12 Jan

Les Temps nouveaux (tome 1), de Warnauts et Raives. Editions Le Lombard. 14,95 euros.

Congo 40, Intermezzo, Fleurs d’ébène, A Coeurs perdus, Liberty, Les Suites vénitiennes… La liste des ouvrages réalisés à quatre mains par le tandem Warnauts – Raives est particulièrement longue, riche et éclectique. Avec ce premier volet des Temps nouveaux, paru au Lombard, les deux auteurs belges mêlent comme à leur habitude une belle histoire d’amour et un contexte historique fort, en l’occurrence celui de la fin des années 30 en Belgique. L’histoire ? Celle d’un jeune homme, Thomas, qui après huit ans passés au Congo belge, revient dans son village, quelque part dans les Ardennes. Il y retrouve son meilleur ami, un curé, et Alice, son amour de jeunesse. Mais huit ans, c’est long, et Alice est depuis devenue mère de famille et surtout elle a épousé Charles, le propre frère de Thomas. Et ce n’est pas le seul changement ! Alors que la guerre devient inéluctable, les deux frères se déchirent politiquement à l’image de la Belgique toute entière. Charles le notable est proche des rexistes pro-nazis de Léon Degrelle. Thomas, de son côté, combat farouchement l’Allemagne hitlérienne…

Ecrit, dessiné et mis en couleurs à quatre mains, ce nouvel opus de Warnauts et Raives est une totale réussite tant d’un point de vue graphique que narratif. Quand au fond, ils abordent ici une période noire pour la Belgique comme pour beaucoup de pays, une période de déchirements et de blessures profondes pour les peuples, ce qui en fait un récit forcément intéressant et prenant.On attend le second et dernier volet avec beaucoup d’impatience ! E.G.
 

En attendant que le vent tourne, de Blaise et Robin Guinin. Editions Casterman. 15 euros.

Cette histoire aurait pu être celle d’un été comme les autres dans un agréable coin de campagne accablé par la chaleur et seulement perturbé par quelques cris d’enfants au loin. Mais cet été là ne devait pas être comme les autres ! Pierrot, Florentin et Xavier, trois potes inséparables ont en effet décidé de construire une cabane dans un arbre. Une belle cabane qui va leur demander une semaine d’un travail acharné. Mais voilà, une fois achevée, quelqu’un va commettre l’irréparable en la détruisant. Persuadés que les auteurs de ce crime sont trois gamins d’un village voisin, une fille se prénommant Lucie et des jumeaux, Pierrot, Florentin et Xavier ne vont plus avoir en tête qu’une seule idée : se venger. Et bien sûr l’affaire tournera mal…

Paru dans la collection Univers d’auteurs, En attendant que le vent tourne est un petit bijou d’écriture et de dessin, de fraîcheur et d’intelligence. Au delà de l’histoire de ces gamins qui se querellent pour quelque chose d’à priori anecdotique, les deux jeunes frangins Blaise et Robin Guinin portent avec beaucoup de finesse un regard sur notre société et sur nous, les hommes, capables du pire comme du meilleur. Deux auteurs talentueux à découvrir d’urgence ! E.G.

11 Jan

Docteur Poche (intégrale 2), de Wasterlain. Editions Dupuis. 24 euros.

Un mélange d’aventure humoristique classique, de poésie, de fantaisie, de fantastique et de générosité : voilà comment la maison d’édition Dupuis présentait le travail de Marc Wasterlain lors de la sortie du premier volume de l’intégrale Docteur Poche. Et ce second tome, tout juste paru, en apporte une confirmation lumineuse en proposant aux lecteurs le fameux diptyque composé de La Planète des chats et du Géant qui posait des questions. L’auteur qui se sentait à l’étroit dans les formats habituels imposés par l’école belge trouva ici matière à libérer totalement son imagination et nous offrir un récit parodique en plein Moyen âge avec pour décor une planète ou les animaux se battent pour le pouvoir. Des animaux très humains en somme ! C’est dans les années 70 que Docteur Poche, personnage fétiche de Wasterlain, apparaît pour la première fois dans les pages du journal Spirou. Signe particulier : son nez. Pas rond, plutôt fin et long. Un nez qui fera dire à Jijé : « … un nez comme cela, c’est un trait esthétique qui ne correspond à rien ».  Pourtant, avec ce nez, son style graphique et sa façon de raconter, Wasterlain va s’imposer et influencer nombre d’auteurs comme Yslaire. En bonus, un dossier retrace la vie et l’œuvre de l’auteur dans le contexte de la fin des années 70 et du début des années 80 avec dessins, esquisses, croquis, photos… E.G.

06 Jan

Pénélope, Les Champs d’azur (tome 2), de Giroud et Brahy. Editions Glénat. 13,50 euros.

