Sans vouloir dévoiler le secret d’une délibération, le choix du lauréat 2024 par les jurés du Prix du Public France Télévisions n’a pas été une mince affaire. Mais tout le monde a fini par se retrouver autour de l’album Des Maux à dire de l’Espagnole Bea Lema. Un album courageux et bouleversant…
© Katia Martin-Gilis / Bea Lema recevant son Fauve Prix du Public le 27 janvier 2024
« Nous remettons notre prix à une œuvre qui nous a touchés pour son audace et sa poésie graphique, qui met à l’honneur l’amour filial envers et contre tout à travers un traitement sensible de la santé mentale. Le Prix est attribué à… Bea Lema pour Des Maux à dire ». C’est par ces quelques mots sincères que les neuf membres du jury ont annoncé leur lauréat samedi 27 janvier à l’occasion de la cérémonie du 51ᵉ Festival international de la bande dessinée d’Angoulême.
Les discussions avaient commencé quelques heures auparavant autour d’un repas dans l’une des salles de la mairie. Autour de la table, neuf lecteurs de Nouvelle Aquitaine, Isabelle Daniel (Chaniers), Mélanie Gatte (Angoulême), Xavier Harismendy (Brive-la-Gaillarde), Aïcha Mallet (Talence), Marion Montrouge (Villenave-d’Ornon), Clément Picout (Aubusson), Anne-Sophie Pittié (Ascain), Kilian Rigaudeau (Lusignan) et Sylvain Rioland (Neuville-de-Poitou).
Objectif du jour : choisir LE Fauve Prix du public France Télévisions 2024 parmi les huit titres préalablement sélectionnés par un jury professionnel présidé par Augustin Trapenard et composé de journalistes spécialistes de la littérature et de la bande dessinée : Jérôme Debœuf (France 3 Poitou-Charentes), Francis Forget (France Info culture), Anne-Marie Revol (Franceinfo canal 27), Noëmie Roussel (France Télévisions) rejoints cette année par Isabel Hirsch (France 3 Poitou-Charentes) et Raphäl Yem (Culturebox l’émission, Culturebox) et votre serviteur, Éric Guillaud (France 3 Pays de la Loire).
Si les huit albums de cette sélection méritaient objectivement le prix, il fallait en garder un et un seul. Arguments contre arguments, les échanges ont été riches et intenses jusqu’à la décision finale qui a mis tout le monde d’accord.
Avec une belle et large palette de styles graphiques, il y a même de la broderie, l’Espagnole Beatriz Lema raconte ici la maladie mentale d’une femme en se mettant dans la peau de Vera, sa fille. Si l’histoire est autobiographique, ce changement de prénom lui permet certainement de garder une certaine distance. Quoi qu’il en soit, Des Maux à dire est un récit bouleversant de vérité dans lequel nous assistons aussi impuissants que Vera à la lente détérioration de la santé mentale d’une femme.
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L’interview de Bea Lema ici
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Exorcistes, psychiatres, médicaments… rien n’y fait, Adela, c’est son prénom, devient de plus en plus paranoïaque, méfiante, persuadée d’être habitée par le démon, et sujette à des pensées suicidaires. Sa vie est un enfer, celle de ses proches plus encore. Mais Vera ne la laissera jamais tomber, s’occupant d’elle jusqu’au bout, quitte parfois à s’oublier, à oublier sa propre vie.
Ce qui frappe dès les premières pages à la lecture de ce roman graphique, c’est l’immense liberté que s’est donnée l’autrice tant d’un point de vue narratif que graphique, les pages alternant broderies et dessins, traits au feutre ou au stylo, planches en couleurs ou en noir et blanc. Un album surprenant mais profondément séduisant !
Bea Lema est la cinquième lauréate du Fauve d’Angoulême Prix du Public France Télévisions après Chloé Wary pour Saison des roses en 2020 (FLBLB), Léonie Bischoff pour Anaïs Nin – Sur la mer des mensonges en 2021 (Casterman), Léa Murawiec pour Le Grand Vide en 2022 (Editions 2024) et Sole Otero pour Naphtaline en 2023 (Çà et là).
Des Maux à dire, de Bea Lema. Sarbacane. 25€