fait lui aussi partie intégrante de notre liberté !

Eric Guillaud

Le Voile noir, de Dodo et Cha. Éditions Casterman. 13,95€

© Casterman / Dodo & Cha

© Casterman / Dodo & Cha

05 Jan

Le Cirque de Minuit et Dans le Silence des Abysses… : les dernières traductions françaises de la saga Hellboy

hellboyT16Même si on ne cessera de regretter la semi-retraite (en tant que dessinateur) de Mike Mignola, il garde un œil avisé sur le devenir de sa plus belle création, Hellboy. Comme le prouve le dernier volume traduit en français de ses aventures bourrées de clins d’œil à la littérature fantastique du XIXe siècle et toujours aussi ensorcelantes…

Mike Mignola est un mec intelligent. Même si cela fait plus de dix ans qu’il a accepté de partager la destinée d’Hellboy avec d’autres dessinateurs, il n’est jamais très loin et continue d’en superviser les scénarios et la cohérence, assurant ainsi une certaine continuité. Après, chacun de ses disciples à son style avec des réussites diverses, même si aucun d’entre eux n’essaye vraiment de copier le maître.

De tous, l’anglais Duncan Fegredo par exemple est peut-être le plus fantasmagorique et le plus classieux. Des deux histoires que l’on retrouve ici dans le seizième tome des aventures du rejeton de l’enfer, celle qui signe (‘Le Cirque de Minuit’) est la fantasmagorique. Un jeune Hellboy (l’action se passe en 1948) faisant le mur y croise le chemin d’un mystérieux cirque ne s’animant qu’à la tombée de la nuit, Mignola établissant alors un parallèle périlleux mais réussi entre son destin et la légende de Pinocchio. Fourmillant de détails, le style de Fegredo rappelle bien sûr celui de son patron dans les séquences de la vie quotidienne mais prend vraiment son envol en quelque sorte lors des scènes d’hallucinations, grâce notamment à un subtil jeu de lumière qui entretient (volontairement) le doute sur la réalité ou pas des évènements.

Gary Gianni, lui, s’est surtout fait un nom en reprenant le flambeau de la série ‘Prince Valiant’ en 2004 mais dans le style, très 30’s, des strips originaux et en illustrant toutes les récentes rééditions de l’œuvre de Robert E. Howard (‘Conan’) parue sen France chez Bragelonne. Ce dessinateur est presque une anomalie en 2018, son style crayonné et assez figé rappelant beaucoup plus celui de l’avant-guerre, bien loin des standards de l’industrie des comics au XXIème siècle. Une patte très particulière qui, sur le papier, ne semble pas convenir à l’univers d’Hellboy… Sauf que ce n’est pas pour rien que ce grand lettré de Mignola, qui adore faire référence à ses auteurs classiques préférés, a dédié ‘Dans le Silence des Abysses…’ à Herman Melville et à son contemporain un peu oublié mais non moins excellent, William Hope Hodgson. Les visions de cauchemars semblant sortir d’un roman de Jules Vernes de ce drame nautique se passant sur une frégate de la seconde moitié du XIXème siècle commence et se termine comme un (mauvais) rêve, beau et terrifiant à la fois, suivant un peu le modèle de l’histoire qui l’a précédé. Un excellent cru !

Olivier Badin

Hellboy T16, Le Cirque de Minuit, de Mike Mignola, Duncan Fegredo, Gary Gianni et Dave Stewart, Delcourt, 15,50 euros

© Delcourt / Mike Mignola, Duncan Fegredo, Gary Gianni et Dave Stewart

© Delcourt / Mike Mignola, Duncan Fegredo, Gary Gianni et Dave Stewart