30 Août

Le néo-Japon de Rai : le cauchemar de Philip K. Dick réinventé au XXXXIe siècle

rai 1Pas facile de se faire une place au soleil quand la plage est squattée depuis plusieurs décennie par deux géants qui n’ont laissé que des miettes aux autres. Après, les écuries MARVEL et DC COMICS pèsent un tel poids dans l’imaginaire populaire US depuis si longtemps qu’il faut limite être maso pour se lancer dans l’aventure… Pourtant, Valiant Comics réussit cet exploit et Rai est sûrement l’une de ses plus belles créations.

Pourtant, maso, VALIANT COMICS l’a été et il l’a payé cash, avec des débuts difficiles et une mise en sommeil forcé à la fin des années 90 pour cause de dettes abyssales. Au point qu’il a fallu attendre 2013 pour en voir les premières traductions françaises et 2015 pour qu’un nouvel éditeur, BLISS, prenne enfin les choses en main comme il se doit, aboutissant depuis peu à de nombreuses sorties attestant de la richesse d’un catalogue au milieu duquel Rai – attention, avis purement subjectif ! – trône presque sans pareil.

Nous sommes en 4001 et au Néo-Japon, sorte de gigantesque satellite crée à partie d’une portion de la Terre arrachée à la gravité et qui tourne autour d’une planète désormais ravagée par les guerres successives, règne Père, intelligence artificielle suprême devenue indépendante. Pour protéger une population asservie sans vraiment sans rendre compte, il a crée le Rai, ‘gardien du peuple’ en partie humain qui peut instantanément se téléporter partout pour sauver la veuve et l’orphelin. Sauf qu’après avoir découvert la vérité sur ses origines et que derrière cette belle façade se cache un monde totalitaire où chaque désir est cadenassé, le dernier de sa lignée décide de se rebeller…Rai 2

La thématique très Freudienne du ‘tuer le père’ est très populaire dans les comics donc en soit, Rai ne sort pas, a priori des sentiers battus et son univers cyberpunk rappelle invariablement ‘Blade Runner’ dont on attend d’ailleurs bientôt la suite au cinéma. Sauf que même si cette saga conséquente (deux fois 300 pages) étalée en douze chapitres sur deux volumes (plus un nombre négligeable de bonus revenant, entre autres, sur les origines du héros) met un certain temps à vraiment décoller, elle révèle un souffle sans pareil. Une grande partie du mérite revient à l’illustrateur Clayton Crain qui avait déjà repeint en noir la sage ‘Ghost Rider’ et dont le style épique et en même temps racé entre yakuza intergalactique et science-fiction crépusculaire a l’emphase nécessaire. Surtout qu’il est soutenu par un très intéressant travail sur les couleurs, à la fois éclatantes et en même temps avec toujours cette sous-teinte bleue froide, presque digitale qui colle si bien à cet univers post-apocalyptique, même cette approche quasi-numérique et parfois un peu trop figé ne sera pas du goût de tout le monde.

© Valiant Comics / Kindt & Crain

© Valiant Comics / Kindt & Crain

Et puis il y a aussi ce scénario d’abord faussement manichéen qui prend petit-à-petit pas mal d’épaisseur et s‘amuse à brouiller les cartes. On ne sait plus assez vite par exemple si l’on est désolé ou dégoûté par ces citoyens qui acceptent sans sourciller d’être abreuvé de propagande abrutissante ou de se voir imposer en guise de compagnons des androïdes nous ressemblant en tous points les ‘positrons’ pour mieux juguler la natalité. Ou encore comment aborder ce personnage principal qui apparaît d’abord comme une sorte de figure christique complice involontaire d’un système totalitaire, surtout le storytelling met donc un certain temps à prendre sa vitesse de croisière. Mais une fois dedans, difficile d’en sortir, même si les références abondent (Isaac Asimov, Philip K. Dick). Surtout qu’on a droit à quelques combats absolument dantesques qui auraient eu toute la place sur le film ‘Pacific Rim‘ de Guillermo del Toro, notamment les duels entre Rai et son créateur, pour parler à nos plus bas instincts.

