15 Août

Chronique d’été. Chloé densité, un récit aérien de Trondheim, Vince et Stan

Un drôle de titre pour un drôle de récit. Mais pouvait-on en attendre autrement avec le trio formé de Trondheim, Stan et Vince ? Pas franchement. Un album léger comme l’air…

extrait de la couverture Chloé densité – © Delcourt – Trondheim, Stan et Vince

Si Chloé est son prénom, Densité n’est pas son nom de famille mais son super-pouvoir acquis lors d’un voyage au pays des super-héros, les États-Unis. Et un super-pouvoir comme on aimerait en avoir un, qui vous permet de vous élever dans les airs ou au contraire de vous enfoncer dans les profondeurs de la terre, de passer à travers les murs ou même à travers des gens. Comme son frère qui l’accompagne dans cette aventure, un grand malade des ovnis.

C’est d’ailleurs pour son anniversaire que Chloé, sa soeur et une copine l’ont emmené aux States, en espérant qu’il tombe « sur une Américaine aussi cintrée que lui avec les ovnis » et qu’ensemble ils fassent « plein de petits extra-terrestres ».

Et question ovnis, question extra-terrestres et phénomènes étranges, la petite troupe va être servie. Mais dans l’immédiat, ce qui les intéresse tous, c’est ce super-pouvoir de Chloé qui ouvre des perspectives assez bluffantes…

Si vous cherchez un album, un seul, à lire d’ici la rentrée, sans risque de vous prendre la tête, en vous amusant des situations souvent cocasses, des tronchouilles improbables des extra-terrestres, avec le plaisir d’ue mise en images d’une grande clarté, à la fois sobre et percutante, appuyée par des couleurs somptueuses… alors ne cherchez plus, c’est celui-ci qu’il vous faut !

Eric Guillaud

Chloé densité, de Trondheim, Vince et Stan. Delcourt. 29,95€

© Delcourt – Trondheim, Stan et Vince

Chronique d’été. Albert Londres, Agatha Christie, George Best, Orson Welles, Viollet-le-Duc, Ed Gein… : quand la BD se fait biopic

Quel rapport existe-t-il entre le tueur en série américain Ed Gein et le footballeur nord-irlandais George Best ? Entre l’écrivaine Agatha Christie et la légende de l’Ouest Jesse James ? Aucun bien évidemment. Si ce n’est de les retrouver les uns et les autres croqués en bande dessinée. La biographie est un des genres en vogue du neuvième art. La preuve avec ces dix albums…

On commence avec Ed Gein justement du nom d’un fameux serial killer qui a inspiré plusieurs personnages cinématographiques parmi les plus effrayants, Buffalo Bill dans Le Silences des agneaux, Leatherface dans Massacre à la tronçonneuse et Norman Bates dans Psychose. C’est d’ailleurs autour d’Alfred Hitchcock et de ce film culte, Psychose, que s’ouvre le roman graphique signé Harold Schechter et Eric Powell, un film accusé à l’époque de sa sortie en salles d’avoir poussé des esprits faibles à tuer. C’est un peu le paradoxe de l’œuf et de la poule. Qui des deux est arrivé le premier ? Bref, l’adaptation graphique présentée ici retrace la vie du tueur depuis sa plus tendre – si on peut dire – jeunesse en se basant sur des sources d’origine, journaux de l’époque, documents médico-légaux, rapports psychiatriques… Glaçant ! (Ed Gein, autopsie d’un serial killer, de Schechter et Powell. Delcourt. 24,95€)

On parlait d’Alfred Hitchcock plus haut, voici Orson Welles, une autre pointure du septième art, multicarte, à la fois acteur et réalisateur, producteur et scénariste, romancier et metteur en scène. L’homme s’est fait connaître au théâtre puis avec son émission radiophonique, La Guerre des mondes, qui selon la légende aurait paniqué l’Amérique. Citizen Kane fut son premier long métrage et son chef d’œuvre. Suivront entre autres La Splendeur des Amberson, Voyage au pays de la peur, Macbeth, Vérités et mensonges… des films exigeants mais pas toujours compris du grand public, une carrière hors norme que revisitent ici Noël Simsolo et Alberto Locatelli depuis ses débuts dans le théâtre jusqu’à sa mort en 1985 le tout avec une mise en images des plus agréables. (Orson Welles, l’inventeur de rêves, de Simsolo et Locatelli. Glénat. 25€)

Du septième au neuvième art, il n’y a qu’un pas que cet album de Bepi Vigna et Mauro de Luca nous permet de franchir agréablement en compagnie de l’un des plus grands représentants du genre, Hugo Pratt, dont la vie fut aussi romanesque que celle de son célèbre héros de papier Corto Maltese. Outre un récit en bande dessinée d’une cinquantaine de pages contant la jeunesse de Pratt jusqu’à son départ pour l’Argentine et le début d’une grande aventure dans la bande dessinée, l’album réunit de nombreuse illustrations originales et couvertures de la revue Sergent Kirk ainsi que plusieurs témoignages. Une biographie ? Plutôt, à en croire Bepi Vigna, « un récit d’aventures qui rassemblerait et rapprocherait les faits avec les rêves et toutes ces histoires dont il s’est nourri et qui, de l’aveu même du dessinateur, l’ont formé et influencé ». (La balade d’Hugo, de Bepi Vigna et Mauro de Luca. Glénat. 17,50€)

