17 Avr

Les Fusibles de Safieddine et Doisneau ou l’histoire d’une transmission à l’épreuve de l’expatriation

Après Yallah Bye et Monsieur Coucou, le scénariste Joseph Safieddine, en compagnie ici du dessinateur Cyril Doisneau, s’appuie une nouvelle fois sur son histoire familiale et ses origines libanaises pour nous offrir une fiction plus vraie que nature sur la transmission et l’identité…

Ne cherchez pas le nom des deux pays dans lesquels se déroule cette histoire proposée aux éditions Dupuis, vous ne le trouverez pas. Le scénariste Joseph Safieddine l’a voulu ainsi avec un objectif clair : parler non pas du Liban et de la France, parce qu’il s’agit tout de même bien de ces pays-là, mais de sentiments universels.

De même, plutôt que de retracer sa propre histoire, l’auteur ayant des origines libanaises, Les Fusibles est construit comme une fiction mais une fiction qui sent le vécu à toutes les pages.

« Il me semble qu’en prenant une certaine distance… », explique Joseph Safieddine, « j’arrive mieux à cerner mon sujet. Finalement, la fiction me permet de parler de choses plus personnelles, de laisser l’inconscient s’exprimer, sans être inhibé par le besoin de coller à mon histoire familiale. La fiction, c’est très puissant ! Si j’écrivais une autobiographie, je risquerais d’être trop dans le contrôle ».

Et que raconte Les Fusibles ? Une histoire effectivement universelle d’expatriation, de déracinement, de transmission de culture, d’identité. Quand il était jeune, Abel s’était donné pour mission avec ses copains de remettre en marche les compteurs électriques lors des quotidiennes coupures de courant, une façon d’aider les gens du quartier, une façon aussi pensait-il de sauver son pays.

Pourtant, Abel finit par fuir ce pays, son pays, fuir la violence, les incertitudes économiques, les conditions de vie difficiles. Dans son pays d’accueil, il devient entrepreneur dans le domaine des réalités virtuelles avec un certain succès, il fonde une famille, a une fille. Un modèle d’intégration ! Jusqu’au jour où son ami de jeunesse Georges débarque et avec lui une foule de questions et de souvenirs. Mais aussi une mauvaise nouvelle : le père d’Abel est gravement malade…

Abel qui avait jusque-là joué les fusibles entre ses deux vies, ses deux pays, tenant chacune et chacun à bonne distance doit se résoudre à regarder son passé et transmettre un peu de son histoire, desa culture, de son identité à sa fille qui le réclame depuis tant d’années…

Un récit principalement en noir et blanc avec quelques touches de couleurs ici et là et dans un trait semi-réaliste, simple, rond et humoristique voulu pour alléger le propos. Une histoire universelle et intemporelle !

Eric Guillaud

Les Fusibles de Safieddine et Doisneau. Dupuis. 25€

© Dupuis / Safieddine & Doisneau

11 Avr

Plagiat! en version remasterisée : un sacré coup de jeune pour la BD de Goffin, Schuiten et Peeters

On aurait pu croire à un plagiat mais non, il s’agit bel et bien de la réédition dans une version remasterisée et sous pavillon Anspach du livre de Goffin, Schuiten et Peeters, publié en son temps aux éditions Humanoïdes Associés et couronné Grand Prix RTL de la meilleure BD en 1990…

C’est un temps que les moins de 20 ans et même les moins de 30 ans ne peuvent connaître, un temps où la ligne claire chère à Hergé et Jacobs revenait en force sous les pinceaux d’auteurs aussi talentueux que Swarte, Ted Benoit, Yves Chaland, Serge Clerc… et Alain Goffin que l’on retrouve ici dans une de ses œuvres majeures, Plagiat!, éditée originellement en 1989 aux éditions Humanoïdes Associés.

Comme il l’a déjà fait pour son album Le Réseau Madou que l’on présente comme un classique de la renaissance de la ligne claire, Alain Goffin offre ici une remasterisation complète de Plagiat! avec à l’arrivée des pages entièrement retracées, remises en couleur et relettrées. Un sacré lifting visible dès la couverture et rattrapant au passage quelques fautes de goûts propres aux années 80. Même la robe de chambre de notre héros pris un coup de jeune.

