29 Mai

House Of X : les X-MEN se réinventent encore une fois…

Si vous êtes fans de la maison MARVEL, vous savez que ces fins businessmen aiment régulièrement rebooter leurs séries, quitte à réécrire les personnages, leurs liens ou encore leurs origines et à bousculer les fans. Habituée à ce traitement de cheval, sa série phare les X-MEN s’offre ici un nouveau ravalement de façade assez radical et surtout très adulte.

En même temps, il était temps. De l’avis de nombreux fans, cela fait maintenant des années que la série végétait, enchaînant les scénaristes et les dessinateurs sans qu’aucun ne réussisse à retrouver une certaine flamme. Oui, il fallait foutre un gros coup dans la fourmilière et c’est ce qui se passe avec House Of X.

Alors le point de départ de cette nouvelle version est hautement politique, vu que les mutants se sont réunis sur la même île dans une espèce d’arche de Noé, d’où ils décident de proposer au reste de l’humanité des remèdes contre le cancer ou pour allonger leur espérance de vie… Mais à condition qu’ils soient reconnus comme un pays à part entière. Sauf que personne n’est vraiment qu’il prétend être. Et alors que les Quatre Fantastiques entrent aussi dans la danse, un projet secret baptisé Orchis et caché dans une station spatiale placée en orbite autour du soleil se réveille. Le tout afin de « sauver l’humanité de l’extinction » mais surtout de l’invasion mutante…

© Marvel / Panini Comics – Jonathan Hickman, Pepe Larraz et RB Silva

Bien sûr, cela plus d’un demi-siècle que Jack Kirby et Stan Lee ont lancé la série et qu’elle s’est depuis longtemps détachée de l’esprit un peu béni-oui-oui de ses débuts. Mais la volonté affichée ici est de proposer une série adulte, en prise avec son époque et notamment le pessimisme ambient. Réaliste, noir et quasiment mystique, House Of X joue pas mal avec nos nerfs. Déjà parce qu’elle fait valdinguer les repères des fidèles lecteurs en redistribuant les rôles. Ressuscité, rajeuni mais avec un visage presque tout le temps caché par un casque cybernétique, le professeur X par exemple est désormais aussi froid que calculateur, bien que toujours idéaliste. Tout comme son ancien protégé, et membre historique, Cyclope devenu cynique et radical et l’un de ses plus farouches adversaires.

© Marvel / Panini Comics – Jonathan Hickman, Pepe Larraz et RB Silva

Mais il y a aussi cette temporalité éclatée, l’histoire étant racontée en suivant pas moins de quatre époques différentes, dont une mille ans dans le futur avec un ton SF apocalyptique assez dur. Ou encore ces dialogues très denses ou cette dramaturgie assez emphatique, comme si le scénariste Jonathan Hickman s’était senti obligé de faire dans la surenchère pour être à la hauteur de l’évènement.

© Marvel / Panini Comics – Jonathan Hickman, Pepe Larraz et RB Silva

Bref, pour ce premier des quatre numéros prévus, il va falloir s’accrocher. Â la limite, on se demande même s’il ne faudrait pas mieux attendre que tout cela sorte en intégral pour que l’on puisse, enfin, avoir une vue d’ensemble et donc peut-être comprendre un peu mieux l’intrigue assez complexe. Mais il faut quand même avouer que c’est un vrai pari artistique, porté par un trait très actuel et les couleurs qui pètent de partout, est osé et a de la gueule. Reste à savoir s’il permettra aux X-MEN de retrouver leur place de leaders… Ou pas.

Olivier Badin

House Of X/Powers Of X #1 de Jonathan Hickman,Pepe Larraz et RB Silva, Marvel/Panini Comics, 8,90 euros  

L’instant d’après : une intrigue illusionniste signée Zidrou et Maltaite

Sorti le 13 mars dans toutes les bonnes librairies de France et d’ailleurs, cet album de Maltaite et Zidrou aurait pu connaître le même sort que ses personnages, disparaître l’instant d’après. Mais le confinement instauré quelques jours plus tard n’a finalement pas réduit à néant le travail de ses auteurs. Et il est encore largement temps de le découvrir…

Des personnages qui disparaissent. Comme ça. Sans explication. D’un coup ! Ils sont là et l’instant d’après ils ne sont plus là. Alors bien sûr, ça effraie, ça interroge et ça commence à faire désordre dans la France des années 60. Surtout que ces disparitions peuvent toucher n’importe qui, intervenir n’importe où, à n’importe quel moment, dans un ascenseur, une salle de classe, une cabine d’essayage, un avion…

