02 Nov

Les Utopiales 2016 : le palmarès complet

© Bajram

© Bajram

Comme chaque année, les Utopiales ont décerné une quinzaine de prix, mentions et coups de coeur reflétant la grande richesse de la science-fiction et la multiplicité des talents, que ce soit en littérature, cinéma, jeu vidéo ou bande dessinée.

Prix du meilleur album de bande dessinée

Nefer, Chants & contes des premières terres, de Arnaud Boutle, Éd. Delcourt, 2015

Prix du meilleur scénario de jeu de rôle

« Un été en hiver » pour le jeu L’appel de Cthulhu/Delta Green de Jean-Marc Choserot et Cyril Puig

Prix du meilleur jeu vidéo réalisé à la Game Jam

Rémi Gourrierec, Raphaël Beuchot, Michel Belleperche, Louis Godart

Prix du jury – compétition internationale de courts-métrages

Ex-aequo Time Rodent de Ondrej Svadlena et Amo de Alex Gargot

Mention spéciale du jury – compétition internationale de courts-métrages

Decorado de Alberto Vásquez

nefer-chants-amp-contes-des-premieres-terresPrix du jury Canal+ – compétition internationale de courts-métrages

Planemo de Veljko Popovic

Prix du public – compétition internationale de courts-métrages

Automatic Fitness de Alejandra Tomei

Grand prix du jury – Compétition internationale de longs-métrages

Realive de Mateo Gil

Mention spéciale du jury – Compétition internationale de longs-métrages

Sam Was Here de Christophe Deroo

Prix du public – Compétition internationale de longs-métrages

Realive de Mateo Gil

Prix Joël-Champetier (prix hébergé par Les Utopiales)

Olivier Paquet pour Graine de fer

Prix Utopiales européen jeunesse

Empreinte Digitale de Patrice Favaro, Éd. Thierry Magnier, 2016

Prix Utopiales européen jeunesse – mention spécialerealive-1

Les copies de Jesper Wung-Sung, Éd. Le Rougue Jeunesse, 2015

Prix Utopiales européen

Le vivant de Anna Starobinets, Mirobole Éditions

Prix extraordinaire des Utopiales 2016 – Double prix

Gérard Klein et Denis Bajram

Prix Solo – concours de Cosplay

Mercy pour Overwatch

Prix de groupe – concours de cosplay

Yona et Son Hak pour Akatsuki no Yona

Prix Coup de coeur – concours de cosplay

Columbia pour Rocky Horror Picture Show

27 Oct

Autel California Face B : Nine Antico explore les années sexe, drogue, rock’n’roll & groupies

1507-1Nine Antico a toujours eu deux passions, le dessin et le rock, auxquelles on pourrait ajouter les parcours de femmes libérées dans un monde encore soumis au diktat des hommes. Après Coney Island Baby qui racontait la vie de la pin-up Betty Page et de l’actrice porno Linda Lovelace, Autel California Face A et maintenant Face B nous entraîne dans l’univers des Girls Together Outrageously, autrement dit les GTO’s, une bande de groupies qui sévit dans les années 60/70 aux Etats-Unis…

Une bande de groupies et l’un des premiers groupes purement féminin, produit par Frank Zappa ! Mais avant de monter sur scène, une anecdote dans l’histoire du rock, cette bande de filles fit ses armes en coulisses dans l’ombre et souvent dans les bras des plus grands musiciens rock de l’époque, de Brian Jones à Jim Morrison, en passant par Jimmy Page, Frank Zappa ou Jimi Hendrix.

Pour raconter cette histoire musicale en deux volumes, Face A et Face B comme il se doit, Nine Antico s’est inspirée de Confessions d’une groupie, l’autobiographie de Pamela Des Barres qu’elle appelle Bouclette dans son récit, une jeune Californienne considérée comme l’une des plus célèbres groupies de l’histoire du rock. Elle collectionnait les amants musiciens comme d’autres collectionnent les disques, avec une volonté farouche de vivre la musique au plus près, de l’intérieur, quitte à payer de son âme et de son corps.