Son nom : Théodore Fayard. Sa passion : les aéroplanes. Déjà, pendant son service militaire, l’homme fabriquait de ses mains des modèles réduits volants qui faisaient l’admiration de ses compagnons. C’est donc presque naturellement qu’il intègre l’entreprise Joliot dont la spécialité est de fabriquer des automobiles mais aussi des « plus lourds que l’air », comme on les appelle à l’époque. Mais après quelques années d’aventures aériennes plus ou moins heureuses, les Joliot se retrouvent au bord de la faillite. Théodore, rendu responsable de cette situation et, plus grave encore, de la mort du fils Joliot, est chassé. Il achète son propre avion, parcourt les meetings et finit par être engagé dans un cirque aérien aux Etats-Unis où il va faire une rencontre déterminante pour la suite de sa carrière. Nous sommes en 1911, il y a tout juste un siècle…

Décollage immédiat pour cette nouvelle série présentée par l’éditeur comme une grande saga historique qui devrait entraîner le lecteur de 1909 à 1970, au gré des découvertes aéronautiques. Réalisée par le scénariste Frank Giroud (Louis la Guigne, Les oubliés d’Annam, Azrayen, Quintett, Secrets…) et le dessinateur Luc Brahy, dont le grand-père fut pilote de chasse en 14-18, la série Les Champs d’azur allie un scénario bien pensé et un graphisme réaliste très agréable ! E.G.

04 Jan

L’héritage du Kaiser, Le Casse (tome 6), de Herik Hanna et Trevor Hairsine. Editions Delcourt. 13,95 euros.

Dernier opus de la série Le Casse, initiée par le scénariste David Chauvel, L’Héritage du Kaiser nous entraîne dans l’Allemagne des années 30 pour une poursuite infernale aux côtés du Major, un agent secret dont on ne sait plus très bien où se situe son camp. Après avoir rempli avec succès une mission en Angleterre, l’homme effectue en effet un retour fracassant sur la terre nazie en tuant plusieurs membres de la Gestapo et plusieurs SS. De quoi laisser circonspects ses supérieurs. Mais comme le déclare l’un d’eux, « si cet homme a choisi un autre camp… Ce ne peut être que le sien », autrement dit, il y a forcément une explication à ses agissements. Oui… Mais laquelle ?

Hyper dynamique, le scénario d’Herik Hanna dont c’est le premier album est merveilleusement mis en images par l’Anglais Trevor Hairsine qui a précédemment réalisé Ultimate Nightmare, en collaboration avec Warren Ellis. Un contexte fort, un récit haletant, un graphisme de caractère… ce sixième album clôt la série avec panache ! E.G.

02 Jan

Margot la folle, de Muriel Blondeau. Editions Glénat. 14,99 euros.

C’est dans la magnifique collection Carrément bd qui compte déjà plusieurs belles pièces comme Le Dérisoire, L’Epouvantail pointeur ou Dracula, que l’album Margot la folle est paru. Aux pinceaux comme à la plume, on retrouve avec intérêt la Belge Muriel Blondeau, qui s’était fait remarquer en 2006 en illustrant Monstrueuse parade, un récit de Foerster sorti aux éditions Casterman. Entre les deux, un point commun, le fantastique, et dans ce nouvel opus une bonne dose de folie douce et d’énergie pour un récit qui nous entraîne dans un village médiéval où les rares survivants de la peste trouvent encore le moyen de s’entretuer. S’en suit une course effrénée dans le monde des morts… Pour les amateurs d’univers un peu dingues ! E.G.

25 Déc

Vies tranchées, Les soldats fous de la Grande guerre, collectif. Editions Delcourt. 19,90 euros.

Combien furent-ils ? Des centaines ? Des milliers ? Beaucoup ! Trop ! La Grande guerre, comme toutes les guerres qui l’ont précédé ou suivi, a rendu fou quantité de soldats. Internés à l’hôpital de Ville-Evrard à Neuilly-sur-Marne alors réquisitionné par l’armée, ces hommes furent soignés avec un unique objectif : les renvoyer au plus tôt sur le front. Une poignée de dessinateurs, parmi lesquels Benoît Blary, Laurent Bourlaud, Florent Humbert, José Luis Munuera ou encore Guillaume Trouillard, deux scénaristes, Yann le Gal et Jean David Morvan, et un spécialiste en psychiatrie qui a notamment travaillé sur les aliénistes de la Grande guerre et consacré la fin de sa carrière à l’étude des archives de l’hôpital de Ville-Evrard, Hubert Bieser, ont rassemblé et mis en images dans cet album le parcours d’une quinzaine d’hommes tombés fous au champ d’honneur. Si chacun de ces témoignages diffère dans la forme, tous ont en point commun un réalisme brutal et en fil rouge l’histoire d’Emile P., 37 ans, originaire de Lannilis en Bretagne, un soldat comme les autres qui accompagnera le lecteur tout au long du récit. Un album poignant, une approche originale et un très bel hommage à tous ces oubliés de l’histoire ! E.G.

Jeronimus (tome 3), de Dabitch et Pendanx. Editions Futuropolis. 17 euros.