Et même une voiture ! Aline, harpiste reconnue, était assise à côté de son mari. En pleine discussion. Tendue la discussion. La Facel Vega fonçait sur l’autoroute, quand la jeune femme s’est évaporée. De quoi troubler son mari qui en perd le contrôle du véhicule et finit les 4 pneus en l’air. Lui se retrouve à l’hôpital, elle nulle part. De quoi éveiller la suspicion des policiers, d’autant que la jeune femme venait de souscrire une assurance vie. De quoi aussi faire revenir la soeurette des États-Unis. Blandine,  petite blonde streap-teaseuse que tout le monde croit hôtesse de l’air dans sa famille, se retrouve au coeur de l’affaire, à essayer de trouver des pistes, démêler le vrai du faux…

Après deux mois de confinement, voilà une histoire qui devrait aérer nos esprits, emmenée par le prolifique scénariste Zidrou et le dessinateur Eric Maltaite, nom associé aux séries 421 et plus récemment Choc. Pour ceux qui aiment les énigmes non résolues ou presque…

Eric Guillaud

L’Instant d’après, de Zidrou et Maltaite. Dupuis. 14,50€

 

25 Mai

Un Travail comme un autre : sublime adaptation en BD du roman de Virginia Reeves par Alex W. Inker

Attention talent ! Alex W. Inker à qui l’on doit déjà trois albums aussi remarquées que remarquables aux éditions Sarbacane revient avec l’adaptation du premier roman de Virginia Reeves, Un Travail comme un autre, une histoire dans l’Amérique des années 20, à la fois belle et tragique…

Terminé le confinement ! Sans reprendre le cours d’une vie tout à fait normale, nous allons enfin pouvoir vaquer à quelques-unes de nos occupations habituelles, notamment retrouver nos librairies préférées et découvrir les nouveautés que nos amis auteurs et éditeurs nous ont concoctées pour ce printemps étrange.

Parmi celles-ci, Un Travail comme un autre, première véritable lecture post-confinement et premier coup de coeur. Il faut dire que l’album a tout pour séduire : une fabrication hyper-soignée, ce qui est souvent le cas chez Sarbacane, près de 180 pages en quadrichromie, un papier de très belle qualité, une couverture magnifique, une dessin savoureusement rétro et légèrement burlesque qui rappellera à certains la bande dessinée américaine du milieu du XXe siècle, et une histoire de caractère signée de l’Américaine Virginia Reeves et magnifiquement adaptée par le Français Alex W. Inker dont c’est ici le quatrième album de bande dessinée après Apache, Prix polar SNCF 2016, Panama Al Brown et Servir le Peuple, tous publiés aux éditions Sarbacane.

L’histoire justement. Un Travail comme un autre nous embarque dans l’Amérique des années 20. Ce n’est pas encore la Grande Dépression, laquelle débutera avec le krach boursier de 1929, mais déjà, à cette époque, de nombreux fermiers endettés pour assurer la modernisation de leurs exploitations ne parviennent plus à honorer leurs emprunts et sont jetés sur les routes du pays, errant à la recherche d’un nouveau boulot.

Roscoe T Martin aurait pu être un de ces paysans ruinés s’il n’avait pas eu l’idée, l’audace ou le courage, appelez ça comme vous voulez, de détourner une ligne électrique de l’Alabama Power. Non seulement, lui, l’ancien électricien devenu fermier contre son grès lorsque sa femme hérita de l’exploitation familiale, évite la faillite mais trouve le moyen de développer son activité agricole, au point de devenir un homme des plus respectable et respecté des environs.

Jusqu’au jour où un employé de la compagnie d’électricité en question s’électrocute sur l’installation illicite de Roscoe. Pour lui, c’est le début de la fin. Á défaut de connaître l’errance sur les routes comme nombre de ses pairs, Roscoe T Martin va connaître les affres de l’emprisonnement dans un pénitentier d’état. Vingt ans de prison, abandonné par sa femme, violenté par les geôliers, vingt ans… et toute un vie qui fout le camp.

Beau et tragique, sensible et violent, Un Travail comme un autre trouve illustration à sa juste mesure sous le pinceau d’Alex W. Inker. Plus de 180 pages à dévorer, une immersion totale dans l’Amérique des années 20 avec son cortège de douleurs et d’injustices, de brutalités et de lâchetés. Indispensable pour les amoureux de Steibeck, fortement conseillé pour les autres. Du super boulot !