Plagiat! 1989 (Humanoïdes Associés) et Plagiat! 2023 (Anspach)

Du côté de l’histoire, signée par le tandem Schuiten et Peeters (Les Cités obscures), bien évidemment, rien n’a changé. Plagiat! raconte l’histoire d’un peintre, Chris Van Meer, dont le succès booste l’esprit créatif. Le monde des arts est à ses pieds, la gent féminine aussi. Bref, tout va bien dans le meilleur des mondes jusqu’au jour où un artiste sorti de nulle part devient la nouvelle coqueluche des amateurs avec des œuvres qui ressemblent étrangement aux siennes. Dans un geste de colère, Chris Van Meer détruit ses propres tableaux. Pour lui, c’est le début de la fin, une lente descente aux enfers commence…

Plagiat! 1989 (Humanoïdes Associés) et Plagiat! 2023 (Anspach)

Histoire intemporelle qui nous transporte dans le monde de l’art et notamment de l’art moderne Plagiat! retrouve ici incontestablement un nouveau souffle, rien ne laissant présager de son âge si ce n’est peut-être la houpette du personnage principal. Pour le reste, le plaisir de lecture est là et bien là, les couleurs se faisant un peu plus discrètes dans cette nouvelle version nous permettent d’admirer au mieux le trait d’Alain Goffin qui fait de cet album un trésor de la ligne claire. L’encart de sept pages qui concluait l’album et avait marqué les esprits en s’inscrivant comme une pièce du scénario est toujours présent, augmenté d’une dizaine de pages portant sur le livre, son histoire, sa renaissance et contenant moult illustrations, recherches graphiques, découpages…

Eric Guillaud

Plagiat!, de Goffin, Schuiten et Peeters. Anspach. 17€

© Anspach / Goffin, Schuiten & Peeters

10 Avr

Tintin de A à Z, un délicieux abécédaire signé Patrice Leconte

Vous pensez que tout a été dit et écrit sur l’œuvre culte d’Hergé ? Raté ! Le réalisateur des Bronzés Patrice Leconte a sorti sa plus belle plume pour nous concocter un abécédaire qui pourrait bien vous surprendre et vous amuser. Une approche très personnelle par un véritable inconditionnel des aventures de Tintin…

Patrice Leconte a un rêve : adapter Les Bijoux de la Castafiore au cinéma. Mais, comme il le reconnaît lui-même ici et là, l’affaire patine sérieusement pour de sombres et complexes histoires de droits.

En attendant de voir une Castafiore plus vraie que nature riant de se voir si belle en son miroir, Patrice Leconte se fait plaisir – et nous fait plaisir – avec ce petit abécédaire aussi délicieux que facétieux.

De A comme Alcazar à Z comme Zorrino, en passant par C comme Castafiore ou Cinéma, D comme Dupond Dupont, H comme Haddock ou encore W comme… comme… Whisky bien sûr, le réalisateur butine à l’envie dans la série culte pour s’arrêter sur des personnages, des expressions, des lieux, des insultes, des gags, des faits, des évidences ou non qui font tout le charme des aventures de Tintin.

Ajoutez à cela une plume alerte, un ton léger et drôle, une mise en page sobre et soignée, une iconographie judicieusement sélectionnée et finalement assez copieuse ainsi qu’une couverture qui nous ramène aux Bijoux de la Castafiore et vous aurez compris que cet abécédaire-là a toute sa place dans votre bibliothèque ou mieux sur votre table de chevet, que vous soyez tintinophile averti ou non.

Eric Guillaud

Tintin de A à Z, de Patrice Leconte. Moulinsart / Casterman. 19,95€

09 Avr

Gone with the Wind : l’adaptation d’un monument de la littérature américaine par Pierre Alary (INTERVIEW)

S’attaquer à un tel chef d’œuvre de la littérature et du cinéma réunis ne manque pas d’audace. Pourtant, Pierre Alary l’a fait et bien fait, nous offrant à l’arrivée un magnifique album au dos toilé rouge du plus bel effet…

Gone with the Wind. Autant en emporte le vent en bon français est une expression vieille comme le monde ou presque mais c’est surtout le titre d’un film de Victor Fleming sorti en 1939 et avant ça encore celui d’un roman de Margaret Mitchell paru en 1936.

L’adaptation que voici est le fruit d’un auteur séduit par le décorum du western ou plus largement du 19e siècle américain, époque qu’il a déjà pu aborder dans son album précédent, Don Vega, une variation autour du légendaire cavalier masqué Zorro.

Mais l’histoire n’est pas la même, pas question ici d’un justicier solitaire ou presque mais d’une jeune femme, Scarlett O’Hara, fille d’un riche propriétaire sudiste, élevée au milieu d’une armada d’esclaves plus dévoués les uns que les autres.

© Rue de Sèvres / Alary

L’histoire est connue, Scarlett O’Hara est amoureuse d’un certain Ashley Wilkes qui est promis à une autre femme. Durant des années, elle tente tout de même de le conquérir. Sans y parvenir. La guerre de Sécession passe par là, ruinant sa famille. Elle doit trouver de l’argent pour sauver la plantation, envisage un temps de devenir la maîtresse de Rhett Butler qui a des vues sur elle depuis longtemps mais finit par épouser l’ex-futur mari de sa sœur au porte-monnaie bien joufflu. Vous suivez ?

Bref, une histoire d’amour et de guerre, une histoire d’argent aussi dans un contexte de fin du monde ou plus exactement de fin d’un monde, celui du Sud esclavagiste.

