Ce livre aurait pu s’appeler #balancetonporc s’il n’avait pas été pensé et réalisé bien avant l’épisode Harvey Weinstein et surtout s’il avait eu pour but de balancer des noms à la vindicte populaire. Mais il n’en est rien, Tu Pourrais me remercier réunit 20 histoires, autant de témoignages anonymes de victimes de violences sexuelles et de harcèlement sexuel…
Dans une note en fin d’ouvrage, l’auteure Maria Stoian, dont c’est ici le premier roman graphique, explique que les témoignages réunis dans Tu Pourrais me remercier ont pour la plupart été recueillis en ligne de manière anonyme et certains sous forme d’entretiens.
Elle écrit surtout son effarement devant la « banalité » dans le sens de la généralisation des actes de violences sexuelles et de harcèlement. « Au cours de ce partage d’expériences en continu, de nouvelles personnes réagissaient invariablement à la discussion pour confier : « ça m’est arrivé aussi ». Il est à la fois inquiétant que ces anecdotes soient si communes et encourageant que l’on puisse, grâce au partage, aider les survivants à gérer leur expérience et créer une société qui ne tolère pas la violence sexuelle ».
En attendant, les actes de violences ou de harcèlements sexuels sont innombrables. Les témoignages, eux, beaucoup moins jusqu’à ce qu’une affaire comme celle qu’on connaît aujourd’hui avec le producteur de Miramax ait un effet libérateur de la parole.
Dans son ouvrage, je le rappelle pensé et réalisé bien avant l’affaire Weinstein, les témoignages sont accablants, allant du harcèlement de rue au viol collectif. Des hommes, des femmes, des jeunes, des moins jeunes… Il n’y a pas de profil pour être victime, ni d’ailleurs pour devenir un prédateur.
Tu Pourrais me remercier ne balance personne mais rappelle par ces récits que les faits d’agression ou de harcèlement ne sont pas sans gravité, que les victimes sont bien des victimes même si elles peuvent un temps se taire, développer même un sentiment de culpabilité.
L’album réunit un total de 20 histoires, autant de styles graphiques pour des témoignages tous différents mais essentiels, des témoignages qui peuvent libérer la parole mais aussi éveiller les consciences. D’ailleurs, l’auteure termine sur les cinq bons réflexes à avoir : écouter et soutenir les victimes, observer les situations, interrompre celles qui semblent inappropriées et tendre la main… Du bon sens qu’il est aujourd’hui bon de rappeler !
Eric Guillaud
Tu Pourrais me remercier, de Maria Stoian. Éditions Steinkis. 15€