Eric Guillaud

Un Travail comme un autre, d’Alex W. Inker. Sarbacane. 28€ (en librairie le 27 mai)

© Sarbacane / Inker

19 Mai

L’histoire d’une jeune juive déportée racontée en BD par la Nantaise Stéphanie Trouillard

Elle s’appelait Louise Pikovsky, avait 16 ans, pensait que l’avenir lui appartenait. Mais en janvier 1944, elle est déportée et gazée à Auschwitz. En 2010, une correspondance entretenue avec une de ses professeurs est retrouvée au fond d’un placard. Elle est à l’origine de cette bande dessinée…

© Sarah Leduc – France 24

« Si je reviens un jour…  » : ces mots sont les derniers écrits par Louise Pikovsky, une jeune Parisienne juive de 16 ans, qui sera, avec sa famille, arrêtée, déportée et gazée à Auschwitz au début de l’année 1944.

C’est aujourd’hui le titre d’une bande dessinée qui raconte son histoire. Ces mots, terribles, nous accompagnent tout au long de la lecture. Et si elle était revenue, si elle avait pu reprendre le cours de sa vie, continuer de correspondre avec cette professeur, Mme Malingrey, qui l’avait prise sous son épaule, et si elle avait pu retrouver son école où elle était reconnue comme une très bonne élève. Et si, et si, et si…

Malheureusement, Louise Pikovsky n’est jamais revenue. Ses lettres, soigneusement rangées dans un placard du lycée Jean de la Fontaine à Paris, ressurgissent en 2010 à la faveur d’un déménagement au sein de l’établissement. C’est là que Stéphanie Trouillard intervient.

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15 Mai

Olive, Les Soeurs Grémillet, Walter Appleduck, Frnck, Kidz, Ratafia delirium…10 BD jeunesse pour rattraper le temps perdu

Bon allez, ce n’est pas parce que c’est l’heure du déconfinement qu’il faut oublier les gestes barrières. On se lave donc bien les mains avant de lire cette chronique, une petite séance de rattrapage pour tou(te)s les ex-jeunes-confiné(e)s de France et d’ailleurs qui auraient besoin d’un peu de lecture…

On commence avec une nouvelle série publiée aux éditions Dupuis. Olive est son nom, c’est aussi le nom de son héroïne, une jeune fille de 17 ans profondément introvertie. À longueur de journée, Olive trouve refuge dans un monde parallèle qu’elle s’est construit, un monde plein de douceurs et de couleurs, jusqu’au jour où un spationaute blessé et malade y débarque sans prévenir. Un spationaute tout ce qu’il y a de plus réel dans son monde imaginaire ? Comment est-ce possible ? D’abord sidérée, Olive va devoir sortir de sa zone de confort pour le sauver. Une graphisme plein de charme, une histoire sensible, très bel album. (Olive tome 1, de Cazot et Mazel. Dupuis. 12,50€)

Il y a du Fantômas dans l’air, mais derrière ce visage masqué se cache un as du secret, plutôt qu’un maître du crime. Oui, le baron Mystère est comme son nom l’indique un très mystérieux personnage qui aime conserver ses secrets et les secrets des autres, consignés dans des registres. Récemment entré à son service, le majordome Boule de gomme découvre l’étrangeté du bonhomme et se retrouve à ses cotés lorsqu’il s’agit de mener une enquête après le vol d’une page d’un de ces fameux registres. Un récit mystérieusement drôle ou l’inverse, dans un décor gothique à souhait, accompagné de compléments en réalité augmentée !  (Une Aventure de Mystère et Boule de Gomme, de Le Gouëfflec et Malma. Delcourt. 16,50€)

Toujours aussi girly, Les Enigmes de Léa nous offrent depuis trois tomes maintenant des histoires très colorées et très mode, avec une jeune héroïne pétillante mais surtout perspicace. Il n’y en pas deux comme elle pour résoudre des énigmes. Et ça tombe plutôt bien, cet album en est truffé, une par page. Pas de souci pour Léa. Et pour vous ? Parviendrez-vous à les résoudre ? Pour les moins doués, les solutions sont notées en bas de page. (Les énigmes de Léa Tome 3, de Peignen et Nouveau. Bamboo Editions. 10,95€)

