28 Jan

Rose Valland Capitaine Beaux-Arts, de Polack, Bouilhac et Catel. Editions Dupuis. 11,50 euros.

  

Qui était Rose Valland ? Si son nom n’a pas forcément traversé le temps et marqué les esprits, son action pendant la seconde guerre mondiale a pourtant été décisive dans le sauvetage du patrimoine culturel juif. Attachée de conservation au Jeu de Paume, à Paris, cette femme opiniâtre va méticuleusement et secrètement noter les références des oeuvres volées aux Juifs et stockées au musée en attendant d’être acheminées en Allemagne. Dès 1945, alors que la guerre se poursuit, Rose Valland, devenue Capitaine Beaux-Arts, part sur les traces de ce patrimoine spolié par les nazis pour le récupérer et le restituer aux différents propriétaires. Elle poursuivra cette tâche pendant des années à travers toute l’Europe. Ce petit album publié aux éditions Dupuis, soutenu par la Fondation pour la mémoire de la Shoah et par la Fondation du Judaïsme fançais, retrace le destin de cette femme étonnante, d’abord en bande dessinée puis sous forme d’une chronologie détaillée et illustrée de photographies et documents d’époque. Un livre à la tonalité éducative, illustré par Catel qui a réalisé précédement le fameux Kiki de Montparnasse, paru aux éditions Casterman. E.G.

L’info en +

Une exposition sur Rose Valland se tient au Musée de la Résistance à Lyon jusqu’au 2 mai 2010. Plus de détails ici

Golden City 8 et Arctica 3 : deux Pecqueur sinon rien…

  

C’était une ville somptueuse. Une ville exclusivement réservée à quelques privilégiés milliardaires. Une ville d’acier délicatement posée sur l’océan à bonne distance des rivages mis à mal par le réchauffement climatique et rongés par la misère et la violence. Mais cette ville a disparu. Subitement ! Et il faudra plusieurs jours de recherches aux équipes de secours pour la retrouver, gisant par trois mille mètres de fond !  Bien que conçue pour être entièrement immergée en cas de danger, Golden City se trouve présentement dans une situation particulièrement délicate. En partie détruite, elle est couchée sur son flanc et en équilibre sur le bord d’une faille sous-marine. Les secours s’organisent mais les chances de retrouver des survivants semblent bien minces… Est-il encore nécessaire de présenter Golden City, l’une des séries phares des éditions Delcourt ? Le scénariste rouennais Daniel Pecqueur et le dessinateur Nicolas Malfin ont imaginé cet univers il y a maintenant plus de dix ans. Huit albums et une série parallèle plus tard  (Golden Cup), Golden City est devenue une oeuvre de référence dans le monde du Neuvième art comme dans celui de de la science fiction, une oeuvre très visuelle qui allie un graphisme élégant, des couleurs très pures, une narration limpide et un scénario simple mais dynamique combinant action, suspense, belles filles et hautes technologies !

Ces aventures là ont le goût de Golden City, les couleurs de Golden City mais s’appellent Arctica. Aux manettes, le même scénariste, Daniel Pecqueur, le même coloriste, Pierre Schelle, et un dessinateur serbe du nom de Boyan Kovacevic. Ici, pas de ville pour milliardaires mais un monde également menacé par le réchauffement climatique et un héros, Dakota, un as de l’aviation qui consacre sa vie à débarrasser l’espace des épaves dangereuses et les routes maritimes, des non moins dangereux icebergs à la dérive. Jusqu’au jour où ce fameux Dakota découvre dans un énorme iceberg un mystérieux caisson en acier. A l’intérieur… une enfant de quelque 10000 ans ! Une bonne dose d’action et d’anticipation, un soupçon d’écologie et toujours cet océan pour horizon… Arctica réunit tous les ingrédients pour en faire une nouvelle grande série ! E.G.

Dans le détail :

Les Naufragés des abysses, Golden City (tome 8), de Pecqueur, Malfin et Schelle. Editions Delcourt. 12,90 euros

Le Passager de la préhistoire, Arctica (tome 3), de Pecqueur, Kovacevic et Schelle. Editions Delcourt. 12,90 euros.