Alors bien sûr, avec nos yeux et nos oreilles d’aujourd’hui, on peut juger le roman profondément raciste. L’éditeur de la version anglaise a d’ailleurs préféré ajouter dans la nouvelle édition du roman cet avertissement :

«Autant en emporte le vent comprend des éléments problématiques, notamment la romantisation d’une époque choquante de notre histoire et des horreurs de l’esclavageLe roman inclut la représentation de pratiques inacceptables, des représentations racistes et stéréotypées et des thèmes, une caractérisation, un langage et une imagerie troublants»

© Rue de Sèvres / Alary

De quoi nous refroidir ? De quoi refroidir toute velléité de lecture ou mieux d’adaptation ? Pour Pierre Alary, les choses sont claires. « Loin de moi l’idée de vouloir disculper Margaret Mitchell de quoi que ce soit mais j’ai pris cette histoire comme celle d’une famille avec une représentation du sud de l’époque et je pense une représentation d’une certaine forme d’opportunisme et de capitalisme ».

Si le livre n’est pas un chef d’œuvre de style comme le reconnaît Pierre Alary, son intérêt est ailleurs : « Ce sont les personnages qui m’ont donné envie de faire cette adaptation, le jeu entre Scarlett O’Hara et Rhett Butler, cette espèce de duel permanent, est exceptionnel. Et puis, oui, j’avais également envie de voir pourquoi il y avait tous ces débats autour du roman. Finalement, en tant que lecteur, je pense que tout ce qu’on reproche au livre est un peu exagéré, par rapport à des situations plus récentes aux États-Unis ou ailleurs, quand tu vois par exemple qu’on peut tuer des mecs dans la rue en s’asseyant dessus (affaire George Floyd, ndlr).

© Rue de Sèvres / Alary

« Ce qui est reproché au livre, c’est cette espèce de complaisance envers l’esclavagisme, le fait de montrer des esclaves plutôt heureux de leur sort. Mais il ne faut pas oublier, que ce roman est une représentation de la réalité, pas la réalité ».

Sans vouloir entrer dans la polémique, s’interroger sur un éventuel retrait du livre des catalogues, comme le fut le film de la plate-forme de streaming HBO Max au lendemain du meurtre de George Floyd, on peut légitimement s’interroger sur le travail d’adaptation. Pierre Alary est resté fidèle au roman mais avec nuance.

« Quand tu adaptes un livre, il est intéressant de sentir que tu as des choses à y mettre et à faire passer. J’ai par exemple tout de suite gommé cet accent « petit nègre » qui pour le coup me semblait humiliant, j’ai aussi évité certains mots qui me gênent de par mes convictions. Le second tome sera un peu plus politisé puisqu’on abordera des choses comme le KKK. Je vais passer par le personnage de Rhett Butler, qui est un peu la fenêtre sur le monde moderne, pour amener des choses qui me correspondent un peu plus »

© Rue de Sèvres / Alary

Passer d’un roman de plus de 1000 pages à une bande dessinée qui n’en comptera que 300 sur 2 volumes à l’arrivée est une belle performance que l’on peut doublement saluer ici, tant sur le plan du travail purement d’adaptation scénaristique que de la mise en image elle-même. Gone with the Wind, en anglais pour des histoires de droits, a été entièrement réalisé à l’ordinateur, ce qui confère à l’ensemble une belle homogénéité. Beau boulot !

Eric Guillaud

Gone with the wind, de Pierre Alary d’après le roman de Margaret Mitchell. Rue de Sèvres. 25€

07 Avr

Bulles d’histoire : 14 BD pour remonter le temps

Source d’inspiration inépuisable pour les auteurs et voyage sans fin pour les lecteurs, l’histoire avec un grand H se décline sur tous les modèles, documentaires ou fictions. En voici une petite sélection forcément subjective mais totalement assumée…

Pas de 49.3 à l’époque et une belle espérance. C’est d’ailleurs le titre de cet album sorti il y a maintenant quelques mois et qui nous plonge dans les années 30, précisément au coeur de l’année 1934 pour une histoire qui oscille entre l’intime et le collectif. L’intime avec une histoire d’amour entre Roger et Louison, lui rêve de devenir ingénieur, elle de faire actrice, il sera finalement ouvrier à Renault, elle travaillera comme petite main chez le couturier Bernstein. Le collectif avec l’aventure du Front Populaire qui trouve ses racines dans la fameuse journée du 6 février 1934 et les émeutes orchestrées par l’extrême droite. Une fresque historique passionnante emmenée par le trait réaliste et vibrant d’Anne Teuf. (La Belle espérance tome 1, de Chantal Van Den Heuvel, Anne Teuf et Lou. Delcourt. 24,95€)

