09 Nov

Liberté, Arabico (tome 1), de Halim Mahmoudi. Editions Quadrants. 10,50 euros.

C’est l’histoire d’un gamin. Un gamin comme les autres. Ou du moins, qui aurait du être comme les autres, joyeux, inscouciant, dévorant la vie à pleines dents. Mais ce gamin là ne s’appelle pas Jérôme ou François, Paul ou Jean-Michel. Non, dans le quartier, on l’appelle Arabico. Il est français d’origine algérienne. Et mine de rien, ça change pas mal de choses ! Pas moyen pour lui de faire un pas dans le quartier sans être suspecté par la police d’intelligence avec l’ennemi (reste à déterminer l’ennemi !), impossible d’aller à l’école sans une kyrielle de papiers qui attestent sa nationalité française et, bien sûr,  impossible d’échapper à la dissertation sur l’identité. Justement, du haut de ses 13 ans, Arabico se demande bien ce qu’il est. Un Arabe ? Un Français ? Un Maghrébin ? Pour sa mère, il n’y a aucune différence entre un Maghrébin et un Arabe. « En plus Maghrébin, ça veut dire quoi ? », s’exclame-t-elle, « … Que tu n’es ni arabe, ni français!!! Ca ne se dit même pas chez nous ça : Maghrébin ! ». Bon, c’est sûr, ça ne l’aide pas vraiment à y voir plus clair mais au moins sa carte d’identité, elle, indique bien qu’il est français. Oui, mais voilà… Arabico a perdu cette fameuse carte d’identité, le sésame pour une vie supposée meilleure. Alors que les images des sans-papiers arrêtés et expulsés du pays tournent en boucle sur les écrans de télévision, Arabico prend peur et se cache. Pour peu que la police lui tombe dessus…

Arabico n’est pas une fiction, ni une autobiographie ! Alors, c’est quoi au juste ? Réponse : Arabico est une auto-fiction, pour reprendre les termes employés par l’auteur lui-même. « Je n’ai pas perdu ma carte d’identité… », confie-t-il dans une interview, « mais effectivement j’ai vécu les mêmes humiliations / menaces face aux institutions (scolaires, policières, sociales…). Autant de souffrances soit diffuses soit frontales qui laissent des marques durables à l’intérieur… ».

Un auteur normand !

Halim Mahmoudi n’a effectivement pas eu à inventer. Ce récit est inspiré de ses propres expériences et de celles qu’il a pu reccueillir dans la cité dite « sensible » où il a longtemps vécu, une cité d’Oissel, près de Rouen. Enfant de la banlieue, Halim Mahmoudi veut aujourd’hui témoigner… et  « faire passer un message, surtout dans ce climat de diabolisation grandissante des étrangers, de lois punitives, de programmes politiques qui  nous prennent pour cible, comme des ennemis intérieurs, comme si cette lente asphyxie, cette condamnation à mort sociale ne suffisait pas à elle seule ». Arabico parle de ce quotidien dans les cités mais, attention, pas des violences urbaines souvent pointées du doigt par les médias et les politiques. L’album parle avant tout de ces violences beaucoup plus discrètes mais tout autant dévastatrices, celles que l’on peut qualifier de sociales et d’intimes. « De nombreux artistes venant de quartiers parlent de la rue mais pas de chez eux, à la maison ». En racontant le quotidien de ce petit garçon, l’auteur nous ouvre donc les portes de cette intimité et nous offre un témoignage direct, sincère, fort et bouleversant, un regard neuf et objectif sur les frustrations, les souffrances, les peurs, les doutes, les difficultés de l’intégration, sur la vie en somme de toute une frange de la population, issue de l’immigration…

Liberté, égalité, fraternité.

A l’heure où vont se tenir partout en France des débats sur l’identité nationale, le récit d’Halim Mahmoudi trouve une résonnance toute particulière. Prévu en trois volets, Liberté, Egalité et Fraternité, Arabico décryptera les trois grandes étapes de la vie du personnage : la sortie de l’enfance, c’est l’objet de ce premier tome, la sortie de l’adolescence puis l’entrée dans l’âge adulte. Arabico est un récit d’une rare intensité dans la lignée des bandes dessinées militantes d’un Baru (Le Chemin de l’Amérique, L’Autoroute du soleil, L’Enragé…) ou des bandes dessinées documentaires d’un Davodeau (Rural!, LesMauvaises gens,  Un Homme est mort…). Et comme dirait le jeune héros de Halim Mahmoudi : « Fils d’immigrés, c’est français ou étranger, ça ? ». E.G.