D’Agatha Christie, La reine du crime comme on l’a surnommée, nous connaissons les livres, à commercer par Les Dix petits nègres rebaptisé Ils étaient dix en 2020, Les Vacances d’Hercule Poirot, La Mystérieuse affaire de styles ou encore Un Cadavre dans la bibliothèque. Des dizaines de romans, plus de 150 nouvelles, 20 pièces de théâtre. Mais d’elle, que sait-on ? Pas grand-chose. Partant de ce constat, Anne Martinetti, Guillaume Lebeau et Alexandre Franc ont pris le parti de nous faire découvrir le personnage qui se cache derrière la romancière à travers un récit reprenant quelques épisodes de sa vie, son enfance, ses débuts dans l’écriture, sa mission d’infirmière durant la première guerre mondiale, ses multiples mariages, la naissance de son unique enfant, les voyages qu’elle affectionnait tant et son étrange disparition en 1926… Une vie d’une richesse insoupçonnée, une mise en images raffinée, un bel album.   (Agatha, La vraie vie d’Agathe Christie, de Martinetti, Lebeau et Franc. Marabulles. 17,95€)

Albert Londres, une pointure, que dis-je, une sommité, une référence dans le monde du journalisme d’investigation capable de passer en son temps d’un reportage au pays des soviets à une enquête sur le bagne de Cayenne, en passant par une interview des coureurs du Tour de France ou des membres de la bande à Bonnot. Bref un journaliste passionné par son travail, engagé et souvent dérangeant. Le roman graphique de Kinder et Borris évoque justement son dernier voyage en Chine. Aucun journal ne l’a missionné mais il promet du lourd, de la « dynamite » qui pourrait déranger en haut lieu. De ce voyage, Albert Londres n’en reviendra pas, disparaissant dans le naufrage du Georges Philippar. Un drame mystérieux et peut-être pas accidentel pour lequel l’album Albert Londres doit disparaître propose une explication entre fiction et réalité. Passionnant ! (Albert Londres doit disparaître, de Kinder et Borris. Glénat. 17,50€)

Le Kayak, c’est une affaire de famille chez les Estanguet. Un père prof de sport et champion dans le domaine, des enfants mis sur l’eau dès le plus jeune âge et parmi eux un Tony qui deviendra en 2012 le premier Français triple champion olympique dans la discipline. Elsa Krim au scénario et Fred Campoy au dessin, en étroite collaboration avec Tony Estanguet lui-même, nous offrent dans ce premier tome un plongeon dans l’intimité du sportif depuis son enfance jusqu’à sa première médaille olympique décrochée à Sydney en 2000. La suite dans le tome 2 à paraître en janvier 2023. (Tony, l’enfant des rivières, de Estanguet, Krim et Campoy. Delcourt. 15,50€)

Un autre sport, un autre champion, Kris et Calvez se sont intéressés pour leur part à George Best en adaptant en BD le roman de Vincent Duluc intitulé Le cinquième Beatles. Pourquoi ce nom ? Parce que George Best a eu la même importance pour le football que les Fab Four pour la musique. Et tous les cinq ont colonisé les colonnes des mêmes journaux pendant les mêmes années faisant de l’Angleterre le paradis du ballon rond et de la pop. Considéré comme l’une des plus grandes légendes de Manchester United, George Best débarque au club au lendemain d’une tragédie, le crash de l’avion qui ramenait les joueurs d’un match contre l’Etoile rouge de Belgrade. Résultat, 23 morts dont 8 joueurs et 3 encadrants. « Jouer à Manchester, désormais, c’était côtoyer des héros, des survivants et des fantômes », écrit Vincent Duluc. Et de fait, George Best aura un parcours singulier fait de passion pour le football mais aussi pour le rock’n’roll, le sexe et l’alcool. Une légende qui dépasse le seul cadre des terrains de football, c’est ce que les auteurs font ressortir ici dans cet album où l’on reconnait le talent d’écriture de Kris et le somptueux coup de crayon de Florent Calvez. Incontournable pour tous les amoureux du ballon rond et les autres… (George Best, de Kris et Calvez. Delcourt. 17,95€)

Les premières scènes, les premières images, de cette bande dessinée de Rubio et Ocana, nous les connaissons bien, trop bien, pour les avoir vécues il y a peu de temps, retransmises en direct et à travers le monde par les médias et les réseaux sociaux. La Cathédrale de Paris en flamme ! C’était en 2019, c’était hier. Et tout de suite de promettre sa reconstruction à l’identique. Mais à l’identique de quoi ? La cathédrale n’a cessé d’évoluer à travers les siècles, il a même été question de sa destruction dans la première moitié du XIXe siècle avant qu’elle ne devienne un temps un entrepôt à vin. La révolution était passée par là, les croyances religieuses mises un temps au placard. Mais un homme va la sauver et la restaurer, un jeune architecte sans diplôme, ni formation théorique. Son nom : Eugène Viollet-le-Duc. C’est cette histoire que raconte ce premier volet paru dans une nouvelle collection dédiée aux grands architectes. Pour les férus d’histoire. (Viollet-le-Duc tome 1, de Rubio et Ocana. Delcourt. 15,95€)