Dans la série Ils ont fait l’histoire, conjointement éditée par Glénat et Fayard, Andrea Meloni, Davide Goy, Luca Blengino et Catherine Brice s’intéressent à un autre moment clé de l’histoire mondiale, la montée du fascisme en Italie et l’arrivée de Mussolini au pouvoir en 1922, pouvoir qu’il ne quittera plus avant 1945 et la fin qu’on lui connaît. Retracer la vie d’un tel personnage politiquement actif sur plus de 40 années n’est pas chose aisée mais les auteurs se sont concentrés ici sur son

action autour de la capitale romaine vue à la fois comme un enjeu politique, un outil de propagande et une vitrine du renouveau italien par le fascisme. Une BD parfaitement documentée, Catherine Brice étant une historienne spécialiste de l’Italie contemporaine, complétée par un dossier d’une petite dizaine de pages réunissant une chronologie, des références bibliographiques, une carte… (Mussolini, d’Andrea Meloni, Davide Goy, Luca Blengino et Catherine Brice. Glénat. 14,95€)

Dans la même collection, Farid Ameur et Chris Renault nous embarquent cette fois pour l’Ouest américain en compagnie d’un personnage légendaire, Jim Bridger, considéré comme l’un des plus grands mountain men. L’album retrace sa vie depuis sa plus tendre jeunesse, alors qu’il était apprenti forgeron à Saint-Louis, très vite rattrapé par l’envie d’ailleurs et d’aventure. Et il n’en manquera pas d’ailleurs et d’aventure. Toute sa vie, le trappeur arpentera les Rocheuses à la recherche de peaux de castors. Plus de 40 hivers dans la nature sauvage et parfois hostile et pratiquement autant d’étés à fréquenter les immenses foires qui se tenaient dans les vallées du Wyoming où se retrouvaient trappeurs, négociants et tribus indiennes pour lesquelles il nourrissait un profond respect. (Jim Bridger, de Farid Ameur et Chris Renault. Glénat. 14,95€)

Le peuple Hmong ! Peu de chance que vous connaissiez son existence. Même Vicky Lyfoung, l’autrice de cet album paru aux éditions Delcourt, pourtant fille d’immigrés hmong, ignorait tout ou presque de ce peuple de montagnards nomades longtemps oppressé par les Chinois. Mais à l’adolescence, se posant beaucoup de questions comme tous les ados, Vicky commence à se renseigner sur ses origines et à découvrir l’histoire des Hmong, une histoire liée à la France de par la colonisation de l’Indochine. C’est donc l’histoire de ce peuple et de sa famille que raconte ce roman graphique aux personnages tout en rondeur, un trait faussement naïf pour parler de choses difficiles avec parfois une touche d’humour. Hmong raconte aussi l’exile, le déracinement, le racisme et au bout du bout la liberté. (Hmong, de Vicky Lyfoung. Delcourt. 16,50€)

Ce nom-là par contre est connu de tous ou presque. Molière est l’un des plus grands dramaturges au monde. Son nom a traversé les frontières et les siècles pour rester aujourd’hui encore une référence. Dom Juan, Le Tartuffe, Le Bourgeois gentilhomme, L’Ecole des femmes… ces pièces sont passées à la postérité, toujours étudiées, régulièrement jouées sur scène et adaptées au cinéma, en livre jeunesse, en bande dessinée. Cette trilogie de Delmas et Gerasi publiée aux éditions Glénat et dont le troisième volet vient tout juste de sortir s’intéresse à l’homme et à son génie en commençant par la fin, sa mort. Une série de flashbacks permet de découvrir les moments clés de sa vie, de sa carrière dans le monde du théâtre et de ses rencontres avec les grands du Royaume de France. Une biographie passionnante à l’image du personnage, merveilleusement mise en images par Sergio Gerasi dont le trait réaliste est absolument bluffant tant sur les passages de représentations théâtrales que sur ceux de la « vraie vie ».  (Molière – 3 tomes, de Gerasi et Delmas. Glénat. 14,50€)

La Beauté du monde ! Mais où peut-elle bien se cacher cette beauté quand la guerre ravage tout un pays ? Quand elle menace de s’étendre au point de devenir mondiale ? Dans l’idée de mourir pour défendre une cause ? Ou de tout faire pour rester en vie ? Ou peut-être dans la peinture ? Et pourquoi pas dans la gastronomie ? C’est à Cerbère, petite ville à la frontière espagnole que l’auteur Thomas Azuélos a posé le décor de son roman graphique. Alors que la retirada se termine, que les derniers réfugiés traversent la frontière en une interminable et sinistre colonne, que les portes de l’Espagne se referment pour une éternité franquiste, l’auteur nous dépeint l’état du monde avec une fiction romanesque réunissant une poignée de personnages, un philosophe, un peintre, un cuisinier, une orangère… Nous sommes en 1939, l’heure n’est plus à la beauté. Quoique… (Toute la beauté du monde, de Thomas Azuélos. Futuropolis. 25€)