Sous son regard, de Marc Malès. Editions Vents d’ouest. 17,99 euros.

  Couv_95609Une Packard ? Quelle idée ! L’agence de location ne pouvait trouver mieux pour énerver Jack Barton. Lui proposer une Packard pour ses vacances… Et puis quoi encore ? A lui, le flic qui a justement passé tant de temps et d’énergie et risquer sa vie à pourchasser le fameux Gang Packard , une bande de pilleurs de banques qui agissaient vite et bien, et surtout sans jamais avoir recours à la  violence. Du moins jusqu’à ce fameux jour où un policier en moto se mit en travers de leur route… L’horreur ! Mais le gang avait été finalement démantelé et le chauffeur présumé arrêté et lourdement condamné. C’était dans les années 30. Pour l’inspecteur Barton, la vie a continué, difficilement. Vingt ans plus tard, il part en vacances. De drôles de vacances en vérité. L’inspecteur a retrouvé la trace du chauffeur, Frank Foster, libéré après 20 ans de prison. Et il veut le revoir. Mais l’homme n’a plus grand chose en commun avec le truand qu’il a autrefois connu. Foster est aujourd’hui rangé des voitures comme on dit. Il est marié, père de famille, exerce la profession modeste mais honnête de livreur pour une épicerie et ne louperait pour rien au monde la messe dominicale. Il est dans le droit chemin et rien ne pourrait semble-t-il l’en détourner. Cependant, Barton a quelques questions à lui poser et compte bien réveiller en lui le sombre passé qui sommeille…

Le trait est racé. Les planches sont en noir et blanc. L’ambiance est somptueusement sombre, presque oppressante. Les dialogues sont plutôt rares et la voix off omniprésente. Les personnages ont du caractère… Normal ! Sous son regard est un polar, un récit noir, très noir, viril, très viril, où il n’y a pas vraiment de gentils, ni de méchants, juste des flics, des voyous et des repentis qui tentent de dépasser la tragédie de la vie. Eclectique, Marc Malès a déjà abordé le polar avec les aventures de Frank Weiss (La Mort obèse et Le Requin, mon frère parus chez Glénat) mais aussi l’historique avec De silence et de sang et le western avec Mille Visages… Avec Sous son regard, l’auteur rend un merveilleux hommage aux films noirs américains des années 50. Une belle leçon de graphisme et de scénario !

Eric Guillaud

27 Oct

Panique au village, Le Royaume, 300 millions d’amis… Le plein de nouvelles séries chez Dupuis !

  

Panique sur la toile ! Après Malaise vagal, 2 tomes parus chez Fluide Glacial, le scénariste Frédéric Jannin (Germain & nous, Que du bonheur…) et le dessinateur Gilles Dal se retrouvent pour nous concocter une nouvelle série humoristique autour de FaceBook. Son nom : 300 millions d’amis. Son but : peut-être se faire autant d’ennemis car Les deux auteurs y enchaînent les gags sur une page qui croquent, et parfois moquent, les mordus du réseau communautaire, depuis ceux qui racontent au monde entier le moindre mouvement de cil dans leur triste quotidien jusqu’à ceux qui pensent enclencher la révolution mondiale grâce aux groupes de discussion. 

Panique au village, c’est le nom d’une nouvelle série de bande dessinée, c’est aussi le nom du film de Vincent Patar et Stéphane Aubier avec les voix de Benoît Poelvoorde, Bouli Lanners et Frédéric Jannin, sorti courant octobre au cinéma. Avant celà, c’était même une série TV diffusée sur Canal+. Bref, Panique au village se décline à toutes les sauces, rançon du succès rencontré à chaque fois auprès du public. Et la BD est comme le reste, chaotique et déjantée à souhait, drôle à mourir !

Pour finir, direction un royaume paisible où il faisait bon vivre. C’était un petit pays oublié par ses puissants voisins et leurs guerres incessantes. Un charmant petit bout de terre sur lequel vivaient tout un tas de gens qui chaque jour jouissaient de ce que leur offraient la terre et le ciel. C’est Le Royaume et des comme ça, il n’y en a pas deux !  Après Wondertown, deux tomes parus chez Dupuis avec Vehlmann au scénario, Benoît Feroumont se lance seul dans ce nouveau projet qui met en scène de drôles de personnages : le bon roi Serge, sa femme, acariâtre et médisante, ses fils complètement laids, sa fille Cécile, la princesse qui monopolise la salle de bain, et la jolie, la très jolie et douce Anne, la favorite du Roi… E.G.