La BD s’en va t’en guerre et Art Spiegelman, traits de mémoire… Une nouvelle collection de DVD consacrée à la BD chez Arte

Pour rendre compte de la bonne ou mauvaise marche du monde, il y avait jusqu’à présent l’écrit, le dessin, la photographie, le cinéma, la télévision… Il y a désormais la bande dessinée. Devenu depuis longtemps un art majeur, le Neuvième art ne pouvait difficilement se cantonner à la seule fiction et à l’exploration de l’imaginaire, si riche et infini soit-il. Depuis quelques années, une nouvelle voie s’ouvre à lui : le journalisme avec des récits proches du reportage, de la biographie, du témoignage historique ou du récit de voyage. Le film de Mark Daniels, publié chez Arte Editions dans la nouvelle collection Univers BD, présente les principaux initiateurs de cette nouvelle forme de bande dessinée, en s’interrogeant sur leur pouvoir, leur force émotionnelle…  Parmi les noms aujourd’hui reconnus, il y a bien évidemment Art Spiegelman avec l’immense récit Maus, paru en 1986, qui retrace la vie de sa famille pendant l’holocauste, et, quelque années plus tard, l’album singulier A l’ombre des tours mortes qui évoque l’attentat du 11 septembre 2001 et ses retombées sur le peuple américain.¨Peut-être moins connus du grand public mais tout aussi importants sont Joe Sacco (Gorazde : la guerre en Bosnie orientale, Palestine : dans la bande de Gaza…), Ted Rall (Passage afghan…), Joe Kubert (Fax de Sarajevo…) ou, plus près de nous, Marjane Satrapi (Persepolis…) et Emmanuel Guibert (La Guerre d’Alan, Le Photographe…). Chacun d’eux, dans des styles graphiques et narratifs différents, ont abordé dans leurs livres les plus grandes tragédies humaines en s’appuyant sur des recherches documentaires, des témoignages de proches ou d’amis, ou encore par une immersion en situation, comme Joe Sacco parti en en Palestine ou en Serbie, son cahier de dessins sous le bras.

Un second DVD consacré au travail d’Art Spiegelman vient d’être également édité dans la même collection. Il est signé Clara Kuperberg et Joëlle Oosterlinck et offre un regard insolite sur cet auteur relativement avare d’interviews. Un troisième DVD est prévu courant 2010 et portera sur l’auteur Joann Sfar.

Un regard très intéressant sur un moyen d’expression et d’information particulièrement en vogue ces dernières années ! E.G.

Dans le détail :

La BD s’en va t’en guerre, de Mark Daniels. Arte Editions. 20 euros.

Art Spiegelman, traits de mémoire, de Clara Kuperberg et Joëlle Oosterlinck. Arte Editions. 20 euros.

Vitesse moderne, de Blutch. Editions Dupuis. 14,50 euros.

Vitesse moderne réédité à la vitesse de la lumière ! Publié initialement en 2002, cet album complètement Blutch était réapparu en 2008, à l’occasion du vingtième anniversaire de la collection Aire Libre, dans une édition spéciale au tirage limité présentée sous jaquette.  Il est de retour en ce début d’année 2010 dans la collection Roman Aire Libre. L’album est cette fois broché et au format roman, donc réduit. Blutch, qui est le président du Festival International de la Bande Dessiné d’Angoulême 2010, nous entraîne ici sur les talons d’une jeune artiste de danse contemporaine dans une course folle à travers Paris. Une course où la vie de notre héroïne se trouve bousculée par une série de rencontres. Il y a d’abord Rudy, un de ses prétendants, violoncelliste de profession, psychopathe à ses heures, Renée, une écrivaine qui souhaite lui consacrer un livre, son père qu’elle n’a pas revu depuis des années et même Omar Shariff en conteur d’expérience érotique ou Serge Reggiani dans son propre rôle de chanteur tourmenté. Inutile de tenter ici un résumé de l’album, Vitesse moderne est à découvrir et à juger sur pièce. Une œuvre singulière, fantasque, déroutante, signée par un auteur à part dans le monde du Neuvième art, un auteur qui s’est fait un nom chez les petits éditeurs avant de rejoindre les grands, sans pour autant lâcher une once de ce qui fait son originalité, sa force, son caractère. E.G.

