Un comic book de science-fiction parodique qui régalera les fans de la période ‘classique’ du genre tout en se permettant quelques petites piques bien senties à notre société machiste.
Oui, le scénariste Karibou et le dessinateur Witko connaissent leurs classiques du space-opera, de Star Wars à Flash Gordon en passant par Galactica. D’où cette galerie de personnages semblant sortir d’un vieux pulp – ces magazines bon marché qui, dans les années 40 et 50 abreuvaient la jeunesse américaine de récits d’aventures couvrant tout le spectre.
Mais le résultat est en même délicieusement décalée, avec le fidèle second qui ne comprend rien à comprend ou le scientifique de l’équipe bourré de névroses. Et bien sûr, il y a ce héros, Johnny Biceps sûr de lui et pourtant bête comme ses pieds et bovin au dernier degré. Sans parler de son ennemi juré, le diabolique et pourtant aussi débile Astar, capable du pire… Comme par exemple d’inviter à un goûter d’anniversaire Biceps. Et ce après qu’il se soit retrouvé en fauteuil roulant, désormais accompagné de son assistant de vie prénommé Aziz qui, par amour, décide bientôt de donner naissance à son clone.
Le ton est donné. Oui, c’est complètement absurde et pousse parfois le bouchon très loin – notamment lorsque Biceps hésite à trucider le monstre galactique en forme de verge ( !) qui menace de le dévorer car la symbolique remettrait trop en question sa virilité. Et on vous laisse deviner ce que suggère le nez fin et allongé de ce dernier sous ce menton poilu séparé en deux…
Mais justement : en plus de son style de dessin faussement naïf entre Lewis Trondheim et Riad Sattouf, L’Argonaute Du Futur se la joue malin. Il alterne le rythme (certaines histoires ne font qu’une page alors que d’autres plusieurs) et les teintes colorées et sait se moquer aussi bien des ‘gentils’ que des ‘méchants’.
Il multiplie aussi les clins d’œil graphiques aux grands classiques du genre tout en renversant parfois complètement les valeurs avec un flegme quasi-britannique, rendant la chose encore plus absurde. Résultat, la charge se révèle à la fois singulière et en même temps jamais trop lourde. Et puis en plus d’être assez en phase au final avec des problématiques très actuelles, comme le machisme à outrance ambiant, Johnny Biceps est avant tout, et surtout, franchement drôle.
Olivier Badin
Johnny Biceps – L’argonaute du futur de Witko & Karibou. Delcourt. 12,50 €