Bref, de la science-fiction ambitieuse ET à la patte graphique assez unique. On vous disait bien qu’il y avait quelques belles pépites du côté de ce petit poucet, alias Valiant…

Olivier Badin

Rai (en deux volumes) de Matt Kindt et Clayton Crain, Valiant Comics, éditions Bliss. 28€

28 Août

Le dessinateur américain Miles Hyman nommé Chevalier des Arts et des Lettres

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Le Ministère de la Culture et de la Communication a accordé aujourd’hui le titre de Chevalier des Arts et des Lettres à l’auteur et dessinateur Miles Hyman. Une cérémonie de remise de distinction aura lieu à une date ultérieure, présidée par Bénédicte de Montlaur, conseillère culturelle de l’Ambassade de France à New York.

Miles Hyman s’est dit « surpris et ému » à l’annonce de sa décoration, évoquant la grande importance de la culture française dans son œuvre : « J’ai la chance de vivre et de travailler dans ce pays qui inspire des artistes du monde entier depuis des siècles, qui donne une si grande importance à la création artistique sous toutes ses formes. La diversité des personnes décorées par l’Ordre des Arts et des Lettres souligne l’importance du rayonnement culturel français à l’échelle internationale.  Pour ma part, je tiens à remercier tous ceux — artistes, écrivains, éditeurs, directeurs artistiques et galeristes — qui ont guidé et inspiré ma création depuis plus de trente ans. Ces personnes remarquables m’ont formé, ont fait de moi l’artiste que je suis aujourd’hui. Recevoir cette distinction, en plus de tout ce que la France m’a déjà offert, représente pour moi un honneur immense. Je suis infiniment touché pour cette reconnaissance de mon travail ».

Considéré comme le plus francophile des illustrateurs américains, Miles Hyman vient de signer dans la collection Aire Libre des éditions Dupuis Le coup de Prague avec le scénariste Fromental, une histoire d’espionnage dans la Vienne de l’après-guerre mettant en scène le scénariste Graham Greene venu faire des repérages dans la capitale autrichienne pour son film Le Troisième homme.

27 Août

Gold Star Mothers : les autres héros de la guerre de 14-18

goldStarsMothersElles n’ont pas affronté le feu nourri de l’ennemi, n’ont pas vécu le quotidien des tranchées, la boue, les rats, les morceaux de cadavres charriés par les pluies, elles n’ont pas senti l’odeur de la mort. Mais le fait d’avoir perdu un mari, un frère ou un fils sur les champs de bataille de l’autre côté de l’Atlantique en ont fait des héroïnes de la Grande guerre. Et l’état américain, reconnaissant, leur offre quelques années plus tard un aller-retour pour le vieux continent le temps d’un recueillement sur la tombe des Sammies morts au combat…

Lorsque la boucherie de la Grande guerre s’achève, 116 000 soldats américains ont perdu la vie dans les tranchées et autour. Autant de corps à rapatrier – ils le sont pour moitié – ou à enterrer sur place. Et de l’autre côté de l’Atlantique, des femmes, des mères, des soeurs, qui entament un long et douloureux travail de deuil.

Dix ans après la fin du conflit, le Congrès américain vote un budget afin de permettre à ces femmes américaines de se recueillir sur la tombe de l’être aimé. L’association des Gold Star Mothers encadre ces expéditions qui durent à chaque fois un mois. On en compte une dizaine au total entre 1928 et 1933, 6654 femmes américaines en bénéficient.

C’est dans l’une des ces expéditions que nous plonge le livre de Catherine Grive et Fred Bernard, au milieu de ces femmes qui ont pour noms Mrs Hartfield, Mrs Vanderbilt, Clara Throckmorton ou encore Jane Smith, l’héroïne principal, et sa mère.

Les auteurs nous racontent la traversée en bateau, les affinités qui se créent ou non entre les femmes, les quelques jours à Paris qui ressemblent plus à un séjour touristique qu’à un pèlerinage, le recueillement dans les cimetières américains du côté de Verdun… mais aussi et surtout, ce qui ne se voit pas, le chagrin de toutes ces femmes si différentes les unes des autres mais unies par l’épreuve.

Auteur complet, responsable et coupable de quelques pépites du livre jeunesse et de la bande dessinée (Une aventure de Jeanne Picquigny, La Tendresse des crocodiles, La Patience du tigre…), Fred Bernard nous embarque pleinement dans l’histoire grâce à son trait léger, presque frissonnant, parfait pour nous parler des années 30. Le scénario est écrit par Catherine Grive, publicitaire, productrice d’émissions de radio à France Culture, écrivaine, traductrice et dorénavant auteure de bande dessinée.

