10 Juil

Black Crow, Achab, Une Brève histoire de l’avenir, London calling… Séries en cours !

Petit coup d’oeil rapide sur quelques séries en cours…  

avec tout d’abord Black Crow dont le second volet vient tout juste de sortir aux éditions Glénat. Ce récit maritime signé par un véritable passionné de la mer, Jean-Yves Delitte, met en scène les aventures d’un corsaire amérindien à la fin du XVIIIe siècle. Après une très belle ouverture en Amérique, en pleine guerre d’indépendance, nous voici en Afrique, sur les eaux boueuses du Zaïre plus précisément. Black Crow est cette fois victime d’un chantage de la part du Flamand Van Steenvoorde. Il doit emmener ce dernier, ainsi que ses hommes, pour une étrange mission dans les terres africaines… Un graphisme réaliste élégant, de magnifiques voiliers, une histoire bien construite, des personnages à fort caractère… Tout est réuni pour faire de Black Crow une grande série d’aventure. En bonus, dans la première édition de ce deuxième volume, un poster du Revenge, le bateau du héros.

Un autre récit d’aventures maritimes avec le troisième volet d’Achab, intitulé Les Trois doublons.  Pour cette sympathique série, l’auteur, Patrick Mallet, s’est librement inspiré des personnages créés par Herman Melville dans Moby Dick avec un héros, Achab Hawthorne, obsédé par le terrible cachalot blanc qui aurait déjà emporté plusieurs de ses proches. Nous le retrouvons ici le 27 mars 1810 juste après avoir mené un effroyable combat contre Moby Dick, combat qui s’est soldé par le naufrage du Bruce, son navire. En très fâcheuse posture, Achab n’a en rien perdu de sa détermination et l’homme reste décidé à poursuivre le cachalot jusqu’au bout des océans…

Dans un genre très différent, vient de sortir le second volet d’Une Brève Histoire de l’avenir aux éditions Delcourt. Le scénariste Jean-Pierrre Pécau ( Zentak, Little Blade, Nash, Arcane Majeur…) et le dessinateur Damien ( Les Fées noires, Arcane Majeur…) mettent ici en images le best-seller éponyme de Jacques Attali, paru en 2006 et vendu à plus de 230000 exemplaires. Construite autour du destin de quatre amis, Jacques François, Marie Dubois, Paul Vange et Thomas Duchat, cette série nous propulse dans un avenir proche après l’explosion d’une bombe nucléaire dans la vieille ville de Jerusalem. Un monde au bord de l’implosion et un futur malheureusement possible !

Suite et fin pour London calling, série initialement publiée dans la feu collection 32 des éditions Futuropolis et rapatriée depuis dans le catalogue classique de l’éditeur. Sylvain Runberg et Phicil nous invitent donc pour la dernière fois à suivre les aventures de Thibault et Alex, deux jeunes Marseillais lassés de leur quotidien, amoureux du rock et bien décidés à faire leur trou dans l’Angleterre des Rolling Stones, des Clash et de… Margaret Thatcher. Partis plein d’espoir, d’enthousiasme, d’illusions, nos deux compères vont être vite confrontés à la dure réalité du pays. Alex travaille dans un sex shop et Thibault fait la plonge à la cantine d’un poste de police. Rien de très rock’n’roll ! Une série à lire en écoutant Sonic Youth, Dinosaur Jr, Smashing Pumpkins, Pixies, The Cramps ou un de ces groupes réunis dans la playlist des auteurs à la fin de l’album. E.G.

  

Dans le détail :

Le Trésor maudit, Black Crow (tome 2), de Jean-Yves Delitte. Editions Glénat. 13 euros.

Les Trois doublons, Achab (tome 3), de Patrick Mallet. Editions Treize Etrange. 13,50 euros.

Une Brève histoire de l’avenir (volume 2), de Jean-Pierre Pécau, Damien et Jean-Paul Fernandez, d’après le livre de Jacques Attali. Editions Delcourt. 13,95 euros.

Le Grand soir, London Calling (tome 3/3), de Sylvain Runberg et Phicil. Editions Futuropolis. 18 euros.

09 Juil

Paris, secteur soviétique, Jour J (tome 2), de Pécau, Duval et Séjourné. Editions Delcourt. 13,95 euros.