On termine avec trois légendes de l’Ouest américain. Tout d’abord Jesse James, un fameux bandit des grands chemins, braqueur de banques, pilleur de diligences et de trains, tueur impitoyable et pourtant élevé par la légende au rang de Robin des Bois américain. Dans cet album au magnifique dessin et aux ambiances crépusculaires, Dobbs au scénario, Chris Regnault au scénario et au dessin accompagnés de Farid Ameur en qualité de conseiller artistique, reviennent sur le parcours de cette figure élevée dans le respect de la morale chrétienne et qui bascula dans la violence la plus totale après que la ferme familiale fut détruite et son beau-père lynché par des partisans des Confédérés en 1863. Dans cette même collection baptisée La Véritable histoire du Far West, co-éditée par Glénat et Fayard, est sorti un opus sur Wild Bill Hickok. (Jesse James, de Dobbs, Regnault et Ameur. Glénat / Fayard. 14,95€)

Enfin, Wild Bill Hickok, justement, partage avec Martha Jane Cannary l’affiche de ce dernier album signé Thierry Gloris et Jacques Lamontagne. Après deux albums consacrés à l’un puis à l’autre, ce troisième volet permet de les retrouver tous les deux, le premier confronté à un tueur en série, la seconde noyée dans son chagrin et sa soif de vengeance après la mort de son mari indien, tué par Wild Bill. Un western comme on les aime, avec ses grands espaces, ses saloons, ses indiens, ses bons, ses brutes et ses truands, et ses héros de caractère. Wild West tome 3, de Gloris et Lamontagne. Dupuis. 14,50€)

Eric Guillaud

 

09 Août

Chronique d’été. Djemnah, les ombres corses, une chasse au trésor entre mer et maquis signée Philippe Donadille et Patrice Réglat-Vizzanova

La Corse comme terrain d’aventure. C’est finalement assez rare dans la BD pour ne pas le signaler, du moins avec ce regard bienveillant, loin des clichés et des idées toutes faites, une Corse authentique qui conserve sa part de mystère pour mieux séduire l’étranger de passage comme Ange Pizarti, chineur d’antiquités parisien, personnage principal de cette histoire…

Il a un nom qui sonne corse, pourtant Ange Pizarti n’a jamais mis les pieds sur l’île de Beauté, pas plus que son père d’ailleurs. Quant à son grand-père il en est parti dans les années 30 mais il ne l’a jamais connu.

C’est pourtant sur les traces de ce dernier, sur les traces de ses ancêtres, qu’il se retrouve un beau jour en débarquant à Ogliastro attiré ici à l’origine par un vieux dessin trouvé dans un journal illustré et une promesse de chasse au trésor sur fond d’héritage napoléonien. Une aubaine pour le chineur d’antiquités qu’il est.

Lui qui n’avait aucun sens de la famille, aucun attachement particulier à quelques terres que ce soit se retrouve au fil de son enquête en terre corse avec une famille, un passé et des racines…

Scénarisé par Philippe Donadille et mis en images par Patrice Réglat-Vizzanova, ce récit d’aventure tranquille est une ode à la Corse avec ses somptueux paysages, ses villages accrochés à la montagne, sa mer bleue turquoise, ses hommes et ses femmes de caractère.

À travers chacune de ses planches, on devine la chaleur du soleil, l’odeur du maquis, on approche surtout l’âme si singulière de ce petit coin de la planète. Une ode à la Corse, oui, mais aussi un beau récit d’aventure, une chasse au trésor captivante qui nous mène jusqu’à Napoléon Bonaparte. 

Eric Guillaud 

Djemnah, les ombres corses, de Philippe Donadille et Patrice Réglat-Vizzanova. Delcourt. 24,95€

© Delcourt / Donadille & Réglat-Vizzanova

06 Août

Chronique d’été. 10 BD jeunesse pour la plage

De l’action, de l’humour, de la magie, de l’histoire, du fantastique… dix albums à potasser pendant les vacances. Interro à la rentrée…

On commence avec un album paru en avril dernier, un conte animalier qui aborde le thème de l’abandon mais aussi ceux du divorce et de la différence, avec beaucoup d’intelligence et de délicatesse. Yeowoo, c’est le nom du personnage principal, est une petite renarde de 5 ans lorsqu’elle est déposée comme un vulgaire colis chez son grand père par des parents démissionnaires et en instance de divorce. Elle y passera toute sa jeunesse et son adolescence avec un grand-père âgé et peu aimant et une tante qui a tout de la vieille-fille. Rien de très fun en somme dans son foyer comme à l’extérieur où elle est largement incomprise par ses camarades de classe, jusqu’au jour où Yeowoo rencontre Paulette, une poule rejetée elle-aussi par sa communauté pour ne jamais pondre d’œufs. (Seizième printemps, de Yunbo. Delcourt. 26,50€)

