22 Jan

Le Grand méchant renard de Benjamin Renner : même les poules en rigolent

tumblr_nibsw62HUm1rb1rgoo10_1280 Costaud comme une huitre, aussi charismatique qu’une limace séchée dans un pot de sel, aussi féroce qu’une tortue anémique à la retraite…

N’en jetez plus, la coupe est pleine. Non seulement, le grand méchant renard se fait balader par les poules mais il doit encore subir les moqueries du loup de la forêt voisine qui ne supporte plus cette mauvaise image donnée présentement des prédateurs. C’est vrai quoi. Où va-t-on si les renards ne font plus la loi dans les poulaillers et doivent se contenter de manger des navets ?

Mais le grand méchant renard a un plan : voler des oeufs, les couver, élever les poussins et les manger. Il fallait y penser. C’est tout bête…

A défaut d’être méchant, le renard de Benjamin Renner est divinement drôle. Comme les autres personnages qui traversent cette histoire sans cases, sans décors, sans bulles. Un one shot qui se lit d’une traite et vous laisse un sacré goût de rigolade dans le bec. Il faut dire que l’auteur a plus d’une plume à son arc même s’il signe ici sa première BD. Benjamin Renner est en effet l’un des co-réalisateurs du long-métrage « Ernest et Célestine », récompensé par de multiples récompenses dont le César du Meilleur film d’animation en 2013. Un grand méchant bonheur !

 Et si vous aussi rêvez de jouer les grands méchants renards, alors par ici la sortie.

Eric Guillaud

Le Grand méchant renard, de Benjamin Renner. Editions Delcourt. 16,95 €

© Delcourt / Renner

© Delcourt / Renner

16 Jan

L’Algérie c’est beau comme l’Amérique, un voyage sur les traces de la famille pied-noir d’Olivia Burton

L'Algérie_CouvIl y a des héritages qui ne sont pas toujours faciles à assumer. Olivia est petite-fille de pieds-noirs, rien de grave me direz-vous, mais l’image que lui ont renvoyé ses camarades de fac – celle de colons exploiteurs – ne l’a pas vraiment aidé sur ce point.

Mais que sait-elle au juste de ce passé familial ? De cette vie d’agriculteurs dans les Aurès, de réfugiés à Alger et finalement de déracinés à Marseille ? Trois fois rien. Il y a bien eu ces réunions de famille où chacun se noyait en fin de repas dans des souvenirs parfois heureux, plus souvent douloureux. Il y a eu aussi ces albums photos qu’elle consultait enfant, ces noms de village, Bernelle et Corneille, qui revenaient sans arrêt dans les conversations…

Et puis, il y a eu cette grand-mère qui aimait raconter sa vie en Algérie, le travail acharné de son mari pour défricher les terres, le froid l’hiver, la chaleur l’été, les nuages de sauterelles et puis bien sûr la guerre, l’incendie de la ferme, le départ pour Alger, l’exil…

En mourant, la grand-mère a laissé un dossier à Olivia avec tous ses souvenirs. C’est peut-être ce qui a décidé la jeune femme à se lancer dix ans plus tard sur les traces de sa famille en Algérie avec l’ambition d’y retrouver un village, une maison, une rue, une tombe, un coin de photo, une atmosphère, une odeur qui lui parlent de ses origines, de ses racines.

Un titre qui se lit forcément avec l’accent, une couverture qui respire le soleil, L’Algérie c’est beau comme l’Amérique raconte avec simplicité et sensibilité ce voyage au bout de l’intime. L’Algérie, c’est un peu l’Amérique d’Olivia, un pays mille fois imaginé, rêvé, fantasmé. Alors bien sûr on pouvait s’attendre à ce qu’elle aille jusqu’au bout et signe le dessin. Mais c’est un autre qui le fait à sa place. Son nom : Mahi Grand, artiste complet, peintre, sculpteur, décorateur. Et bien qu’il ne connaisse pas spécialement l’Algérie, Mahi Grand s’en sort à merveille, son trait est élégant, ses mises en scènes, particulièrement efficaces. « Le fait qu’il n’ait pas de connexion particulière avec l’Algérie… », précise Olivia Burton,  » ni aucun affect pied-noir m’a paru moins un obstacle qu’un atout, il allait pouvoir ainsi poser un filtre sur mes éventuelles errances « .

Et ça fonctionne, le roman graphique d’Olivia Burton et Mahi Grand nous transporte littéralement de l’autre côté de la Méditerranée à la découverte de ce pays à la fois si proche et si lointain. Une belle idée !

