04 Avr

Déam’Bulle : deux jours pour fêter la bande dessinée à Pornichet les 6 et 7 avril

Un super-festival avec des super-auteurs et des super-héros, il y aura du superlatif dans l’air ce week-end à Pornichet où se tient la deuxième édition du festival BD Déam’Bulle. Yoann, le dessinateur actuel des aventures de Spirou et Fantasio, en est l’invité d’honneur…

@ Yoann

En deux petites éditions seulement, le festival Déam’Bulle a trouvé ses marques investissant durant deux jours la ville de Pornichet, depuis la Rotonde jusqu’au Quai des arts, en passant par la médiathèque J. Lambert, le Bois joli, le Bd de la République ou encore le Centre de congrès.

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03 Avr

Tout va bien : un parcours de l’intime signé Charlie Genmor

On n’a pas tous les jours 20 ans. Et pour Ellie, c’est plutôt une bonne nouvelle. Confrontée à sa première histoire d’amour, la jeune-femme voudrait que tout aille bien, dans son corps comme dans son esprit. Mais ce n’est pas vraiment le cas, les interrogations sont nombreuses, les émotions se bousculent, de quoi lui donner des envies de vieillir. Tout va bien raconte son parcours intime au milieu de l’amour, une histoire vraie, l’histoire de Charlie Genmor alias Anna Lkiss…

Vous connaissez la méthode Coué, l’autosuggestion par la répétition de phrases positives et motivantes ? C’est un peu ça l’album de Charlie Genmor, tout au moins dans le titre. Parce que pour le reste, dès le dessin de couverture, on comprend que tout ne va pas si bien que ça pour la protagoniste, on la voit surtout sombrer dans les profondeurs de son âme.

« On sourit, on souffle et puis on a 20 ans ». Ellie déteste les anniversaires. Aussi loin qu’elle s’en souvienne, elle a toujours pleuré ces jours-là. Aujourd’hui aussi, elle pleure. De ne jamais être tombée amoureuse, de n’avoir jamais senti d’attirance pour quelqu’un, d’avoir toujours repoussé les éventuels prétendants. Elle pleure et elle déprime. Une dépression chronique. Même l’arrivée d’Archimède dans sa vie ne parvient à soigner ses blessures.

Archimède est pourtant le genre de garçon plutôt gentil, attentif, patient. Avec lui, Ellie voudrait être normale, l’embrasser, faire l’amour, comme font tous les amoureux du monde. Mais quelque chose ne tourne pas rond. Chaque approche physique se termine par une crise d’angoisse. Ellie ne serait pas faite pour l’amour ?

Ellie, c’est Charlie Genmor, une personne non binaire, c’est à dire une personne qui ne se sent ni homme, ni femme. Avant de s’appeler Charlie Genmor, l’auteur de ce récit autobiographique s’appelait Anna Lkiss. C’est sous cette dernière identité qu’il a commencé le livre, c’est sous une identité masculine qu’il vit aujourd’huiDans Tout va bien, il raconte son histoire d’amour peu ordinaire avec Archimède.

Il raconte surtout avec beaucoup de finesse sa dépression chronique et ce malaise permanent qui l’empêche de vivre pleinement sa vie de jeune-fille. Il raconte son parcours intime peut-être pour se comprendre, mieux se connaître, mais surtout pour faire « du bien aux gens », c’est ce qu’il fait dire en tout cas à son personnage, « c’est probablement le genre d’histoire que j’aurais voulu lire étant plus jeune. ». Ça lui aurait sans doute ouvert les yeux sur le fait qu’il était non binaire. Mais attention, Tout va bien n’aborde pas cette thématique, tout simplement parce que Charlie Genmor n’avait pas conscience à l’époque de cette histoire d’amour qu’il était une personne transgenre.

Reste que Tout va bien aborde quantité de sujets intimes avec beaucoup d’intelligence, de finesse et de sensibilité. Et que dire du graphisme ? Sobre, fin et efficace, il trouve toute sa puissance émotionnelle dans un camaïeu de bleu soigné.