Une autre époque, un autre endroit, une même horreur, la guerre, et en l’occurrence cette fois la guerre civile cambodgienne que l’auteur franco-cambodgien Séra a déjà abordé par trois fois dans les albums Impasse et rouge, L’Eau et la terre et Lendemains de cendres, tous les trois réédités à l’occasion de la sortie de L’Âme au bord des cheveux. Ce nouveau récit est le premier à être autobiographique. Après quelques pages restituant le contexte, Séra y raconte l’histoire de sa famille, de son père cambodgien, diplômé de l’école supérieure de commerce de Paris, de sa mère française, heureuse de s’installer à Phnom Penh, d’une jeunesse presque normale, des premiers échos de la guerre, de l’entrée en ville des Khmers rouges, du refuge au sein de l’ambassade de France, de la disparition de son père… de quoi être mort de peur ou d’avoir l’âme au bord des cheveux, comme le dit une expression de la langue khmère. (L’Âme au bord des cheveux, de Séra. Delcourt. 24,95€)

Retour en Europe et dans les tranchées de la première guerre mondiale avec ce premier volet de Visages – Ceux que nous sommes, une saga romanesque prévue en 4 tomes qui devraient tous sortir en 2023 et conter la destinée de cinq personnages pris dans le tourbillon de l’histoire entre 1900 et 1954. Tout commence avec Louis Kerbaz, un jeune Breton parti au front et Lieselotte Ruf, une photographe allemande engagée comme infirmière dans La Croix-Rouge. Entre les deux, aucun point en commun. Et pourtant, ils vont se rencontrer, s’aimer et donner naissance à un garçon, un bâtard ou un bastard comme on appelle ces enfants bi-nationaux en Allemagne, un bastard qui en voudra pour la vie à ses géniteurs… En supplément, un dossier documentaire d’une dizaine de pages sur la première guerre mondiale. Visages – Ceux que nous sommes tome 1, de Ponsard-Gutknecht, Beausang-O’Griafa et Morinière. Glénat. 14,95€)

Trois albums pour les amoureux des blindés, oui il y en a, avec tout d’abord Le Boucher de Stonne qui nous embarque à bord du B1bis français, un char redouté par les Allemands pour sa robustesse mais qui se révèlera un peu lourd pendant la campagne de France, et deux albums parus dans la collection Guerres & Histoire, le premier portant sur les Panther Sherman M4 et M1 plongés dans la bataille des Ardennes (Les Ardennes Lâchez les fauve), le second, sur les Crusader et la bataille d’El Alamein (El Alamein De sable et de feu). Dans les trois cas, un récit romancé et un dossier documentaire réunissant photos, cahiers techniques, éclatés de chars, cartes des batailles… (Le Boucher de Stonne, de Pécau, Mavric et Andronik. Delcourt. 15,50€) / Les Ardennes, de Doubs et Fiorentino. Glénat. 15,50€ / El Alamein, de Lamy et Cammardella. Glénat. 15,50€)

Un petit tour dans l’espace avec cet album signé Dobbs et Becciu qui nous raconte le destin d’un homme exceptionnel, un héros dans l’Union soviétique et au-delà que tous les amoureux de l’histoire de la conquête spatiale connaissent. Son nom : Alexei Leonov. Il est le premier homme à avoir flotté dans l’espace en 1965, soit quatre petites années après le premier vol spatial habité par un autre héros soviétique, Youri Gargarine. L’URSS marque alors de sérieux points dans la course à l’espace mais, l’histoire est ainsi faite, ce sont les Américains qui marcheront les premiers sur la Lune en 1969. Un dessin très agréable, un scénario fouillé, une histoire passionnante et pleine de péripéties qui nous éclaire autant sur l’histoire de la conquête spatiale que sur l’homme en lui-même, un passionné de peinture qui, incapable de se payer des études, devra se résigner à rejoindre l’armée de l’air. Avec le succès qu’on connait aujourd’hui… (Leonov, de Dobbs et Becciu. Passés composés / Humensis.14,90€)

On termine sur les océans avec deux livres signés Jean-Yves Delitte, une référence dans l’histoire maritime et pour cause, l’homme est peintre officiel de la marine belge, membre titulaire de l’Académie des Arts & Sciences de la mer et auteur d’une belle collection de bandes dessinées sur le thème. Le premierdes livres, La Buse, dont il signe à la fois le scénario et le dessin, nous emmène au coeur du 18e siècle à la fin de la guerre de Succession d’Espagne qui marque une recrudescence de la piraterie avec des corsaires congédiés et sans tarvail. Olivier Levasseur, dit La Buse, est l’un d’entre eux. C’est son histoire qui est ici racontée. Le second, avec Fabio Pezzi au dessin, nous plonge au coeur de la guerre des barons dans l’Angleterre du 13e siècle et d’une incroyable bataille navale entre une armada venue de Calais pour s’emparer du trône et la marine anglaise. (Les Grandes batailles navales – Les cinq îles, de Jean-Yves Delitte et Fabio Pezzi. Glénat. 15,50€ et La Buse tome 1 de Jean-Yves Delitte. Glénat.14,50€)

Eric Guillaud

31 Mar

Johnny Biceps – l’argonaute du futur : une fantasy absurde mais pas que !

