26 Juil

Les Schtroumpfs, Tif et Tondu, Les Petits hommes… les intégrales de l’été chez Dupuis

Une intégrale se termine, une autre démarre ! Avec ce treizième volume, l’intégrale consacrée au tandem de choc Tif et Tondu s’achève en effet. 60 ans d’aventures, 45 albums, sept auteurs parmi lesquels Fernand Dineur le créateur, Will le grand patron, ou encore Sikorski et Lapière les ultimes animateurs. Ultimes  ? Peut-être pas car si l’arrêt fût pour le moins brutal en 1997, un retour ne serait aujourd’hui pas exclu comme le laisse entendre Didier Pasamonik dans le cahier graphique qui accompagne ce recueil. En attendant, ce dernier volume réunit trois aventures et non des moindres : Les Vieilles dames aux cent maisons, Fort Cigogne et Le Mystère de la chambre 43. Trois petits bijoux simenoniens !

De 20 ans leurs cadets, les Schtroumpfs sont nés autour d’une table réunissant Pierre Culliford, André Franquin et leurs épouses. Un mot qui ne vient pas et Pierre Culliford, alias Peyo, lance le schtroumpf pour désigner une salière. Le repas se concluera en schtroumpferies diverses. Un an plus tard, Peyo glisse les premiers lutins bleus dans une histoire de Johan et Pirlouit, La Flûte à six trous, et publie en 1959 dans le journal Spirou la première aventure des Schtroumpfs sous la forme d’un livre miniature à confectionner soi-même, Les Schtroumpfs noirs. C’était parti pour une des plus belles aventures  du Neuvième art. Le premier volet de cette nouvelle intégrale réunit un cahier graphique d’une quarantaine

de pages revenant sur le contexte de création ainsi que les récits publiés dans les albums Les Schtroumpfs noirs (dans son format d’origine), Le SchtroumpfissimeLa Schtroumpfette, L’oeuf et les Schtroumpfs. Schtroumpfement bien !

Ils ont une taille de lutins mais cette fois une forme humaine, ce sont les Petits hommes de Pierre Seron. Le cinquième volume de l’intégrale consacrée à leurs aventures réunit quatre grands récits, Dans les griffes du seigneur, Le Guêpier, Les Prisonniers du temps, Le Petits hommes et les hommes-singes, ainsi que trois histoires courtes et une interview très intéressante de Vittorio Leonardo qui signa la mise en couleur de la série. EGuillaud

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Dans le détail

Tif et Tondu (Intégrale 13), de Sikorski et Lapière. 24 euros

Les Schtroumpfs (Intégrale 1), de Peyo. 28 euros

Les Petits hommes (Intégrale 5), de Seron et Hao. 24 euros

24 Juil

La Vie est courte, l’intégralité des cartoons de Larcenet et Thiriet réunis dans un album

La vie est trop courte pour s’habiller triste scandait il y a quelques années la publicité d’une célèbre marque de vêtements. Et c’est vrai, la vie est courte, trop courte, alors autant en profiter et la tourner en dérision comme le font si bien Manu Larcenet et Jean-Michel Thiriet dans ces cartoons réalisés à la fin du siècle précédent. A l’époque, Manu Larcenet venait de lancer les aventures de Bill Baroud pour les éditions Fluide Glacial et Jean-Michel Thiriet multipliait les expériences pour les éditeurs indépendants, Spirou et Canal +. Vache, absurde, noir, délirant… mais toujours savoureux, l’humour de ces cartoons nous fait bien évidemment penser à Pierre Desproges mais pas que. Goossens, Gary Larson, Pifou, Woody Allen, Les Monty Pythons… sont revendiqués comme de sérieuses références. Publiés de-ci de-là avant d’être réunis une première fois en trois albums publiés dans la collection Humour Libre des éditions Dupuis, les cartoons trouvent aujourd’hui, avec cette intégrale à l’italienne, un écrin à leur juste mesure. Magnifiquement drôle ! EGuillaud

La Vie est courte, de Larcenet et Thiriet. Editions Dupuis. 30 euros

21 Juil

L’Ecureuil du Vel’d’Hiv par Christian Lax – Futuropolis

L’Ecureuil du Vél’ d’Hiv par Christian Lax – Futuropolis

 

C’est un lieu historique du sport dans la capitale, un lieu où le vélo sur piste a acquis ses lettres de noblesse, une salle où le Tout-Paris venait se faire voir dans la première moitié du 20e siècle. Mais le Vélodrome d’Hiver, le Vél’ d’Hiv comme chacun l’appelle, est resté dans les mémoires pour un des faits les plus marquants de la Seconde Guerre mondiale : la rafle de 13 152 français de confession juive par la police française. Christian Lax réussit avec cet album L’écureuil du Vél’ d’Hiv à faire le récit de ces deux histoires, à travers le regard d’un journaliste et de son frère, un cycliste sur piste.