Un éclairage instructif sur un sujet peu connu tout au moins de ce côté-ci de l’Atlantique.

Eric Guillaud

Gold Star Mothers, de Catherine Grive et Fred Bernard. Éditions Delcourt. 16,95€

© Delcourt / Grive & Bernard

© Delcourt / Grive & Bernard

22 Août

Pages d’été. Sonora et Marshal Bass, deux westerns sinon rien !

1aa543f744863b30b4b2b83ee697a224C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Ces deux albums-là ont été publiés en même temps début juin aux éditions Delcourt, deux westerns qui sentent la sueur et la poudre, Sonora d’un côté réalisé par Pécau et Dellac, Marshal Bass de l’autre, de Macan et Kordey.

Barbet, Gervais et Fauchevent. Trois noms, trois excellentes raisons pour Maximilien Bonnot de débarquer en Californie. Nous sommes en 1851, en pleine ruée vers l’or, mais vous l’aurez compris, ce n’est pas le précieux métal jaune qui a attiré le jeune Français jusqu’ici. Maximilien Bonnot est venu plus prosaïquement pour se venger. Trois ans auparavant, son frère et ses amis ont été sauvagement massacrés par le sergent Barbet, les caporaux Gervais et Fauchevent, sur les barricades de la révolution française, celle de 1848. Maximilien s’est juré de ne jamais oublier son frère et ses amis de lutte et de retrouver ces trois-là pour les envoyer en enfer. Et c’est plutôt bien parti… ffce3150610eb17a9f59d5cc42ccba3bUn premier épisode qui promet pas mal d’action ! (Sonora, de Pécau et Dellac, 14,95€)

Changement de décor pour ce premier opus d’un diptyque mettant en scène le premier marshal afro-américain Bass Reeves ici rebaptisé River Bass. Après avoir échappé de justesse à la corde, Bass se voit proposer un poste d’adjoint au colonel Terrence B. Helena avec pour objectif d’arrêter un gang de noirs dirigé par un blanc qui se fait appeler Milord. S’il arrive à infiltrer le fameux gang, Bass Reeves ne fait pas longtemps illusion, se fait démasquer et doit alors faire face à la violence du gang et de son chef. Avec un graphisme et un scénario gonflés à la testostérone, et de magnifiques couleurs, Marshal Bass nous embarque pour une chevauchée haletante dans l’Ouest américain. Macan et Kordey n’en sont pas à leur première collaboration, tous deux s’étaient déjà retrouvés autour de Soldier X, une série de comics publiée chez Marvel, ainsi que sur Nous, les morts, série en 4 volets publiée chez Delcourt. (Marshal Bass, de Macan et Kordey. 14,95€)

Eric Guillaud

Le Malouin Michel Plessix, auteur des séries Julien Boisvert ou Le Vent dans les saules, est mort lundi

L’émotion est très vive sur les réseaux sociaux depuis l’annonce du décès de l’auteur breton Michel Plessix. L’auteur de Julien Boisvert, du Vent dans les saules, du Vent dans les sables et très récemment de Là où vont les fourmis sur un scénario de son ami Frank Le Gall est mort lundi matin d’une crise cardiaque. Son ancien éditeur, Delcourt, réagit ce matin par ces quelques mots…

Décrit comme un personnage « discret » qui « transpirait une gentillesse et une âme d’enfant infinie » (Daniel Alexandre, auteur BD), Michel Plessix était aussi de ceux qui couchaient les autres dans les festivals, aimant par dessus tout discuter et philosopher jusque tard dans la nuit comme le rappelle l’auteur Jacques Terpant…

Originaire de Saint-Malo, Michel Plessix débarque à Rennes pour des études de médecine qu’il arrête rapidement au profit de l’illustration puis de la bande dessinée. Avec son ami Dieter, il réalise La Déesse aux yeux de jade pour Milan et enchaîne – toujours avec Dieter –  sur la fameuse série Julien Boisvert pour Delcourt. Le tome 3 du Vent dans les saules lui permet de décrocher en 2000 l’Alph’Art du public au festival d’Angoulême et le Prix Max et Moritz. Après Le Vent dans les saules viendra Le Vent dans les sables puis Là où vont les fourmis en 2016 pour son nouvel éditeur Casterman.