Un comic book de science-fiction parodique qui régalera les fans de la période ‘classique’ du genre tout en se permettant quelques petites piques bien senties à notre société machiste.

Oui, le scénariste Karibou et le dessinateur Witko connaissent leurs classiques du space-opera, de Star Wars à Flash Gordon en passant par Galactica. D’où cette galerie de personnages semblant sortir d’un vieux pulp – ces magazines bon marché qui, dans les années 40 et 50 abreuvaient la jeunesse américaine de récits d’aventures couvrant tout le spectre.

Mais le résultat est en même délicieusement décalée, avec le fidèle second qui ne comprend rien à comprend ou le scientifique de l’équipe bourré de névroses. Et bien sûr, il y a ce héros, Johnny Biceps sûr de lui et pourtant bête comme ses pieds et bovin au dernier degré. Sans parler de son ennemi juré, le diabolique et pourtant aussi débile Astar, capable du pire… Comme par exemple d’inviter à un goûter d’anniversaire Biceps. Et ce après qu’il se soit retrouvé en fauteuil roulant, désormais accompagné de son assistant de vie prénommé Aziz qui, par amour, décide bientôt de donner naissance à son clone.

© Delcourt / Witko & Karibou

Le ton est donné. Oui, c’est complètement absurde et pousse parfois le bouchon très loin – notamment lorsque Biceps hésite à trucider le monstre galactique en forme de verge ( !) qui menace de le dévorer car la symbolique remettrait trop en question sa virilité. Et on vous laisse deviner ce que suggère le nez fin et allongé de ce dernier sous ce menton poilu séparé en deux…

© Delcourt / Witko & Karibou

Mais justement : en plus de son style de dessin faussement naïf entre Lewis Trondheim et Riad Sattouf, L’Argonaute Du Futur se la joue malin. Il alterne le rythme (certaines histoires ne font qu’une page alors que d’autres plusieurs) et les teintes colorées et sait se moquer aussi bien des ‘gentils’ que des ‘méchants’.

Il multiplie aussi les clins d’œil graphiques aux grands classiques du genre tout en renversant parfois complètement les valeurs avec un flegme quasi-britannique, rendant la chose encore plus absurde. Résultat, la charge se révèle à la fois singulière et en même temps jamais trop lourde. Et puis en plus d’être assez en phase au final avec des problématiques très actuelles, comme le machisme à outrance ambiant, Johnny Biceps est avant tout, et surtout, franchement drôle.    

Olivier Badin

Johnny Biceps – L’argonaute du futur de Witko & Karibou. Delcourt. 12,50 €

27 Mar

La Femme à l’étoile d’Anthony Pastor : western au féminin

Avec Hoka Hey! de Neyef, sorti il y a quelques mois, et aujourd’hui La femme à l’étoile d’Anthony Pastor, le western prouve qu’il en a encore sous le sabot pour se renouveler en abordant des thématiques très actuelles comme ici le féminisme…

Sorti en octobre 2022, Hoka Hey! a assurément fait de l’effet dans le milieu du neuvième art au point de se retrouver inscrit dans la sélection officielle du festival d’Angoulême 2023 ainsi que dans la sélection restreinte du Prix du Public France Télévisions, et au final de décrocher le Prix des libraires Canal BD. À la plus grande joie de son auteur Neyef.

Rebelotte avec La Femme à l’étoile dont la sortie est prévue pour le 5 avril. Un album d’Anthony Pastor cette fois, publié par Casterman, qui du long de ses 260 pages devrait lui aussi marquer fortement les esprits !

© Casterman / Pastor

Leur point commun ? Au-delà de nous embarquer dans l’Ouest américain, univers ô combien violent, masculin et machiste, et de s’approprier pleinement les codes du western, l’un et l’autre prennent des chemins de traverse pour aborder des thématiques très contemporaines, nous interrogeant sur la filiation, l’acculturation et l’oppression des minorités dans le premier cas, la condition féminine dans le second, celui qui nous intéresse ici.

Avec un héros, ou plutôt une héroïne, Perla, qui s’est emparé d’une étoile de shérif non pas pour faire la loi comme les hommes mais pour afficher son refus de l’ordre patriarcal établi.

© Casterman / Pastor

Sans spoiler l’histoire, Perla est une fugitive, recherchée par le marshal Pierce. Mais elle est plutôt du genre à ne pas se laisser faire. Planquée dans un village fantomatique, une ancienne mine d’or, elle voit arriver Zachary, lui aussi activement recherché. Ensemble, ils vont devoir apprendre à se connaître et à se complémenter pour affronter l’hiver hostile et surtout les hommes de loi qui ne manqueront pas de débarquer.