© L'Association / Antico

© L’Association / Antico

Mais Nine Antico est allée bien au delà de cette autobiographie en racontant des événements qui en sont totalement absents, notamment l’assassinat de Sharon Tate, la femme de Roman Polanski, par le gourou Charles Manson et ses sbires. Pamela n’était pas présente sur les lieux du crime mais, pour Nine Antico, cet événement est très important. Nous sommes en 1969, il marque en quelques sortes le début de la fin de la vague hippie en Californie, en tout cas la fin d’une certaine insouciance. La couverture de l’album est une photo de presse aérienne du 10050 Cielo Drive, le lieu du massacre.

Outre le meurtre en lui-même, Nine Antico met en scène la rencontre de son héroïne avec trois jeunes illuminées protestant contre l’arrestation de Charles Manson. « S’il est condamné à mort, nous nous immolerons », préviennent-elles. Une soumission absolue qui nous ramène à celle de Bouclette, à la fois muse et adulatrice des gourous de la musique.

© L'Association / Antico

© L’Association / Antico

Ces groupies étaient-elles des femmes libérées ou soumises ? C’est l’une des questions que pose ce récit. Peut-on être aux pieds d’un homme, le vénérer à l’extrême et conserver – voire gagner – sa liberté ? C’est toute l’ambiguïté de ces groupies qui comme Pamela sont prêtes à tout pour vivre leur passion amoureuse et musicale. « Ce qui m’intéresse… », confiait l’auteure dans une interview accordée aux Inrockuptibles au moment de la sortie du premier tome, « C’est que ça pose des questions : quelle féministe es-tu quand tu es amoureuse ? Quelle force as-tu quand l’amour te rend vulnérable ? Quelle est ton identité quand tu es dans l’adoration de ce que fait quelqu’un, mais que toi-même tu ne fais rien ? Es-tu muse, es-tu fan, as-tu le droit d’exister ? »

© L'Association / Antico

© L’Association / Antico

Les années passent et avec elles l’insouciance des toute une jeunesse. Bouclette finit par ranger ses posters, sa poupée Barbie, et rendre sa chambre d’enfant à ses parents. Elle doit se marier avec un musicien. Elle est amoureuse. Une autre vie commence…

Jimmy Page, Mick Jagger, Keith Moon, Gram Parsons, Waylon Jennings… autant de noms qui rythment la vie de Bouclette et les pages de cet album. Le rock vit alors ses plus belles et ses plus folles années. Nine Antico nous en fait partager toute l’exubérance, toute l’énergie créatrice. Un roman graphique d’une richesse incroyable pour tous ceux qui aiment le rock, l’amour, la vie…

Eric Guillaud

Autel California Face A, Treat me nice, de Nine Antico. Éditions L’Association. 19€

Autel California Face B, Blue moon, de Nine Antico. Éditions L’Association. 19€

25 Oct

Les Utopiales 2016 : la science-fiction a rendez-vous à Nantes du 29 octobre au 3 novembre

© Bajram

© Bajram

Machine(s), c’est le thème de la 17e édition du festival international de science-fiction qui se tiendra à Nantes du samedi 29 octobre au jeudi 3 novembre, six jours pour découvrir de quoi sera peut-être fait demain et de quoi l’imaginaire se nourrit aujourd’hui…

C’est LE rendez-vous incontournable de tous les fans de science-fiction en France et au-delà, le plus important en Europe, un festival pluridisciplinaire couvrant le cinéma, la littérature, la bande dessinée, les jeux vidéos, les arts plastiques, la recherche scientifique… De quoi s’y perdre avec bonheur. Suivez le guide.

La suite ici

La maison d’édition ego comme x met la clef sous la porte

© Ego comme X

© Ego comme X

Il y a deux ans, dans une interview accordée au site actuabd à l’occasion des 20 ans d’ego comme x, Loïc Néhou son responsable s’interrogeait sur la possibilité de repartir pour 20 ans dans ces termes : « Difficile à dire… Si c’est le cas, il faudra alors continuer à réfléchir pour s’adapter à la nouvelle donne d’un marché du livre en pleine mutation. Mais je crois que nous avons commencé à bien amorcer le virage, d’autant que la situation financière est toujours restée des plus saines ».

