Le Hellfest vous manque ? Vous aimez Batman et les grandes sagas épiques au long cours servies par les comics depuis les années 80 ? Vous raffolez des objets collectors ? Batman Death Metal coche toutes les bonnes cases !
Même si l’évènement est passé un peu inaperçu en France, la saga Batman Metal a remis presque complètement à plat en 2018 non seulement l’univers du Vengeur Masqué mais aussi de DC Comics en général. Une espèce de cataclysme difficilement résumable mais qui, en gros, a rassemblé une bonne partie des héros maison – Batman bien sûr mais aussi Superman, Wonder Woman, plus toute La Ligue De Justice etc. – pour tous ensuite tout chambouler en les envoyant de façon sadique dans un blender. Et les lecteurs avec.
Mais qu’importe : avec sa grosse remise à plat de tout ce que l’on considérait comme acquis, son gros méchant bien flippant (le Batman Qui Rit), son gros nom au scénario (le très côté Scott Synder) et ses multiples ramifications annoncées, DC avait clairement décidé ici de ne pas faire les choses à moitié. Dont acte.
Presque trois ans après, le constat est, disons, mitigé mais et ce n’est pas ce nouvel appendice qui va changer la donne, bien au contraire. Avec toujours Snyder et le très doué dessinateur Greg Capullo à la manœuvre, Batman Death Metal se révèle être un curieux objet, au format et aux concepts, disons, hybrides.
Alors d’entrée, on prévient les malheureux qui oseraient s’y aventurer sans avoir au préalable réussit l’exploit d’avoir assimilé Batman Metal : n’essayez même pas malheureux ! Même les connaisseurs risquent de sentir d’abord perdus face à tous ces allers-retours incessants entre les différents Multiverse, ces versions multiples du Vengeur Masqué et surtout toutes ces sous-intrigues. L’ambition de Snyder d’accoucher de la saga ultime transpire à toutes les pages. Mais à force de vouloir verser dans le grandiloquent, les personnages semblent parfois désemparés face à une telle démesure pas toujours justifiée.
Ensuite il y a ce format, assez frustrant car seulement de 40 pages par épisode, même si le tout est vendu à un prix largement abordable.
Mais ce qui risque de diviser le plus, c’est ce choix éditorial d’associer à chaque numéro (sept en tout) un groupe de metal. Un concept marketing un chouia scabreux visant à récupérer les fans de ce style de musique susceptibles de se retrouver dans cet univers très sombre tout en réalisant un jeu de mot un peu facile – musique métal et Batman Metal, pour ceux du fond qui n’avaient pas compris. Or l’implication de chacun des groupes se limite en fait à une pochette thématique les mettant en scène dans le monde de Batman Metal, une préface signée de leur main ainsi qu’en fin de parcours une page d’interview et une petite bio. Mais sans que tout cela ait le moindre lien avec le récit.
Alors qui est visé ici ?
Les fans de metal justement ? Peut-être, surtout que l’éventail des groupes choisis ici est très large, allant du rock/metal théâtral de Ghost en passant par le thrash de Megadeth et Sepultura, le metal progressif d’Opeth et Dream Theater etc. Sauf qu’ils n’apprendront rien ici et ne seront donc probablement attirés que par l’aspect collector de l’objet.
Les fans de Batman alors ? Les plus acharnés peut-être, les autres risquant d’être rebutés. Soit par le rapport taille du texte/prix, soit par le gloubiboulga concocté par un Snyder en roue libre et très occupé à construire son propre mythe. Reste cette initiative, plutôt osée, d’allier musique et comics au service d’un récit certes ampoulé mais qui n’a pas peur d’écraser sous son talon clouté toute une mythologie populaire pour mieux la reconstruire, mais en version plus moderne et surtout, bien plus méchante.
Olivier Badin
Batman Death Metal, Vol. 1 & 2 de Scott Snyder et Greg Capullo. Urban Comics/DC. 10 euros.