« Un monde sans art, c’est comme un tire-bouchon sans semoule ». Ne cherchez pas, vous ne pourrez pas trouver réplique plus débile. Elle est l’oeuvre de Billy que certains présentent comme « l’archétype du type rustre, macho, grossier et alcoolique aux idées dangereusement fascisantes ». Rien de moins ! Et ce grand crétin des alpages, adjoint au shérif dans un bled paumé du coté de l’Ouest sauvage, débarque un beau jour dans la grand ville du coin, invité par Walter Appleduck pour découvrir ce qui fait un monde civilisé. Alors bien sûr, ça dérape, ça déraille, ça flingue à tout va mais c’est bigrement drôle. Normal, ce western est signé côté scénario par Fabcaro, l’auteur de Zaï Zaï Zaï Zaï, et côté dessin par Fabrice Erre. (Walter Appleduck, tome 2., de Fabcaro et Erré. Dupuis. 12,50€)

On reste dans le western parodique avec le deuxième volet de Six-coups paru chez Dupuis début mars. Avec toujours le jeune Eliot en anti-héros parfait. Souvenez-vous, dans le premier volet, son père, shérif de son état, lui avait offert un flingue pour ses dix ans, oui un fabuleux Smoothie-Wesson. Sauf que notre gamin, les flingues, ç’est pas vraiment son truc, ça le dépasse un peu, ça lui fout même la trouille… Alors, se retrouver adjoint au shérif, vous imaginez. C’est pourtant ce qui lui arrive dans ce deuxième épisode, nommé d’office par son père. La blague ! (Six-coups, tome 2, de Thibault-Jouvray et Jouvray. Dupuis. 10,95€)

Changement de style avec le deuxième volet de Kidz du tandem Ducoudrey – Joret. Pas de shérif ici mais des gamins livrés à eux-mêmes dans un monde post-apocalyptique après qu’une épidémie, oui oui, ait transformé le population en zombies, des zombies qui finissent par mourir de faim après avoir dévoré la quasi totalité de l’humanité. Mais il en reste encore quelques exemplaires ici et là comme il reste quelques humains, notamment cette bande de gossesdont on suit ici les aventures, une bande de gosses qui chassent les derniers zombies entre deux jeux vidéo. (Kidz, tome 2, de Ducoudray et Joret. Glénat. 14,95€)

Et de six ! Six albums en un peu plus de trois ans. Celui-ci est sorti en janvier dernier. On y retrouve bien évidemment notre ado de 13 ans, Frnck, Franck si vous préférez, téléporté et bloqué à des milliers d’années de chez lui, du côté de la préhistoire. Bloqué ? Peut-être plus pour longtemps car notre geek a réussi à renvoyer son smartphone avec un message, et non le contraire, dans les années 70, 1970. Un objet venu du futur et du passé en même temps. De quoi faire perdre la boule à ceux qui le découvrent au détour d’une séance de spéléologie. En attendant d’être sauvé, Frnck a tout le loisir d’apprendre les voyelles aux hommes préhistoriques et de se familiariser avec les dinosaures. Drôle ! (Frnck tome 6, de Cossu et Bocquet, Dupuis, 10,95€)

Vous avez aimé la série Ratafia ? Alors, vous aimerez Ratafia Delirium, lancée par le même tandem, Pothier au scénario et Salsedo au dessin. Le même tandem pour un humour encore plus dévastateur qui nous embarque aux confins de l’univers. Finis les océans, nos héros devienent des pirates de l’espace. Et ça va faire mal ! (Ratafia Delirium tome 1, de Pothier et Salsedo. Vents d’Ouest. 11,50€)

Le premier épisode nous a permis de faire la connaissance de Lya Berton, jeune héroïne embauchée pour un stage dans un cabinet d’avocats. On comprenait au fil des pages que Lya, handicapée à la suite d’un accident de la circulation, n’était pas une stagiaire ordinaire et n’avait pas choisi son lieu de stage par hasard. Le cabinet a en effet défendu le chauffard qui l’a écrasée. Lya n’avait alors qu’un objectif : dénicher le dossier 2015/78 DV, le sien, enfin surtout celui de l’homme qui l’a laissée pour morte au bord de la route. Ses propres parents lui ont caché son nom. Elle était bien décidée à le faire payer. On la retrouve aujourd’hui avec le fameux dossier entre les mains. Que contient-il ? Réponse dans ce deuxième volet… (Dans les yeux de Lya, tome 2, de Carbone et Cunha. Dupuis. 12,50€)

