10 Sep

Le Chemisier de Bastien Vivès : pas qu’une simple histoire de fringue !

On connaissait le faible pour ne pas dire le penchant de Bastien Vivès pour les poitrines qui en imposent. En cette rentrée 2018, il ne lâche rien et les habille cette fois d’un chemisier de soie qui change tout…

Un chemisier de soie peut-il bousculer une vie ? Oui, du moins sous la plume et le pinceau de Bastien Vivès. Lui qui, régulièrement, nous met face à des personnages féminins à poitrine généreuse, parfois trop (Les Melons de la colère, Les Requins Marteaux), poursuit sur sa lancée avec une nouvelle héroïne, Séverine, étudiante en lettres à la Sorbonne, totalement inhibée et atone. Jusqu’au jour où elle débarque chez un couple pour faire du baby-sitting et doit enfiler le chemisier en soie de la mère de famille à la suite d’un petit dérapage de vomi.

Elle que personne ne regardait, n’écoutait, attire subitement le regard et occupe l’esprit de tous les hommes qu’elle croise. Comme par magie. Mais ce n’est pas un tour de magie, le chemisier a simplement dévoilé les formes de son corps et surtout révélé sa personnalité. Elle se sent mieux, elle se sent femme, relève la tête, redresse le corps et décide enfin de vivre sa vie, ne plus la subir.

Mais que représente ce chemisier à ses yeux ? Et aux nôtres ? L’accessoire indispensable de la femme moderne et libérée qui travaille et a des responsabilités ou l’attribut d’une soumission aux exigences et fantasmes de la gent masculine ? On peut légitimement se poser la question.

« D’ailleurs… », explique Bastien Vivès dans une interview pour les éditions Casterman, « elle a un rapport d’attraction et de répulsion avec ce vêtement. Elle veut le rendre et elle veut le garder. Elle veut l’utiliser mais elle est aussi piégée par lui. Bien sûr, ce n’est pas aussi simple, mais je voulais qu’on se pose la question : quand tu mets le chemisier, que se passe-t-il ? Le chemisier a-t-il des pouvoirs magiques ? Ou bien, c’est Séverine qui dévoile sa personnalité et qui, même sans le chemisier, reste splendide ? »

« Le défi… », poursuit-il « était de dessiner exactement la même personne qui, sur un dessin n’a pas l’air très intéressante et, sur le dessin d’après, est la femme la plus belle du monde »

Défi relevé haut la main par un Bastien Vivès que l’on présentait il y a quelques années encore comme le petit jeune à la mode, la nouvelle coqueluche et qui a gagné en quelques albums essentiels le rang d’auteur phare du 9e art.

Avec sa touche graphique de plus en plus sobre, épurée, et cette façon qu’il a et que j’adore d’effacer parfois le regard de ses personnages, l’auteur de Polina, Le Goût du chlore ou encore de Lastman, embarque le lecteur dans cette belle histoire de 200 pages sans jamais l’abandonner en cours de route. Le Chemisier se lit d’un trait, c’est beau, c’est légèrement érotique, c’est surtout très bien écrit. Une leçon de simplicité et d’efficacité !

Eric Guillaud

Le Chemisier, de Bastien Vivès. Casterman. 20€ (sortie le 12 septembre)

© Casterman / Vivès

08 Sep

Nick Cave, Vince Taylor, Symphonie carcérale… pour une rentrée en BD et en musique

Vous avez le blues de la rentrée ? Rien de mieux qu’un peu de décibels pour l’éliminer. Régulièrement, la BD s’intéresse au monde de la musique. En voici quelques exemples…

