C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…
Spirou, Tif et Tondu, Yoko Tsuno, Natacha, Gil Jourdan, Théodore Poussin, Broussaille, tous les grands héros du journal de Spirou ont leur intégrale, une façon pour nous de revivre leurs aventures avec du recul mais aussi avec un oeil averti grâce au dossier copieusement documenté et illustré qui accompagne chaque volume.
Et revoici L’intégrale Jean Valhardi, un deuxième volet qui nous transporte dans les années d’après guerre, entre 1946 et 1950. Des deux créateurs de la série en 1941, seul le scénariste Jean Doisy signe encore les récits au lendemain de la guerre. Le dessinateur Jijé est pour sa part parti aux Etats-Unis avec ses amis Morris et Franquin, confiant le dessin au jeune Eddy Paape qui fait ici ses premières armes dans la bande dessinée. « Si certaines de ses productions ultérieures comme L’Oncle Paul, Marc Dacier ou Luc Orient lui permirent de connaître le succès… », nous rappellent Christelle et Bertrand Pissavy-Yvernault en ouverture de l’album, « Valhardi fut plutôt synonyme d’un rendez-vous manqué, sa relation avec l’éditeur ayant souffert de beaucoup d’incompréhensions« . Quoiqu’il en soit, Eddy Paape signera en 1953 une aventure mythique de la série Valhardi avec Charlier au scénario, Le Château maudit, et deviendra l’un des plus talentueux auteurs de son époque.
Pour l’heure, ce deuxième volet nous permet de retrouver l’intégralité des aventures de Jean Valhardi dessinées par Eddy Paape entre 1946 et 1950, notamment les histoires Sur le rail, Valhardi et les Rubens, Les diamants artificiels, Valhardi détective, Le roc du diable et À la poursuite de Max Clair. Plus de deux cents de ces planches étaient jusque-là restées inédites en album. Ce n’est plus le Jean Valhardi des années d’occupation qui par sa probité était parvenu à dépasser en notoriété Spirou et devenu l’un des symboles de la résistance du magazine, ni le Valhardi moderne des années 50/60, mais un Valhardi d’entre deux, agent d’assurance de son état, des histoires au scénario dense et au dessin à la fois inspiré par la ligne claire européenne mais aussi par les productions américaines et transalpines. Un morceau de notre patrimoine !
Eric Guillaud
Intégrale Jean Valhardi (deuxième volet), de Paape, Doisy et Delporte. Editions Dupuis. 35 euros