Après les quatre premiers albums qui retraçaient quatre histoires parallèles avec quatre héros différents, ce cinquième volume réunit tout le monde pour un final qu’on nous promet surprenant. U4 est l’adaptation en bande dessinée de la fameuse saga post-apocalyptique qui a fait un carton en roman avec plus de 350 000 exemplaires vendus. L’histoire ? Un virus baptisé U4 a décimé la population mondiale à l’exception des adolescents. Jules, Yannis, Stéphane et Koridwen sont quatre d’entre eux. Ils ne se connaissent pas mais tous sont des joueurs experts de « Warriors of Time » (WOT), un jeu en ligne, et tous ont reçu un étrange message les convoquant à un rendez-vous à Paris… (U4, de Renders, Lapière et Huelva – 5 volumes parus. Dupuis. 14,50€ le volume)

Perceval, ça vous cause ? Oui bien sûr Perceval le fameux chevalier de la table ronde qui, à la demande du roi Arthur, participa à la quête du Graal. Mais avant d’être un vaillant chevalier, Perceval fut un enfant. C’est cette jeunesse que Brrémaud et Bertolucci retracent dans ce premier volet, d’une histoire complète en quatre tomes, paru en juin aux éditions Vents d’Ouest, un récit truffé d’aventures, d’humour, de magie, de fées et autres créatures au cœur des forêts du sud de l’Angleterre. On avait déjà pu apprécier le talent des auteurs, le scénariste Frédéric Brrémaud et le dessinateur Federico Bertolucci, dans le diptyque Brindille ou la série Love, ce nouvel album ne vient que confirmer tout le bien qu’on pense d’eux. Brillant ! (La légende oubliée de Perceval tome 1/4, de Brrémaud et Bertolucci. Vents d’Ouest. 14,50€)

Coup de chaud sur la planète, la forêt flambe en Gironde, la glace fond au pôle nord. Au point de rendre la vie des ours blancs particulièrement difficile. Pol Polaire et ses deux oursons en savent quelque chose. Il leur est impossible de s’amuser à glisser sur la neige sans se frotter les fesses sur la roche et pire encore il leur devient de plus en plus difficile de chasser le phoque, la glace trop fine se brisant sous leur poids. Et que dire de tous ces détritus échoués sur la banquise et récupérés par L’oncle Bob ? Non franchement la banquise n’est plus ce qu’elle était et Caroline Soucy nous le prouve avec cette série d’histoires courtes drôles faite pour sensibiliser les plus jeunes aux enjeux de l’écologie. (Pol Polaire tome 1, Coup de Chaleur!, de Caroline Soucy. Glénat. 10,95€)

Étrange univers que celui proposé par le duo de scénaristes Beka et le dessinateur Munuera. Étrange univers où les chevaux de traits, les bateaux à vapeur, les biplans, les robots high tech, les amis virtuels et les écrans se côtoient dans un décor qui rappelle le sud des États-Unis au XIXe siècle avec ses champs de coton. Et dans cet univers, Iséa est une pré-adolescente qui ne se sépare jamais de son écran sur lequel elle regarde en boucle le film Cyrano de Bergerac. Un vestige du passé dont elle raffole. Comme elle raffole de sa nounou-robot Debry qu’elle retrouve tous les soirs après l’école. Jusqu’au jour où sa mère la chasse. Iséa décide alors de partir à sa recherche… Un conte aux confins des époques et des genres pour parler d’amour, le tout avec un somptueux dessin.(Les Cœurs de Ferraille tome 1, Debry, Cyrano et moi, de Beka et Munuera.  Dupuis. 13,50€)

À côté des créations originales qui permettent à des auteurs européens d’imaginer leur propre aventure de Mickey, les éditions Glénat proposent depuis quelques années maintenant la réédition des aventures signées par les plus grands dessinateurs de l’univers Disney, de Carl Barks à Romano Scarpa en passant par Floyd Gottfredson, Don Rosa ou, ici, Luciano Bottaro avec Donald et la mission Jupiter, un récit de science fiction inédit en album avec Picsou, Donald, Minnie, Géo Trouvetou… et pas mal d’extra-terrestres très envahissants. (Donald et la mission Jupiter, de Bottaro. Glénat. 15€)

Voici une nouvelle aventure de Michel Vaillant, la onzième de la saison 2 lancée il y a maintenant dix ans par Benéteau, Bourgne, Lapière et Philippe Graton, le propre fils du créateur de la série Jean Graton. Si ce dernier s’est retiré depuis, notre fameux pilote de course poursuit sur sa lancée avec des aventures toujours aussi punchy. Il est cette fois au départ d’une course hors norme, la Cannonball, une course initiée dans les années 70 du siècle passé et consistant à relier la côte est à la côte ouest des États-Unis, près de 5000 kms en circuit ouvert sans itinéraire imposé, sans règle précise. Et face à lui : Pog, un célèbre youtubeur. Mais la menace viendra bien d’ailleurs. Sabotage, attentat à la bombe, la course ne sera pas qu’une affaire de vitesse…  (Michel Vaillant tome 11 Saison 2, Cannonball, de Lapière, Bourgne et Marin. Dupuis. 15,95€)