Sam, l’aîné, est un des meilleurs de sa génération. C’est un pistard, un coureur cycliste sur piste. Apprécié du public populaire, il est surnommé l’écureuil du fait de son agilité. Eddie, le cadet, est handicapé d’un bras ; cela ne l’empêchera pas d’écrire et de devenir un journaliste engagé dans la Résistance en signant ses articles contre l’occupation nazie : L’écureuil !

L’Ecureuil du Vél’ d’Hiv par Christian Lax – Futuropolis

A travers les coulisses du Vél d’Hiv, l’auteur fait le récit, sans manichéisme, des années noires de l’Occupation, jusqu’au drame de la rafle du 16 juillet 1942. La mère des deux garçons se retrouve enfermée avec 13 000 autres personnes dans des conditions épouvantables. Ses enfants ne la reverront pas malgré les efforts de leur père et ses relations avec des officiers allemands. Moins de 100 personnes survécurent à la déportation et aucun des 4 115 enfants.

L’Ecureuil du Vél’ d’Hiv par Christian Lax – Futuropolis

Passionné de cyclisme, c’est le 3ème récit que Christian Lax consacre au monde du vélo dans l’Histoire, après L’Aigle sans Orteils (le Tour de France dans les années 1910) et Pain d’Alouette (Paris-Roubaix dans les années 20). Son objectif  est à chaque fois le même : présenter la volonté de s’élever malgré un handicap (en 1987, il publie Des Maux pour le dire, l’histoire tout en pudeur d’un handicapé, inspirée de son frère) et la vie quotidienne des gens ordinaires au destin peu commun.

En s’inspirant de faits réels, Lax construit un album richement documenté. Il trouve le trait juste et acéré pour ce récit dense. Les courses sont tout en dynamisme et puissance, les scènes intimistes en douceur et intensité, renforcées par une riche palette de couleur ocre.

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La BO à se mettre entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Notre Epoque – Tarmac (en vélo)

Pour lire les premières planches : Futuropolis BDgest’

Le point de vue le presse spécialisée : Bodoï PlanéteBD

10 Juil

Les essentielles de l’été #2/3

Comme moi, la BD sous toutes ses formes vous appréciez. Sous toutes les latitudes, vous les dévorez. Alors plongez dans cette sélection de 12 albums pour tous les âges et tous les goûts, à lire à la plage, sur les sommets ou sous la couette …

 

Zone Blanche par Jean-Claude Denis – Futuropolis

 

Zone Blanche par Jean-Claude Denis – Futuropolis

« Il y a des meurtres mais ce n’est pas un polar, il y a peu d’espérance mais ce n’est pas un roman noir, il y a une homme et une femme mais ce n’est pas une histoire d’amour », nous affirme l’éditeur Futuropolis. Zone Blanche, c’est une enquête policière, écrite et dessinée à sa façon, par Jean Claude Denis, Grand Prix d’Angoulême 2012 et président cette année du festival.

L’homme, un parisien, souffre d’un mal encore peu connu et peu répandu, il est électro-sensible. Il souffre de tous les ondes produites par les téléphones, ordinateurs et autres antennes relais. Seul refuge possible : les zones blanches. Un soir de grande panne généralisée d’électricité, il revit et peut sortir de chez lui. C’est l’occasion d’une étrange rencontre avec une femme singulière dans une atmosphère de nuit noire.

Zone Blanche par Jean-Claude Denis – Futuropolis

A l’opposé, en pleine lumière, et en forêt, pas loin d’une ligne à Très Haute Tension, un homme est découvert, tué sur le coup. Comme le dit un enquêteur : « J’ai déjà vu des meurtres maquillés en suicides, mais le contraire, alors là, c’est bien la première fois ! »

Jean-Claude Denis signe là une belle mécanique de crime parfait, aux contours déliés et subtils. Un récit psychologique bien orchestré avec une belle construction en flashback et une confirmation s’il en était besoin, du talent graphique de son auteur.

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La BO à se glisser entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Electricity – Orchestral Manoeuvre in the Dark

Le point de vue le presse spécialisée : ActuaBD Bodoï

 

Silas Corey par Fabien Nury & Pierre Alary – Glénat

 

Silas Corey (t1&2) par Fabien Nury & Pierre Alary – Glénat

Une fripouille à l’élégance rare, un héros à l’image de son scénariste, un homme au franc parler qui multiplie les expériences et les employeurs pour son plaisir personnel et le nôtre en retour. Tel est Silas Corey, le nouveau personnage du 7e art imaginé par Fabien Nury (l’auteur de la grande série à succès Il était une fois en France) et dessiné avec brio par Pierre Alary (Belladone).