Il devait sortir le 27 mars, il sortira finalement le 12 juin, Les Soeurs Grémillet est une nouvelle série des éditions Dupuis réunissant Di Gregorio au scénario, Barbucci au dessin, deux Italiens pour un récit en tout point merveilleux, une chronique familiale autour de quatre personnages féminins, trois soeurs aux caractères très différents mais unies paru un petit même grain de folie et une mère qui cache un lourd – trop lourd – secret… (Les Soeurs Grémillet, de Di Gregorio et Barbucci. Dupuis. 13,95€)

Eric Guillaud

09 Mai

The Spider King ou quand les vikings se castagnent avec les extra-terrestres

Des vikings, des couleurs ultra-flashy, une ambiance digne d’un jeu vidéo par moments et, bien sûr, des extra-terrestres armés jusqu’aux dents qui veulent écrabouiller tout le monde. Où est le problème ?

Sorti sous l’étiquette ‘Grindhouse stories’ dont le goût pour la culture bis et les films dits ‘de genre’ est désormais bien reconnu et avec en couverture cette accroche qui résume plutôt bien ce qui nous attend (‘quand les aliens déclenchent le Ragnarök !’), The Spider King réussit plutôt bien le grand écart tout en éclaboussant les murs. Mais sans non plus jamais tomber dans le grand n’importe quoi.

Le tout débute pourtant comme une simple histoire de vengeance entre guillemets entre deux clans vikings se disputant le pouvoir et même sans soucoupe volante ni gros laser à neutrons, le style graphique très coloré s’affirme déjà. Sauf qu’à la page 21 débarque E.T. et il n’est pas content. Du tout.

La lutte fratricide se transforme alors en lutte intergalactique. Et plus on découvre la nature de ce que le roi Hroldf doit affronter et plus le récit prend de l’ampleur à tous les niveaux. Surtout lorsque le héros et sa bande tombe sur un arsenal venu de l’autre bout de la galaxie…

© Glénat / Josh Vann, Simone D’Armini et Adrian Bloch

Avec ses couleurs qui claquent, ses rondeurs de partout, ses têtes réduites en bouillie, ses bras tranchés à tout va et ses monstres démesurés, ce n’est pas par hasard que The Serpent King donne l’impression d’être l’adaptation BD ultra-speedée d’un jeu vidéo sanglant, vu que le dessinateur Simone d’Armini a fait ses armes dans ce milieu.

Tout est excessif chez lui, du nombre de trépassés à la taille des flingues atomiques avec lesquels le héros dézingue à tout va, jusqu’a la mise en page qui, parfois, permet à une seule case de s’étaler sur toute une page. D’accord, la psychologie des personnages passe un peu à la trappe mais ce n’est clairement pas le propos ici.

Non, ça pétarade, ça va vite et ça éclabousse tout en se permettant quelques traits d’humour noir. Bref, cela assume aussi bien ses références (essentiellement cinématographiques) que son genre (le pulp mâtiné de science-fiction) et surtout, cela décrasse bien la pupille en cette période de confinement !

Olivier Badin

The Spider King de Josh Vann, Simone D’Armini et Adrian Bloch. Glénat. 19,95€ (disponible en numérique)

© Glénat / Josh Vann, Simone D’Armini et Adrian Bloch

05 Mai

Huit BD qui nous parlent de demain ou d’après-demain histoire de bien préparer le déconfinement…

Jamais on a eu aussi hâte d’être à demain, voire à après-demain, de connaître des jours meilleurs, de pouvoir enfin reprendre une vie normale sans penser à cette saleté de virus. Malheureusement, le futur n’est pas toujours à la hauteur de nos espérances. En voici quelques exemples, des bandes dessinées disponibles en édition numérique ou auprès de vos libraires qui rouvrent le 11 mai…

Hôpitaux saturés, personnel soignant débordé, rassemblements interdits, transports publics suspendus, écoles et universités fermées, crise économique mondiale, mobilisation de l’armée, surmortalité… La Chute de Jared Muralt est censé se dérouler dans un avenir proche mais ça ressemble brougrement à notre quotidien. Avec un petit plus qui permet de maintenir le récit dans la catégorie science-fiction, et pour longtemps j’espère, il n’y a ici plus de continuité du service public, les magasins sont réellement vides et on tire à balles réelles dans les rues, bref, c’est le chaos total. Et dans ce chaos, une petite famille, un père et ses deux enfants, tente de survivre. Un dessin réaliste de belle facture, un scénario hyper-efficace qui met en scène un monde confronté à « un virus dont la dangerosité n’est pas comprise dès le début ». Sorti le 6 mars dernier, prévu en six tomes. Saisissant ! (La Chute tome 1, de Jared Muralt. Futuropolis. 15€)