  

      

  

  

      

   

   

  

Dans le détail :

300 millions d’amis (tome 1), de Jannin et Dal. Editions Dupuis. 9,45 euros.

Anne, Le Royaume (tome 1), de Benoît Feroumont. Editions Dupuis. 9,45 euros.

Le Vol du tracteur, Panique au village (tome 1), de Aubier, Patar, Tavier et Saive. Editions Dupuis. 10,40 euros.

Mauvais garçons, Solea 1 et 2, de Flao et Dabitch. Editions Futuropolis. 17 euros le volume.

  

Une chose est certaine, si Benjamin Flao et Christophe Dabitch décidaient subitement de m’offrir une planche de leur album, comme ça, simplement pour le plaisir d’offrir, non seulement je ne la refuserai pas mais encore je l’encadrerai et lui réserverai le plus bel espace de mon salon. C’est que les deux albums de Mauvais garçons, parus à un mois d’intervalle – le premier est sorti le 8 octobre et le second est attendu pour le 5 novembre - sont tout simplement des petits bijoux qui démontrent, si besoin est encore, que la bande dessinée est un art à part entière avec ses propres codes, ses propres univers, ses propres émotions, et que le tout est souvent difficilement transposable, ne serait-ce qu’au cinéma. Comme on peut le vérifier régulièrement et même très récemment encore  ! Après La Ligne de fuite, le scénariste Christophe Dabitch et le dessinateur Benjamin Flao se retrouvent donc autour d’un nouveau projet qui aborde la solea, un chant flamenco qui parle bien entendu d’amour, souvent contrarié, plus souvent de peines de coeur, de pauvreté, d’injustice… Et plus qu’une simple passion ou un passe temps, la solea est quelque chose qu’on a dans la peau comme peuvent l’avoir les deux personnages principaux de cettte histoire, deux « mauvais garçons » prénommés Manuel et Benito. Le flamenco, ils le vivent mais n’en vivent pas. Inséparables dans les galères le jour comme dans les moments de grâce, à chanter et danser la nuit, Manuel et Benito le resteront jusqu’au jour où l’un et l’autre rencontreront l’amour, cet amour qui leur paraissait tellement improbable, tellement inaccessible…

Ces albums qui respirent au rythme du flamenco, libèrent de chaque vignette, de chaque page, une sensation à la fois de virilité et de sensualité. Mauvais garçons n’a pourtant pas été écrit, ni même dessiné, par des Espagnols. L’un et l’autre sont français mais Christophe Dabitch s’est inspiré de ses propres rencontres à Séville.« Je suis souvent allé dans un petit village au sud de Séville, Utrera, qui est l’un des foyers de ce chant… », confie le scénariste,  » J’ai un ami qui vit là-bas. Il est chorégraphe et a fait des recherches en musicologie sur le flamenco. Il se nomme Manuel, sa famille est originaire du village, mais il a vécu en France avant de revenir s’y installer. Nous nous sommes rencontrés à ce moment-là, voilà une dizaine d’année. Il a un vieil ami gitan qui se nomme Benito, un chanteur et un personnage hors norme […] J’avais envie d’écrire sur eux et sur le flamenco à travers eux, sur une forme de correspondance entre une expression artistique et la vie. J’aime leur approche du chant, leur côté mauvais garçons aussi, en dehors des clous ». Côté graphisme, Benjamin Flao a laissé glisser ses crayons sur la page, d’un trait jeté, nerveux, brut… viril quoi ! Et sensuel.  »Il paraît que l’on me surnomme l’homme crayon, capable de tout dessiner. Ca, c’est un surnom à finir dans une fête foraine, entre l’homme tronc et la femme à barbe ! […] Pour Les Mauvais garçons, le plus gros écueil, bien sûr, était la représentation de la musique et du chant. En BD, quoi qu’on fasse, on est muet. Comment rendre le son, l’intensité du flamenco ? On n’est jamais très loin du ridicule. » Et pourtant, le miracle est bien là. Mauvais garçons nous plonge au coeur du Flamenco et on se surprend à avoir la musique dans la tête tout au long de l’album. C’est beau, c’est fort, chaque planche nous entraîne loin, très loin.  Mauvais garçons est l’histoire de deux Espagnols épris de musique mais c’est aussi quelquepart l’histoire de l’humanité car, dans le flamenco, comme dans ce récit, il y a quelque chose d’absolument universel ! E.G.