L’action commence pendant la première guerre mondiale. 1917 :  Georges Clémenceau n’est pas encore Président du Conseil. C’est un opposant acharné qui recherche des preuves de la trahison du gouvernement en place, afin de faciliter son retour en politique. Il fait appel à l’ancien reporter devenu détective et aventurier, Silas Corey. Mais celui-ci aime l’argent et adore manipuler ses différents employeurs. Il est surtout au service de lui-même.

Silas Corey par Fabien Nury & Pierre Alary – Glénat

Avec, en toile de fond, une période historique bien exploitée au service de l’intrigue, ce nouvel héros arrogant reste néanmoins attachant et fait une entrée réussie avec ce dyptique. Une série à suivre sans hésiter si ses auteurs décident de poursuivre l’aventure.

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La B.A pour en savoir plus et prolonger le plaisir de cette BD :

Le point de vue le presse spécialisée : BDgest ActuaBD

 

Souvenirs de l’Empire de l’Atome par Thierry Smolderen & Alexandre Clérisse – Dargaud

 

Souvenirs de l’Empire de l’Atome par Thierry Smolderen & Alexandre Clérisse – Dargaud

Cet album est un véritable OGNI : un objet graphique de toute beauté, à l’image du site internet qui lui est dédié et de l’exposition qui lui est consacré à la Cité Internationale de la Bande Dessinée (jusqu’au 6 octobre 2013). Une pureté du style « atome » cher aux dessinateurs André Franquin (Spirou, Gaston) et Will (Tif & Tondu), allié à une narration exceptionnelle. Le scénario est basé sur un cas clinique réel des années 50, celui d’un américain surnommé, par le psychanalyste qui l’a suivi, Kirk Allen. Ce spécialiste du monde asiatique travaille dans un secteur gouvernemental particulièrement sensible. Il semble parfaitement intégré dans la société, jusqu’au jour où son trouble de la personnalité est découvert. En effet, depuis l’âge de 13 ans, il aurait développé des capacités de télépathie avec un personnage vivant dans un futur galactique. Le lecteur est baladé entre les années 1 920, 1 950 et 121 000 et les lieux : Asie, Mexique, Washington … sans jamais être perdu.

Souvenirs de l’Empire de l’Atome par Thierry Smolderen & Alexandre Clérisse – Dargaud

Souvenirs de l’Empire de l’Atome est une belle revisitation de l’histoire de la science-fiction et s’inspire de la vie de Cordwainer Smith, de son vrai nom Paul M.A. Linebarger (le prénom du héros), auteur culte des fifties, universitaire et militaire spécialiste de la guerre psychologique. Un livre au papier suranné qui permet de se replonger avec un plaisir affirmé dans cette période de la guerre froide mythifiée ou fantasmée. A vous de le lire au premier degré – ou de partir à la recherche des nombreuses références parsemées au travers des cases …

Souvenirs de l’Empire de l’Atome par Thierry Smolderen & Alexandre Clérisse – Dargaud

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La BA pour en savoir plus et prolonger le plaisir de cette BD :

Le point de vue le presse spécialisée : du9 Inrocks

 

Le Sourire de Mao par Jean-Luc Cornette & Michel Constant – Futuropolis

 

Le Sourire de Mao par Jean-Luc Cornette & Michel Constant – Futuropolis

Le scénario redouté est devenu une réalité. La Belgique est scindée en deux Etats. Tel est le postulat de départ de ce récit. La République Démocratique de Wallonie, avec à sa tête un Président-Capitaine, devient peu à peu un pays totalitaire. L’action se déroule au sein d’un groupe scout proche des jeunesses hitlériennes.

La manipulation des uns et des autres est au coeur de ce récit sur fond de magouilles politiques et de lutte armée d’un groupe de résistance.

Au final, un album déconcertant, entre thriller et politique fiction, avec en ligne de mire l’achat iconoclaste de la dépouille de Mao Zedong, un modèle chinois pour ce régime adepte lui aussi du culte du chef.

A visiter cet été, à Bruxelles, l’exposition dédiée à l’album au Centre Belge de la Bande Dessinée jusqu’au 8 septembre 2013.