Vous avez adoré, dévoré, la série Irena, histoire vraie d’Irena Sendlerowa, résistante et militante polonaise qui sauva près de 2500 enfants juifs du ghetto de Varsovie ? Alors vous aimerez Simone. D’abord, parce qu’il s’agit des mêmes auteurs, Jean-David Morvan au scénario et David Evrard au dessin, parce qu’ensuite, comme Irena, Simone se penche sur une figure héroïque de la seconde guerre mondiale, Simone Lagrange, une résistante juive française cette fois, déportée à Birkenau, passée entre les mains du boucher de Lyon, Klaus Barbie, qu’elle retrouvera bien des années plus tard à son procès. Ce premier volet de ce qui est présenté comme une trilogie est en tout point passionnant et bien évidement très pédagogique. On connaît le sérieux de Jean-David Morvan quand il s’agit de s’intéresser à notre passé et en l’occurrence à cette période sombre. Avec Madeleine, résistante une autre série en cours de publication chez Dupuis, histoire là encore d’une héroïne résistante nommée Madeleine Riffaud, l’auteur a obtenu le prestigieux Prix René-Goscinny. C’est dire ! (Simone tome 1, de Morvan et Evrard. Glénat. 15,50€)

Vous ne pouvez décemment pas être passés à côté de la série Raowl ou si c’est le cas vous pouvez encore vous rattraper en achetant les deux premiers albums disponibles à ce jour et partager les aventures de ce prince pas vraiment charmant chargé de sauver les princesses en détresse avec plus ou moins de bonheur. Des aventures délicieusement déjantées aujourd’hui complétées par ce premier album d’une série parallèle baptisée La Méthode Raowl. Elle vous dévoilera en une série de gags d’une page tous ses secrets pour avoir du succès auprès des princesses, battre les sorcières, devenir super fort mais aussi péter en toute discrétion ou frimer sur la plage avec son slip. Du Tebo quoi ! (La méthode Raowl tome 1, de Tebo. Dupuis. 10,95€)

Quelle famille ! Des parents en prison pour avoir cambriolé un musée, une grand-mère qui turbine à la vodka dès le petit déjeuner et une ado, collégienne le jour, voleuse d’objets magiques la nuit. Même son prénom, Héliotrope, elle le doit à la couleur bleue qu’elle a volée et qui lui donne dorénavant une allure singulière. Un visage bleu, une chevelure rousse, un tempérament de feu, Héliotrope nous embarque dans une aventure complètement foldingue où l’on croise des zombies, des sorcières et même des vampires. Au scénario, l’une des pointures du neuvième art, Joann Sfar, et au dessin, Benjamin Chaud jusqu’ici plus connu dans le monde de l’illustration. Vitaminé ! (Héliotrope tome 1, de Sfar et Chaud. Dupuis. 13,95€)

Eric Guillaud

17 Juil

Chronique d’été. Comme une envie de prendre le large ?

Prix et températures qui s’envolent, guerre qui tonne, épidémie qui joue les prolongations… il y a des moments où on aimerait être ailleurs, embarquer pour l’aventure sous d’autres horizons. En attendant, voici déjà six albums qui vont vous permettre de lever l’ancre sans bouger l’orteil gauche…

On commence par un album paru aux éditions Delcourt en mai dernier. Vent Debout est son nom, un récit inspiré de faits réel et notamment des voyages de Sabine Merz et Jurgen Kantner, deux navigateurs allemands au destin tragique. Kidnappés une première fois par des terroristes au large de la Somalie, libérés contre une rançon, ils reprendront la mer avant d’être finalement assassinés par l’État islamique en 2017 au large – cette fois – de la Malaisie. Mais ce n’est pas là les seuls personnages du livre. Les auteurs, Grégory Jarry, Nicole Augereau et Lucie Castel, mettent en scène trois histoires parallèles, celle de ce couple de navigateurs, celle aussi d’une famille partie à la découverte du monde et celle enfin d’un vieux baroudeur installé en Indonésie. Avec pour point commun entre tout ce beau petit monde : l’amour de la liberté. (Vent debout, de Augereau, Jarry et Castel. Delcourt. 29,95€)