Sutures : un récit autobiographique poignant signé David Small

L’histoire racontée dans cet album est tout simplement effrayante. D’autant qu’il s’agit d’une histoire vraie, celle de l’auteur, David Small, et elle commence dans les années 50 à Détroit aux Etats-Unis.

David est alors un petit garçon à la santé fragile avec des problèmes récurents de sinus. Son père, médecin, lui prescrit des séances intensives de radiogaphies pour le soigner. Une croyance de l’époque !

Quelques années plus tard, un kyste apparaît dans le cou de David. Kyste qui se révèle être une tumeur cancéreuse au moment de l’opération. Dans l’affaire, David perd sa glande thyroïde et une corde vocale. Plus de voix !

Mais le plus terrible dans l’histoire est certainement l’attitude de ses parents. Son père et plus encore sa mère sont des êtres froids, distants, égoïstes, avares. Murés dans un silence quasi-permanent, ils manifestent une indifférence totale aux malheurs de leur fils, sa mère lui reprochant même de coûter cher en soins…

Bien sûr, David s’en sortira et entreprendra avec Sutures une véritable thérapie, livrant sur près de 300 pages en noir et blanc un récit poignant qui sera encensé par la critique et le public lors de sa sortie aux Etats-Unis et récompensé par The National Book Award. Sutures est le premier roman graphique de David Small qui offre d’habitude des univers beaucoup moins sombres. Un récit très puissant à vous nouer la gorge pour l’éternité !

Eric Guillaud

Sutures, de David Small. Editions Delcourt. 19,90 euros

On me l’a enlevée, de Springer et Lambour. Editions Vents d’ouest. 13 euros.

C’est une histoire presque banale. Tristement banale. Et tragique ! Tout commence au milieu d’une fête foraine. La foule, les enfants qui rient et courent entre les manèges, les vendeurs de barbes à papa… et puis, soudain, des cris. Ceux d’une femme qui vient de s’apercevoir que le landau qu’elle pousse est vide. Désespérément vide ! Sa fille, Lola, âgée de 6 mois, a disparu ! Enlevée, forcément. Aussitôt, l’alerte est donnée et des messages tournent en boucle sur les chaînes de télévision. Au bistrot du coin comme au jardin d’enfants, c’est l’abattement. Et chacun de se demander qui a bien pu faire le coup. Peut-être ce type là-bas que personne ne connaît et qui a l’air un peu louche. Ou, pourquoi pas, l’ex petit ami de Mélanie, la maman éplorée…

Après La Rebouteuse, Séverine Lambour et Benoît Springer poursuivent dans la  chronique provinciale avec ce nouveau récit qui met en scène une fois encore la France profonde, confrontée ici à un acte terrible, le rapt d’une enfant. Avec un angle particulier. On me l’a enlevée ne s’intéresse pas à l’enquête policière lancée pour retrouver la petite mais plutôt aux réactions des villageois et à l’histoire de l’un d’entre eux, une histoire racontée dans une série de flash-backs et qui va avoir une grande importance dans l’épilogue. Tout en douceur narrative, en subtilité graphique et en justesse de ton, Séverine Lambour et Benoît Springer signent ici un bel album et un voyage au coeur de la psychologie humaine ! E.G.

Championzé, de Vaccaro et Ducoudray. Editions Futuropolis. 20 euros.