Malheureusement, le constat dressé par Loïc Néhou est aujourd’hui sans appel et le message posté lundi 24 octobre sur le site internet de la petite maison d’édition angoumoisine relativement amère :

« Bon… il est temps d’officialiser les choses : voici 5 ans que je ne me salarie plus (au passage, je ne remercie pas le CENTRE DU LIVRE ET DE LA LECTURE en POITOU-CHARENTES) et 2 ans que j’ai arrêté de publier des livres (je ne remercie pas non plus MAGELIS – POLE IMAGE d’Angoulême), je déclare donc que les ÉDITIONS EGO COMME X cessent désormais leurs activités ».

Créée en 1994, la maison d’édition indépendante ego comme x s’est fait une spécialité des récits autobiographiques comme le fameux Journal de Fabrice Neaud qui, toutes éditions confondues, a atteint un tirage de plus de 50 000 exemplaires, ce qui n’est pas rien.

ego comme x, c’est aussi Le Val des ânes, L’Épinard de Yukiko, L’Homme sans talent, Dans la prison, Gens de France et d’ailleurs, Melody

Parmi les auteurs qui ont contribué à la réputation de la maison, citons Nine Antico, Matthieu Blanchin, Frédéric Boilet, Fabrice Neaud, Jean Teulé, Joe G. Pinelli, Frédéric Poincelet… et beaucoup d’autres.

Eric Guillaud

22 Oct

Les voyages d’Ulysse: une odyssée maritime et picturale d’Emmanuel Lepage, Sophie Michel et René Follet aux éditions Maghen

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C’est un livre absolument somptueux que nous ont concocté Emmanuel Lepage, Sophie Michel, René Follet et l’éditeur galeriste Daniel Maghen. Un livre de 272 pages qui nous embarque à bord de L’Odysseus pour un voyage à la croisée de la mythologie grecque, de la peinture, de la littérature et de la bande dessinée…

« Ne t’imagine pas que les informations valent de l’or. Je n’ai pas l’intention de t’offrir une croisière…. Une toile par semaine tant que tu seras sur mon bateau, C’est d’accord ? ». Jules Toulet accepte. Il va pouvoir embarquer sur L’Odysseus, le bateau du Capitaine Salomé Ziegler, une femme de caractère qui aime la peinture et voit finalement en ce jeune peintre une aide providentielle. Le capitaine Salomé est effectivement à la recherche d’Ammôn Kasacz, un des plus grands peintres de la Grèce antique, qu’elle a connu plus jeune. Ses toiles qu’il a disséminées au gré de ses voyages et de sa vie sont autant de petits cailloux blancs posés sur le chemin qui mène à lui. Jules Toulet l’a rencontré plusieurs fois et dernièrement à Alexandrie chez un mécène anglais. L’Odysseus lève l’ancre, cap sur l’Egypte, première étape d’une véritable odyssée…

En digne Breton, Emmanuel Lepage aime la mer et le fait savoir. Aujourd’hui à travers le magnifique travail réalisé sur les planches des Voyages d’Ulysse, hier à travers les albums La Lune blanche, Australes ou encore Voyage aux îles de la Désolation. 

Ponctué de peintures parfois pleine page de René Follet, réalisées pour des albums précédents ou spécifiquement pour celui-ci, ponctué également de textes d’Homère, de flashbacks sur la vie intime de Salomé, de références à la mythologie grecque, Les voyages d’Ulysse est un album très riche qui répond quelque part aux Voyages d’Anna, un carnet de voyage scénarisé, publié en 2005 chez Maghen et mettant déjà en scène Jules Toulet et ses peintures.

Eric Guillaud

Les voyages d’Ulysse, de Lepage, Michel et Follet. Editions Maghen. 29€

L’info en + : les planches originales de l’album sont présentées à la galerie Maghen jusqu’au 16 novembre.

© Maghen / Lepage, Michel & Follet

© Maghen / Lepage, Michel & Follet

18 Oct

Mort aux Vaches : un polar de François Ravard et Aurélien Ducoudray chez Futuropolis

9782754811002Ces gars-là ont des gueules d’atmosphère, des gueules à ne pas jouer les enfants de choeur à la messe du dimanche matin. Non, ces gars-là sont des truands, des as de la cambriole, des professionnels du recyclage de biftons honnêtement gagnés. Enfin quand je dis ces gars-là, ce n’est pas tout à fait exact, je devrais plutôt dire ces gars-là ET cette fille-là…

Cassidy qu’elle s’appelle ! Autant dire qu’elle porte bien son nom et que les mecs ne lui font pas peur. « Bon, on se mesure la bite encore longtemps », lâche-t-elle à ses coéquipiers encore hésitants pour l’intégrer à l’équipe. Mais terminées les balivernes, place à l’action, un petit casse à l’agence bancaire BK de Clermont l’Abbaye et allez hop tout le monde à la campagne, histoire de se faire oublier de la flicaille.