Le Sourire de Mao par Jean-Luc Cornette & Michel Constant – Futuropolis

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La BO à se glisser entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

The Age of the Understatement par The Last Shadow Puppets

Le point de vue le presse spécialisée : RTBF BDgest’

01 Juil

Les essentielles de l’été #1/3

Si comme moi, la BD sous toutes ses formes vous appréciez. Si sous toutes les latitudes, vous dévorez les albums. Alors plongez-vous dans cette sélection de 12 albums pour tous les âges et tous les goûts, à lire à la plage, sur les sommets ou sous la couette …

 

Masqué par Serge Lehman & Stéphane Créty – Delcourt

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MASQUE t 3&4 par Serge Lehman & Stéphane CrétyDelcourt

Le premier cycle de 4 tomes s’achève. Cette description rétro-futuriste de notre prochain Grand Paris est brillante. Les références à l’actualité sont nombreuses (les frères Bogdanov, Rachida Dati) comme les luttes de pouvoir entre le maire de Paris-Métropole et le Préfet de Police aux pleins pouvoirs. A l’égal du nouveau monde, la 1ère capitale du continent européen a trouvé son Super-Héros : Franck Braffort a à faire avec des Anomalies, un être minéral issu des gargouilles de Notre-Dame, et des chimères de l’Ile de la Cité. L’insurrection gronde à Paname. L’Homme masqué veille sur ce Paris fantasmé.

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La BO à se glisser entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

I’ve Got That TuneChinese Man

Le point de vue le presse spécialisée : Krinein BDgest

 

 

La Colère de Fantômas (t1) par Olivier Bocquet & Julie Rocheleau – Dargaud

« Fantômas, c’est l’Enéide des temps modernes », disait Blaise Cendrars. Paris 1991. Le héros criminel, imaginé par Marcel Allain et Pierre Souvestre, est de retour. Cette adaptation en BD est un retour aux sources du feuilleton (32 volumes parus) qui connu le plus grand des succès au début du XXe siècle, loin de la version comique de toutes les mémoires avec Louis de Funès et Jean Marais. de quoi justifié La Colère de Fantômas.

Pour évoquer le maître du crime et de l’effroi (considéré par certains comme le premier super-héros moderne et l’inspiration de The Phantom aux USA), le romancier Olivier Bocquet (primé pour son thriller Turpitudes) et la dessinatrice Julie Rocheleau (primée pour l’album La Fille Invisible) épousent la noirceur et la cruauté de leur personnage.

Fantômas par Olivier Bocquet & julie Rocheleau – Dargaud

Un dessin d’une grande beauté stylistique, tout en ombres et couleur sang, sert cette intrigue policière bien menée. Massacre et guillotine, terreur et frissons, avec un zeste de second degré. A vous de découvrir de quoi est fait ce premier des 3 tomes de la série : « Les Bois de Justice ». Un des albums essentiels de l’année 2013 !

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La BA à se glisser entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Une Bande Annonce d’une grande qualité visuelle avec une formidable bande sonore.

Le point de vue le presse spécialisée : BDgest’ Télérama

 

Ouessantines par Weber & Nicoby – Vents d’Ouest

 

OUESSANTINES par Patrick Weber & NicobyVent d’Ouest

« Qui voit Ouessant voit son sang » Autrement dit Ouessant se mérite ! Sur cette île de Bretagne, ce n’est pas donné à qui veut d’y vivre – et encore moins d’y ouvrir une maison d’hôtes quand on arrive du continent ! C’est pourtant le cas de Soizic, une jeune femme décidée à donner une autre direction à sa vie. Ici sur l’ile française la plus à l’ouest, la vie y a longtemps été rude et depuis des générations, les Ouessantins ne sont pas vraiment réputés pour leur sens de l’accueil. Mais derrière les clichés et les a priori, tout peut évoluer. C’est ce que prouve avec talent ce récit graphique à l’atmosphère digne d’un roman d’Agatha Christie. Un bel hommage à toutes ces femmes qui ont façonné cette ile pendant que leurs hommes étaient en mer.

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La BO à se glisser entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Chanson pour les amisMiossec (filmée à Ouessant)

Le point de vue le presse spécialisée : BDgest PlanéteBD

Sirène par Collignon – Dupuis

 

SIRENE t1 par CollignonDupuis

Etrange, hypnotique, fascinant …  Les qualificatifs manquent pour décrire ce rare récit graphique. La voie qui est explorée ici par Daphnée Collignon, est, nous dit-elle, celle d’une interprétation très personnelle du conte de la Petite Sirène conjugué avec ses réflexions personnelles sur la maternité. Au Maroc, entre mer et montagne, l’héroïne est aux prises avec des fantômes, des présences énigmatiques qui lui semblent si réelles. Le plaisir vient de ce mélange de pleine page de dessin au couleurs envoutantes et de la calligraphie arabe toujours aussi graphique. Se laisser porter par les images sans chercher à tout prix à comprendre, est le plus sûr moyen de rentrer dans l’histoire, sous peine sinon de passer à coté.

