Après Les Grands cerfs, le grand bleu version Gaétan Nocq, un voyage à la recherche de soi-même mais aussi à la rencontre de ce monde sous-marin que l’homme, aveuglé par la richesse, s’évertue à détruire petit à petit…
Octopolis est un objet hybride, à la fois roman graphique et outil pédagogique. C’est surtout l’œuvre d’un artiste complet, à la fois dessinateur, peintre et carnettiste, fasciné par la nature et ses mystères.
Mais ce qui ressort avant tout de cet Octopolis est ce bleu profond, présent à toutes les pages, parfois dénuées de tout texte, comme pour suggérer les silences des abysses et de la faune sous-marine que découvre son héroïne, et nous avec.
Personne solitaire et mutique, Mona est rappelée à Paris suite à la disparition de son père, avec lequel elle a pourtant rompu tout contact depuis la mort de sa mère sept ans avant. Chercheur-paléontologue, il travaillait sur un essai intitulé Octopolis qu’elle retrouve sur le disque dur de son ordinateur, à propos d’un lieu unique au monde, refuge des poulpes sur lesquels il a fait des recherches toute sa vie.
Au fur et à mesure de ses rencontres – une chercheuse du muséum d’histoire naturelle de Paris, un moniteur de plongée mutique, le tenant d’une galerie d’art océanien à Paris – elle essaye de démêler cette pelote de laine qui finit par l’emmener au bout du monde, jusque dans un atoll perdu de l’océan Pacifique.
Tout est très symbolique ici : Mona doit d’abord essayer de retrouver son père au milieu d’une ville de deux millions d’habitants. Sans succès. Au final, ce n’est qu’en s’enfonçant sous la mer, loin de ses semblables puis en s’exilant à l’autre bout de la Terre sur un minuscule lopin de terre inhabité, qu’elle finit par trouver en partie ce qu’elle recherche. Quant aux méchants de l’histoire si l’on peut dire, on ne voit jamais vraiment leurs visages, seulement les gigantesques machines qu’ils ont lancées pour assouvir leur avidité sans fin, au mépris de la faune sous-marine.
Sorte de thriller écologique, Octopolis est avant tout un conte graphique, réalisé à la plume et au pinceau. Le récit principal de la quête de cette jeune femme alterne avec des reportages sur la faune sous-marine, pleins de poésie. En résulte un objet hybride, à la dramaturgie certes imparfaite (la conclusion hâtive, par exemple, laisse sur notre faim) mais à la beauté évanescente, sans de réel équivalent dans la production actuelle.
Olivier Badin
Octopolis de Gaétan Nocq. Daniel Maghen. 30€