Eric Guillaud

L’Algérie, c’est beau comme l’Amérique, d’Olivia Burton et Mahi Grand. Editions Steinkis. 20 € (en librairie le 21 janvier)

13 Jan

Charlie Hebdo, Grand Prix du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême? Gwen de Bonneval s’explique

© Gwen de Bonneval d'après Charb

© Gwen de Bonneval d’après Charb

Et maintenant ? Maintenant que l’état de sidération est passée, que chacun y est allé de son hommage, et que le journal est assuré de retrouver les kiosques, que pouvons nous faire ? Donner le Grand Prix du Festival International de la BD d’Angoulême à Charlie Hebdo ? Une pétition est lancée…

L’initiative est partie de Nantes. Gwen de Bonneval est un auteur de bande dessinée que nous avons déjà eu l’occasion de rencontrer  au moment de la sortie d’un de ses albums, un auteur épris de liberté qui ne pouvait ne pas réagir aux heures noires que nous venons de vivre.

Avec quelques auteurs amis, parmi lesquels un autre Nantais, Cyril Pedrosa, il a lancé lundi 12 janvier une pétition sur internet pour que le Grand Prix du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême soit exceptionnellement attribué cette année à Charlie Hebdo.

La suite ici

12 Jan

Charlie Hebdo : un hors-série Spirou dans les kiosques vendredi 16 janvier

6a00d83451decd69e201b7c7346043970b-800wiLes initiatives se multiplient après la semaine tragique que nous venons de vivre. Les éditions Dupuis on décidé de s’unir à tous ceux qui défendent avec force la libre circulation des idées et de rendre hommage à Charlie et à la liberté d’expression en publiant le vendredi 16 janvier un numéro spécial du magazine Spirou en vente uniquement en kiosque.

Dans un communiqué de presse, les éditions Dupuis déclarent : « Spirou n’est pas un journal politique. Spirou est un journal de divertissement. Mais depuis toujours, Spirou défend la liberté, la solidarité, la tolérance, l’amitié, l’intelligence et l’humour. Sans liberté de la presse, pas de démocratie. Sans liberté de création, pas d’édition, et les bandes dessinées que vous lisez ici n’existeraient pas. Sans liberté, pas d’humanité ».

Eric Guillaud

10 Jan

Un « Prix Charlie de la liberté d’expression » au festival de la BD d’Angoulême

Photo de profil du compte Facebook du FIBD

Photo de profil du Facebook du FIBD

Pour répondre à l’odieuse attaque de Charlie Hebdo qui a tué 12 personnes dont les dessinateurs Tignous, Wolinski, Honoré, Cabu et Charb, les responsables du Festival International de la BD d’Angoulême ont décidé de créer le « Prix Charlie de la liberté d’expression ».

« Nous voulons ouvrir cet événement à tous les dessinateurs, au-delà de la stricte famille de la bande dessinée. L’édition 2015 sera un temps de mémoire, de résistance, de débat sur la liberté d’expression, et de rassemblement », a déclaré Franck Bondoux, délégué général du Festival. « Il n’y a pas de différence entre les caricaturistes et les auteurs de bande dessinée », a-t-il ajouté, « ce sont tous des dessinateurs, comme ceux de Charlie Hebdo pris pour cible. Plusieurs d’entre eux publiaient d’ailleurs aussi des albums ».

Interrogé par Le Monde, Franck Bondoux a précisé : « Ce prix cessera d’être remis le jour où tous les dessinateurs du monde pourront s’exprimer librement, c’est dire qu’il a de l’avenir ».

D’autres initiatives pourraient être prises à l’occasion du festival pour honorer la mémoire des victimes, notamment un concert de dessins, des débats sur la liberté d’expression, une exposition autour des oeuvres des dessinateurs de Charlie… La cérémonie de clôture devrait également rendre un hommage particulier à Charlie Hebdo.

D’ore et déjà, le FIBD a créé une page Facebook ouverte à toutes celles et ceux qui, dans l’univers du 9e art, souhaitent exprimer sous forme graphique ce que leur inspirent les tragiques événements de ces derniers jours. Et les hommages y sont déjà très nombreux.