On commence par une biographie singulière, celle d’un chanteur non moins singulier qui a fait ses débuts sur la scène punk australienne avant de rejoindre Londres et de devenir une star du rock avec son groupe The Bad Seeds. Vous avez deviné, il s’agit bien évidemment de Nick Cave. L’auteur allemand Reinhard Kleist, connu des deux côtés du Rhin pour avoir mis en images quelques destins exceptionnels comme Elvis Presley (Petit à Petit), Johnny Cash (Dargaud), le boxeur Hertzko Haf ou encore Castro (Casterman), offre ici un portrait à l’image du chanteur, complexe, tourmenté, qui mélange sa vie réelle et l’univers de ses chansons. Kleist remonte à son enfance et notamment aux séances de lecture avec son père, pour dérouler le tapis rouge d’une vie qu’il a voulu différente. C’est la rencontre décisive avec le musicien Mick Harvey ou avec sa muse Anita, ce sont les premiers concerts en Australie sous le nom de The Boys Next Door, puis l’installation à Londres, Berlin, l’écriture du premier roman… Pour les fans et les autres. (Nick Cave, Mercy on me, Casterman. 23,95€)

Cette histoire-là commence en plein Blitz. Londres est sous les bombes et le jeune Brian Maurice Holden n’a que les histoires de son grand frère pilote d’avion tout vêtu de cuir pour oublier le sinistre quotidien. Brian Maurice Holden n’est pas encore Vince Taylor mais ll n’aura de cesse dès lors de faire plus de bruit que les sirènes. L’album de Marc Malès au dessin et d’Arnaud le Gouëfflec au scénario paru en mai dernier retrace sa vie depuis cette enfance en Angleterre jusqu’à sa mort en Suisse à l’âge de 52 ans, en passant bien sûr par son heure de gloire sur les scènes françaises et sa chute vertigineuse, gloire et déchéance d’une star, une vie pour le moins rock’n’roll que notre duo d’auteurs met en images avec une très grande justesse, grâce notamment à l’utilisation du noir et blanc et à un trait inspiré de la bande dessinée des années d’après guerre. (Vince Taylor, L’Ange noir, Glénat. 22€)

Dans un style très différent, Symphonie Carcérale nous embarque derrière les barreaux, ceux de la prison de Fresnes où Romain Dutter occupe le poste de coordinateur culturel, mission consistant à mette en place des ateliers de théâtre, d’écriture, de musique et bien évidemment à proposer des concerts. Quand on parle de concerts en prison, on pense bien évidemment à Johnny Cash et à son mythique album At Folsom Prison au sein de la prison d’état de Folsom devant un parterre de prisonniers. C’est un peu l’idée ici. D’ailleurs, Romain y fait référence dans les pages de l’album. Comme il fait référence aussi au concert des Sex Pistols dans la prison de Chelmsford Top Security en 1976, à celui de Trust à Fleury-Mérogis en 1980 ou encore celui de Metallica dans la prison de San Quentin en 2003. Au-delà de son expérience de coordinateur, de son combat pour faire entrer un peu de liberté et de chaleur humaine dans le milieu carcéral, le récit de Romain Dutter mis en images par Bouqé qui signe ici son premier roman graphique nous raconte surtout la prison et les hommes qui la peuplent, avec une touche d’humour bienvenue. (Symphonie carcérale, Steinkis. 20€)

Eric Guillaud

06 Sep

Didier, la 5e roue du tracteur : Ravard et Rabaté vérifient si le bonheur est dans le pré…

De vaches, une prairie, un tracteur, un agriculteur sur le tracteur et au loin des éoliennes… La couverture ne trompe pas, François Ravard et Pascal Rabaté nous embarquent à la campagne pour ce nouvel album savoureusement titré Didier, la 5e roue du tracteur, l’histoire d’un agriculteur qui aimerait bien connaître l’amour avant de mourir…

Bon, ne vous inquiétez pas, Didier, l’agriculteur en question, n’est pas encore à l’article de la mort même s’il pense le contraire lorsque son médecin l’osculte pour quelques problèmes d’hémorroïdes. C’est emmerdant, certes, mais pas mortel. Il ressort donc avec une ordonnance adéquate et une adresse internet notée sur un post-it : meetic.fr.

Car oui, Didier n’a pas un mais deux problèmes, le cul pour parler crument et le coeur.

« je vais mourir et cela sans même avoir connu l’amour … Je parle du grand amour, celui qui aide à vous lever le matin et vous donne envie de vous coucher le soir… Celui qui rafraîchit les journées et réchauffe les nuits… Celui qui rend beau… qui rend bon… »

Un poète je vous dis. Voilà pour le bonhomme, le héros de François Ravard et Pascal Rabaté, un gars qu’on adore dès les premières pages, un peu gros, un peu petit, un peu naïf, un peu bourru, un peu fainéant, un peu porté sur la bouteille, mais gentil, très gentil. Un anti-héros magnifique !