Eric Guillaud

Tout va bien, de Charlie Genmor. Delcourt. 18,95€

30 Mar

Les Nuisibles : le regard ultra-sensible de Piero Macola sur notre monde impitoyable

Piero Macola aime poser son regard sur le monde en empruntant indifféremment le registre de la fiction ou du documentaire. Après Aller simple, Le Tirailleur ou encore Kérosène, il revient avec Les Nuisibles chez Futuropolis, l’histoire de deux personnages qui vivent à la marge et, pour des raisons différentes, essaient de se rendre le plus transparent possible. De quoi les prendre un peu trop rapidement pour des nuisibles…

L’histoire que nous raconte Piero Macola se déroule de nos jours en Italie, dans la plaine du Pô précisément. Mais elle pourrait être très facilement transposée dans n’importe quel coin du monde tant son propos est universel. Reste que les paysages, le fleuve notamment, le brouillard très présent dans cette région, sont importants pour le récit et peut-être plus encore pour l’auteur, qui touche ici du doigt ses racines familiales.

Au centre du récit, Anton et Bruno, aucun point commun entre les deux personnages, le premier est un émigré de fraîche date prêt à travailler dans les pires conditions pour gagner une misère et espérer rejoindre un jour ce qu’il croit être le paradis sur Terre : la Suède. Le deuxième est un jeune Italien qui vit à la marge, il est gardien de péage sur un pont et file un coup de main à Maria, une vielle femme dont le mari vient de mourir.

Aucun point commun entre les deux je vous disais, aucun sauf… la peur, un sentiment dont l’auteur avait ici envie de parler, une peur inconsciente pour Bruno qui remonte à son enfance et à une mauvaise rencontre, une peur plus concrète pour Anton qui travaille au black sur les chantiers jusqu’au jour où il fait une chute et se retrouve coincé dans un lit, caché de tous par ses employeurs indélicats.

Les Nuisibles, c’est l’histoire d’un croisement entre deux trajectoires obliques, celles de deux hommes qui ne trouvent pas vraiment leur place, des êtres invisibles aux yeux des autres, oui invisibles mais en aucun cas nuisibles. Pour Piero Macola, les nuisibles sont ailleurs, plutôt parmi ces profiteurs de la misère, chefs de chantier ou promoteurs immobiliers peu scrupuleux et cruels.

Pour raconter cette histoire, Piero Macola a choisi d’utiliser des crayons de couleur qui lui ont permis de travailler les lumières, les couleurs, les teintes et de nous offrir de superbes atmosphères, notamment autour de ce fleuve. Gros coup de cœur !

Eric Guillaud

Les Nuisibles, de Piero Macola. Futuropolis. 20€

28 Mar

Lucien et les mystérieux phénomènes : une fiction pour imaginer la vie autrement signée Delphine le Lay et Alexis Horellou

Changer nos habitudes, consommer autrement, viser le zéro déchet, respecter la nature… Impossible ? Pour Delphine le Lay et Alexis Horellou, c’est au contraire possible et même aujourd’hui nécessaire. Leur nouvel album, Lucien et les Mystérieux phénomènes paru chez Casterman, est en tout cas fait pour éveiller les consciences des plus jeunes. Un bon début…

Ces deux-là nous ont habitué à avoir des choses à dire. Qu’ils utilisent le mode documentaire avec Plogoff et Cent Maisons ou le mode fiction avec Ralentir et aujourd’hui Lucien et les Mystérieux phénomènes, c’est toujours avec un objectif bien précis : nous faire savoir qu’un autre monde est possible et que tout ça dépend de nous.

Alors, allez-vous me dire, ils vont nous faire la morale, pire encore nous faire culpabiliser. Mais non !  Delphine et Alexis savent très bien que ça ne sert à rien, mieux vaut y aller par petites touches, en explorant et proposant des pistes, en les mettant en scène dans des histoires comme celle-ci.

« Vivre autrement demande de faire des efforts… », nous déclaraient Delphine et Alexis en 2017 au moment de la sortie de Ralentir. « Or rien ne nous incite à en faire. Tout nous maintient dans la recherche du confort matériel et donc de la sécurité financière. L’argent est un fléau. Nous détruisons tout pour lui. Et c’est quelque chose de si puissant, que nous ne reviendrons jamais en arrière (sauf quelques uns). Donc, un jour, il n’y aura plus d’internet, de réseaux sociaux et d’info en temps réel. Ce jour-là, il faudra réapprendre tout ce qu’on a perdu. Et si on arrive à ne pas s’entretuer, peut-être que ceux qui auront fait le choix de vivre autrement pourront filer quelques coups de mains… »

Avec Lucien et les Mystérieux phénomènes, Alexis et Delphine nous parlent une nouvelle fois de décroissance, de consommation raisonnée, de zéro déchet, à travers l’histoire d’un gamin, Lucien, citadin fraîchement débarqué dans un petit village avec ses parents.

