On commence avec le troisième et dernier volet de Biomega du génial Tsutomu Nihei, paru il y a maintenant quatre mois mais totalement incontournable. Près de 1200 pages au final et une sacrée claque visuelle grâce à ce graphisme si singulier du mangaka, un immense fan, et ça se sent, du créateur des décors et monstres d’Alien, H.R. Giger. L’homme s’est fait connaître au Japon et en Europe avec des récits SF sombres, désespérés, violents, oppressants, organiques, reconnaissables entre tous. Après Abara et Blame 0, c’est donc au tour de Biomega de bénéficier d’une réédition Deluxe, de quoi profiter pleinement du génie de Nihei et de se téléporter en 3005, carrément, pour une histoire mêlant exploration spatiale et contamination virale. Le poids des mots, le choc des images ! (Biomega deluxe, de Tsutomu Nihei. Glénat. 14,95€ le volume)
Série toute aussi incontournable, One Piece s’est enrichie d’un 106ᵉ épisode en décembre, un 107ᵉ est attendu pour avril. De quoi nous faire tourner la tête et propulser la série du Japonais Eiichiro Oda dans le top One du manga le plus lu et le plus connu sur la planète Terre et peut-être au-delà. Plusieurs centaines de millions d’exemplaires vendus à travers le monde, une quarantaine de millions sur le seul territoire français, un univers unique, un mélange d’aventure, de fantastique et d’humour, et un héros baptisé Lufy qui rêve de devenir le roi des pirates en trouvant le fameux trésor baptisé One Piece. (One Piece tome 106, d’Eiichiro Oda. Glénat. 6,99€)
On reste dans le même univers avec un anime comics en deux tomes tout juste sortis des presses. One Piece Film – Red, tel est son nom, permet de retrouver les plus belles scènes du film musical éponyme sorti en 2022, l’une des meilleures adaptations de One Piece au cinéma, me dit-on dans l’oreillette. En tout cas une belle façon de découvrir ou redécouvrir l’univers foisonnant d’Eiichiro Oda, ici en couleurs. Et qui dit film musical dit musique. Notre héros international Luffy, accompagné de son équipage, débarque sur l’île d’Élégia pour assister au premier concert de la chanteuse Uta, fille du pirate Shanks Le Roux et amie d’enfance de Luffy. Surprise… la jeune femme prône une « nouvelle ère » sans pirates. (One Piece Red, d’Eiichiro Oda. Glénat. 9,60€ le volume)
Le Bateau-usine de Shinjirô et Shigemitsu Harada est un récit de science-fiction qui nous embarque pour un futur lointain où toutes les mers se sont évaporées, faisant de notre belle planète bleue une planète noire et aride. Les créatures marines se sont adaptées en se déplaçant dorénavant au gré des courants atmosphériques. C’est donc dans le ciel que le bateau-usine navigue pour pêcher des crabes géants. À son bord s’activent pour une misère des ouvriers endettés, des criminels et des gamins orphelins vendus à la compagnie comme Luca et Shû qui ne rêvent que d’une chose : gagner assez d’argent pour acheter leur liberté. Mais ce n’est pas gagné… (Le Bateau-usine tome 3, de Shinjirô et Shigemitsu Harada. Vega – Dupuis. 8,35€)
Vous avez aimé ReRe : Hello! de Yoko Minami ? Alors, vous devriez aimer 360° Material de la même autrice. Les quatre volumes de la série seront disponibles simultanément aux éditions Delcourt / Tonkam le 13 mars. À l’unité ou en coffret, à vous de choisir pour plonger dans cette histoire d’amour qui commence sur un quai de gare. Mio Ôtaka, lycéenne ordinaire, évite à un jeune garçon, Takin, absorbé dans ses pensées, de finir sous un train. De cet acte de courage nait une amitié entre les deux personnages, une amitié qui se transformera en amour… Une romance au dessin léger comme l’air ! (360° Material, de Yoko Minami. Delcourt / Tonkam. 7,99€ le volume)