« Didier, 45 ans, jamais marié, agriculteur, habite en Bretagne (France), bonne hygiène, surtout le samedi, cherche le grand amour de 35 à 55 ans ».

Et hop, c’est fait. Grâce à sa soeur et au Régis de service, un fermier ruiné qui vient de voir sa ferme vendue aux enchères et qui squatte chez lui, Didier est sur Meetic, il n’y a plus qu’à attendre les premières touches. Pendant ce temps-là, la soeurette et le fermier ruiné s’envoient en l’air. Il n’y a pas de raison !

Si le bonheur ne court pas forcément les prés, il est assurément dans les pages de cet album, un savant cocktail d’humour bio et d’humanité avec des personnages élevés au bon air de la campagne, quelques scènes d’anthologie, un graphisme fin et élégant, et un regard tout en finesse sur les difficultés de la vie paysanne, la solitude, les dettes qui poussent certains à la faillite et parfois au suicide. Mais le propos ici reste léger et drôle, un soupçon décalé, de quoi voir le monde rural sous un nouvel angle. Allez hop, tout le monde à la campagne !

Eric Guillaud

Didier, la 5e roue du tracteur, de Ravard et Rabaté. Futuropolis. 17€

© Futuropolis / Ravard & Rabaté

03 Sep

De la Syrie à la Turquie : le premier volet de L’Odyssée d’Hakim signé Fabien Toulmé

Fabien Toulmé fait partie de ces rares auteurs qui se sont faits un nom dans le milieu du neuvième art en l’espace d’un album seulement. C’était en 2014 avec Ce n’est pas toi que j’attendais, un bouleversant récit autour de la trisomie 21 de sa fille. Il est de retour aujourd’hui avec L’Odyssée d’Hakim, l’histoire vraie et forte d’un migrant syrien en trois volumes…

On les voit tous les jours, de nos propres yeux ou par l’intermédiaire des caméras de télévision, ceux qu’on appelle les migrants et qu’on devrait plus surement appeler les réfugiés nous rappellent qu’ailleurs, pas si loin de chez nous finalement, une guerre atroce a généré des millions d’exilés et des centaines de milliers de morts.

On connait plus ou moins l’histoire, on en a en tout cas entendu parler dans les médias, on s’émeut devant les chiffres ou la photo d’un enfant retrouvé mort sur une plage de la Méditerranée, mais que connaît-on de tous ces hommes, de toutes ces femmes, de ces enfants qui arrivent sur notre territoire au risque de leur vie et s’entassent dans des camps de fortune plus ou moins tolérés par une population locale, indifférente dans le meilleur des cas ? Rien. Ou presque…

Le déclic de cet album ? Fabien Toulmé s’en explique dans un préambule graphique. « De façon curieuse, l’envie de faire un livre sur les migrants qui traversent la Médterranée est apparue alors qu’avait lieu une catastrophe sans aucun lien avec cette problématique… Le crash d’un avion ».

© Delcourt / Fabien Toulmé

Vous vous en souvenez sûrement, en mars 2015, un pilote dépressif de la Germanwings précipite son avion avec 150 personnes à bord contre un flanc de montagne. L’événement tourne en boucle pendant des jours et des jours dans les journaux télévisés. Pendant ce temps-là, un autre drame se joue sur la Méditerranée, 400 migrants se noient. Juste de quoi faire une brève en fin de journal !

« Il est beaucoup plus difficile de ressentir de la compassion pour des chiffres cités en fin de journal que pour des personnes dont nous connaissons l’histoire ou au moins dont nous arrivons à l’imaginer ».

C’est là que Fabien Toulmé décide d’écrire l’odyssée d’une famille de réfugiés. Il part à la recherche de celle-ci et la trouve grâce à une amie journaliste. Lui s’appelle Hakim, elle, Najmeh. Ils ont un fils, Hadi, 3 ans.