Ce qui commence comme le récit d’un retour à la campagne prend des allures de récit fantastique avec la découverte d’un château qu’on dit hanté.

En guise de fantôme, Lucien y rencontre un homme qui a décidé de vivre autrement, de se retirer du monde et de vivre en autosuffisance. Son nom ? H. Price. Oui comme le chasseur de fantômes Harry Price. Sauf que lui se prénomme Honoré.  A son contact, Lucien découvre une nouvelle vision de la vie…

Comme toujours avec notre tandem mayennais, l’album allie un graphisme très agréable, avec des influences Art nouveau dans la mise en page, et un scénario intelligent qui pousse à la réflexion. Mission remplie !

Eric Guillaud

L’empreinte de H. Price, Lucien et les Mystérieux phénomènes (tome 1), de Delphine Le Lay et Alexis Horellou. Casterman. 16€ (sortie de l’album le 3 avril)

@ Casterman / Le Lay & Horellou

25 Mar

L’anxiété, quelle chose étrange : Steve Haines et Sophie Standing explorent une émotion complexe

On la présente souvent comme le nouveau mal du siècle, elle touche chacun de nous à des degrés plus ou moins élevés, l’anxiété est au coeur de cet ouvrage, un précis de vulgarisation en bande dessinée signé par deux Anglais, le chiropracteur Steve Haines et l’illustratrice Sophie Standing…

L’anxiété ne connaît pas la crise ni les frontières. Ses causes, ses conséquences, sont les mêmes que vous soyez anglais ou français, américains ou chinois. Et chacun de nous y est confronté, elle serait d’ailleurs nécessaire à petite dose nous apprend ce livre pour avancer, faire, sans verser dans l’excès de confiance. Seuls les psychopathes en seraient dépourvus.

Paru dans la même collection que La Douleur et bientôt Le TraumaL’Anxiété, quelle chose étrange se donne pour objectif d’expliquer de façon simple une émotion pour le moins complexe qui peut avoir des origines très diverses.

« Ne tombez pas dans le piège qui consiste à penser que l’anxiété est simplement dans votre tête », explique Steve Haines. De mauvaises habitudes alimentaires, la pression à la maison, au travail, dans le cercle d’amis, une douleur persistante, un traumatisme remontant à l’enfance… peuvent être autant de déclencheurs de l’anxiété.

Mais Steve Haines, avec un langage adapté, et Sophie Standing, avec un dessin stylisé et des astuces narratives, ne s’en tiennent pas à énumérer les causes et les symptômes, ils essaient de nous donner les clés nécessaires à la compréhension du phénomène et des pistes d’action, des outils, pour la combattre. Bien utile en ces temps vécus par beaucoup comme anxiogènes !

Eric Guillaud

L’Anxiété, quelle chose étrange, de Steve Haines et Sophie Standing. Ça et là. 12€

24 Mar

Les Clés de la bande dessinée : une grande leçon de graphisme et de narration signée Will Eisner

Inutile de le présenter, Will Eisner est l’une des grandes figures de la bande dessinée mondiale, un raconteur exceptionnel, un dessinateur hors pairs, qui contribua à révolutionner le genre et modifier profondément et durablement le regard de tout un chacun sur un art jugé très longtemps mineur…

C’est une somme, plus de 500 pages abondamment illustrées, une référence sur la théorie et la mécanique de la bande dessinée publiée à partir de 1985 et régulièrement mise à jour par l’auteur lui-même, jusqu’à sa mort en 2005. Aux États-Unis, on ne compte plus le nombre de réimpressions, en France, les ouvrages ont été publiés en trois volumes entre 2009 et 2011 avant de se trouver judicieusement réunis dans cette intégrale.

À qui s’adresse ce livre ? À tous, aux professionnels du neuvième art bien sûr, mais aussi aux autres, fans inconditionnels du genre, amateurs de belles histoires, critiques… En vrac, on y apprend la gestion du temps, le cadre, l’anatomie expressive, l’art séquentiel et ses applications, l’histoire de la narration, le processus d’écriture, la mécanique humaine, les muscles, la tête, les émotions humaines… bref tout ce qui est nécessaire pour raconter une histoire en images.

L’approche est sérieuse mais jamais ennuyeuse, chaque propos s’appuyant sur des exemples, des illustrations signées Eisner mais pas que. Cette intégrale s’inscrit dans le programme d’intégrales consacrées aux plus grandes oeuvres de Will Eisner, telles que New York Trilogie, publiée fin 2018, Un pacte avec Dieu qui le sera fin 2019.