Dans ce huis clos fortement enneigé, Perla ne tient pas le rôle habituel assigné à la femme dans ce genre d’univers. Perla est une femme indépendante, de caractère, qui manie aussi bien les armes que la tactique. Zachary, lui, n’a visiblement pas les épaules aussi carrées et doit accepter dans les premiers temps une forme de soumission.

© Casterman / Pastor

Réalisé de façon traditionnelle, au pinceau et en couleur directe, dans un lavis à l’encre bleue des plus subtiles, l’album d’Anthony Pastor est une petite merveille graphique en même temps qu’une oeuvre sensible à l’air du temps, à nos questionnements, aux questionnements de l’auteur lui-même qui trouve ici, dans ce genre très masculin, l’occasion d’exprimer sa position d’homme féministe refusant, dit-il, « le rôle assigné de la domination et son héritage« .

Bien évidemment, La Femme à l’étoile reste avant tout une fiction, un divertissement au scénario parfaitement ficelé, aux atmosphères oppressantes à souhait, aux psychologies fouillées, des personnages qui au fil de l’histoire nous dévoilent leurs blessures profondes, un récit où l’intime finit par côtoyer l’universel. Brillant !

Eric Guillaud

La Femme à l’étoile d’Anthony Pastor. Casterman. 27€ (en librairie le 5 avril)

25 Mar

Clear de Scott Snyder et Francis Manapul : un futur avec filtre

Et si les filtres n’étaient plus réservés à nos seules photographies Instagram mais pouvaient modifier la réalité selon nos envies. C’est ce qu’ont imaginé l’Américain Scott Snyder et le Philippino-canadien Francis Manapul dans ce récit haletant au graphisme et au scénario d’une très grande richesse…

Vous lisez cette chronique sur l’écran d’un ordinateur ou d’un smartphone ? Alors vous êtes totalement has been, d’un autre siècle. Dans celui qu’imaginent ici Scott Snyder et Francis Manapul, plus de supports, tout est dans la tête.

Et quand je dis dans la tête, c’est physiquement dans la tête, grâce à un implant cérébral qui permet à tout un chacun de se connecter avec le monde réel et de l’adapter à ses envies. Vous voulez revivre les années 1980 ? Vous inviter dans un film porno ? Dans un monde de zombies ? Pas de souci, il suffit de choisir le bon filtre ou voile, une petite innovation technologique qui a mine de rien changé la face du monde.

Et surtout permis à beaucoup d’oublier la sombre réalité, notamment cette troisième guerre mondiale ou guerre rouge, appelez-là comme vous voulez, perdue par les États-Unis, gagnée par la Chine et la Russie.

Dans cet avenir pour le moins sombre, l’ancien flic devenu détective privé, Sam Dunes, a choisi lui de vivre sans filtre, en mode « clear ». Il a ainsi tout le loisir de voir les choses telles qu’elles sont, et ce n’est pas franchement joli joli… Alors, lorsqu’on l’appelle pour venir reconnaître son ex-femme raide morte sur une table d’autopsie, et qu’on lui parle d’un suicide, Dunes pourrait se contenter de cette version mais il n’en croit pas un mot. Et il a bien raison…

La couverture annonce la couleur, Clear est un petit bijou graphique au scénario implacable, Snyder et Manapul ayant imaginé là un futur effrayant à souhait où l’homme aurait finalement choisi de se résigner en se voilant la face dans tous les sens du terme. Du polar à la mode SF ou l’inverse bigrement bon !

Eric Guillaud

Clear, de Scott Snyder et Francis Manapul. Delcourt. 16,95€. En librairie le 29 mars.

© Delcourt / Snyder & Manapul

19 Mar

L’Année fantôme de Didier Tronchet ou la face cachée des amuseurs

Si l’humour peut faire du bien, il peut aussi être affreusement dévastateur. À sa manière et à travers le portrait d’un humoriste qui pourrait lui ressembler un peu, Didier Tronchet invite chacun de nous à la réflexion sur les limites de l’exercice et sur ce qu’il peut cacher. Avec beaucoup de sensibilité et un poil de drôlerie…

Il s’appelle Gilles Collot-Sopiédard, mais tout le monde l’appelle Collot, un drôle de nom pour un drôle de bonhomme. Son métier : faire rire ! Et faire trembler aussi. Car son humour n’a d’égal que sa férocité. Dans le journal où il signe une chronique quotidienne, on le vénère. Sur la place de Paris, on craint ses mots.

« Hé, Collot ! T’as encore sorti le lance-flamme! ».