Peut-être n’avez-vous pas fait partie des chanceux qui ont pu parcourir la formidable exposition consacrée à Hiroaki Samura lors de la dernière édition du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême mais pas de panique, il reste ses mangas pour en prendre plein la vue et notamment cette nouvelle édition de L’Habitant de l’infini en 15 doubles tomes accompagnée d’une suite inédite en français baptisée Bakumatsu dessinée par Ryu Suenobu et scénarisée par Renji Takigawa, sous la supervision, bien évidemment, du maître Hiroaki Samura. Les premiers volets sont sortis en septembre, les deuxièmes en novembre, les troisièmes en janvier et les quatrième sont annoncés pour avril. Bref, de quoi retrouver notre samouraï immortel, Manji, dans de sacrés combats de sabre et dans les deux cas avec un graphisme plutôt musclé. (L’Habitant de l’infini, Immortal editions Tome 3, de Hiroaki Samura, Casterman. 13,95€. L’Habitant de l’infini – Bakumatsu tome 3, de Renji Takigawa et Ryu Suenobu. Casterman. 9,45€)
Gen Kinokura, 34 ans, est un amoureux de la nature. Il aime par-dessus s’éloigner de la ville, planter sa tente au milieu des bois, faire un bon feu, respirer le bon air et prendre une bonne dose de solitude. Mais cette fois, Gen ne peut que déchanter. Alors qu’il s’apprête à prendre son repas, surgit de nulle part une jeune-fille, Shizuku Kusano. La rencontre est explosive mais les talents de cuisinière de Shizuku finissent pas apaiser les tensions et le camping en solo se termine à deux. Cette série qui compte déjà 16 volumes au Japon et semble remporter un certain succès se présente à la fois comme une histoire d’amour, un guide du parfait campeur et un livre de recettes. Au menu : poêlée de saucisses et de champignons à l’ail, bouchées de jambon cru au fromage et sauce salsa maison, poulet rôti à la bière ou encore risotto à la tomate et aux palourdes façon plein air, bref de quoi nous en mettre l’eau à la bouche ! (Solo Camping for two, de Yudai Debata. Soleil Manga. 8,50€)
C’est une histoire d’épicier. Mais d’épicier épicé. Du genre qui ne vend pas que des légumes. Taro Sakamoto, c’est son nom, a beau avoir un léger embonpoint, une moustache à la papa, des lunettes de myope, il est à lui seul un mythe, une légende, un ex-tueur admiré de tous ses congénères, craint par tous les gangsters. Oui, Sakamoto l’épicier avait le flingue facile avant de raccrocher, de se marier, d’avoir un enfant et de s’installer comme épicier. Une vie pépère jusqu’au jour où le jeune assassin télépathe Sin débarque dans la supérette. Vous voulez de l’action ? Alors, vous en aurez, Sakamoto Days est un concentré d’énergie au rythme de parution effréné. Le tome 12 est sorti en février, le 13 sortira en mai. (Sakamoto Days tome 12, de Yuto Suzuki. Glénat. 6,99€)
On continue dans l’esprit culinaire avec What did you eat yesterday. Le premier tome est sorti en janvier en France, une série référence au Japon publiée depuis 2007 (21 tomes à ce jour et plus de 10 millions d’exemplaires écoulés) et adaptée en film, série télévisée et livre de cuisine. Au centre de tout, deux personnages qui forment un couple gay, Shirô Kakei, avocat, et Kenji Kabuki, coiffeur, deux caractères opposés mais qui se retrouvent autour de la cuisine. Entre recettes et instantanés de vie, les deux protagonistes nous font découvrir la culture japonaise. Aux manettes, une autrice multiprimée. What did you eat yesterday a notamment remporté le prix Kodansha Award du meilleur manga en 2019. (What did you eat yesterday tome 1, de Fumi Yoshinaga. Soleil Manga. 15,99€)
Ils en rêvaient, ils l’ont fait ! Et bien fait. es Français Sylvain Ferret, scénariste, et Nevan, dessinateur, signent avec L’Ombre de Moon leur tout premier manga. Un manga ? Des Français ? Oui, exactement, avec sens de lecture à la japonaise, dessin et découpage à la japonaise et même un petit laïus des auteurs sur le rabat de la couverture, comme le font les mangakas. Côté histoire, les auteurs nous embarquent pour l’Ombre, un monde fantastique dans lequel Moon Banning, le protagoniste principal, accompagné d’un jeune garçon, Panpan, et d’un être étrange toujours prêt à balancer des proverbes, Arès, doit affronter des monstres comme autant de ses tourments du passé avec l’espoir d’en sortir grandi. Un scénario efficace, un dessin nerveux, des scènes d’action vertigineuses, un brin d’humour… bref une belle découverte ! (L’Ombre de Moon, de Nevan et Ferret. Delcourt Tonkam. 12,99€)