En deux volumes publiés en février et juin de cette année, Un Capitaine de quinze ans n’est autre que l’adaptation en bande dessinée du roman de Jules Verne. Adapté plusieurs fois au cinéma et à la télévision, il ne l’avait bizarrement pas été en BD. C’est chose faite donc, direction le port d’Auckland où le capitaine Hull du brick-goélette Le Pilgrim s’apprête à larguer les amarres avec une cargaison bien singulière à son bord : l’épouse de l’armateur ainsi que son fils et son cousin. Hull est chargé d’emmener tout ce beau monde à Boston. Mais au milieu de l’océan, une pêche à la baleine vire au drame. Les Cinq marins du navire et le capitaine sont projetés à la mer et disparaissent. C’est à DIck Sand, un jeune mousse resté à bord du Pilgrim, que revient alors la lourde charge de ramener tout le monde à bon port contre vents et marées… De l’aventure avec un grand A magnifiquement mis en images par Christophe Picaud. (Un Capitaine de quinze ans, de Picaud et Brrémaud. 2 volumes parus. Vents d’Ouest. 14,50€)

On connait tous cette histoire des révoltés du Bounty magnifiquement portée à l’écran par Lewis Milestone en 1962, avec Marlon Brando dans le rôle du lieutenant Fletcher et adaptée maintes fois en roman, notamment par Jules Verne en 1879 et plus récemment par Sébastien Laurier. Pitcairn en est l’adaptation en BD, une adaptation signée Mark Eacersall, qui s’est récemment fait remarquer avec l’album Tananarive, et le dessinateur hongrois Gyula Németh dont le trait expressif fait ici parfaitement l’affaire. (Pitcairn, L’île des révoltés du Bounty, de Eacersall, Laurier et Németh. glénat. 14,95€)

Publié en octobre 2020 pour le premier volet, en novembre 2021 pour le second, ce diptyque nous raconte la vie de l’un des pirates les plus célèbres des océans, Edward Teach, plus connu sous le nom de Barbe Noire, Blackbeard en anglais. Quand je vous aurais dit que l’auteur Jean-Yves Delitte est peintre officiel de la Marine, membre titulaire de l’Académie des Arts & Sciences de la mer, qu’il a réalisé précédemment les aventures de Black Crow, relaté l’histoire du Belem, de la frégate Hermione ou encore, on y revient, de la mutinerie de la Bounty, vous aurez compris qu’on n’a pas affaire là à un marin d’eau douce. Un diptyque essentiel pour tous les amoureux de la mer et de la marine. (Black Beard – 2 tomes parus, de Jean-Yves Delitte. Glénat. 13,90€)

Cette histoire-là est aujourd’hui devenue légendaire et le voilier qui l’a permis un monument historique. C’est dire ! Damien, c’est le nom de ce voilier, a parcouru le monde d’est en ouest, du nord au sud, pendant cinq ans avec à son bord deux mordus de la voile, Jérôme Poncet et Gérard Janichon, deux mordus de liberté aussi, désireux de découvrir notre belle planète et ses populations les plus reculées. Partis de La Rochelle en mai 1969, ils y reviendront en septembre 1973 après avoir parcouru plus de 55 000 miles, remonté l’Amazone, affronté le Cap Horn, abordé le continent Antarctique, traversé les tempêtes, survécu à plusieurs chavirages… « À la fin, il reste un témoignage… », écrit Isabelle Autissier en préface de l’album, un témoignage repris aujourd’hui en bande dessinée qui pourrait faire naître de nouvelles vocations. (Damien, l’empreinte du vent, de Vincent et Janichon. Vents d’Ouest. 25€)

C’était en 2012 sur le ponton du Vendée Globe. Sébastien Destremau décidait de prendre le départ de la future édition. Lui, le néophyte de la course au large, de la navigation en solitaire, sans un sou, s’embarquait dans une aventure au longs cours dont il ne savait s’il verrait le bout. Pourtant, quatre ans plus tard, en novembre 2016 le skipper toulonnais est bien sur le départ de la mythique course autour du monde à bord de son voilier FaceOcéan. Après 124 jours 12 heure 38 minutes et 18 secondes de navigation, de tempêtes, de pétoles, d’avaries, de joies et de frayeurs, Sébastien Destremau remonte le chenal des Sables-d’Olonne, 18e, bon dernier au classement, avec un titre, celui de coqueluche de la huitième édition. De cette aventure hors-norme, le skipper en tire un livre paru en juin 2017 chez Xo Editions, Seul au monde, 124 jours dans l’enfer du Vendée Globe. En 2019, Serge Fino lance une adaptation en bande dessinée, fidèle au roman, sensible et humaine dont le troisième tome est sorti en début d’année … (Seul au monde, de Serge Fino d’après le livre de Destremau – 3 tomes parus. Glénat. 14,50€)

29 Août

Pages d’été. Un Anglais dans mon arbre, Olivia Burton sur les traces de son ancêtre explorateur avec Mahi Grand

C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Non, Un Anglais dans mon arbre ne raconte pas l’histoire d’un espèce de farfelu anglais dans un arbre perché même si le titre et la couverture peuvent aisément le laisser supposer. Si on parle d’arbre ici, c’est d’arbre généalogique, et si on parle d’Anglais, c’est d’un ancêtre décédé depuis belle lurette, précisément un ancêtre d’Olivia Burton, auteure de ce livre paru chez Denoël Graphic en mars dernier, un arrière-arrière-grand-père dont elle découvre l’existence le jour des funérailles de son père.