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Michel Plessix avait remporté le Grand Prix de l’affiche au festival Quai des Bulles en 2016, lui offrant l’immense satisfaction de réaliser l’affiche de l’édition suivante, en l’occurence de l’édition 2017 qui se tiendra du 27 au 29 octobre. « Je n’y croyais plus. Cela fait quatre ans que ce sont des jeunes… », déclarait-il à nos confrères de Ouest France, « J’en ai longtemps rêvé. Alors, l’avoir, c’est le bonheur ».

Michel Plessix était un poète du neuvième art et son oeuvre un souffle de délicatesse dans un monde souvent féroce.

Eric Guillaud

20 Août

Gens de Clamecy : Edmond Baudoin et Mireille Hannon tirent le portrait d’une société idéale

Gens-de-ClamecyUn nouvel album d’Edmond Baudoin est toujours un événement pour ceux qui s’intéressent à la bande dessinée dite contemporaine. Cette fois, l’auteur de Couma acò, du Chant des baleines ou encore de Piero a décidé de tirer le portrait de gens de Clamecy et d’en faire un récit sur la liberté, l’égalité, la fraternité et la résistance en compagnie de Mireille Hannon. 

Pourquoi Clamecy ? Parce que cette petite ville de la Nièvre, qui compte moins de 4000 habitants, a une histoire singulière. Longtemps capitale du flottage du bois de chauffage entre les forêts du Morvan et Paris, Clamecy a toujours été très réceptive aux idées nouvelles et révolutionnaires venant de la capitale. En 1789, elle sourit à la Révolution. En décembre 1851, au lendemain du coup d’état de Louis-Napoléon Bonaparte, elle se révolte pendant deux jours pour défendre la IIe République. Une insurrection qui fît plusieurs morts.

Ce qui intéresse Edmond Baudoin aujourd’hui à Clamecy, ce n’est pas tant comment on vit avec ce passé et cet héritage aussi glorieux soient-ils mais comment on imagine, on rêve, on fantasme, le monde de demain, le monde idéal.

Au marché de Clamecy, dans les cafés, à la médiathèque, Edmond Baudouin pose ses crayons et invite les habitants à livrer un peu d’eux mêmes. Un portrait contre quelques confidences. La question est simple : Qu’est-ce qui serait pour vous une société idéale ?

Un monde où l’on entendrait tomber des arbres les crottes de chenilles…

Entre quelques petits rappels historiques, depuis l’instauration de la République de 48 jusqu’au coup d’état de Bonaparte en 1851… les habitants confient leurs espoirs d’une société meilleure, plus juste, où la santé et l’éducation seraient prioritaires aux intérêts du grand capital, où tous les hommes seraient égaux, où l’on accepterait les différences de chacun, où la monnaie aurait cédé la place au troc, où il n’y aurait plus de guerres, où la science pourrait soigner toutes les maladies, où chacun aurait de quoi nourrir et éduquer ses enfants, où l’hypocrisie serait bannie, où les villes retourneraient au végétal et où on entendrait tomber des arbres « les crottes de chenilles »

Aspiration, rêve ou utopie ? Appelez-ça comme vous voulez, l’espoir et la résistance valent toujours mieux que la résignation. Avec ces portraits, une quarantaine, Edmond Baudoin, tente de trouver des réponses à des questions qu’il se pose lui-même et que nous pouvons nous aussi nous poser. Auteur d’une quantité impressionnante d’ouvrages dont un grand nombre publiés à L’Association, Edmond Baudoin est un précurseur de ce qu’on appelle la bande dessinée contemporaine et notamment de la bande dessinée autobiographique. Ici, l’auteur convoque le passé pour parler d’avenir, d’un avenir qui ne demande qu’à être meilleur. Il ne tient qu’à nous de l’imaginer, semble nous dire Edmond Baudoin ! En librairie le 14 septembre…
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Eric Guillaud

Gens de Clamecy, d’Edmond Baudoin et Mireille Hannon. Éditions L’Association. 15€

© L'Association / Baudoin & Hannon

© L’Association / Baudoin & Hannon

16 Août

Pages d’été. La Bicyclette : une histoire au coeur de la seconde guerre mondiale à Singapour signée Cheah Sinann

Unknown C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Qui de mieux placé qu’un Singapourien pour raconter la seconde guerre mondiale de ce côté-ci de l’Asie ? L’auteur de ce roman graphique paru à La Boîte à bulles, Cheah Sinann, n’a bien évidemment pas vécu la guerre mais en connaît l’histoire avec un grand H et pas mal d’histoires avec des petits h, des histoires d’hommes et de femmes plongés au coeur de l’horreur. La Bicyclette en est une. Est-elle réelle, seulement inspirée de faits réels ou totalement imaginée ? Peu importe, elle aurait pu être véridique, tant le récit est fortement documenté et le contexte solidement planté.

