Début des aventures d’une chasseuse de primes pas comme les autres au XXVème siècle, très douée pour se fourrer dans de sacrés pétrins, dans le premier de deux tomes annoncés. Décalé et drôle.
Peut-être écrasée par la concurrence anglo-saxonne, la BD française ne s’aventure pas si souvent que ça sur le terrain casse-gueule du space opera. Et quand elle le fait, c’est souvent sur un ton très sérieux, voire assez mystique, comme on l’a vu récemment sur l’excellent Amen par exemple. Donc déjà, rien que le contrepied total pris par Bettie Hunter fait un bien fou, surtout qu’on ne tombe pas pour autant dans la gaudriole non plus.
Non, ici tout est coloré, pop et joyeusement foutraque, dans un style finalement plus proche du duo Tome & Janry lorsqu’il était en charge de Spirou dans les années 80 que celui d’un, mettons, Moebius. Et surtout, tout tient grâce à son personnage principal, la fameuse Bettie Hunter – jeu de mot sur ‘bounty hunter’ qui veut dire en anglais ‘chasseur de primes’ – chasseuse de primes donc, à la langue bien pendue mais aussi au background, disons, compliqué : élevée dans un orphelinat et surdiplômée, elle est éternellement flanquée d’un robot un peu perché comme elle. L’histoire se passant au XXVème siècle, les auteurs s’amusent d’ailleurs beaucoup à de temps en temps insérer une double pleine page où elle endosse alors une tenue universitaire pour nous faire une sorte de cours magistral sur telle ou telle créature extraterrestre…
Toujours à cours d’argent, elle accepte une mission a priori facile, retrouver la trace d’une jeune femme travaillant dans l’humanitaire. Sauf dès que le duo se rend à Minaria Prime sa dernière affectation, une lointaine planète où deux espèces se livrent une guerre sans merci sous l’œil torve des êtres humains, les ennuis commencent.
Leur éditeur parle d’une aventure survoltée et tapageuse dans la veine des Gardiens de la Galaxie de MARVEL. Mais on rajouterait bien aussi une pincée de Tank Girl, à qui Bettie a d’ailleurs en partie la coupe de cheveux mais aussi le sens de la répartie cinglante, et de Valérian pour le côté bariolé. Mais surtout, au-delà des dialogues très réussis et de l’interaction toujours très drôle du duo, il y a aussi sous-jacent un discours sur la tolérance et le racisme, où l’être humain n’a, pour une fois, pas le plus beau rôle. Bref, une vraie réussite, qui plus est animée par deux auteurs français qu’on a très envie de suivre avec assiduité.
Olivier Badin
Bettie Hunter, Tome 1 par Aurélien Ducoudray et Marc Lechuga. Glénat/Comixburo. 15,50 euros