Sirène par Collignon – Dupuis

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La BO à se glisser entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Sweet MessageMolecule feat. Charlélie Couture

Le point de vue le presse spécialisée : PlanéteBD Laligneclaire

28 Juin

« Jack Joseph soudeur sous-marin », un récit de Jeff Lemire aux éditions Futuropolis

On ne voit que ça. Son ventre. Enorme ! Susie devrait accoucher dans un mois tout au plus. En attendant, elle aimerait bien que son mari, Jack, reste à ses côtés, participe aux séances de préparation à l’accouchement. Elle se sent seule. Très seule. Jack, lui, ne s’est jamais senti aussi bien au fond de l’eau qu’aujourd’hui. Il est soudeur sous-marin. Une façon peut-être de retarder l’échéance, de fuir encore un peu ses responsabilités. Une façon aussi de replonger dans son passé, d’aller chercher au plus profond de l’eau et de lui-même une culpabilité enfouie. Jusqu’au jour où  Jack est remonté inconscient à la surface. On pense immédiatement à un accident de décompression. Mais non. C’est bientôt Halloween, la date anniversaire de la mort de son père…

Souvenez-vous, Jeff Lemire nous avait littéralement subjugué avec son récit Essex County paru en 2010, récit qui racontait la vie d’un gamin de 10 ans orphelin vivant chez son oncle dans une ferme perdue quelque part dans l’Ontario, au Canada. Avec Jack Joseph, soudeur sous-marin, l’auteur poursuit son exploration de l’âme humaine, peut-être encore plus profondément, intensément, mettant en scène un homme incapable de regarder devant lui, rongé par le souvenir d’un père absent, alcoolique, qui trouvera la mort dans des eaux – et des circonstances – troubles.

Jeff Lemire est inspiré par des gens comme José Munoz, Hugo Pratt, Alex Toth, Joe Kubert ou Dave McKean pour la BD, David Lynch, Stanley Kubrick, Wim Wenders, pour le cinéma. Un trait brut proche de l’esquisse, une atmosphère intime et sombre, une charge émotionnelle forte…  incontestablement, Jeff Lemire est l’un des plus grands auteurs canadiens actuels ! EGuillaud

Jack Joseph, soudeur sous-marin, de Jeff Lemire. Editions Delcourt. 26 euros

Interview de Bruno Bazile, auteur de la BD M’sieur Maurice et la dauphine jaune

Dessinateur des Aventures de Sarkozix, le Nantais Bruno Bazile revient avec un album qui fleure bon l’âge d’or de la bande dessinée franco-belge, une biographie dessinée et romancée de l’auteur Maurice Tillieux. Rencontre…

La fin d’un règne… et la fin d’une série ! Exit Nicolas Sarkozy, au placard les aventures de Sarkozix. La série parodique publiée chez Delcourt entre 2010 et 2012 s’arrête avec le changement de Président mais Bruno Bazile, son dessinateur, ne baisse pas les pinceaux et s’attaque d’emblée aux aventures d’un nouveau personnage, tout aussi réel, tout aussi passionnant, une figure, que dis-je une légende du Neuvième art que les plus de 20 ans, ou plus sûrement 40, connaissent forcément. Son nom : Maurice Tillieux.
M’sieur Maurice et la dauphine jaune est une biographie (très) romancée du génial créateur des aventures de Gil Jourdan publiées dans le journal Spirou entre 1956 et 1979. Inspiré par le quotidien et souvent par son propre quotidien, Maurice Tillieux glissa ses héros dans les décors de quelques sites remarquables de France et d’ailleurs comme le passage de Gois en Vendée, le port de Saint-Nazaire ou le pont transbordeur de Rochefort.

Entre nostalgie et modernité, M’sieur Maurice et la dauphine jaune nous fait découvrir en une suite d’histoires courtes comment ce quotidien, ces sites remarquables mais aussi les quartiers populaires ont pu influencer Maurice Tillieux.

© Christophe Turgis
© Christophe Turgis

Pourquoi une biographie dessinée de Maurice Tillieux ?

Bruno Bazile. Parce que je trouvais, quand j’étais jeune lecteur de la série, une proximité (géographique) entre les aventures de Gil Jourdan et des lieux de vacances que je fréquentais moi-même. Etant devenu auteur BD, adulte, et fréquentant ces lieux familiers, la logique dans laquelle s’était plongé Tillieux pour imaginer ses histoires me paraissait évidente, naturelle. C’est ce que j’ai voulu raconter.