9782754803113FSDeux ans après le premier, voici le troisième et dernier volet de Jeronimus, magnifique et terrifiante fresque maritime emmenée par l’excellent Christophe Dabitch au scénario et le virtuose Jean-Denis Pendanx au dessin, aux peintures devrait-on dire tant son travail en est proche, chaque planche nous offrant une preuve éclatante d’un talent hors du commun. Direction les océans donc pour ce dernier chapitre et plus précisément une île au large de l’Australie. C’est là qu’en juillet 1629 s’est échoué le Batavia, navire amiral de la Compagnie des Indes hollandaises. A son bord, 341 passagers, dont 38 femmes et enfants, et un certain Jeronimus Cornelisz. Il est d’usage de dire que c’est dans les situations extrêmes que se révèle la véritable personnalité des hommes. De fait, Jeronimus Cornelisz, homme plutôt peu courageux, va s’ériger ici en personnage sanguinaire, chef d’orchestre d’un odieux massacre… Ce drame bien réel, resté célèbre semble-t-il en Hollande et en Australie, est ici retracé avec une incroyable force. Un récit captivant !

Eric Guillaud

22 Déc

Une anthologie, de Jirô Taniguchi. Editions Casterman. 30 euros.

Une douceur ! C’est peut-être le terme qui caractérise le mieux chaque nouvelle publication de Jirô Taniguchi. Et c’est plus vrai encore avec cette très belle anthologie publiée chez Casterman, anthologie qui reprend les histoires des albums Terre de rêves et L’homme de la Toundra, ainsi que deux récits inédits en français : La Lune finissante et Une Lignée centenaire. 500 pages de bonheur pour le lecteur, une plongée dans un univers de délicatesse, de légèreté, d’amour pour la nature, l’animal et l’homme. Un peu comme si le monde s’était subitement arrêté sur la case des jours heureux. Vous me direz qu’il ne s’agit là que d’une réédition et vous aurez raison. Terre de rêves a effectivement été publié précédemment dans la collection Ecritures (2005) et L’Homme de la Toundra, dans la collection Sakka (2006) mais avec le sens de lecture original, c’est à dire à l’envers du nôtre, donc moins adapté au grand public. Et c’est bien le grand public qui est visé avec ce recueil de luxe, du moins celui qui aime Taniguchi sans connaître forcément les mangas. Celui qu’on présente comme le plus européen des auteurs japonais est en fait un auteur universel aux thèmes universels. L’adaptation au cinéma de son album Quartier lointain, sorti début novembre en salles, en est la meilleure preuve. Bref, si vous aviez besoin d’une idée cadeau de dernière minute, ne cherchez plus, vous l’avez trouvé… Et aucun doute, il sera fortement apprécié ! E.G.

17 Déc

Un héros sans coeur, Showman killer (tome 1), de Jodorowsky et Fructus. Editions Delcourt. 13,95 euros.

Créé de toutes pièces par un généticien fou du nom de Courcolain, Showman killer n’a reçu durant sa jeunesse aucun réconfort de qui que ce soit, histoire de bien le préparer à sa carrière de super-assassin. Il n’a eu ni père, ni mère, ni copains, ni jouets, a été simplement éduqué « …à martyriser les animaux, les enfants, les malades, les vieux, les avortons galactiques sans la moindre pitié ! ».  Et pour éviter que ses sentiments prennent le dessus, Courcolain a pris le soin d’enlever les conduits émotionnels de son système nerveux. Implacable ! Showman killer n’a de fait aucun sentiment. Il tue d’ailleurs son propre créateur dès que l’occasion lui est donnée, et refuse de se mettre au service de l’Omnimonarque. Véritablement sans coeur, Showman killer est un mercenaire uniquement intéressé par l’or. Jusqu’ au jour où son chemin croise celui d’Ibis…

Réalisateur, mime, romancier, essayiste, poète et scénariste de bande dessinée, Alejandro Jodorowsky a plus d’une flèche à son arc et une carrière bien remplie. Il a collaboré avec les plus grands du Neuvième art, Moebius (L’Incal), Juan Gimenez (La Caste des Méta-Barons), Manara (Les Borgia), Arno (Alef Thau) ou encore François Boucq (Bouncer), et parvient toujours à nous surprendre , à plus de 80 ans, avec des histoires d’une très grande richesse. « Ce qui est intéressant avec lui… », confie le dessinateur de Showman killer, Nicolas Fructus, « c’est qu’il ne fait pas de découpage. Il fonctionne plutôt comme au théâtre, acte par acte, en privilégiant une mise en scène et une ambiance... ». De fait, ce premier volet de Showman killer nous plonge dans un univers extrême, régi par la violence et l’or, un univers offrant une sombre vision du futur, de notre futur ! E.G.

  

L’info en +

Talentueux et prolifique, Alejandro Jodorowsky est l’auteur d’un autre album récemment paru, le premier volet d’une nouvelle série intitulée Ogregod (Ed. Delcourt, 13,95 euros). Réalisée avec Zoran Janjetov, avec qui il avait déjà collaboré sur les Technopères, cette série est l’adaptation très libre de 2 ans de vacances de Jules Verne. Direction une planète inconnue où vient de s’échouer le Sloughi, un vaisseau spatial qui devait emmener en voyage huit héritiers de grandes familles de la planète militaire Okkar…