Il n’est jamais trop tard pour bien faire et il faut guère de temps à Olivia Burton pour remonter la filière et en découvrir un peu plus sur ce Sir Richard Francis Burton,c’est son nom, aventurier et explorateur au long cours, écrivain, poète, linguiste, diplomate, premier traducteur du Kâmasûtra mais aussi des Mille et une nuits, oui oui, premier occidental à pénétrer dans La Mecque (déguisé en musulman) et découvreur des sources du Nil. Surprise et heureuse de cette belle découverte, Olivia Burton décide d’abandonner sa petite vie confortable et de se faire elle-aussi aventurière en se lançant sur les traces de l’ancêtre, façon remake.

Ce sont ses pérégrinations que retrace donc Un Anglais dans mon arbre, avec au programme pas mal d’émotions, de découvertes, d’humour, une belle balade sur le continent africain le tout subtilement mis en images par Mahi Grand. C’est lui qui avait illustré le premier scénario d’Olivia Burton, L’Algérie c’est beau comme l’Amérique paru chez Steinkis en 2015 et dont on disait déjà le plus grand bien ici-même. Un très bon livre à déguster dans votre arbre ou ailleurs…

Eric Guillaud

Un Anglais dans mon arbre, de Olivia Bruton et Mahi Grand. Denoël Graphic, 23 € (paru en mars 2019)

24 Août

Pages d’été. Lucy, histoire d’une star de l’humanité avec Patrick Norbert et Tanino Liberatore

C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode repos et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Pour les amoureux de la pop, Lucy c’est avant tout ceci…

Mais c’est aussi, depuis 1974, et en référence à la fameuse chanson des Fab Four, le nom donné à un squelette vieux de 3,2 millions d’années découvert à la faveur d’une campagne de fouilles archéologiques sur le site d’Hadar en Ethiopie encadrée par Yves Coppens, Donald Johanson et Maurice Taieb.

Une référence mythique pour une découverte majeure. C’est le squelette le plus complet datant de cette époque. Très longtemps, Lucy sera même considérée comme notre ancêtre à tous, avant que de nouvelles découvertes ne viennent contredire cette hypothèse.

Quoiqu’il en soit, Lucy est entrée dans notre grande famille et dans notre imaginaire.

Mais quelle a été sa vie ? Dans cet album, Patrick Norbert et Liberatore soulèvent un peu le voile du mystère avec une Lucy confrontée à mille et un dangers, une Lucy protectrice et aimante, une Lucy qui s’éveille au monde et à la conscience.

Initialement publié chez Capitol Editions en 2007, cet album nous permet de retrouver un artiste au trait extraordinaire, Liberatore, qui se fit connaître dans la bande dessinée au milieu des années 80 avec RanXerox avant de se consacrer plus spécialement à l’illustration et au cinéma. Son trait est ici hyper-réaliste, quasi-photographique, idéal pour accompagner le récit voulu à la fois scientifique et poétique par le scénariste Patrick Norbert.

Eric Guillaud

Lucy, de Patrick Norbert et Liberatore. Glénat. 15€ (sortie en juin 2019)

@ Glénat / Norbert & Liberatore

14 Juil

Pages d’été : Our Summer holiday et Gantz : deux mangas pour la route…

98b64545ae508dfc32d4577b0be0f375C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode détente et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

L’avantage avec les mangas, me disent mes filles, c’est qu’on peut en emmener autant qu’on veut en voyage, c’est léger et ça ne prend pas plus de place qu’un livre de poche. Bon, le tout c’est de ne pas prendre toute la bibliothèque. En voici déjà deux qui pourraient satisfaire les boulimiques de lecture pendant au moins deux heures de trajet. Et c’est déjà pas mal…

Tout d’abord, Our Summer Holiday, un one shot dont la couverture à elle-seule nous promet de passer un bon moment. A gauche, Natsuru, un jeune garçon de onze ans passionné de football au point d’être considéré comme un jeune espoir dans son école. « Quand je serai grand… », dit-il, « je jouerai au Real Madrid ». À droite, Rio, une fille de sa classe mise à l’écart par les autres à cause de sa très grande taille et peut-être aussi à cause de son caractère un peu plus mature. Rio doit en effet assumer au quotidien la responsabilité de son petit frère pendant que le père est parti pour ses 27d8df0355b0e34b8f1b835cfad50f72campagnes de pêche.L’un et l’autre n’ont pas grand chose en commun, pourtant une histoire d’amour, une belle histoire d’amour, naîtra entre les deux… Un shônen de Kaori Ozaki particulièrement fort en émotion ! (Delcourt – Tonkam, 7,99€)

On laisse la romance de côté pour la science-fiction avec le retour d’une série absolument mythique, Gantz, initialement publiée en 36 volumes entre 2002 et 2013 chez Delcourt – Tonkam. Cette nouvelle édition en double volume avec une mise en page retravaillée nous permet de revivre le parcours initiatique de Kurono pour sauver la terre d’une terrible invasion. Cette série a connu un tel succès qu’elle a été adaptée en série animée et en film. Une série ultra-violente que certains jugent dérangeante, voire malsaine, mais incontestablement magnifique dans sa mise en scène. (Delcourt – Tonkam, 15€)

Eric Guillaud

Pages d’été : Plutona, un récit de super-héros intimiste signé Jeff Lemire et Emi Lenox

790619_01C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode détente et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Les super-héros peuvent-ils être des gens ordinaires et vice versa ? La réponse est dans ce récit signé par le Canadien Jeff Lemire et l’Américaine Emi Lenox. Plutona met en scène une bande d’ados du Midwest, des gamins ordinaires qui mènent une vie ordinaire, presque ennuyeuse, jusqu’au jour où ils découvrent en pleine forêt le corps de Plutona, la plus grande super-héroïne de toute la planète.

