Lire un album de Marc-Antoine Mathieu n’est pas seulement un divertissement, c’est une expérience. Une sacrée expérience même ! Souvenez-vous des différentes aventures de Julius Corentin Acquefacques, de L’Origine publié en 1990 avec sa case en moins, de La Qu…, du Processus, du Début de la fin, de La 2,333e dimension ou encore du one-shot Dieu en personne, une farce mettant en scène le retour de Dieu dans notre monde actuel. A chaque fois, l’auteur nous a surpris par son imagination, par son univers influencé par Kafka, Borges, Linch ou Gilliam, par son appétit d’innovation et surtout par cette volonté de toujours pousser plus loin les limites du Neuvième art. Et 3″ ne déroge bien évidemment pas à la règle, proposant non pas une mais deux nouvelles expériences de lecture, l’une sur papier, l’autre en numérique. Et difficile de résumer ce nouvel opus tant il est vertigineux. Vertigineux comme le zoom qu’il nous propose sur 72 pages découpées à l’identique de 9 cases, sans dialogues, avec pour seul mouvement un grossissement à l’intérieur des vignettes entraînant le lecteur dans un tunnel d’images. « On est vraiment dans l’exploration… », confie l’auteur, « Mon envie était de développer un espace-temps particulier, et de faire une expérience autour de ça plutôt que de raconter une histoire. 3″ n’emmène pas le lecteur dans une direction précise mais plutôt dans une expérience de lecture que j’ai envie de partager. Et c’est très différent. En ce sens, il s’agit avant tout d’un jeu et d’un espace ludique. C’est non seulement une histoire qui est présentée linéairement mais ce sont aussi beaucoup d’autres histoires annexes, autant d’arborescences à ce tronc central qui constituent cet album et cet objet numérique ». Vous l’aurez compris, l’histoire est secondaire mais en l’espace de trois secondes, il se passe quantité de choses. « C’est une BD où l’on est le héros… », poursuit Marc-Antoine Mathieu, « Un album où notre regard serait la loupe, ou le limier. Il s’agit de fouiller dans les coins, de visiter le hors-cadre, de l’imaginer, de retrouver la trame principale ou de la perdre… ». Etonnant ! E.G.
21 Oct