Rendez-vous sur le site Culturebox pour visionner le reportage de France3 Bretagne réalisé sur ce diptyque : c’est ici

Airborne 44 (tomes 1 et 2), de Philippe Jarbinet. Editions Casterman. 11,50 euros le volume.

   

D’un côté, un soldat américain. De l’autre, un Allemand. Chacun le fusil à l’épaule. Chacun prêt à tirer. Mais il ne se passe rien. Les deux hommes se regardent longuement et chacun reprend sa route ou plus exactement son chemin à travers des bois enneigés. C’est par cette image forte que commence Là où tombent les hommes, premier volet du diptyque Airborne 44. Nous sommes en décembre 1944 quelque part dans l’est de la France. La guerre n’est pas terminée mais les troupes allemandes perdent chaque jour un peu plus de terrain. Le soldat américain qui n’a pas tiré s’appelle Luther Yepsen. Il est juif. Il vient d’apprendre que sa femme le quittait. Il vient aussi de perdre un doigt au cours des derniers combats. Celui qui, justement, portait son alliance. Un signe du destin ? Mais Luther a un autre mal qui le ronge. Lors des premiers jours du Débarquement, du côté de Carentan, en Normandie, il a tué par erreur toute une famille. Une femme et des enfants. Traumatisé, Luther, comme bon nombre de soldats, en a assez de cette boucherie. Séparé de sa troupe, il se réfugie avec deux autres soldats dans une ferme isolée où il fait la connaissance de la belle Gabrielle…

Une histoire de guerre mais aussi une histoire d’amour. Une sale histoire de guerre et une très belle histoire d’amour. C’est ce que nous propose avec ce diptyque Philippe Jarbinet, aurteur que l’on a pu découvrir précédemment avec les séries Mémoires de cendres (10 volumes parus chez Glénat) ou encore Sam Bracken (3 volumes parus chez Glénat). Sortis simultanément, il semble que ce soit à la mode en ce moment, les deux albums de Airborne 44 nous offrent un bon récit, bien écrit, bien dessiné, même si les premières pages peuvent parfois désorienter le lecteur avec plusieurs flash-back qui ne permettent pas d’appréhender l’intrigue sereinement ! E.G.

La Colline aux serments, Quintett (Hors-série), de Giroud, Révillon et Alessandrini. Editions Dupuis. 14,50 euros.

  Lancée en août 2005, la série Quintett met en scène la vie de quatre personnages, Dora Mars, Alban Méric, Elias Cohen et Nafsika Vasli. Nous sommes en 1916, en pleine guerre mondiale, ces deux hommes et ces deux femmes, qui ne s’étaient jamais rencontrés auparavant, vont être embauchés dans un orchestre baptisé Quintett en hommage aux formations jazz américaines. Sur ordre du ministère de la guerre, le Quintett va rejoindre le front pour distraire les hommes, la Somme, la Champagne, mais aussi la Macédoine et plus précisément la base aérienne de Pavlos. Là, la vie de ces quatre personnages va basculer en quelques mois…

Chaque album de Quintett, dessiné par un auteur différent (Gillon, Cuzor, Kraehn, Bonin, Alessandrini) raconte l’histoire d’un de ces personnages. Le cinquième, intitulé La Chute, apporte le dénouement. C’est la dernière pièce d’une partition savamment orchestrée par le scénariste Frank Giroud. La dernière ? Pas tout à fait ! Franck Giroud, Luc Révillon et Alessandrini proposent aujourd’hui un hors-série, La Colline aux serments, qui apporte un épilogue inédit et un nouvel éclairage de ce drame à travers une fiction constituée de bandes dessinées mais aussi de documents graphiques inédits, esquisses, photographies, travaux de repérage… Un album en forme de making-of, magnifiquement mis en page, que se doivent de posséder tous les fans de la série. E.G.

L’info en +

Retrouvez l’univers de Quintett sur le site officiel http://quintett.dupuis.com/

Gil Jourdan l’intégrale (volume 2), de Tillieux. Editions Dupuis. 24 euros.