Un mois au vert dans la ferme familiale à donner du grain aux poules, laissant le temps aux uns de faire connaissance, aux autres de se retrouver et au pognon de se refaire une beauté. « La Cagnotte pour l’instant elle est comme la République, unie et indivisible », dit l’un des truands. Un vrai nid douillet que cette ferme. Enfin presque. Le cousin qui a hérité des lieux n’est pas du genre regardant côté accueil. Un bourre-pif en guise de bienvenue et de sombres histoires de vaches folles cachées qui vont attirer les flics comme des mouches autour d’une bouse. Mort aux Vaches….

Il y a du Audiard et du Lautner dans l’air. Il y a aussi et surtout du Ravard et du Ducoudray qui réalisent ici un polar aussi noir que jubilatoire où les emmerdes volent en escadrille. Comme disait Audiard, « les conneries c’est comme les impôts, on finit toujours par les payer ». En attendant, payez-vous cette BD, vous ne le regretterez pas !

Eric Guillaud

Mort aux Vaches, de Ravard et Ducoudray. Editions Futuropolis. 19€

© Futuropolis / Ducoudray & Ravard

© Futuropolis / Ducoudray & Ravard

15 Oct

ChronoSquad : une aventure à travers les siècles signée Giorgio Albertini et Grégory Panaccione chez Delcourt

chronosquadT1Il s’appelle Bloch Telonius, ressemble à un Iggy Pop des pays nordiques avec un gros nez, et ne rêve que d’une chose depuis sa plus tendre jeunesse : rejoindre les Chronosquad, ces agents qui veillent sur les Chronotouristes, où qu’ils soient dans l’espace et dans le temps. Car oui, dans le monde de Giorgio Albertini et Grégory Panaccione, les destinations de rêve ont un nom et surtout une date.

Il en rêve depuis sa plus tendre jeunesse et, finalement, l’occasion lui est donnée. Bloch Telonius est recruté comme Chronosquad avec prise de fonction immédiate car il y a urgence. Deux adolescents ont disparu d’un club de vacances de luxe situé en Égypte antique. Et l’un d’eux est la fille du président de la banque centrale. Autant dire que l’heure est grave ! Bloch et deux autres agents sont propulsés en 2574 avant J.C., le 27 juin pour être précis. Leur mission : retrouver ces adolescents et les ramener en 2016. Un petit voyage de plus de 4590 ans pour l’aller, autant pour le retour, enfin normalement…

Il nous a enchanté avec ses aventures muettes au dessin dynamique et expressif (Toby mon ami, Âme perdue, MatchUn Océan d’amour), Grégory Panaccione est de retour avec cette histoire qui mélange autant les genres que les époques. De la science fiction au goût de polar ou l’inverse, le tout mixé avec une histoire d’amour. Et cette fois, il a retrouvé la parole notre Grégory Panaccione, grâce au scénariste Giorgio Albertini. Résultat : une petite merveille qui devrait compter à terme 4 tomes, 800 pages couleurs, le tout publié en un an. Un cadeau venu d’ailleurs, du futur peut-être… ou du passé, qui sait ?

Eric Guillaud

Chronosquad, de Albertini et Panacccione. Éditions Delcourt. 25,50 €

© Delcourt / Albertini & Panaccione

© Delcourt / Albertini & Panaccione

14 Oct

Les brumes de Sapa : un magnifique roman graphique sur le sens de l’amitié signé Lolita Séchan

brumes-de-sapaInutile de le cacher, la première chose qui a arrêté mon regard est le nom de l’auteure. Lolita Séchan. Ça me rappelait quelque chose. Une chanson peut-être.  Mais oui bien sûr, c’était la Lolita de Renaud, la fille du chanteur énervant, celle dont il se disait complètement morgane…

Bon ok ! Mais un nom, aussi illustre soit-il, ne fait pas tout. Et ce qui m’a vraiment décidé à ouvrir et lire l’album est franchement ailleurs, dans l’atmosphère de cette magnifique couverture, dans ce bleu intense et dans ces traits, cette multitude de petits traits constituant l’illustration. Au centre, une jeune femme et une jeune fille ensemble sur le même chemin devant une montagne d’émotions.