Et si l’Allemagne avait gagné la Première Guerre mondiale ? Et si l’attentat de Dallas avait eu lieu en 1973 et non en 1963 ? Et si les Russes avaient réussi à marcher sur la Lune avant les Américains ? Et si les anarchistes avaient renversé le tsar Nicolas II en 1917 ? Avec des Si, on mettrait Paris en bouteille. On pourrait surtout imaginer le monde autrement. C’est justement le parti pris de cette nouvelle série qui relève de l’uchronie, un genre littéraire directement rattaché à la science fiction et basé sur la modification d’un événement passé. A la barre, deux scénaristes de choc, Jean-Pierre Pécau (Arcanes, L’Histoire secrète…) et Fred Duval (Carmen Mc Callum, Travis, Tartuffe, Hauteville House…)  qui ont pour ce nouvel opus, le second, imaginé ce qui aurait pu se passer si le débarquement du 6 juin avait été un total échec. Peut-être que l’armée soviétique aurait libéré une partie de la France et fait jonction avec les troupes alliées à Paris, à hauteur de  la Seine. Peut-être que la France et Paris auraient été, à l’image de l’Allemagne et de Berlin, coupés en deux. Peut être que le Checkpoint Charlie aurait été installé au niveau du pont au Change. Peut-être que des deux côtés, on se serait espionné pendant des années… Peut-être que… 

Pure fiction, Jour J n’en reste pas moins une série très documentée – comme toutes les séries de Fred Duval - et appuyée sur des faits, des personnages, qui ont existé, dans un autre contexte. Une série concept bien pensée et au rythme de parution très serré puisque les cinq volumes prévus pour le moment devraient être publiés en 10 mois. L’Histoire n’attend pas ! E.G.

08 Juil

Soul Man, Le Casse (tome 3), de Chauvel et Denys. Editions Delcourt. 13,95 euros.

Vingt millions de dollars ! Un beau petit pactole. Mais un pactole qui s’est envolé. Disparu. Disparu aussi le gars qui devait transporter cet argent à Las Vegas pour le compte de la mafia new yorkaise. Un certain Anthony « Half Finger » Giarolamo. Pourtant tout le monde lui faisait confiance…

40 ans ! 40 ans de prison et une réputation de tueur. Soul Man n’est effectivement pas un tendre. Plusieurs de ses compagnons de cellule sont morts sous ses coups. Alors, pourquoi Félix Richards, un blondinet de 27 ans, a-t-il été placé avec lui ? Pour que Soul Man le tue ? Pour que Richards obtienne des informations ? Etrange…

Troisième volet d’une série de one-shots réunissant différents dessinateurs et scenaristes, Soul Man est un thriller qui tient en haleine jusqu’à la dernière page, la dernière vignette. Aux manettes cette fois, le concepteur de cette série, David Chauvel, et le dessinateur Denys, dont on a déjà pu admirer le trait réaliste et percutant dans Comptine d’Halloween ou Dans La nuit. Le prochain album, dont la sortie est prévue fin août, sera réalisé par deux grandes signatures rouennaises, Fred Duval et Christophe Quet, le fameux tandem de Travis. E.G.
 

07 Juil

Corps de pierre, de Joe Casey et Charlie Adlard. Editions Delcourt. 12,90 euros.

Aucun doute, avec son divorce, Thomas Dare traverse une période difficile. Très difficile. Mais ce n’est rien par rapport à ce qui l’attend. Déjà, quelques engourdissements se font ressentir au niveau des mains. Gênant pour un musicien ! Et plus le temps passe, plus son corps semble se pétrifier. Son poids augmente. Tout mouvement devient de plus en plus difficile. Et le corps médical, impuissant, ne peut que constater : son corps se transforme inéluctablement en pierre. Une maladie inconnue, sans nom… pour le moment !

Présenté par l’éditeur comme un récit situé entre le drame personnel et la fable sociale, Corps de pierre évoque en tout cas un parcours de vie hors du commun, celui d’un homme condamné par un mal étrange, un parcours mis en scène par deux spécialistes du comics, d’un côté le scénariste Joe Casey qui a notamment travaillé sur des séries comme Alpha Flight, Batman, Les 4 Fantastiques, X-Men…, de l’autre le dessinateur Charlie Adlard qui s’est fait connaître avec Walking Dead, publié en France chez Delcourt. Son trait est ici très épuré, sans ombres si ce n’est pour marquer l’avancée de la maladie chez son personnage. Un album d’une grande force graphique et un récit bouleversant ! E.G.
 

Un Piano, de Louis Joos. Editions Futuropolis. 20 euros.

