Il a l’Amérique dans la peau, et même un peu dans son prénom, référence à Anthony Quinn, mais c’est dans l’univers de la bande dessinée qu’Anthony Pastor s’est véritablement imposé, en tant qu’auteur d’une quinzaine d’ouvrages. Récemment, il s’est aventuré dans une trilogie consacrée au western. Billy Lavigne en est le deuxième volet, offrant une nouvelle chevauchée féministe en tout point audacieuse dans un univers violent et masculin…
Souvenez-vous, il y a deux ans exactement sortait La Femme à l’étoile aux mêmes éditions Casterman, un huis clos fortement enneigé quelque part dans l’Ouest américain avec pour héros ou plus exactement pour héroïne Perla, femmes indépendante et de caractère, porteuse d’une étoile de shérif non pas pour faire la loi comme les hommes mais pour afficher son refus de l’ordre patriarcal établi.
Anthony Pastor y révélait, en plus d’un état d’esprit féministe, une passion pour le western, réutilisant avec bonheur les codes du genre pour mieux nous servir une œuvre sensible à l’air du temps.
Avec Billy Lavigne, on ne change rien ou plutôt si, le personnage principal est un homme cette fois, l’incarnation parfaite du cowboy, viril et un brin sauvage. Mais l’objectif reste le même, comme l’explique l’auteur : « En gardant les codes, je fais le pari de renouveler l’idéologie sous-jacente, et peut-être d’amener à réfléchir ceux qui comme moi sont des amoureux du genre ».
Et de fait, Billy Lavigne a beau être un mâle dans toute sa splendeur, il n’en est pas moins fragile et l’assassinat de sa mère qu’il n’a pas même pu enterrer va le foudroyer. Lui qui cherchait déjà un père perdait brutalement sa mère. Et la vengeance n’y pourra rien changer…
Dans ce deuxième volet de la trilogie, Anthony Pastor revisite l’esthétique du western avec un graphisme qui peut surprendre au premier coup d’œil, notamment sur la couverture, mais offre au final une profondeur sans pareil au récit, aux personnages et aux décors. Et les couleurs, savant mélange d’encres acryliques et d’aquarelles, ne font qu’accentuer cette impression, l’auteur cherchant à « impacter la rétine ». Parmi les influences revendiquées de l’auteur : Van Gogh, comme on peut s’en douter, mais aussi Bonnard et les Nabis, sans oublier Giraud et les aventures du Lieutenant Blueberry dont Anthony Pastor est bien évidemment un immense fan.
Après La Femme à l’étoile et Billy Lavigne, Anthony Pastor travaille aujourd’hui sur le troisième album de la série, Retour au Yellowstone, qui mettra en scène un couple vieillissant dont la femme est atteinte de la maladie d’Alzheimer. « Ni violence, ni coup de feu… », prévient l’auteur, simplement un autre regard sur un genre qui ne demande qu’à être revisité et pourquoi pas, comme ici, sur un air de Bob Dylan. Splendide !
Eric Guillaud
Billy Lavigne, d’Anthony Pastor. Casterman. 22€ (en libraire le 5 mars)