Oui vraiment, une montagne d’émotions. C’est ce qui me vient à l’esprit en refermant ce bouquin de Lolita Séchan, un bouquin que j’ai eu beaucoup du mal à fermer, tant j’ai été pris par son écriture, par cette façon singulière et belle de décrire, de raconter, de dessiner, de nous embarquer dans son voyage.

Mais que raconte Les Brumes de Sapa ? Un peu de géographie. Sapa est une petite station climatique vietnamienne située à 1650 m d’altitude et à 350 km de Hanoi. Un village très fréquenté par les touristes et donc par les locaux qui tentent de se faire là un peu d’argent. 

Lorsqu’elle y débarque à 22 ans, Lolita n’a pas vraiment le profil type de la touriste, plutôt celui de la jeune nana un peu paumée bien décidée à aller voir ailleurs si l’herbe est plus verte. Et éventuellement trouver une bonne raison de vivre. « J’ai pris un carnet, un crayon, des baskets, et de l’imodium. Un RER pour Roissy Charles de Gaulle, un avion pour Dubaï… Un Whopper au Burger King de l’aéroport, et enfin un avion pour Saïgon… » .

Cette raison de vivre, Lolita la trouve à Sapa. Elle a pour nom Lo Thi Gôm, une jeune fille Hmong. Tout les sépare, à commencer par les milliers de kilomètres entre leur foyer respectif mais au fil des années et des voyages se lie entre les deux une amitié forte et sincère. 

C’est cette histoire d’amitié que Lolita Séchan raconte ici sur plus de 250 pages en noir et blanc, avec un graphisme fin, élégant et racé, parfois très détaillé, parfois épuré, dans des vignettes libérées du cadre.

Avec ses mots, son extrême sensibilité, Lolita décrit ses voyages, ses rencontres, elle nous parle des Hmongs, ce peuple de montagnards vivant au nord du Viêt Nam, elle évoque aussi ses amours – on aperçoit Renan Luce –  et puis sa famille avec notamment une scène extrêmement émouvante la montrant aux côtés de son père qu’on imagine en cure dans une clinique. Il y a dans cette scène, je ne sais pourquoi, un petit quelque chose de Corto Maltese, la solitude du héros face à son destin peut-être.

C’est beau, c’est fort, c’est poignant. On a simplement envie de dire « Merci Lolita »…

Eric Guillaud

Les Brumes Sapa, de Lolita Séchan. Éditions Delcourt. 24,95€

© Delcourt / Séchan

© Delcourt / Séchan

13 Oct

Rencontre avec Marty Planchais, l’auteur de l’album Le Petit bourreau de Montfleury chez Sarbacane

c’est dans un blockhaus, oui oui, le DY10 situé à deux pas des Machines de l’île à Nantes que j’ai rencontré Marty Planchais, auteur du Petit bourreau de Montfleury paru aux éditions Sarbacane à la fin du mois d’août. Pourquoi dans un blockhaus? Tout simplement parce que c’est là qu’il a installé son atelier comme une vingtaine d’autres personnes, architectes, musiciens, dessinateurs. Un endroit surprenant, sans fenêtres, coupé du monde par des murs de deux mètres de large mais où règne une effervescence créative sans pareil. Marty Planchais m’y attendait pour parler de sa bande dessinée bien sûr mais aussi de ses influences, de Pratt, de la vie…

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Un peintre bourreau de père en fils, ce n’est quand même pas banal. Comment accouche-t-on d’une idée pareille ?

Marty Planchais. Un scénario, c’est 7 secondes d’intuition et ensuite 7 heures de travail par jour. Il y a eu beaucoup de lectures forcément. Des livres sur les bourreaux qui ont nourri mon scénario, des dizaines de livres, certains assez glauques qui relataient des exécutions et d’autres qui évoquaient plus simplement le quotidien de ces hommes. Et puis j’ai remarqué qu’il n’y avait pas d’autobiographies de bourreaux. Je pensais que ce serait intéressant de connaître leur quotidien, de partager leurs tracas et leurs passions, parce qu’ils ne tuent pas tous les jours ces gens-là. Et de fil en aiguille, j’en suis arrivé à ce bourreau post-impressionniste jaune et rouge, un peu à la Van Gogh, tourmenté, passionné par la peinture. Un bourreau qui n’a jamais tué et qui un beau jour doit choisir entre sa passion et son métier. Le Petit bourreau de Montfleury aborde cet aspect-là aussi : le choix, la liberté…

© Planchais - Recherches graphiques

© Planchais – Recherches graphiques

Ton album s’adresse autant aux enfants qu’aux adultes me semble-t-il. C’est ce que tu souhaitais dès le départ ?