Eric Guillaud, avec AFP

copie d'écran de la page Facebook du FIBD ouverte au lendemain de l'attentat

copie d’écran de la page Facebook du FIBD ouverte au lendemain de l’attentat

 

06 Jan

14 -18 : sur les chemins de l’enfer avec Corbeyran et Le Roux

14-18 02.inddBrûler ce qui le relie encore à ces années noires, les tranchées, la boue et le sang, la folie et la mort, en un mot, l’enfer. Brûler tout, les poèmes et les dessins que son pote Maurice avait produits sur le front. Brûler pour oublier qu’il n’a peut-être pas été un héros, juste un homme qui partait combattre la trouille au ventre. Pierre en est finalement revenu vivant mais tant d’autres y sont restés. Des millions, des anonymes et des potes…

Corbeyran et Étienne Le Roux poursuivent avec ce tome 2 leur saga 14-18 qui nous accompagnera sur cinq ans et comptera à terme dix albums. Même si dans chacun d’eux, un événement marquant sert de toile de fond, c’est bien le quotidien des soldats que veulent mettre en lumière les auteurs à travers le destin de huit personnages principaux, huit jeunes hommes issus du même petit village et enrôlés dans la même compagnie. « La série 14-18 », explique Corbeyran, « est filmée au ras des tranchées. Elle exprime le point de vue des soldats, les petits, ceux à qui on ne demande pas leur avis ».

Qui dit 14-18 en BD dit Tardi. Et son oeuvre de référence sur la Grande guerre. Pas facile d’aborder le sujet sans que soient faits des comparaisons. Dans une interview réalisée pour le compte du site spécialisé ActuaBD, le scénariste Corbeyran explique comment on peut quand même parler de cette foutue guerre sans s’appeler Tardi : « J’ai une très grande admiration pour l’œuvre de Tardi, depuis toujours. Mais si on se met à réfléchir de cette manière, en tant qu’auteur, on ne fait rien. On reste assis et on lit les bouquins des autres. Car tout a déjà été écrit, dessiné, filmé, narré, peint, sculpté, chanté, etc. Il faut donc s’accaparer le sujet sans complexe, et l’explorer avec spontanéité et franchise ».

Une fiction au coeur de l’histoire.

Eric Guillaud

14-18, Les Chemins de l’enfer (septembre 1914), de Corbeyran et Le Roux. Editions Delcourt. 14,50 €

L’info en +

L’interview de Corbeyran à lire sur ActuaBD

03 Jan

Pour bien commencer l’année : Michel Vaillant à fond la caisse !

Liaison-Dangereuse-cop-originale Première résolution de l’année : faire du sport.

Mais pas n’importe comment et pas avec n’importe qui. Pour nous, ce sera du sport automobile avec Michel Vaillant, oui oui le mythique pilote de course né à la fin des années 50 sous les pinceaux de Jean Graton.

La troisième aventure de la nouvelle saison est sorti il y a quelques semaines, 54 pages à lire pied au plancher, avec un Michel Vaillant  plus en forme que jamais et surtout plus séducteur que jamais. Liaison dangereuse, le titre de ce nouvel opus annonce la couleur. Il y a du grabuge dans l’air et de la gomme sur l’asphalte.

En attendant le retour des Vaillantes sur les circuits de Formule 1, notre pilote préféré doit faire la promo d’une voiture de rallye que l’écurie compte bien vendre dans les années à venir. Pour cela, direction le rallye du Valais, épreuve reine du Championnat d’Europe des Rallyes, Michel doit y imposer le prototype. Et pour y parvenir, la débutante mais très sensuelle Carole Ouessant doit jouer son copilote…

Toujours aussi merveilleusement raconté et dessiné par la nouvelle équipe formée de Marc Bourgne, Denis Lapière, Benjamin Benéteau et Philippe Graton, le fils du créateur de la série, cette nouvelle saison poursuit la légende de la plus belle façon. Une série qui a changé de siècle mais gardé son âme !

Eric Guillaud

Liaison dangereuse, Michel Vaillant (Nouvelle saison, tome 3), de Graton, Lapière, Bourgne et Benéteau. Editions Graton. 15,50 €

© Dupuis / Graton, Lapière, Bourgne et Benéteau

© Dupuis / Graton, Lapière, Bourgne et Benéteau

31 Déc

La BD en 2014 ? Un petit coup de barre… et ça repart !

le plus gros tirage de l'année 2014

le plus gros tirage de l’année 2014 – 430 000 exemplaires

Le rapport Ratier est sorti. Du nom du secrétaire général de l’ACBD, Association des critiques et journalistes de bande dessinée, le rapport Ratier offre chaque année une photographie très précise de la production de bande dessinée dans l’espace francophone européen. Après un fléchissement en 2013, l’offre éditoriale enregistre pour 2014 une nouvelle hausse avec 5410 livres de BD publiés, dont 3946 nouveautés. Soit une production en hausse de 4,64% par rapport à l’an passé.