Eric Guillaud

Les Clés de la bande dessinée, de Will Eisner. Delcourt. 39,95€

Fluide Glacial s’attaque aux super-héros. Hollywood, Marvel et tous les super-méchants du monde n’ont qu’à bien se tenir…

Le 21 Mars. Premier jour du printemps et sortie du nouveau hors-série de Fluide Glacial. Comme le premier, le second est bon pour la santé, surtout celle des zygomatiques et de tous ceux qui sont allergiques à ces mecs en spandex qui, sous prétexte de sauver le monde tous les quatre matins, nous empêchent de tisser tranquille.

Un numéro spécial super-héros qui débarque d’ailleurs trente-sept ans après un premier HS consacré au seul, l’unique, l’indestructible, que dis-je, l’énormissime SuperDupont. Oui, SuperDupont, le super moustachu en charentaises qui combat inlassablement les soldats de l’AntiFrance en charentaises avec sa baguette sous le bras. Donc les super-mecs et Fluide Glacial, cela ne date pas d’hier. D’ailleurs, on a ressorti pour l’occasion deux apparitions du gugusse. Une première fois lorsque Gotlib avait réussi à convaincre son idole Harvey Kurtzman – le créateur de Mad Magazine, influence première totalement assumée – de scénariser la première visite de l’homme au super-béret au pays de l’Oncle Sam. Puis lorsque sept ans avant, le papa de Gai Luron lui-même s’était amusé à croquer sa rencontre délirante avec le Surfeur d’Argent, rebaptisé pour l’occasion le Patineur d’Argent. Deux gros clins d’œil à celui qui lança le magazine le 1er Avril (cela ne s’invente pas) 1975 et qui nous a quitté, ce con, en Décembre 2016.

C’est là la seule séquence nostalgie d’un numéro de 100 pages sinon blindé de mecs super-balèzes, super-poilants et surtout, super-très-cons et à la thématique générale très portés sur la philosophie, les conseils de jardinage et comment réussir à ouvrir une douzaine d’huîtres en trente secondes (ami lecteur, sauras-tu reconnaître quelle partie de cette phrase interminable est fausse ?). Mention spéciale à ces ‘futurs nouveaux comics’ où entre Silver Trollboy (« trois ennemis redoutables cherchent à contrecarrer ses plans : la brigade du net, l’orthographe et la syntaxe ») ou Rigolomax Stan Dupper, on retiendra surtout ‘L’Incroyable Jean-Hulk’, « un géant jaune aux yeux exorbités (…) capable de faire manger son micro à un journaliste de France 3. » Quelle bande de cons.  Et c’est pour ça qu’on les aime.

Olivier Badin

Fluide Glacial  HS n°86, spécial ‘super-héros’, 6,50 €

22 Mar

Le Dernier Atlas : le projet fleuve de quatre auteurs nantais

Ils sont quatre, quatre Nantais, des auteurs confirmés dans le milieu de la bande dessinée. Ils ont décidé de s’associer autour d’un projet à grande échelle. Trois volumes, six cents pages, un polar tendance SF, ou l’inverse, avec des vrais morceaux de robots géants à l’intérieur. Rencontre…

Gwen, Hervé et Fabien @ éric guillaud

Fabien Vehlmann, Gwen de Bonneval, Hervé Tanquerelle, Fred Blanchard. Si vous vous intéressez un minimum à la bande dessinée, alors ces quatre noms vous parlent forcément.

Le premier est le scénariste actuel des aventures de Spirou et Fantasio, mais aussi de la série Seuls adaptée au cinéma en 2017, le deuxième a signé Adam et Elle ou plus récemment Polaris ou la nuit de Circé, le troisième a réalisé le dessin et écrit le scénario de Groenland Vertigo, le dessin de Professeur Bell ou de La Communauté, enfin le dernier, directeur du label Série B des éditions Delcourt, est aussi designer pour la BD et le cinéma, associé à une multitude de projets parmi lesquels le récent Renaissance

Et il fallait bien des auteurs de poids pour porter ce nouveau projet. Le Dernier Atlas, c’est d’abord plusieurs centaines de tonnes d’acier, un robot géant comme vous n’en avez jamais vu, élaboré aux chantiers de Saint-Nazaire pour la reconstruction de la France et peut-être pour d’autres missions moins avouables.