© Delcourt / Fabien Toulmé

Et le récit à proprement parler commence ici, au moment de la première rencontre entre Fabien Toulmé, qui se dessine dans les scènes d’entretien, et la famille syrienne. Pendant des heures, des jours, l’auteur enregistre le témoignage d’Hakim, sa vie avant la guerre, sa jeunesse, son métier de pépiniériste, les premières manifestations contre Bachar el-Assad, les premiers morts… et finalement son exil forcé, un long cheminement qui le conduira de la Syrie jusqu’en France…

Fabien Toulmé nous avait époustouflé avec le récit autobiographique Ce n’est pas toi que j’attendais, la quasi-autofiction Les deux vies de Baudouin, tous deux édités chez Delcourt, il récidive avec cette  histoire vraie prévue en trois volumes. C’est passionnant, bien écrit, bien dessiné, narrativement ingénieux, un vrai travail d’auteur, exceptionnel, utile et nécessaire pour enfin nous faire poser un vrai regard sur la question des migrants, un regard humain qui se fiche des chiffres, dépasse les différences, pour se focaliser sur l’histoire d’un homme comme tant d’autres, juste contraint de fuir son pays à la recherche d’une vie normale. Bravo Fabien, on adore et on attend la suite avec impatience !

Eric Guillaud

De la Syrie à la Turquie, L’Odyssée d’Hakim tome 1, de Fabien Toulmé. Editions Delcourt. 24,95€ (en librairie le 5 septembre)

26 Août

Pages d’été. The Forgotten Man, l’adaptation graphique d’un ouvrage de référence sur la grande dépression

C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Certains livres nécessitent du temps, à la fois pour se décider à les ouvrir et une fois ouverts, pour tout simplement les lire. The Forgotten Man est de ceux-là, du moins en ce qui me concerne, un livre épais de 320 pages à la thématique on pe peut plus sérieuse, un récit graphique de prime abord un peu rugueux adapté d’un ouvrage économique lui-même rugueux mais de référence sur la grande dépression américaine, celle qui a causé tant de malheur, brisé tant de vies dans les années 30.

Le livre à l’origine de cette adaptation graphique est signé de l’économiste et éditorialiste Amity Shlaes. ll a été traduit en plusieurs langues, parmi lesquelles l’allemand, l’italien ou encore le chinois, et est aujourd’hui étudié, précise l’avant-propos, dans les écoles et universités américaines. La vision qu’il offre sur la Grande Dépression va à l’encontre du consensus établi dans la culture populaire autour du New Deal, la politique interventionniste mise en place par le président américain Franklin Delano Roosevelt pour lutter contre les effets de la Grande Dépression aux États-Unis.

Amity Shlaes a effectué un important travail de recherche dans les fonds d’archives pour écrire ce livre en privilégiant l’aspect humain, l’individu, plutôt que la théorie. Le fameux homme oublié, The Forgotten Man, est celui qui a enduré la Grande Dépression et n’a pas trouvé le soutien espéré et promis par le New Deal. C’est son histoire et celle de millions d’hommes et de femmes que raconte The Forgotten Man.

Publié en France par l’éditeur Steinkis en février dernier, l’adaptation graphique de l’Américain Paul Rivoche (Mister X, Batman : Black & White…) offre un visage à ces hommes et à ces femmes. C’est dense, parfois un peu compliqué pour nous européens, mais passionnant et riche d’enseignement sur ce qu’était l’Amérique d’hier. Quant au dessin, le trait réaliste en noir et blanc de Paul Rivoche nous embarque immédiatement dans l’ambiance de ces années sombres.

Eric Guillaud

The Forgotten Man, nouvelle histoire de la grande dépression, d’Amity Shlaes et Paul Rivoche. Steinkis. 22€

Steinkis / Shlaes & Rivoche

22 Août

Pages d’été. Sous les bouclettes : un combat contre l’adversité signé Gudule et Mélaka

C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Sorti en avril dernier mais logiquement disponible encore aujourd’hui dans toutes les bonnes librairies, Sous les bouclettes raconte une histoire vraie, un drame familial comme on a tous pu en vivre, l’histoire d’une sale maladie qui s’invite à votre table sans y être conviée.