En position de sniper, Collot flingue à tout va. C’est la guerre. La guerre du bon mot au bon moment. Et pour la gagner cette guerre, Collot doit rester en permanence sur le qui-vive, dégainer le premier, sortir l’artillerie lourde si nécessaire. Rester au top. Toujours. jusqu’au jour où, en direct à la télévision, le bon mot finit par lui échapper. Et de perdre pied…

On aurait presque oublié que Collot est aussi un homme avec ses blessures, ses manques, ses interrogations. Sa psy tente de l’aider mais sa biographie a pas mal de trous, et notamment cette année 1986 qui a disparu des radars. Pas une photo, pas un souvenir. Comme si on avait voulu l’effacer de sa mémoire. Mais pourquoi ?

Oui pourquoi ? C’est toute la question de ce récit qui explore la faille intime d’un protagoniste en apparence solide comme un roc. Mais Gilles Collot-Sopiédard ou Collot-Sopiédard Gilles (prononcez bien toutes les syllabes) se révèle plus fragile, plus humain et donc plus attachant qu’il ne peut laisser paraître de prime abord.

Bien que ce récit ne soit pas revendiqué comme une autobiographie, on y retrouve bien évidemment pas mal de l’auteur qui, comme son héros, a commencé en tant que journaliste, avant de de faire connaître dans la bande dessinée avec un humour particulièrement féroce et un regard aiguisé sur la misère humaine. Ici, l’humour est disons tempéré, Tronchet offrant un portrait touchant et en même temps une réflexion sur l’humour et sa place dans notre société.

Eric Guillaud 

L’Année fantôme, de Didier Tronchet. Dupuis. 27€

@ Dupuis / Tronchet

17 Mar

Grandville : un présent alternatif où les animaux ont pris la place des hommes et où la paranoïa est générale

La maison d’édition indépendante Delirium continue son œuvre de salubrité publique en rééditant l’univers du magazine britannique ‘déviant’ 2000 AD. Œuvre de l’un des auteurs phares de la revue publiée à part, Grandville est une passionnante uchronie policière.

Le plus fascinant avec ce premier tome de Grandville, ce sont ses différents niveaux de lecture.

On y trouve d’abord une uchronie assez subtile, c’est-à-dire une reconstruction fictive de l’histoire. Dans ce monde parallèle, tout diverge à partir de l’accession au pouvoir de Napoléon. Au lieu de perdre la bataille face aux anglais et d’être déchu, ici l’Empereur a remporté la victoire et envahit la perfide Albion avant d’y décapiter la famille royale. L’Angleterre est désormais gérée comme une sorte de colonie officiellement autonome mais avec lesquels les relations sont très tumultueuses.

La capitale de l’Empire est toujours Paris mais a été rebaptisée Grandville. L’action se passe dans un décor très steampunk, mélangeant technologie rétro-futuriste et décors et costumes d’inspiration Art Nouveau. En découle une atmosphère à la fois feutrée et décadente, entre un croisement entre les aventures d’Adèle Blanc-Sec, Sherlock Holmes et Jules Verne. Une impression renforcée par le souci du détail et les nombreux clins d’œil à la pop culture éparpillés à droite et à gauche – le lecteur peut par exemple au détour d’une case y croise les personnages de Bécassine ou Spirou – mais aussi à des artistes ayant réellement existé au tout début du XXème siècle, comme Alfred Mucha ou l’actrice Sarah Bernhardt. 

@ Delirium / Talbot

Mais le plus fascinant reste ce choix de personnages d’animaux anthropomorphes, parmi lesquels évoluent quelques êtres humains réduits à des tâches purement subalternes et transparents alors que leurs ‘maitres’, eux, s’aiment, se détestent, se battent ou débattent avec passion. Le héros de l’histoire l’illustre bien : envoyé par Scotland Yard pour enquêter sur une série de meurtres et de suicides mystérieux, L’inspecteur LeBrock semble d’abord évoquer (forcément) d’abord du 10, Downing Street avant d’évoluer vers quelque chose de plus ambigu, où son esprit de déduction n’est pas sa seule arme, ce qui le rend plus impitoyable et donc bien plus intéressant.

@ Delirium / Talbot

Enfin, l’ambiance lourde et complotiste dans laquelle ce premier volume baigne renvoie forcément à une époque un peu oubliée de l’histoire mondiale, celle de quasi-insurrection en Europe après la crise de 29. Une époque trouble où pullulaient alors sociétés secrètes et autres milice d’extrême droite (on pense beaucoup à la Cagoule) et d’extrême gauche, visant toutes à renverser le gouvernement en place. Un cadre paranoïaque où tout le monde était un potentiel ennemi… Ou une potentielle victime. Pas étonnant au final de retrouver derrière cette brillante aventure policière romanesque tordue ça l’un des auteurs phares de la revue 2000 AD (Judge Dredd, Nemesis) Bryan Talbot qui cumule ici les postes de scénariste et dessinateur.

 noter que par rapport à la première version française de 2011, celle-ci contient une trentaine de pages de bonus, avec croquis et commentaires de l’auteur. Enfin, un deuxième tome (sur cinq prévus au total) sortira le 7 avril prochain.

Olivier BADIN

Grandville de Bryan Talbot. Delirium. 22.