20 Mai

Cinq questions au journaliste Michaël Sztanke, auteur avec Alexis Chabert de La Faute chez Delcourt

 

Michaël Sztanke à Pyongyang

Michaël Sztanke à Pyongyang

Comment vous est venue l’idée de l’album La Faute ?

Michaël Sztanke. La première chose qui frappe l’oeil en posant le pied en Corée du Nord c’est l’omniprésence des portraits des leaders Kim Il-sung et Kim Jong-il. Les Nord-Coréens portent sous forme de badge les visages souriants de leur leader sur leur veston à l’endroit de leur cœur. J’ai posé la question à mon guide : « Comment faites-vous et que se passe-t-il si vous égarez votre badge ? » La réponse fut « On n’égare pas notre badge ». A partir de cette anecdote j’ai construit un scénario imaginant la perte d’un badge et tous les évènement qui pouvaient en découler. L’idée m’est venue dans l’avion du retour lors de mon premier voyage.

La BD est le médium le plus adéquat pour raconter justement ce qu’on ne peut pas filmer.

9782756047256vSelon vous, en quoi l’album peut-il être complémentaire de votre documentaire?

M.S. Tourner un documentaire en Corée du Nord est extrêmement complexe. Que montrer et comment le montrer étant donné le contrôle très serré sur place et l’impossibilité d’interroger qui vous souhaitez ou de se déplacer librement… Pour le documentaire j’ai pu me rendre deux fois à Pyongyang en septembre 2012 et février 2014. J’ai filmé beaucoup de sites officiels ou touristiques et beaucoup de nouvelles infrastructures récemment construites sous Kim Jong-un, le leader arrivé au pouvoir à la mort de son père. Un festival de cinéma, un parc d’attractions, une patinoire, une station de ski à 200 km de Pyongyang, une nouvelle bibliothèque universitaire, un nouvel hôpital etc… uniquement des lieux neufs. Comment comprendre ce qu’il se joue derrière cette sorte de village Potemkine ? La BD est le médium le plus adéquat pour raconter justement ce qu’on ne peut pas filmer. Il permet une vraie liberté de ton et donc de plonger le lecteur dans l’atmosphère de ce pays.

Comment percevez-vous la BD et plus précisément la BD reportage ?

M.S. Je conçois le BD reportage comme un médium plus libre et moins formaté pour aborder une question que la télévision. Les cases reportages ou documentaires de la télévision laissent peu de place à la liberté créative. Avec le dessin et le récit tout est permis en terme de forme, tout en gardant le fond, l’essentiel, c’est à dire l’information. Il est vrai que la BD reportage est devenue un peu à la mode chez les journalistes qui y voient une possibilité de s’échapper des formes auxquelles ils sont habitués. Il y a également un public très réceptif à la BD reportage ou documentaire qui aime à la fois la BD et l’information…

Quel est le souvenir le plus fort que vous gardez de vos séjours en Corée du nord?

M.S. Je crois que l’arrivée en voiture dans la nouvelle station de ski flambant neuve et vide qui a coûté au régime 300 millions de dollars est impressionnante quand on sait qu’un tiers de la population a du mal à se nourrir… La visite d’une famille modèle où une petite fille de 2 ans chante la gloire au leader Kim Jong-un est aussi glacial que l’hiver nord coréen.

Pensez-vous renouveler l’expérience avec d’autres pays  ?

M.S. Pourquoi pas sur un autre pays. Mais pour le moment j’ai en tête une BD sur la Corée du Nord mais d’un autre point de vue…

propos recueillis le 20 mai 2014 par Eric Guillaud

Découvrez la chronique de l’album sur ce blog

© Delcourt / Sztanke & Chabert

© Delcourt / Sztanke & Chabert