Après avoir colonisé tout ce qu’il y avait à coloniser sur Terre, et au passage dilapidé toutes les ressources disponibles, l’homme doit se résigner à trouver un autre os à ronger et accessoirement un nouveau gîte d’accueil. Et pourquoi par Mars ? C’est le parti pris de Sylvain Runberg et Grun dans ce très bel album paru aux éditions Daniel Maghen. En route pour 2132…
Coloniser Mars oui, ruiner la population terrienne non ! Les services RH et financiers n’auront pas à sortir la calculette et remuer le chiffon rouge des ETP, vous savez ces fameux équivalents temps plein qui régissent aujourd’hui la vie des entreprises, l’idée est toute trouvée : envoyer tous les repris de justice y bâtir la nouvelle colonie, une main d’oeuvre qui coûte absolument rien, nada, et qui ne discute pas, ne demande rien. Le rêve quoi ! Et ça bétonne dur comme ça depuis 20 ans maintenant. Une dizaine de cités dômes sont en construction pour les colons libres, des habitats confortables, agréables et autosuffisants en énergie, bref le bonheur pour tous… sauf bien sûr pour les condamnés à l’exil.
« Ça vous aura pris plus de six mois pour arriver ici… Ça ne vous prendra pas vingt-quatre heures pour comprendre comment fonctionne le plus grand camp de travail jamais construit dans notre système solaire. »
Jasmine Stanford est flic. Ou plutôt, elle était flic jusqu’à ce qu’elle foire une mission en tuant une gamine de 15 ans. Pour elle, ce sera 20 ans. 20 ans à casser du caillou et couler le béton pour les autres sur la planète rouge. Les conditions de travail sont rudes, il y a souvent des accidents, des morts, les violences entre prisonniers sont quotidiennes et l’environnement général n’est pas franchement idéal pour se refaire une opinion toute neuve sur l’humanité…
L’avantage avec cet album de Sylvain Runberg et Grun, c’est que vous n’avez nullement besoin pour comprendre l’intrigue d’avoir absorbé et digéré tout ce qui se fait en science fiction depuis des décennies. Aucune culture spécifique n’est demandée et, franchement, ça fait du bien. On repart de la base, le scénario est simple mais pas simplet et les planches de Grun, grand admirateur de Moebius, ancien designer de décors et de personnages dans une société de production de jeux vidéos, sont tout simplement magnifiques. Un cahier graphique en fin d’album, réunissant grandes illustrations en couleur et recherches graphiques, permet d’admirer plus encore son immense talent. Une histoire prévue en trois volumes. On attend la suite avec une très grande impatience!
Eric Guillaud
On Mars (tome 1) de Sylvain Runberg et Grun. Éditions Daniel Maghen. 16€