Une merveille ! A tout point de vue. Autant graphique que narratif. Son titre : Un Piano. Son auteur : Louis Joos. L’histoire : celle d’un père et d’un fils, deux destins singuliers au coeur du XXe siècle. Le premier, Henry, est un grand pianiste de musique classique à qui on prédit un avenir radieux. Plusieurs fois déjà, il s’est rendu aux Etats-Unis pour des séries de concerts. Mais la Première Guerre mondiale met un terme à sa carrière. Bloqué en Europe, il devient professeur de musique. Son fils, Louis, lui rend visite tous les jeudis pour son cours de piano. Pendant des années ! Et lorsque le père meurt, Louis hérite du fameux piano. Un magnifique cadeau même si Louis ne fera pas carrière dans la musique mais dans la peinture. Et à l’occasion d’une exposition à New York, Louis retrouve une trace bien singulière du passage de son père en Amérique…

Pour parler aussi bien de la musique, il faut tout simplement s’appeler Louis Joos. Auteur belge né en 1940, Louis Joos a publié son premier ouvrage, La Colaxa, en 1982 chez Futuropolis première époque. Suivront chez le même éditeur Foutue croisière, Le Mal de l’espace, Musique de nuit et ailleurs des livres sur Thélonius Monk, Mingus, Bud Powell (que l’on croise dans l’album) ou encore John Coltrane et Charlie Mingus. Le dessin et le jazz , vous l’aurez compris, sont les deux passions de Louis Joss. Avec Un Piano, l’auteur nous parle de sa vie, de son père, de la passion que celui-ci lui a certainement transmise. Une évocation en cinq temps magistralement mis en images, chaque planche nous absorbant véritablement dans l’histoire, chaque vignette nous transportant dans un autre monde, une autre époque, grâce à l’encrage partiel qui nous fixe sur l’essentiel et, en même temps, nous invite à lévasion. On vous l’a dit, Un Piano est une merveille, un chef d’oeuvre ! E.G.
 

05 Juil

Ils Iront au jazz, de Ben. Editions Hécatombe. 13 euros.

Pendant que certains vont en enfer ou au paradis, d’autres vont au jazz ! Un plan B en quelques sortes pour les mélomanes, amoureux de Miles Davis, Lee Morgan, Clifford Brown ou encore Bessie Smith… Un plan B que les héros ou plus exactement les antihéros de ce récit, un trompettiste et une chanteuse, ont sans doute espéré durant toute leur vie de misère. Lorsqu’ils se rencontrent au fond d’une impasse sordide et crasseuse, ces deux amoureux du jazz espèrent peut-être en terminer avec la pauvreté et la solitude. De fait, ils vont très vite partager le même lit et, surtout, une solide addiction à l’alcool qui finira par les anéantir…

Avec cet album publié dans la collection Inaccessible étoile de la structure indépendante suisse Hécatombe, Ben, lui-même musicien, rend hommage au jazz. Un récit quasi-muet, en noir et blanc, avec un personnage principal représenté sous les traits d’un animal, un ton cru, direct, une atmosphère glauque… Ils Iront au jazz parle de la rue, de l’amour, de la mort, de la brutalité de la vie… Une oeuvre à découvrir, un auteur à suivre ! E.G.
 

Seconde chance, de Ozanam et Renart. Editions Casterman. 14 euros.

Marianne Welles est une pro de la gâchette. Une vraie, largement appréciée par sa hiérarchie et respectée par ses collègues. La minutie chirurgicale avec laquelle elle accomplit toutes ses missions lui ont valu de nombreuses promotions. Mais aujourd’hui, Marianne s’ennuie ferme. Tirer pour tirer ne l’amuse plus, même s’il s’agit pour elle de déclencher des coups de foudre et non de provoquer la mort. Marianne Welles n’est effectivement pas une tueuse mais plutôt une combattante de l’amour. Et voilà qu’on l’oblige même à travailler le 14 février, son seul jour de congés de l’année. Un comble ! Mais ce jour là, Marianne va à son tour tomber amoureuse et refuser de tirer sur un client. Tout va alors très vite se compliquer pour Marianne…

Le scénariste Antoine Ozanam et le dessinateur Renart revisitent le mythe de Cupidon avec un polar sentimental qui commence dans une ambiance à la Saint-Valentin et s’achève dans un véritable bain de sang. Une histoire d’amour et de haine ! E.G.

Sheol, de Dogado. Editions Delcourt. 14,95 euros.