M.P. Tout à fait. Evidemment, l’esthétique, le dessin rond, s’adressent avant tout aux enfants et l’éditeur l’a voulu comme ça. Mais j’ai dés le début souhaité que le livre soit ouvert à un plus large public. Les plus jeunes y apprennent ce qu’est la peine de mort, les plus âgés y découvrent de nombreuses références historiques et culturelles, des clins d’œil au fameux discours de Badinter en 1981, à Rimbaud avec ce poème en ouverture qui amène une certaine sérénité apparente, aux peintures de Van Gogh bien sûr, au cinéma aussi et à la bande dessinée, à Pratt plus précisément et à son album Les Helvétiques. Je ne voulais pas d’une histoire sans fond, banale, d’un petit bourreau qui, le matin, va à son travail…

Un clin d’œil à Pratt. Marty Planchais nous explique en images… 

Le personnage du bourreau est magnifique. Entre le personnage moyenâgeux et le super-héros. Comment l’as-tu imaginé ?

M.P. Dès la couverture, on voit bien que ce n’est pas un bourreau ordinaire. Je l’ai longtemps cherché graphiquement, essayant plusieurs techniques de dessin. Je voulais un personnage qui soit dans la rondeur, un peu gentillet, tout rouge, masqué pour faire super-héros, un peu naïf mais pas trop quand même…

© Planchais - Recherches graphiques

© Planchais – Recherches graphiques

On le voit sur la couverture, il est assez attirant, en tout cas pas repoussant…

M.P. Vraiment ? Tant mieux, c’est vraiment ce que je voulais, ça fait plaisir..

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La chronique de l’album ici

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Un maire qui veut faire preuve de fermeté pour flatter ses électeurs, un croque-mort qui se frotte les mains, des commerçants qui espèrent en tirer quelques menues monnaies et un peuple qui en redemande comme au spectacle. Si l’histoire est drôle au premier abord, le fond est assez noir…

M.P. Oui mais en même temps, ça met en lumière le personnage, parce que c’est une belle personne ce bourreau. Il résiste, ne se trahit pas et finit par faire son choix.

© Planchais - storyboard

© Planchais – storyboard

Amnesty International a apporté son soutien à l’album. Comment cela s’est-il concrétisé ?

M.P. Ça s’est fait un ou deux mois avant l’impression de l’album, grâce au super boulot de l’éditeur. C’est la première fois que cette organisation soutient un livre jeunesse. D’habitude, c’est plutôt des BD adultes.

Ça donne quoi concrètement ?

M.P. On rentre dans leur catalogue et puis c’est un label de qualité pour les professionnels comme pour les lecteurs. C’est une belle reconnaissance…

C’est ton premier album. Tu signes à la fois le dessin et le scénario. Pas trop difficile ?

M.P. Le dessin, le scénario… et la couleur qui est très importante ! Oui, c’était assez périlleux mais en même temps une belle aventure. Un an de travail, classiquement je dirais. Après, l’idée en elle-même, je l’avais depuis 3 ou 4 ans en tête. Ça a mûri petit à petit.

© Planchais - encrage

© Planchais – encrage

Tu as pu bénéficier de conseils ?

M.P. Oui, surtout pour le scénario (merci Emmanuel Gaudin!). Je le faisais lire et relire avec les textes qui sont aussi très importants. C’est pour moi plus important que le dessin. Avoir un bon scénario et un bon texte est la base. Après c’est de l’exécution… J’ai donc pas mal montré le scénario, assez peu les planches finalement.

Quelle technique as-tu employé pour l’album?