La romancière Gudule est l’héroïne de cette histoire mais la narratrice est sa propre fille, Mélaka, qui va l’accompagner dans la maladie, partageant son quotidien, ses angoisses, assistant à sa lente déchéance physique et psychique.

Alors que son ancien compagnon est mort d’un cancer de l’estomac et qu’elle vient tout juste de retrouver un nouvel amoureux, Gudule s’inquiète de ne plus pouvoir se servir normalement de sa main gauche.

Mélaka pense à un problème musculaire, les médecins diagnostiquent une lésion cérébrale. Le début de la fin ! Hospitalisation, opération, radiothérapie, chimiothérapie… Mélaka raconte ce sinistre quotidien, la maladie dans toute son horreur, mais aussi les petits moments de bonheur, comme des miracles au milieu de la tourmente.

Elle raconte aussi par une succession de flashbacks la vie de Gudule, ex-femme de l’auteur de BD Paul Karali, mère non seulement de Mélaka mais aussi d’Olivier Ka, également auteurs de BD, dévoilant au fil des pages une personnalité attachante et touchante. Ces flashbacks illustrent « Les Solitudes », des textes écrits par Gudule elle-même. Un récit forcément poignant !

Eric Guillaud

Sous les bouclettes, de Gudule et Mélaka. Delcourt. 18,95€

07 Août

Blindsprings, Sleepless Domain et Awaken, le webcomic débarque chez Hachette Livre

Le groupe Hachette Livre a inauguré début juin son nouveau label Robinson Millenials avec trois titres à la croisée du comics et du manga, trois titres issus de la plateforme Hiveworks…

Hiveworks, quésako ? Hiveworks, explique le groupe Hachette Livre, « est une plateforme spécialisée dans la publication web de bandes dessinées et de romans graphiques née de la collaboration d’une dizaine de passionnés qui partageaient le même rêve : créer un espace de publication gratuit, accessible à tous les internautes, permettant aux artistes de faire connaître leurs œuvres ».

Lancé en 2011, la plateforme compte aujourd’hui 135 titres, publie 210 pages chaque semaine et enregistrerait plusieurs millions de clics chaque mois.

Les trois bandes dessinées qui ont inauguré en juin dernier le label Robinson Millenials du groupe Hachette sont issues de cette plateforme. Toutes les trois ont été réalisées par des femmes et proposent des récits fantastiques à la croisée du manga et du comics. On y rencontre un jeune homme soucieux d’intégrer l’élite des chevaliers (Awaken de Koti Saavedra. 17,95€), une princesse tout juste libérée de 300 années de vie commune avec les esprits (Blindsprings, de Kai Fedoruk. 16,95€) et un groupe de cinq jeunes héroïnes aux pouvoirs magiques en lutte contre d’horribles créatures (Sleepless Domain, de Mary Cagle. 16,95€).

Eric Guillaud

Flic & Fun, les aventures de deux flics mais pas à Miami

Ces deux-là ont longtemps hésité entre l’animation en parcs d’attractions et l’élevage de bovins avant de finalement tenter le concours de la police et d’être reçus. Un sacré coup de bol pour eux, pas vraiment pour nous! Les flics les plus affligeants de la planète BD sont de retour!

Ne vous y trompez pas, les palmiers qui figurent sur la couverture de ce deuxième volet de Flic & Fun paru en juin dernier ne promettent en aucun cas des aventures sous le soleil de Miami mais plutôt sous la grisaille de nos grandes villes hexagonales. Je peux vous le révéler ici sans risquer la garde à vue, il s’agit d’un simple décor de couverture en carton, un faux donc. Retournez l’album, vous comprendrez !

La suite ici

29 Juil

Pages d’été. Les Oubliés de Prémontré, un récit de Stéphane Piatzszek et Jean-Denis Pendanx au coeur de la première guerre mondiale

C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Ces deux auteurs-là nous avaient déjà impressionné avec un premier album commun publié aux éditions Futuropolis. Il s’agissait de Tsunami, l’histoire d’une quête sur l’île de Sumatra encore marquée par le raz-de-marée de 2004.