Mais c’est aussi un scénario exigeant, un mélange savamment dosé de polar et d’uchronie qui nous emmène des rues de Nantes au parc de Tassili en Algérie, en passant par la ville de Darukhana en Inde, une bande dessinée de divertissement enrichie par une volonté affichée de poser un regard lucide sur notre monde et son passé, notamment sur la guerre d’Algérie.

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19 Mar

Fables amères : onze histoires courtes signées Chabouté

Dix ans après le premier volet de Fables amères, Chabouté renoue avec le format court qui en dit long sur son talent. Onze histoires, autant d’instantanés de vie,  de petits riens qu’on ne relève plus et qui font pourtant la vie…

À mes yeux, mais je ne crois pas être le seul à partager ce sentiment, Chabouté fait partie des auteurs incontournables de la BD francophone, un raconteur exceptionnel qui fait passer beaucoup de choses par son dessin, lui aussi exceptionnel, un noir et banc ultra-maîtrisé qui nous happe littéralement.

Terre-Neuvas, Tout seul, Zoé, Sorcières, Moby Dick, Construire un feu…. chacun de ces livres est un petit bijou graphique et scénaristique qui n’abuse jamais de la parole. Avec lui, l’essentiel a toujours été dans l’image et dans les silences.

C’est encore le cas ici avec ces onze histoires courtes réunies dans le deuxième volet des Fables amères. Tout est dans le titre, des fables au goût amère, et dans le sous-titre, Détails futiles. Des détails, oui, des petites choses que nous ne remarquons pas forcément mais qui ne passent pas inaperçues aux yeux de Chabouté. Des « événements insignifiants, minuscules impairs, maladresses anodines… » peut-on lire en dernière de couverture. Mais des événements qui font le monde, le rendent parfois beau, parfois moche.

Avec Chabouté, pas de mauvaises surprises, on parle de l’humain avec humanité. Et ça fait toujours mouche. Comme ce jeune militant fascisant pris en stop par un musulman ému de le voir sur le bord d’une route déserte sous une pluie battante. C’est la première histoire de ce nouveau recueil, pas un mot, juste des regards, des attitudes et des hommes.

Eric Guillaud

Détails futiles, Fables amères tome 2, de Chabouté. Vents d’Ouest. 13,90€

16 Mar

White Spirit : un récit décapant signé Dédo et Weldohnson

Si vous avez le cerveau embué sous une épaisse couche de morosité visqueuse et cherchez quelque chose pour décaper tout ça, alors voici notre prescription : une bonne dose de White Spirit, album complètement trash tendance drôle... 

« Il a autant de talent qu’un bon mètre carré de pelouse… De la pelouse de mauvaise qualité, qu’on aurait plantée dans le désert du Sahel… Sur laquelle on jouerait un match de rugby toutes les 4 heures… ». Bref, n’en rajoutez pas, vous l’aurez compris, Pascal, jeune Parisien et accessoirement protagoniste de cette histoire, déteste l’artiste qui expose ce soir-là à la galerie Ombrage.

Alors, pourquoi me direz-vous se retrouve-t-il là en plein milieu du vernissage ? Pour faire de la figuration ou des rencontres peut-être. Il en fait une d’ailleurs, Sandrine. Ils resteront ensemble pendant trois années… aussi ennuyeuses que le reste de sa vie.

Mais les choses vont subitement changer. À la suite d’une séance de spiritisme avec des amis, où il abusera de son humour corrosif, le jeune-homme voit son frère débarquer chez lui, un bras en moins, la gueule cassée.

Le souci, ce n’est pas tant son aspect physique mais sa présence même, ici, maintenant, dans la chambre de Pascal. Et pour cause, Adrien, c’est son nom, est mort huit ans auparavant dans un accident de voiture.

Pascal n’aurait jamais dû plaisanter avec l’au-delà. À partir de ce moment-là, sa vie devient un enfer, de quoi regretter sa vie ennuyeuse…

Publié dans la jeune collection Une Case en moins! des éditions Delcourt, White Spirit est la première bande dessinée d’un tandem qui pourrait bien faire parler de lui à nouveau, Dédo l’humoriste au scénario, Weldohnson au dessin. Dialogues percutants, dessin sombre et nerveux, personnage principal détestable à souhait, histoire à la fois drôle et gore… C’est clair, White Spirit est un bon décapant pour la morosité ambiante.

Eric Guillaud

White Spirit, de Dédo et Weldohnson. Delcourt. 16,5€

@ Delcourt / Dédo et Weldohnson