  

Apparues dans les pages du journal Spirou en 1956 et reprises en album à partir de 1959, les aventures de Gil Jourdan imposent très rapidement Maurice Tillieux comme l’un des maîtres de la bande dessinée franco-belge. Celui-ci animera la destinée du personnage jusqu’à sa mort accidentelle, en 1978. Déjà réunies dans une version intégrale baptisée Tout Gil Jourdan, publiée entre 1985 et 1987, les aventures du détective sont aujourd’hui réunies dans une nouvelle intégrale dont le second volume vient tout juste de paraître. Au sommaire, quatre récits publiés au début des années 60, L’Enfer de Xique-Xique, Surboum pour 4 roues, Les Moines rouges, Les 3 taches, et une histoire courte intitulée La Poursuite. En ouverture, un dossier très complet revient sur le contexte de création avec de nombreuses illustrations inédites, recherches graphiques, indications de couleurs… Un grand classique et une belle intégrale. E.G.

Yoko Tsuno, Marzi, Pandora Box… Une petite sélection d’intégrales indispensables !

   

Et de huit ! L’intégrale des aventures de Yoko Tsuno arrive à son terme avec cet ultime album réunissant trois titres qui s’articulent autour d’un thème central cher à l’auteur : l’avion. Il s’agit de Message pour l’éternité, Le canon de Kra et Le Septième code. Comme dans les volumes précédents et, d’une manière générale, comme dans toutes les intégrales Dupuis, ce huitième volume propose en ouverture un cahier, ici rédigé par l’auteur lui-même, qui revient sur le contexte de création. Roger Leloup y présente avec force détails et anecdotes ce qu’il présente comme de « …merveilleuses machines, du passé, du présent, ou du futur, qui nous portent, par-dessus l’immensité nuageuse, vers le rêve sans cesse renouvelé. » On y retrouve notamment le fameux Colibri présent dans Le Canon de Kra. De nombreux croquis, illustrations, maquettes, projets de couverture, photographies accompagnent les explications de l’auteur.

   

   L‘orgueil, La Paresse, La Gourmandise, La Luxure, L’Avarice, L’Envie et La Colère sont les titres des sept premiers albums de la série Pandora Box qui revisitent le mythe de la boîte de Pandore à la lumière des avancées technologiques d’aujourd’hui. Lancée en janvier 2005, la série se termine en mars 2006 par un huitième album intitulé L’Espérance et proposant une réponse à la question de chacun des volets de Pandora Box : l’homme est-il capable de prendre en main son destin ? Ces huit albums au final, réalisés en un peu plus d’un an par une équipe composée d’un scénariste, Alcante, et de sept dessinateurs, dont Pagot, Radovanovic, Henriet, Damour ou Pignault, sont aujourd’hui réédités en intégrales dans un format roman graphique. L’occasion de se replonger dans ce récit d’anticipation hors du commun  où l’on parle de vache folle, d’armes bactériologiques, d’intelligence artificielle, de clonage…

  

Marzi… Cette série des éditions Dupuis a eu une destinée peu commune. Publiée depuis 2005 dans une édition classique, grand public, elle ne semble pas trouver son public et végète jusqu’au jour où la maison d’édition a la lumineuse idée de la publier, en parallèle, dans un volumineux format roman graphique de 264 pages. Le premier volet sort en 2008 et réunit les trois premiers albums. Les couleurs ont laissé place à une bichromie grise et rouge, les pages ont été remontées avec quatre cases maximum sur chacune d’elles, des dessins ont été ajoutés et hop, comme par magie, Marzi devient une toute autre bande dessinée qui intrigue et surprend. Et c’est véritablement l’engouement au sein de la presse, du public et des festivals.  Le second volet, publié fin octobre, reste bien évidemment calqué sur le même principe avec la réédition des tomes 4 et 5 accompagnés d’un cahier documentaire intitulé Journal d’un voyage et racontant le retour de la scénariste Marzena Sowa en Pologne, 20 ans après son enfance et la chute du mur. Un récit vraiment passionnant dans la lignée du Persepolis de Marjane Satrapi (éd. L’Association) ou du Photographe d’Emmanuel Guibert et Daniel Lefèvre (éd. Dupuis). Le tome 5 de l’édition grand public, intitulé Pas de liberté sans solidarité, est également sorti au début du mois d’octobre. E.G.

  

Dans le détail :

Menaces pour la Terre, Yoko Tsuno (intégrale 8), de Leloup. Editions Dupuis. 18 euros.

