Les Sanson et l’amateur de souffrance permet de parler de la grande Histoire en passant par la petite mais aussi de revoir les grands évènements qui ont secoué la France de Louis XIV pour aboutir à la Révolution Française et à la Terreur. Cette histoire en trois tomes distille aussi une pointe de fantastique pour donner plus de corps à son grand méchant…
Rien que sur le papier, Les Sanson et l’amateur de souffrance réussit déjà un petit exploit, atteindre le bon équilibre entre romanesque et faits historiques. On y croise pas mal de personnages connus des férus d’histoire et le tout permet même, habilement, de réviser un peu cette période charnière allant de la seconde moitié du XVIIème siècle au milieu des années 1850 mais sans jamais phagocyter l’intrigue principale. Jusqu’au bout les deux auteurs réussissent même à maintenir l’aura de mystère entourant ce fameux amateur de souffrances qui se délecte des exécutions publiques et qui s’en nourrit même, prolongeant ainsi sa vie diabolique.
Un être étrange dont on ne sait rien, ou presque si ce n’est qu’il profite de soutiens hauts placés et qu’il n’hésite pas à peser sur le cours des évènements pour en profiter encore plus. Et le pire est qu’il n’est pas tout à fait seul… En travers de son chemin, non pas un homme mais une famille, les Sanson. Des bourreaux de père en fils (la charge est héréditaire), liés malgré eux à l’amateur et dont chaque génération va tenter de le combattre à sa façon.
Les Sanson ont bien existé et ont notoirement mis à mort aussi bien le brigand Cartouche que Marie-Antoinette ou même Danton. On peut d’ailleurs visiter leur caveau au cimetière de Montmartre à Paris. Ce dernier chapitre débute en 1793, période tourmentée où la machine inventée par le docteur Guillotine marche à plein régime et marque l’apogée de cette lutte…
Le plus étonnant ici est cette façon de faire cohabiter des traits somme toute assez simples et réalistes avec des soudaines poussées de violence parfois assez gore. D’ailleurs, ça décapite sec ! Après, la volonté des auteurs de rester fidèles à tout prix à la vérité historique et de bien toujours expliquer les choses abouti parfois à quelque chose d’un peu trop verbeux qui aurait peut-être gagné à être un chouia plus nerveux et sauvage. Mais on retient quand même l’ambiance de plus en plus occulte, digne d’un film de la Hammer, cette célèbre maison de production anglaise des années 60 spécialisée alors dans les films à petits budgets avec, souvent, Christopher Lee dans le rôle principal. Christopher Lee qui, pour l’anecdote, a d’ailleurs interprété le rôle de Sanson dans le film La Révolution Française sorti en 1989…
Olivier Badin
Le Sanson et l’amateur de souffrances, de Patrick Mallet et Boris Beuzelin. Vents d’Ouest. 17,50 euros