C’est l’histoire d’un gamin des rues de Singapour qui rêve d’apprendre à faire du vélo et qui tombe sur un soldat japonais, un occupant, dont la seule ambition n’est pas de gagner la guerre mais de participer aux Jeux Olympiques en tant que cycliste. Nous sommes en 1942, les Etats-Unis sont entrés en guerre après l’attaque de Pearl Harbour et les Japonais viennent de conquérir la ville de Singapour après un périple de plus de 800 km – pour beaucoup à vélo – depuis la ville de Kota Bharu.

Entre les deux naît une amitié singulière mais à haut risque. L’un et l’autre pourraient être jugés pour trahison. Mais la passion du vélo est plus forte que les différences, plus forte que les préjugés, plus forte que la peur.

Même si le dessin ne m’a pas vraiment convaincu, La Bicyclette a le mérite de s’intéresser à un épisode de la seconde guerre mondiale peu connu de ce côté-ci de la planète. Les dernières pages du livre offrent quelques repères historiques non négligeables.

Eric Guillaud

La Bicyclette, de Cheah Sinann. Editions La Boîte à bulles. 15€

© La Boîte à bulles / Sinann

© La Boîte à bulles / Sinann

11 Août

Sortez les carottes, Lapinot fait son retour à L’Association…

couv_lapinot-e0481Lapinot ?  Vous avez dit Lapinot ? Le Lapinot de Lewis Trondheim ? Eh bien oui. On le croyait mort et enterré mais le revoici plus fringant que jamais dans de nouvelles aventures imaginées par le sieur Lewis Trondheim lui-même. L’album est annoncé pour le 21 août à L’Association – c’est un retour à la maison – dans un format standard de 48 pages MAIS AUSSI, sortez les carottes, dans une édition luxe avec dos toilé, couverture dédiée et cahier spécial de 16 pages, le tout pour 39€ MAIS ENCORE dans une édition superluxe, la même en tous points à une petite différence près, la couverture sera blanche, toute blanche, à charge pour l’acheteur d’y coller sa photo ou d’y faire un petit gribouillis ou, ce qui serait peut-être préférable, de coincer Lewis pour qu’il vous face une couverture originale et unique, une superdédicace en somme à 500 la bête tout de même !

Albums mais aussi ex-libris. Ils vous seront offerts dans le réseau des libraires indépendants. Et puis une sérigraphie tirée à 149 exemplaires dont 50 numérotés et signés pour L’Association à 90€. Il ne manque plus que les mugs et les tee-shirts !.

Eric Guillaud

10 Août

Pages d’été : Raven & l’ours, Hey Jude!, Yennega… trois BD pour les plus jeunes

9782203118409C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Ras-le-bol des histoires de chats ? Alors voici rien que pour vous une histoire de chien. Celui-ci est un boston terrier, Il s’appelle Jude et débarque sans prévenir dans le foyer de Julie – un cadeau d’anniversaire – contre l’avis de son père. Jude est tout petit mais a déjà un sacré caractère et aime par dessus tout jouer avec les chaussettes. Au point de les avaler, une première bêtise qui le conduit tout droit chez le véto. Pourra-t-il échapper à l’opération ? Je vous rassure, oui, il échappera à l’opération et survivra. Mais la vie de la petite famille va s’en trouver chamboulée. Sandrine Revel à qui l’on doit 9782849532843_1_75_1l’excellent N’embrassez-pas qui vous voulez chez Dupuis signe ici un récit plein d’humour mais aussi de conseils avec un cahier spécial donnant des astuces pour élever son chien, des jeux ou encore des recettes de friandises. Si vous n’aimez pas les chiens, passez votre chemin. (Hey Jude!, de Sandrine Revel. Éditions Casterman. 14)