D’abord effrayés par leur découverte, puis fascinés, les cinq gamins décident de garder secret la mort de Plutona, de peur que les méchants en profitent pour répandre le chaos sur Terre. Mais lorsqu’ils reviennent avec un pelle pour l’enterrer, le corps a disparu…

Jeff Lemire aime le mélange des genres. L’auteur s’est révélé tout autant capable de travailler pour des éditeurs mainstream, en l’occurence DC Comics et Marvel, que pour pour la scène alternative en signant quelques beaux projets comme le fabuleux Essex County paru en 2010 chez Futuropolis et largement plébiscité par le public et les professionnels. Il signe ici un récit intimiste dans lequel il aborde la fin de l’innocence avec le passage de l’enfance à l’adolescence – un de ces thèmes privilégiés – le tout avec un casting presque parfait, cinq gamins d’un côté aux personnalités différentes mais jamais caricaturales, et une super-héroïne ordinaire, oui oui, qui doit travailler le jour pour payer son loyer et s’interroge sur ses capacités à être une bonne mère de famille. Plutona n’est pas un livre de super-héros comme les autres, ce qui intéresse l’auteur ici, c’est la réaction des enfants face à la découverte du corps et ce que ça va induire comme changement en eux.

Je présentais Jeff Lemire en 2010 comme un étoile montante de la bande dessinée. L’artiste a beaucoup, beaucoup, travaillé en sept ans et s’est imposé comme une référence des deux côtés de l’Atlantique. Un album sombre et lumineux à la fois !

Eric Guillaud

Plutona, de Jeff Lemire et Emi Lenox. Editions Futuropolis. 20€

© Futuropolis - Jeff Lemire & Lenox

© Futuropolis – Jeff Lemire & Lenox

02 Juil

Pages d’été : le roman Intempérie de Jesús Carrasco adapté en BD par Javi Rey

K9xOOMcjUbtaJOWBjRsqWJFoWy8mfPzp-couv-1200 C’est l’été, les doigts de pied en éventail, le cerveau en mode détente et enfin du temps pour lire et éventuellement rattraper le retard. Sur la table de chevet, quelques livres en attente. C’est le moment…

Relativement peu de textes, peu de dialogues, vous pouvez lire Intempérie en vingt minutes chrono mais vous pouvez aussi prendre votre temps – et je vous le conseille – pour savourer le dessin mais aussi et surtout vous imprégner des atmosphères et des émotions. Car toutes les pages de ce récit en sont riches.

Intempérie raconte l’histoire d’un gamin qui décide de fuir la violence de son père, fuir les coups et la vie de misère qu’il lui réserve. Mais la nature dans ce coin d’Espagne ravagé par une épouvantable sécheresse est aussi rude que les hommes. Et le jeune enfant, dont on ne connait pas le nom, doit faire face à la faim et à la soif. Recueilli par un berger nomade, il doit se reconstruire, réapprendre à faire confiance à l’homme. Mais les démons de son passé sont à ses trousses, des hommes qui sont prêts à tout pour le ramener au point départ…

Certains d’entre vous connaissent déjà le Barcelonais Javi Rey qui a précédemment signé l’album Un maillot pour l’Algérie ainsi qu’un épisode de la série Secrets chez Dupuis. Son graphisme, ses couleurs, illustrent ici parfaitement l’humilité du héros face à la nature et sa détresse face à la violence des hommes.

Comme l’explique l’auteur du roman, Jesús Carrasco, Intempérie dépeint le monde dans lequel il a grandi, le monde de l’Espagne rural : « Je suis né dans un village et j’y ai vécu jusqu’à l’âge de vingt environ. Pour cette première aventure, ce premier défit, je me suis rendu compte qu’il était indispensable de puiser à une source en émotions, en perceptions ou en sensations suscités par le paysage. Ce roman est fabriqué à partir de ce matériau-là : un vécu hautement exposé à l’environnement, au milieu naturel, à la campagne, à l’inclémence, à l’intempérie ». 

Un bel album et, à en croire l’auteur du roman lui-même, une adaptation qui « surpasse le livre »!

Eric Guillaud

Intempérie, de Javi Rey d’après le roman de Jesús Carrasco. Éditions Dupuis. 18€

© Dupuis / Javi Rey - Jesus Carrasco

© Dupuis / Javi Rey – Jesus Carrasco