Pour Gilles Ratier, « L’économie de la bande dessinée, dans son ensemble, résiste encore et toujours à la crise ambiante, mais les tirages de la plupart des 98 principaux best-sellers de l’année subissent une nouvelle baisse« .

Qui sont les grands gagnants de l’année ?

Parmi les plus gros tirages hors comics et mangas, on retrouve quelques grands classiques comme le tome 23 de Blake et Mortimer (430 000 ex.), le tome 8 de Joe Bar Team (350 000 ex.), le tome 19 de Largo Winch (350 000 ex.), le tome 19 du Chat (350 000 ex.), beaucoup plus loin dans le classement le 54e Spirou et Fantasio (75 000 ex.), encore plus loin le 24e Jérôme K Jérôme Bloche (30 000 ex.).

Du côté des comics, Walking Dead rafle les trois premières places avec les tomes 20 (120 000 ex.), 21 (110 000 ex.) et 19 (100 000 ex.). Pour les mangas, la série Naruto occupe comme l’an passé les quatre premières places avec les tomes 62 à 65 (180 000 ex. chacun).

Trois groupes se partagent 36,52% de la production. Il s’agit des groupes Delcourt, Glénat et Média-Participations.

Eric Guillaud

Quid de la BD numérique ? Combien d’auteurs vivent de la BD ? Quels sont les tirages des revues d’info BD ? Tous les chiffres, toutes les analyses de Gilles Ratier et de l’ACBD ici

30 Déc

Chroniques de Noël : Un voyage improbable signé Turf

9782756047850vNoël, c’est fait ! Plus que quelques heures et on embarquera pour 2015. Un nouveau gueuleton en perspective, cotillons et serpentins à volonté, champagne et petits cadeaux à la clé. Alors, on vous refait le coup de la sélection de BD, des livres qui feront à coup sûr de l’effet au pied du sapin ou sur la table de réveillon.

Pour inventer un voyage comme celui-ci, il faut s’appeler Turf, oui oui, l’auteur de La Nef des fous ou de Magasin sexuel. Parce qu’il faut quand même disposer d’une sacré dose d’imagination, de loufoquerie et d’humour pour propulser un phare dans l’espace avec à son bord le gardien et une joyeuse bande d’archéologues venue à la base tâter du plésiosaure bicéphale. Quésaco ? Un modèle, une marque, une espèce de dinosaure. Un coup de pioche à la base du phare et hop voici donc tout notre beau petit monde parti embrasser les étoiles.

Et question ambiance, ce n’est pas vraiment ça. Le gardien du phare ne supporte pas la compagnie. Et la compagnie ne supporte pas le gardien de phare. Bref, de quoi nous donner un huis clos extraordinairement explosif et fatalement jouissif…

Eric Guillaud

Le Voyage improbable (première partie), de Turf. Editions Delcourt. 14,50 €

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29 Déc

Chroniques de Noël : Véronique Deiss adapte en BD le Journal d’un chat assassin

album-cover-large-24665Noël, c’est fait ! Plus que quelques heures et on embarquera pour 2015. Un nouveau gueuleton en perspective, cotillons et serpentins à volonté, champagne et petits cadeaux à la clé. Alors, on vous refait le coup de la sélection de BD, des livres qui feront à coup sûr de l’effet au pied du sapin ou sur la table de réveillon.

Oh, un chat ! Oui mais attention, pas n’importe quel chat, un chat assassin, un vrai, un psychopathe de première qui tue, déplume et croque sans modération. Un chat un peu grassouillet quand même, un peu roux aussi, qui pense faire son boulot. Sauf que ses maîtres n’apprécient que modérément les activités nocturnes du tueur en série. Ras-le-bol des souris et oiseaux en tout genre qui viennent mourir sur le tapis du salon. Pourtant, Tuffy, le chat en question, ira jusqu’au bout de son destin, tuant même le lapin des voisins, un certain Thumper. Un gros coup, un coup de trop…

Si la bande dessinée partage avec Instagram une passion immodérée pour nos amis les bêtes et notamment les chats, celui-ci n’est pas né dans une planche de BD, ni dans un chou, mais dans une page de roman, un livre signé Anne Fine, auteure par ailleurs de Madame Doubtfire qui connaîtra au cinéma un succès mondial. Pour tous ceux qui aiment les chats et pas trop les lapins !

Eric Guillaud

Journal d’un chat assassin, de Véronique Deiss d’après Anne Fine. Editions Rue de Sèvres. 10,50 €

Capture d’écran 2014-12-17 à 17.22.38