Saint-Louis du Sénégal, à l’aube du XXè siècle. Amadou M’Barick Fall est un gamin pour le moins vif et rusé. Au point de se faire remarquer et embaucher par deux jeunes artistes hollandaises de passage dans le pays. Avec elles, Amadou M’Barick Fall rejoint la France et découvre le monde du théâtre. Habillé comme un bourgeois européen, il monte sur scène pour réciter des poèmes et, bien souvent, se faire huer et traiter de singe par des spectateurs survoltés. Mais ce n’est pas sur les planches qu’il va se faire un nom. C’est sur les rings. Car, au hasard des rencontres, M’Barick Fall devient boxeur. Et pas de ces boxeurs d’opérette. Non, M’Barick Fall, que l’on va surnommer Battling Siki, sera le premier Français champion du monde de boxe… noir ! C’est en 1922 qu’il conquiert ce titre en battant un autre Français, blanc celui-là, Georges Carpentier. Mais la gloire aura vite un goût amer. La société bien pensante ne peut admettre qu’un noir soit champion du monde et représente à ce titre la France. Il sera accusé de tricherie, perdra son titre avant de le récupérer, partira pour les Etats-Unis où on lui refusera un combat avec le champion américain blanc et moura sur les pavés new-yorkais de cinq balles dans la peau ! Bien sûr, ceux qui s’intéressent un minimum à la boxe connaissent Battling Siki, peut-être moins son histoire et le contexte dans lequel il a évolué. Et c’est là tout l’intérêt de Championzé. Car au-delà d’un portrait sur l’homme, Aurélien Ducoudray et Eddy Vaccaro nous brossent dans ces pages le tableau d’une époque que l’on espère révolue. Celle du colonialisme et du racisme sans retenue. M’Barick Fall aura beau s’être illustré pendant la Grande guerre, jamais il ne sera considéré comme un Français. Publiée chez Futuropolis, Championzé est une biographie réellement passionnante qui, comme L’Enragé, le fameux diptyque de Baru publié aux éditions Dupuis en 2004, parle du milieu de la boxe en s’adressant à un public large et pas seulement aux initiés… C’est beau, c’est fort, c’est poignant et on en redemande. Ca tombe plutôt bien puisque les deux compères ont en projet deux autres biographies de boxeurs et une adaptation du Club du suicide de Stevenson… A suivre donc ! E.G.

Retrouvez ici l’interview des auteurs !

29 Déc

Le privé d’Hollywood, de Berthet, Rivière et Bocquet. Editions Dupuis. 19 euros.

  

Les éditions Dupuis nous proposent une sympathique petite virée dans la plus célèbre capitale du cinéma au monde, Hollywood, avec une magnifique intégrale en noir et blanc reprenant les trois aventures du privé au flegme légendaire, le dénommé Hyppolyte Finn. Publiées dans le journal Spirou dès 1983, ces trois uniques histoires seront publiées en albums de 1985 à 1990 avec, dans l’ordre d’apparition, Le privé d’Hollywood, Amerika et Retour de flammes.  Trois petits tours et puis s’en vont ! Trois petits tours et puis reviennent. Car, il faut bien l’avouer, si les aventures du privé n’avaient peut-être pas rencontré leur public il y a vingt-cinq ans, un rapide petit coup d’oeil sur les planches suffit pour en percevoir aujourd’hui toute la finesse du graphisme et des ambiances, toute l’intelligence des scénarii qui mettent en scène un Los Angeles à deux faces : d’un côté, les villas de luxe, les stars, les sudios de cinéma, et d’un autre, la violence, les meurtres, les trahisons, les vengeances, les rivalités et autres sombres intrigues. Ce récit noir et élégant, complété par trois nouvelles et une préface signée Phillippe Vandooren, est un cadeau idéal pour tous les amoureux du polar américain ! E.G.

Houppeland, de Tronchet. Editions Dupuis. 17 euros.

  

Que serait Noël sans sa fameuse dinde aux marrons, sans ses petits présents échangés sous une pluie de remerciements, sans ses éclats de rire, parfois forcés, sans ses chansons, ses chapeaux pointus, ses cotillons et autres buches glacées  ? Rien ! En tout cas, ce ne serait pas Noël, et surtout pas ce Noël qu’on aime célèbrer à Houppeland. Et à Houppeland, justement, le Noël, on le célèbre tous les jours… Tous les jours, sans exception. Et ceux qui refusent de se plier à la tradition sont pris en charge par la brigade des Joyeux Drilles, une bande de gars qui ne plaisante franchement pas lorsqu’il s’agit de maintenir l’ordre festif…

Publié initialement en 1997, couronné par le Grand Prix de l’humour noir en 1998, Houppeland est un récit grinçant, très grinçant, qui, comme la plupart des oeuvres de Tronchet, caricature notre monde contemporain en appuyant là où ça fait mal. L’auteur des aventures intimes et délirantes de Raymond Calbuth et de Jean-Claude Tergal, des albums humoristiques La Bite à Urbain ou Sacré Jésus, signait ici son premier long récit avec un ton qui n’était plus ouvertement et uniquement comique. D’autres longs récits suivront, plus graves, plus poétiques, tels que Le Quartier évanoui ou là-bas. Cette nouvelle édition intégrale de Houppeland comprend en outre un cahier supplémentaire de 16 pages avec de nombreuses illustrations inédites et une interview de l’auteur. Parfait pour mettre au pied du sapin ! E.G.