M.P. J’ai d’abord fait le storyboard au lavis, je l’ai scanné, regardé si ça collait bien avec les textes. Je suis ensuite passé à la conception des planches définitives, je les ai scannées elles-aussi. J’ai refait chaque planche au lavis pour donner de la matière, du relief, des nuances. J’ai scanné tout ça et fignolé sur Photoshop. Un gros travail que ces effets au lavis mais qui offrent plus de sensibilité aux planches et adoucissent le propos.

© Planchais - matière

© Planchais – matière

Quel a été ton premier coup de cœur BD ?

M.P. Hugo Pratt. Vers 11 ou 12 ans, j’ai acheté La Jeunesse. Je pensais que c’était le premier album à lire de la série. Je ne comprenais pas tout mais je ressentais une sensation très agréable. J’adorais les ambiances. Après, j’ai acheté De l’autre côté de corto (un livre d’entretiens avec Pratt, ndlr) pour bien connaître l’auteur et son oeuvre. Puis Les Celtiques, Les Helvétiques… Aujourd’hui, je possède toute sa production, pas forcément en édition originale d’ailleurs, c’est pas ce qui m’importe.

Et plus généralement, quelles sont tes influences ?

M.P. Rabaté, Christophe Blain, le talentueux Al Severin, Emmanuel Guibert, Denis Bodart, Christophe Gaultier, Tardi, Sergio Toppi, Dino Battaglia, tout le noir et blanc de cette époque-là et une BD qui m’a beaucoup marqué, L’homme de Java de Pierre-Yves Gabrion, un déclic, un vrai, il y a un côté Corto dans ses pages… Et Cyril Pedrosa qui est un collègue de bureau au DY10. Enfin, il y a la peinture avec Turner, le cinéma bien sûr…

© Planchais - planche définitive

© Planchais – planche définitive

Des projets ?

M.P. Oui, notamment l’adapation d’une oeuvre littéraire et des projets jeunesse.

Nous, on espère une suite au Bourreau

M.P. Il y aurait de quoi faire..

Merci Marty

Interview réalisée le 11 octobre 2016 à Nantes par Eric Guillaud – retrouvez la chronique de l’album ici

© Planchais

© Planchais

09 Oct

Le marathon de New York à la petite semelle : une BD de Sébastien Samson pour tous ceux qui aiment avaler les kilomètres

Capture d’écran 2016-10-08 à 14.39.55« Un récit qui ravira autant les inconditionnels de la course à pied que les coureurs du dimanche », prévient l’éditeur. Autant dire que pour moi, c’était mal barré. N’étant ni l’un ni l’autre, ce bouquin-là, pensais-je, allait m’ennuyer à mourir, autant qu’une compétition de ping pong retransmise à la radio. Mais non…

D’abord parce que ça ne parle pas du tout de ping pong, ensuite parce que le personnage principal qu’on voit suer sur la couverture de l’album est du genre normal pour moi, comprenez pas vraiment sportif, enfin parce que cette histoire est vraiment drôle et captivante.

Sébastien Samson, à la fois auteur et personnage central de cette bande dessinée raconte comment au détour d’un verre de vin avec des amis, il décide qu’il les accompagnerait au marathon de New York, non pas pour tenir les valises ou la buvette mais bel et bien pour participer, courir en somme.

Rires, sarcasmes… et puis l’évidence. Sébastien se lance dans un programme de remise en forme puis de préparation digne du bon marathonien.

Après des mois d’entraînement, direction New York, ses buildings, sa statue de la liberté, ses camions de pompier aux sirènes hurlantes… Mais le tourisme s’arrête là, place à la reconnaissance du parcours. Pas longtemps non plus. Pang, c’est le départ, Sébastien nous fait vivre le marathon de l’intérieur avec ses professionnels mais aussi ses amateurs et parfois ses coureurs excentriques, 42 kms de joies et de souffrances, 42 kms aussi de découverte, Sébastien nous offre une visite guidée de New York comme vous n’en n’avez jamais vue ailleurs en 5 heures et 44 minutes chrono.

De quoi me mettre au sport ? Pour vivre New York comme Sébastien l’a vécu, oui ! Demain, séance d’assouplissement, après-demain, footing. Terminé le vin, aux oubliettes le camembert et les cheesecakes, razzia sur les haricots verts. Enfin bon… je vais essayer !

Eric Guillaud

Le marathon de New York, de Sébastien Samson. Editions La Boîte à Bulles. 24€

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