La suite ici…

24 Juin

La Fille par Christophe Blain & Barbara Carlotti

La Fille par Christophe Blain & Barbara Carlotti - Gallimard

La Fille, c’est une grande brindille aux cheveux rouges. Sa moto, c’est une anglaise des années 60, pétaradante et rutilante. Un bolide à son image. L’homme qu’elle a dans la peau est un cowboy minuscule, mais un vrai, avec Stetson, santiags et belles moustaches. Ce livre-disque est dessiné et mis en musique par un attelage inhabituel : l’auteur à succès de B.D, Christophe Blain (Quai d’Orsay, Isaac, Gus) et une chanteuse à la voix envoutante, Barbara Carlotti (L’amour, l’argent, le vent). Le résultat : un conte érotique à réserver aux oreilles et aux regards avertis, pour un plaisir inédit entre Comics et Pop Music.

Un jour que la Fille chevauche sa moto dans la Sierra Nevada, elle rencontre une horde de motardes, dont le sport favori est de casser du cow-boy. Christophe Blain, qui nous avait réjoui avec Quai d’Orsay et Gus, un autre cowboy, rend ici un hommage revendiqué à l’illustrateur belge Guy Pellaert. Pravda la Survireuse, est aussi une motocycliste, une icône sexy des sixties & seventies, de laquelle l’héroïne de Blain pourrait bien être la fille.

« Pour écrire ce conte, je suis parti d’une histoire de huit pages que j’avais faite pour le magazine Pilote, en hommage à Pravda la Survireuse de Guy Peellaert et Pascal Thomas. L’hommage s’est transformé en un récit plus personnel. J’ai travaillé et retravaillé, attentif aux remarques de Barbara, qui pointait sans concession les passages qui ne fonctionnaient pas, ou qui m’encourageait lorsque je trouvais une bonne direction. »

La Fille par Christophe Blain & Barbara Carlotti - Gallimard

Barbara, c’est Barbara Carlotti, la chanteuse à la voix grave, une voix différente dans la chanson française, récompensée par le prestigieux Grand Prix du disque de l’Académie Charles Cros pour son dernier album en 2012 : L’amour, l’argent, le vent.

« Nous avons construit le conte en flux tendu, j’apportais le texte, Barbara m’enregistrait en train de le lire à haute voix, puis elle réenregistrait le texte. Elle commençait à y ajouter les chansons, je lui montrais des planches, ça lui donnait de nouvelles idées de musique. Je lui ai infligé des heures d’écoute de bruits de motos, Barbara a mis l’histoire en son, elle a réuni, enregistré la plupart des bruitages. Nous voulions une vraie bande-son de film. »

La Fille par Christophe Blain & Barbara Carlotti - Gallimard

La Fille par Christophe Blain & Barbara Carlotti - Gallimard

Avec la reprise de Hey Cowboy de Lee Hazlewood et celle de Blanche Neige de Brigitte Fontaine, la playlist qui accompagne le récit multiplient des références très larges. Et impossible de ne pas penser à l’univers de Russ Meyer et son célèbre Faster, Pussycat ! Kill ! Kill, dans le mâle imaginaire.

Des influences revendiquées par Barbara Carlotti : « Au final, c’est un mélange hybride qui nous ressemble et qui doit d’une certaine manière être notre interprétation de l’histoire. Ce qui fait l’homogénéité, c’est qu’on a finalement utilisé beaucoup de synthétiseurs, tout en gardant un côté acoustique, et que nous avons voulu y mettre de l’énergie et du sexe, car il ne faut pas oublier que c’est un conte érotique. »

La Fille par Christophe Blain & Barbara Carlotti - Gallimard

Dans ce conte érotique, le cowboy ne mesure que quelques centimètres. Il grandit au fur et à mesure qu’il fait l’amour avec La Fille. Sur la moto avec elle, il est à la meilleure place qui soit, lové dans la boucle de sa ceinture, les yeux grands ouverts face à l’immensité de l’ouest américain, du désert californien. Une des passions d’enfance de Christophe Blain, qui se vivait tour à tour comme un outlaw, un cowboy, un shérif. C’est ce goût pour l’Ouest fantasmé, qui a donné naissance à sa belle série Gus et aujourd’hui à ce livre-disque.