Stéphane Piatzszek au scénario et Jean-Denis Pendanx au dessin reviennent avec un thème et un contexte très différents mais une réalisation toute aussi soignée et une histoire toute aussi captivante. Les oubliés de Prémontré est basée sur une histoire vraie, une histoire funeste, celle d’un hôpital psychiatrique, l’hôpital de Prémontré dans l’Aisne, qui pendant la première guerre mondiale se retrouva aux premières loges des combats ou du moins des mouvements militaires, 1300 malades, hommes, femmes et enfants, qui auraient pu se retrouver livrés à eux-mêmes si il n’y avait eu le courage de certains.

Car, à l’instar de la majeure partie de la population locale, le directeur de l’hôpital, le médecin-chef et plusieurs membres du personnel s’enfuirent à l’approche des troupes prussiennes en marche vers Paris. Mais d’autres restèrent, comme l’économe André Letombe, qui fut très vite confronté à un dilemme sans précédent : comment nourrir 1300 personnes en pleine guerre ?

De fait, beaucoup des malades moururent de faim, des centaines. Alors Letombe eut l’idée de les faire travailler, de proposer leurs services aux paysans du coin en échange de nourriture. C’est ce qui permit d’en sauver une grande partie.

L’histoire de cet hôpital est connue, Piatzszek et Pendanx nous en livrent une version illustrée qui retrace avec précision et humanité ces années noires où la vie humaine n’a plus la même valeur, qui plus-est lorsqu’il s’agit d’aliénés. De quoi faire passer Letombe pour le vrai fou de l’affaire, capable d’une abnégation totale pour sauver le maximum de malades. Mais dans cette histoire vraie, les auteurs ont imaginé une autre histoire, celle de Clément, un jeune-homme tout juste débarqué à l’hôpital pour prêter main forte. Mais pas seulement. Sous ses apparences de garçon tranquille, Clément cache un secret… Une histoire singulière et prenante !

Les oubliés de Prémontré, de Stéphane Piatzszek et Jean-Denis Pendanx. Futuropolis. 21€

© Futuropolis / Piatzszek & Pendanx

22 Juil

Pages d’été. La Soutenable légèreté de l’être, l’autobiographie d’une trentenaire hypocondriaque signée Éléonore Costes et Karensac

C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Elle va avoir 30 ans, déteste son prénom, est souvent de très mauvaise humeur, fume comme un pompier, dort très mal, a mal partout tout le temps et a peur de tout, surtout des maladies. Oui, vous l’avez compris, en plus de tous ces petits défauts qui la rendent invivable, voire détestable, Éléonore, pardon Lolo, est hypocondriaque tendance un peu beaucoup à la folie, capable de s’imaginer un cancer à la première douleur.

Mais cette fois, elle en est persuadée, elle va mourir. Depuis plusieurs jours, elle a mal au ventre. Pour son médecin, le cancer est dans sa tête, pas ailleurs. Pourtant, Lolo fait un malaise et finit par se retrouver à l’hôpital. Totalement liquéfiée par l’idée qu’on lui découvre quelque chose de grave, Lolo fait le point sur ses trente premières années, sur sa famille, l’amour, la vie…

Publiée dans la toute nouvelle collection Une Case en moins des éditions Delcourt, collection qui a pour vocation de mettre en avant des artistes polyvalents et non issus de la BD, La Soutenable légèreté de l’être est une autobiographie signée Éléonore Lolo Costes, comédienne et autrice parisienne, et Karensac, ex-architecte, aujourd’hui autrice pour les éditions Dupuis (Aubépine) et donc Delcourt.

À la fois drôle et touchant, La Soutenable légèreté de l’être raconte les angoisses d’une trentenaire face à la vie, une trentenaire qui a bien du mal à quitter le monde de l’adolescence. Scénario et dessin fonctionnent parfaitement ensemble avec de bonnes trouvailles narratives. Un album à lire même si on a plus de 30 ans, ça peut réveiller quelques souvenirs…

Eric Guillaud

La Soutenable légèreté de l’être, de Éléonore Costes et Karensac. Delcourt. 15,50€

© Delcourt / Éléonore Costes et Karensac