L’éditeur Delirium continue son salvateur travail de réhabilitation de la contre-culture destroy du neuvième art. Il attaque aujourd’hui la réédition de l’intégrale des aventures de Nexus, sorte de chevalier blanc intergalactique censé sauver la veuve et l’orphelin…
Non ce n’est pas Captain Flam mais lui aussi vient du fond de la nuit et d’aussi loin que l’infini pour sauver tous les hommes. Après le nom Nexus ne vous dit rien ? C’est normal. Â moins d’un acharné au dernier degré adepte forcené de VO, il y a peu de chances que vous ayez entendu parler de cette BD indépendante de SF baroque parue initialement dans les années 80 et jusqu’à lors traduite seulement brièvement par Semic au début des années 2000 en français. Après, rien qu’avec ce petit pitch et si vous suivez un minimum ce blog (allez, avouez-le), vous deviez bien sentir que l’on tenait donc là un candidat parfait pour la-petite-mais-maousse maison d’édition Delirium, spécialisée dans l’exhumation de petites perles de BD ‘déviantes’ dont nous vantons régulièrement les mérites (Judge Dredd, Next Men, Nemesis etc.). Bingo !
Dans cette édition, comme d’habitude avec cet éditeur, de toute beauté avec sa couverture cartonnée auquel on a adjoint un petit ‘volume 1’ (sous-entendu…), on navigue donc en plein space-opera quasi-pop et en même temps, bizarrement empreint d’une certaine mélancolie. Ces 400 pages reprennent la parution chronologiquement de la série, qui a d’abord débuté en noir et blanc avant de passer, rapidement, en couleurs.
Refugié sur sa lune d’Ylum, Horatio Hellpop (ce nom !) alias le Nexus est une sorte de shérif interstellaire traquant les criminels et les assassins. Sauf qu’il est torturé par ses rêves, des visions en fait manipulées par la race extra-terrestre à l’origine de ses pouvoirs afin de l’obliger à exécuter leurs basses œuvres à son insu. Et il doit plus ou moins gérer la société cosmopolite de Ylum, conglomérat bigarré de sorte de sans papier de l’espace qui ont tous échoué ici par défaut après avoir été sauvés.
Bien qu’elle soit américaine, cette série dont la première publication remonte à 1981 a finalement plus de points communs avec le genre de héros subversifs que l’on pouvait trouver, par exemple, chez les anglais de 2000 AD, éditeur de Judge Dredd et Nemesis que l’on retrouve d’ailleurs, comme par hasard, aussi chez Delirium. En plus de son esthétique très pop et réaliste assez éloigné des canons établis par, mettons, Marvel, le ton y est plus adulte et en même temps traversé par de soudains moments d’humour absurde.
Si l’on devait faire une comparaison de circonstance, on pourrait dire que le résultat est plus proche de Star Trek que de Star Wars, l’emphase étant plus mise sur l’humain que sur les scènes d’action à gogo. En même temps, on y retrouve aussi un peu de cet esprit ‘cyberpunk’ typique des années 80, ce qui fait de Nexus un OVNI, de la SF drôlement déglingos et en même temps plus profond qu’il n’y paraît. Une vraie (re)découverte !
Olivier Badin
Nexus Omnibus – Volume 1 de Mike Baron &Steve Rude. Delirium. 39 euros