« C’est une autre de mes passions enfantines. J’adore qu’on me raconte des histoires. Qu’on me les lise. D’ailleurs, c’est un des sujets de ce conte. Le Cow-boy, le personnage principal masculin, fait lire un livre à la Fille, le personnage principal féminin. Les acteurs jouent presque comme les doubleurs d’un film américain des années 60. Si on vous fait écouter, en blind test, la bande-son doublée en français d’un film hollywoodien, même si les dialogues sont banals, qu’ils ne disent rien de l’action, ni du lieu, vous savez immédiatement que vous êtes en Amérique, qu’il s’agit bien d’un film, et vous pourrez vite dire s’il a été tourné dans les années 50, 60, 70 ou 80. Vous sentez le souffle de l’aventure, vous êtes dans une Amérique rêvée, fantasmée, fausse et vraie, plus grande qu’elle-même. C’est un paradis perdu. »

La Fille par Christophe Blain & Barbara Carlotti - Gallimard

Au final, cet objet peut se dévorer de trois façons :

– classique, celle que je préfère, le livre seul

– le livre plus le CD comme un enfant qui attend la petite clochette pour tourner la page suivante de l’album, un peu trop lourd et redondant à mon goût

– sur la route, le CD seul comme une histoire avec de vrais chansons à l’intérieur

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Pour se faire une idée de la BO et de l’album :

Christophe Blain & Barbara Carlotti - c Catherine Hélie/Gallimard

Pour en savoir plus sur : Christophe Blain Barbara Carlotti

Pour lire les premières planches : Gallimard

Le point de vue le presse spécialisée : Culturebox Du9 Motomag

19 Juin

M’sieur Maurice et la dauphine jaune, une biographie romancée de Maurice Tillieux signée Bruno Bazile aux éditions Treize Etrange

Mais qu’a donc fait ce fameux M’sieur Maurice pour mériter un album de BD à son nom ? Si les plus âgés d’entre vous comprendront dès les premières pages, les plus jeunes auront peut-être besoin de quelques éclaircissements. Car M’sieur Maurice n’est pas un personnage de papier ordinaire. Dans la vraie vie, l’homme s’appelait Maurice Tillieux et exerçait le métier d’auteur de bande dessinée, oui oui, un auteur prolifique et influent qui imprima sa marque au Neuvième art dans les années d’après-guerre et plus particulièrement au journal Spirou pour lequel il créa les célèbres aventures de Gil Jourdan. C’est d’ailleurs à celles-ci que fait référence la couverture et principalement à celles-ci que nous ramènent les 46 pages de cet album.

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Découvrez l’interview de l’auteur ici-même

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Dans une série d’histoires courtes, Bruno Bazile, auteur par ailleurs des aventures humoristiques de Sarkozix, nous raconte en effet comment le quotidien de l’auteur et notamment ses voyages à travers la France, depuis Marseille jusqu’à Saint-Nazaire, en passant par lîle de Noirmoutier ou  la Normandie, ont pu  influencer son travail et donner naissance à l’un des personnages les plus emblématiques du journal Spirou. Moins épique et surtout moins polémique que le récit des aventures de Jijé, Franquin et Morris aux Etats-Unis (Gringos Locos), M’Sieur Maurice et la dauphine jaune est présenté comme une biographie (très) romancée de Maurice Tillieux. Les amoureux de la série policière s’amuseront des nombreuses anecdotes, des clins d’oeil et des « seconds rôles » qui traversent l’album comme will ou François Walthéry. Toute une époque ! EGuillaud

M’Sieur Maurice et la dauphine jaune, de Bazile. Editions Treize Etrange. 13,90 euros

17 Juin

L’Etranger par Jacques Ferrandez

L'Etranger par Jacques Ferrandez - Gallimard

L’Etranger de Camus par Jacques Ferrandez ou quand la BD retourne aux sources de la littérature avec brio. L’auteur, pied noir, connu pour ses Carnets d’Orient, Alger la Noire et son goût pour les adaptations d’œuvres littéraires. Pagnol, Benacquista, Pennac se sont déjà retrouvés transformés sous ses crayons, ou encore Camus, déjà, avec L’hôte (une nouvelle tirée de L’Exil et le Royaume) Un auteur pour lequel son sens du découpage et la beauté de ses aquarelles font merveilles.

« L’Étranger, c’est l’histoire d’un homme condamné à mort pour n’avoir pas pleuré à l’enterrement de sa mère. » aimait à répéter Albert Camus.

En cette année de célébration du centenaire de la naissance du prix Nobel 1957, Jacques Ferrandez s’attaque à nouveau à un de ses textes, certainement l’un des plus connus à travers le monde : L’Etranger. Et c’est loin d’être un hasard, puisque Ferrandez connait intimement Camus.