Inquiétant ! Très inquiétant ! Sheol est un terme d’origine hébraïque intraduisible, désignant le séjour des morts, la tombe commune de l’humanité, sans vraiment pouvoir statuer s’il s’agit ou non d’un au-delà (source Wikipédia). Un monde entre deux, en somme, entre la vie et la mort. Un monde dans lequel errent certains êtres qui refusent de mourir. Voilà pour le décor de ce récit complet signé Dogado. Côté personnage, l’auteur coréen met en scène une jeune amnésique très mal en point qui va faire appel à Esse, un être doté du 3e oeil, le seul capable d’interférer dans ce fameux monde de Sheol… Publié dans la collection Mirages, ce récit de plus de cent pages est surtout remarquable par son graphisme, ses atmosphères, ses cadrages particulièrement travaillés et sombres. De quoi se faire peur avant de dormir ! E.G. 

Vacances, de Nicoby. Editions Drugstore. 15 euros.

Amélie !!! Aucun doute, cette jeune femme avec un enfant furtivement aperçue dans le métro parisien était bien Amélie… Mathieu ne l’a malheureusement pas reconnue à temps et elle a disparu, emportée par la foule. Avec elle, avec Marine, Greg et Franck aussi, ils avaient passé des vacances d’été au bord de la mer. C’était il y a quelques années maintenant. Ils étaient jeunes, ados, libres, insouciants… et avaient pour seules préoccupations de s’amuser, de se baigner, de bronzer et de draguer bien sûr. Souvenirs, souvenirs…

Auteur multicarte, Nicoby explore avec le même talent l’humour, l’aventure, l’intimiste et la chronique sociale. Avec ce one shot, intitulé Vacances, paru aux éditions Drugstore, il mélange un peu tous ces genres pour nous offrir un récit emprunt de légèreté et de nostalgie qui rappellera à chacun de nous quelques bons souvenirs. C’est aussi un récit qui parle du mal être, de la peur du regard des autres, du manque de confiance et même de la mort avec une fin pour le moins dramatique ! Une bonne histoire, des personnages attachants, un graphisme élégant, un album à découvrir… E.G.
 

04 Juil

La Colline empoisonnée, de Freddy Nadolny Poustochkine. Editions Futuropolis. 28 euros.

Deux lieux, deux univers, deux destins… et au final deux histoires qui ne sont pas si éloignées l’une de l’autre ! Sur près de 350 pages, l’Angoumoisin Freddy Nadolny Poustochkine nous offre un récit étonnant, partagé entre le Cambodge d’avant Pol Pot et la France des banlieues. D’un côté, l’auteur met en scène un jeune garçon cambodgien qui découvre, non sans quelques difficultés, la vie de moine bouddhiste, une vie faite de méditation, de jeûne, de mendicité, d’abnégation, d’amour… alors que les Khmers rouges s’emparent du pays et font couler le sang. Retour en France pour la seconde partie de l’histoire avec un autre jeune garçon, au quotidien beaucoup plus proche du nôtre, un jeune garçon qui tombe amoureux d’une certaine Aline, réfugiée cambodgienne… 

Pour l’auteur, l’idée de raconter la vie d’un moine novice dans le Cambodge d’avant Pol Pot est venue à la lecture de cette pensée d’un moine taoïste chinois : « La nuit dernière, j’ai rêvé que j’étais un homme et maintenant, je me demande : suis-je un papillon qui a rêvé qu’il était un homme, ou suis-je un homme qui rêve, pour le moment, qu’il est un papillon? ». « Ce fut… », explique Freddy Nadolny Poustochkine, « la genèse de ce livre. Le rapport étroit rêve/réalité, cette fine et fragile limite m’a toujours fasciné. Ensuite, au fur et à mesure de l’écriture et des recherches, à mesure que mon récit s’affinait, des souvenirs personnels sont venus à moi, et particulièrement un, comme un flash, qui a propulsé mon histoire en lui donnant un envol assez inattendu. C’est le souvenir d’une petite fille de mon âge, à l’époque de l’école primaire, une camarade de classe arrivée en cours d’année, d’un pays lointain et inconnu pour moi jusqu’alors, le Cambodge. Elle fut ma camarade de classe mais aussi ma voisine de palier, comme raconté dans l’histoire ». Construit autour de l’apprentissage de la vie confrontée à la dure réalité historique, La Colline empoisonnée est un récit singulier, tant dans le fond comme on l’a vu que dans la forme. Freddy Nadolny Poustochkine explore ici une forme narrative assez proche de celle employée par Ludovic Debeurme pour Lucille, album également paru aux éditions Futuropolis. Un traitement au lavis, des planches sans vignettes, deux à six illustrations par page, un récit assez long, un rythme lent, une approche contemplative… Mais ne vous y trompez pas, derrière l’apparente douceur du récit, c’est l’insouciance de l’enfance, mise à mal par la violence du monde, qui est ici illustrée ! E.G.