Pain d’alouette, de Lax. Editions Futuropolis. 16 euros.

Un matin d’avril 1919, quelque part dans le Nord-Pas-de-Calais. Le paysage présente encore les stigmates de la Grande guerre toute proche mais, déjà, la vie et la passion  tentent de reprendre le dessus sur la mort et la haine. A peine sortis des tranchées, quelques vaillants gamins ont en effet enfourché leurs vélos pour participer à l’une des courses cyclistes les plus mythiques du pays : le Paris-Roubaix ou l’Enfer du nord comme on la surnomme si justement. Quentin Ternois ne pouvait louper ça, lui, l’ancien du milieu. Même si aujourd’hui, il tente de survivre avec ce qui lui reste de poumon. Gazé, comme tant d’autres ! Il va se contenter de regarder les gars passer et de rêver au bon vieux temps avec son neuveu, un passionné de vélo lui aussi, malheureusement condamné à travailler dans les mines. Comme papa ! Pendant ce temps là, dans un orphelinat du Sud-ouest de la France, une fillette subit la violence du directeur. Elle s’appelle Reine Fario. C’est la fille d’Amédée Fario, un autre coureur cycliste tué sur le front… En apprenant son existence, un ami de ce dernier, Camille Peyroulet, va tout tenter pour la récupérer, l’adopter…

Lax est de retour ! Et le plaisir est toujours là. Immense. Entre deux aventures du Choucas (éd. Dupuis), il livre ici une suite à L’Aigle sans orteils (éd. Dupuis), un récit publié en 2005 et couvert de récompenses. « On y retrouve certains protagonistes, tout particulièrement Camille Peyroulet, le meilleur ami d’Amédée Fario… », précise l’auteur, « Le récit commence en avril 1919, au moment où fut organisé dans une région picarde dévastée par le conflit, le premier Paris-Roubaix d’après-guerre. La France avait alors un besoin pressant de retrouver une dignité, et cette course célèbre, véritable monument du patrimoine national , en resurgissant des ruines, était une formidable occasion de redresser la tête ». Pain d’alouette est un véritable hommage au monde du cyclisme mais aussi au monde ouvrier. « Si le contexte de mes livres est celui de la classe ouvrière, quelles que soient les époques, c’est que je viens de là. C’est le milieu social dans lequel j’ai grandi, qui a influencé mon éducation ». Et le lien entre le monde ouvrier et le cyclisme est évident pour l’auteur. « Le vélo fut et est encore un grand sport populaire, parce qu’il porte des valeurs que la classe laborieuse, le monde du travail, le prolétariat, les gens de peu (pour reprendre les mots du philosophe Pierre Sansot) connaissent, repsectent et cultivent […] Pour moi le parallèle est évident, et une course aussi inhumaine que Paris-Roubaix ne pouvait s’imposer que sur ce terreau de l’effort et de la souffrance, participant à façonner une aristocratie du monde ouvrier et du milieu sportif ». Pour ce magnifique récit, Lax à souhaité un graphisme rugueux qui colle à l’atmosphère d’après-guerre et à cet « Enfer du nord » qui peut tout autant décrire le Paris-Roubaix que le quotidien des mineurs. Lax a d’ailleurs, pour l’occasion, adapté son dessin. « En posant mes couleurs (encres et aquarelle) sur un trait volontairement tracé avec une encre soluble et elle-même colorée en fonction de la tonalité dominante, j’obtiens des mélanges plus ou moins hasardeux et plus ou moins sales, que je surcharge souvent avec du graphite, des pastels ou des épaisseurs de gouache. J’ai de la matière, surtout pour les scènes d’extérieur, et du coup rien n’apparaît propre et tranquille ». Et le résultat est tout simplement sublime ! E.G.