« Beaucoup de choses, et depuis longtemps en effet, me lient à Camus. Il me semble que j’ai grandi avec. Je suis né dans le quartier populaire de Belcourt, à Alger, et mes grands parents avaient un petit magasin de chaussures au 96 rue de Lyon. Albert Camus a passé toute son enfance et son adolescence au 93, en face. Ma grand-mère paternelle et sa mère étaient de la même génération. D’origine espagnole toutes deux, elles se connaissaient en tant que voisines. »

L'Etranger par Jacques Ferrandez - Gallimard

« Le trajet entre Belcourt et le Lycée Bugeaud, à l’autre bout d’Alger, que Camus raconte dans son livre Le premier Homme, mon père, qui a fréquenté le même lycée venant du même quartier, me l’avait raconté presque avec les mêmes mots. Son appartenance à l’Algérie, son déchirement au moment de la guerre d’Indépendance, tout cela me touche 
beaucoup. »

« Camus m’a beaucoup inspiré tout au long de mes Carnets d’Orient et, avant d’adapter L’Hôte, je lui avait déjà rendu hommage sous forme d’exergue dans mes précédents albums. Dans La Guerre fantôme, j’ai même mis en scène la séquence où Camus lance à Alger son appel à la trêve civile, en janvier 1956 …»

« Aujourd’hui, maman est morte. … ou peut-être hier, je ne sais pas … »

Difficulté première : comment faire avec le long monologue de Meursault, le personnage central de L’Etranger ? Jacques Ferrandez choisit de faire dialoguer son personnage avec les autres protagonistes, mais tout en revendiquant de ne pas avoir pris un seul mot qui n’appartienne à Camus.

La seconde difficulté a été de donner un visage à un héros de la littérature dont la célébrité dépasse le cadre géographique de la France.

L'Etranger par Jacques Ferrandez - Gallimard

« Impossible de ne pas reprendre le célèbre incipit du roman : “Aujourd’hui, Maman est morte.” Mais je ne savais pas comment l’installer dans le récit. Je ne souhaitais pas garder de voix off : c’est de la bande dessinée, il faut dialoguer les situations pour les rendre vivantes. J’ai donc dû trouver une astuce. Albert Camus m’a fourni la solution : son héros s’assoupit dans le bus, quelques pages plus loin. J’ai profité de cette situation pour opérer un retour en arrière dialogué, et conserver ensuite cette forme de narration. J’ai choisi de faire de Meursault un homme jeune. Pour moi, L’Etranger est un roman sur la jeunesse, il pointe un refus du mensonge et des règles de la société. J’ai pensé à James Dean ou Gérard Philipe pour créer mon héros. Comme je dessine l’intrigue au fur et à mesure, mon trait évolue : au début, je cherche mes personnages, je peine à les rendre ressemblants d’une case à l’autre. Cela va finalement bien à Meursault, qui est si difficilement cernable… » (propos recueillis par Télérama)

Ses aquarelles lumineuses restituent élégamment des paysages écrasés de chaleur, où se déroule un drame sourd : l’indéchiffrable Meursault a tué un homme, et va être condamné à mort. Mais le jury est-il plus sensible à cet assassinat, ou à l’indifférence affichée de l’accusé lors de l’enterrement de sa mère ?

L'Etranger par Jacques Ferrandez - Gallimard

Cette intention de mettre en scène « l’absurde » est parfaitement retransmise par l’adaptation. Surtout, elle n’étouffe jamais le texte et laisse l’œuvre de Camus respirer. Tout les questions que se posent cet étranger à soi et au monde sont là : l’amour, Dieu, la famille, la morale, celles-là même sur lesquelles sont fondées nos sociétés.

L'Etranger par Jacques Ferrandez - Gallimard

Le soleil d’Algérie, les plages de Tipaza, les rues d’Alger, la lumière aveuglante avant le drame d’une noirceur insondable. Tout est là dans chacune des planches de Ferrandez, la chaleur étouffante, l’atmosphère et les décors chers à Camus.

Jacques Ferrandez - Photo (c) Isabelle Franciosa

« Je me suis amusé à faire des clins d’œil : le procureur ressemble fort à Jean-Jacques Brochier, un intellectuel parisien dans la mouvance de Jean-Paul Sartre, qui avait qualifié Albert Camus de « philosophe pour classe de terminale ». Et j’ai fait à Céleste – le patron du restaurant où Meursault a ses habitudes – la tête de William Faulkner, pour lequel Camus avait beaucoup d’admiration. Un peu plus loin, j’ai transformé Sartre en journaliste agressif venu de Paris… Une façon de venger Camus, en quelque sorte ! » (propos recueilli par Télérama)

Bref  Jacques Ferrandez confirme son statut majeur dans le monde du 9ème art. Cette bande dessinée est une des plus grandes réussites en la matière, une adaptation qui donne envie de relire l’œuvre de Camus et plus…

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La BO à se mettre entre les oreilles pour prolonger le plaisir de cette BD :

Killing an arab par The Cure (chanson inspirée du roman de Camus et très mal comprise à l’époque de sa sortie en 1978)

Pour en savoir plus sur Jacques Ferrandez

Pour lire les premières planches : Gallimard

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