Oui, passez votre chemin et jetez-vous sur Raven & l’ours. Pas de chien cette fois mais un ours. C’est tout aussi poilu me direz-vous mais ça n’aboie pas, c’est déjà ça de gagner. Lui s’appelle Dimas et elle c’est Raven, une gamine haute comme trois pommes à cidre qui s’est perdue dans la nature. À force de chercher ses parents partout, elle tombe sur l’ours qui dormait tranquillement dans sa caverne. Elle lui demande de l’aider à retrouver son chemin. Mais les choses ne vont pas être simples. Raven ne se souvient même pas dans quelle ville est sa maison. Commence alors un périple yennegaFemmeLionriche en rencontres, en péripéties et en énigmes. Personnages attachants, graphisme sobre et délicat, couleurs attractives, narration rusée, ce récit de Bianca Pinheiro est un bonheur, un bonheur simple mais efficace. (Raven & l’ours, de Bianca Pinheiro. Éditions La Boite à bulles. 14€)

Changement total d’univers, direction l’Afrique avec un conte signé Yann Dégruel et intitulé Yennega, la femme lion. Dans ce conte, il y a un royaume, et dans ce royaume un château, dans ce château, il y a un roi qui rêve d’avoir un fils, qui a finalement une fille. Peu importe, le roi élève cette fille, Yonnega, comme un garçon. Elle tue son premier lion à l’age de 14 ans, se fait remarquer à la chasse et au combat par son audace et son courage et finit par intégrer l’armée royale. De quoi rendre son père particulièrement fier, oui, jusqu’au jour où elle lui annonce qu’elle souhaite se marier et avoir un enfant. Scandale au château, le père est furieux ! Après Genz Gys Kan, Saba et la plante magique ou encore Haïda, Yann Dégruel nous offre l’adaptation en BD d’un vieux conte africain mettant en scène une femme libre, indépendante, intrépide, rebelle même contre l’autorité du père, bien décidée à mener sa vie comme elle l’entend en bousculant singulièrement les traditions d’une société fortement patriarcale. Divertissant et éducatif ! (Yennega, la femme lion, de Yann Dégruel. Éditions Delcourt. 9,95€)

Eric Guillaud

09 Août

Pages d’été : Demo, une exploration des affres de l’adolescence signée Becky Cloonan et Brian Wood

Couv_303837C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Voilà un beau pavé de près de 500 pages qui pourrait bien vous servir d’oreiller sur la plage après lecture, bien évidemment. Demo, c’est son nom, a débarqué en France en mai dernier sous pavillon Glénat, le tout en version intégrale et définitive, de quoi rassasier pour de bon tous ceux qui attendaient fermement ce qui est considéré comme un petit chef d’oeuvre du comics, qui a en tout cas rencontré un immense succès de l’autre côté de l’Atlantique au point d’être nommé comics indé de l’année par Wizard Magazine en 2004 et se retrouver en compétition pour deux Eisner Awards. Rien que ça ! Et quand je dis que les fans l’attendaient fermement, je fais light parce que pour de vrai, ils trépignaient d’impatiente depuis que le bouquin était paru en italien, en portugais et en allemand, c’était il y a maintenant plus de huit ans!

Bref, la vie appartient à ceux qui se lèvent tôt et savent patienter. Au scénario, on retrouve Brian Wood, à qui l’on doit DMZ, Channel Zero ou encore The Couriers, et au dessin, Becky Cloonan, une talentueuse dessinatrice influencée par le manga et par ailleurs responsable de la série East Coast Rising qui lui valut une troisième nomination aux Eisner Awards dans la catégorie « meilleure nouvelle série ». C’est clair, on n’a pas affaire à des amateurs!

Mais que raconte Demo ? Très bonne question. Demo s’intéresse à l’adolescence, vous savez cette période de la vie entre l’enfance et l’âge adulte qui est souvent source de multiples préoccupations. L’originalité ici, c’est que les auteurs parlent des ados, de leur vie, de leurs joies, de leurs peines, à travers des personnages qui collectionnent, en plus des questions existentielles, des superpouvoirs. Dix-huit histoires courtes en tout, indépendantes, concises et nerveuses, à lire entre deux petits ploufs !

Eric Guillaud

Demo, de Becky Cloonan et Brian Wood. Editions Glénat. 30€

© Glénat / Cloonan & Wood

© Glénat / Cloonan & Wood