Ceux qui aiment être surpris, voire décontenancés, vont être servis. Square eyes est un album comme on n’en voit pas à tous les coins de rue, un album qui nous embarque dans un monde futur où les frontières entre la mémoire, les rêves et le monde virtuel s’estompent, un album qui vous en met plein les yeux pour de vrai…
L’histoire débute avec Fin, Fin Ueda-Soto. C’est le nom de l’héroïne. Fin a un problème, elle a été déconnectée du réseau. Elle qui était, il y a quelques mois encore, admirée et encensée pour avoir créé un programme novateur, une sorte d’interface entre l’espace de visualisation et le cerveau, se retrouve à la porte du monde virtuel, rejetée à chaque tentative de connexion. À la porte du monde virtuel et bientôt à la porte de son appartement où une autre femme s’est installée et vit sa vie. Comme si elle n’existait plus !
Et le pire de tout ça, c’est qu’elle ne sait plus comment elle a pu en arriver là. Ce qu’elle sait par contre, c’est que son programme pourrait être impliqué dans la disparition spontanée de gens dans les rues de la ville…
Etonnant récit que celui-ci, tant sur le plan graphique que scénaristique. Aux manettes, les Anglais Anna Mill et Luke Jones jouent avec la réalité et le virtuel pour nous embarquer dans un univers futuriste à la croisée d’un Otomo et d’un Mœbius. On prétend que tous les mondes sont possibles en bande dessinée, Anna Mill et Luke Jones nous le prouvent en tout cas avec brio, parvenant à nous surprendre à chaque page avec un trait, un découpage, des couleurs, des atmosphères, qui se renouvellent sans cesse. Sorti en 2018 en Angleterre, l’album a remporté un World Illustration Award en 2019.
Eric Guillaud
Square eyes, de Luke Jones et Anna Mill. Delcourt. 27,95€