Pandora Box (Intégrales 1 et 2), Collectif. Editions Dupuis. 18 euros le volume.

Marzi… 1989  (Intégrale 2), de Sowa et Savoia. Editions Dupuis. 25 euros.

Pas de liberté sans solidarité, Marzi (tome 5), de Savoia et Sowa. Editions Dupuis. 10,40 euros.

02 Oct

Dieu en personne, de Marc-Antoine Mathieu. Editions Delcourt. 14,95 euros.

   

Nom : Dieu. Prénom : Dieu. Le fonctionnaire d’état n’en saura pas plus. L’homme qui est devant son bureau n’a ni numéro de matricule, ni inscription au service de sécurité, ni référence de traçabilité, ni domicile, ni papiers d’identité. Simplement une identité : Dieu. Et une existence réelle, révélée au grand jour et au beau milieu d’une foule qui n’en croit pas ses oreilles et ses yeux. Dieu, en personne, a rejoint les hommes, ces pauvres mortels. Et très vite, Dieu devient une star. Une superstar. Un phénomène médiatique, une opportunité commerciale, un monstre de foire aux facultés cérébrales infinies, capable de calculer instantanément le nombre de molécules flottant dans une pièce, capable aussi « d’inverser l’évolution irréversible associée à la croissance de l’entropie, et ceci en manipulant chaque molécule individuelle ». Bon, comprenne qui pourra ! En attendant, Dieu, qui se dit à l’origine de tout, se retrouve inculpé et traîné devant la justice, non pas la justice divine mais celle des hommes. Un  »coupable universel » idéal qui devra répondre de nombreux chefs d’inculpation…

Profondément influencée par Kafka, Borges, Terry Gilliam ou encore David Lynch, l’oeuvre de Marc-Antoine Mathieu est à la fois surprenante, déroutante, excitante, forte et en tous cas absolument unique dans l’histoire du Neuvième art. Tout a commencé en 1987 avec l’album Paris-Mâcon, suivi des aventures de Julius Corentin Acquefacques (5 albums parus chez Delcourt), une série qui joue avec les codes de la bande dessinée et le révèle au grand public. Plus tard viendront les one-shot Le Dessin, Mémoire morte (éd. Delcourt) ou encore Les Sous-sols du révolu (éd. Futuropolis) et finalement aujourd’hui Dieu en personne, 120 pages de bonheur graphique et narratif dans lesquelles l’auteur s’empare d’un sujet pour le moins sérieux et le traite façon comédie intelligente, une farce qui prête à réfléchir sur notre monde, notre vision des choses et pas seulement de la religion. Dans l’organe officiel des éditions Delcourt, Planète 49, l’auteur confie : « J’avais envie de réaliser une fresque de l’état actuel de la pensée humaine en me posant une question : que se passerait-il si Dieu débarquait en chair et en os dans le monde d’aujourd’hui? Je voulais que ce soit drôle, parfois grotesque. Il s’agit avant tout d’une farce. Et comme toutes les farces, quand elles sont bien faites, il y a des questionnements qui vont plus loin que le rire » E.G.

Souvenirs de films, collectif. Editions Le Lombard. 29 euros.

    

Le Péril jeune, Sept ans de réflexion, Les Temps modernes, Lost in translation, Danse avec les loups, Easy rider, Il était une fois dans l’ouest, Mort à Venise, Retour vers le futur, Brazil, Les Tontons flingueurs, West side story… Chacun de ces films a marqué le septième art et laissé des souvenirs impérissables, voire révélé une fibre artistique, à nombre de spectacteurs. C’est tout au moins le cas pour Rabaté, Pinelli, Cosey, Blanc-Dumont, Boucq, Dany, Gibrat, Lepage, Servais, Taduc, Hermann, le Rouennais Vatine, Monge et quelques autres encore qui ont en commun le métier d’auteur de bande dessinée et la passion du cinéma. Dans les pages de ce beau livre, paru au Lombard, plus de cinquante auteurs ont ainsi été invités à livrer leurs souvenirs autour du film qui a compté pour eux ou provoqué quelque chose dans leur vie et à en revisiter à leur manière l’affiche. En plus de cent pages, Souvenirs de films établit une belle passerelle entre le septième et le neuvième art. Un beau cadeau pour tous les passionnés de bande dessinée ou de cinéma ! E.G.