Nouvelle adaptation en manga d’un classique de la littérature par le studio Variety Artworks pour le compte des éditions Soleil Manga, La Métamorphose. Après La Divine Comédie, Ulysse, Le Rouge et le noir, Le Capital ou encore Du Contrat social, voici donc l’une des œuvres les plus célèbres de Franz Kafka écrite en 1912. Direction Prague pour une histoire absurde, celle d’un représentant de commerce nommé Gregor Samsa. L’hommei se réveille un beau jour métamorphosé en un énorme insecte. Plus qu’un simple récit fantastique, La Métamorphose offre une critique sociale aux multiples lectures possibles. (La Métamorphose, de Franz Kafka et Variety Artworks. Soleil manga. 8,50€)
Bienvenue en enfer ou presque ! Depuis 100 ans, la Terre est plongée dans le noir à cause d’un épais nuage. La plupart des végétaux a disparu et l’humanité place ses derniers espoirs dans la transfloraison, une technique qui consiste à transformer un être humain en plante, comblant ainsi le manque de végétaux. Héros de ce récit vivant dans une grande pauvreté, Toshiro décide de franchir le pas et de subir l’opération nécessaire à sa transformation en plante… Un récit d’anticipation original aux belles ambiances sombres. (Fool Night tome 6, de Kasumi Yasuda. Glénat. 7,90€)
Fin de partie pour Abyss Azure dont le troisième et dernier volume est sorti début février. Inspiré de La Petite Sirène du romancier danois Hans Christian Andersen, Abyss Azure nous embarque dans les profondeurs sous-marines où vivent les ondins, ces créatures mythiques représentées avec un torse humain et une queue de poisson. Ici, aucun contact avec les humains n’est toléré, une consigne respectée jusqu’au jour où l’une de ces créatures, Ryû, tombe amoureuse d’un homme… (Abyss Azure tome 3/3, d’Akhito Tomi. Vega Dupuis. 8,35€)
Changement de style et d’univers avec Blue Giant Explorer et la sortie du troisième volume, une série signée Shinichi Ishizuka. Suite directe de Blue Giant et de Blue Giant Supreme, cette nouvelle série, dont le premier tome a figuré dans la sélection officielle du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême 2024, nous permet de retrouver notre saxophoniste Dai Miyamoto à la conquête des États-Unis. Blue Giant Explorer nous offre non seulement un regard sur le monde de la musique et plus spécialement le jazz mais aussi sur la culture nippone et américaine, le tout avec une approche graphique du plus bel effet. Et si vous regrettez le silence du manga, vous pourrez toujours vous rabattre sur l’adaptation cinéma actuellement sur les grands écrans et sa BO signée Hiromi Uehara. (Blue Giant Explorer tome 3, de Shinichi Ishizuka. Glénat. 7,90€)
On termine avec la réédition de deux anthologies consacrées à Moto Hagio, l’une des premières mangakas femmes à avoir investi dans les années 70 le registre de la bande dessinée féminine, le shojo, et bousculé au passage les codes en usage qui imposaient des histoires sans profondeur. Moto Hogio, à laquelle le Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême a consacré cette année une rétrospective et décerné un Fauve d’honneur, a tout au long de sa longue carrière cherché à imposer à travers la fiction des récits ambitieux sur des thématiques diverses, notamment autour de l’identité de genre. Une autrice à découvrir ou redécouvrir ! (Anthologie de l’humain et Anthologie de la rêverie, de Moto Hagio. Glénat. 14,95€ le volume)
Eric Guillaud