Toujours dans un futur proche, toujours dans un contexte d’épidémie et de chaos général, Les Dominants de Martial Toledano et Sylvain Runberg chez Glénat nous entraîne dans les pas d’Andrew Kennedy, un survivant à la Grande Souche, nom donné à cette épidémie qui a ravagé l’essentiel de l’humanité – plus d’un milliard de morts – et laissé champ libre à une étrange race extraterrestre pas forcément belliqueuse mais qui provoque nausées, hystéries, migraines… Face à ces intrus, l’humanité s’est divisée en trois catégories : ceux qui ont décidé de s’adapter, ceux qui veulent résister et ceux qui leurs vouent un culte. Andrew Kennedy n’appartient à aucune de ces catégories, son choix à lui est de sauver ceux qu’il aime, notamment sa fille qui a rejoint une bande de résistants violents. La seule bonne nouvelle dans tout ça, c’est l’annulation de la 46e élection présidentielle aux USA qui donnait largement vainqueur Donald Trump. Pas le choix, tous les candidats à l’investiture étant décédés… (Les Dominants tome 1, de Runberg et Toledano. Glénat. 14,95€)

Pas de virus dans Planeta Extra, pas de virus mais une planète Terre à l’agonie. Plus d’air pur, plus d’eau potable, la Tour Eiffel rasée, l’Arc de triomphe squatté… et les ultra-riches qui s’enfuient les uns après les autres vers Luna Europa, planète de luxe située à plusieurs années-lumière de la Terre. Alors biens sûr, ça râle du côté des travailleurs. Les syndicats réclament un libre passage vers ce nouvel éden mais l’accès est verrouillé. Même Kiké, qui officie comme déménageur pour ces fameux ultra-riches, ne dépasse pas la limite du cosmoport (port pour le cosmos). Et il s’en porte plutôt pas mal, jusqu’au jour où il apprend que sa propre fille projette de s’installer sur Luna Europa… De la SF à la sauce politique signée par une tandem argentin qui n’est pas à son coup d’essai. En bonus, un graphisme qui a du caractèrere ! (Planeta Extra, de Diego Agrimbau et Gabriel Ippoliti. Sarbacane. 18€)

Un mur pour protéger les puissants de ce monde, du moins ce qu’il en reste. C’est l’idée à la base de cette histoire parue en janvier dernier chez Glénat et signée par un Français au scénario, Antoine Charreyron, et un Italien au dessin, Mario Alberti. Un Français et un Italien, et c’est intéressant de le noter car Le Mur est né en automne 2011 à l’occasion d’un accrochage politique franco-italien au sujet des migrants, Nicolas Sarkozy proposant la création d’un mur pour protéger l’Europe. Choqué, Antoine Charreyron écrira très vite la première version de cette histoire, d’abord pour le cinéma, et finalement pour la bande dessinée. L’histoire justement ? Celle d’un mur donc, censé protéger les derniers puissants d’un monde en ruine et sec comme un caillou. Même la Méditerranée est un vague souvenir. Dans ce monde-là, les survivants tentent de survivre et bien évidemment de franchir le mur par tous les moyens pour rejoindre ED3N où toutes les ressources nécessaires à la survie de l’homme seraient réunies. Parmi les survivants, Solar et sa soeur, Eva, atteinte d’une grave maladie respiratoire. Sa survie dépend des médicaments. Pour en trouver, une seule solution : franchir ce satané mur. Un road movie à la Mad Max, plein de fureur et de poussière ! (Le Mur tome 1, de Alberti et Charreyron. Glénat. 15,50€)

Colonisation nous embarque dans un futur où l’homme a dû quitter la Terre surpeuplée pour coloniser d’autres planètes. Un exode de masse à bord d’une multitude de vaisseaux spatiaux dont certains se sont perdus dans l’immensité de l’espace et sont sujets à des pillages. Retrouver ces vaisseaux, c’est précisément la mission de Milla Aygon et de son équipe, une mission dangereuse qui les entraîne dans des recoins inhospitaliers de l’univers... Un scénario toujours aussi captivant avec ce quatrième volet, une mise en images sublime, tout en finesse et dynamisme, une très bonne série ! (Colonisation tome 4, de Filippi et Cucca. Glénat.13,90€)

Changement de style avec ce one shot signé Nuno Plati et David Boriau chez Glénat. Cette fois, notre bonne vieille planète n’est pas à l’agonie, elle pourrait même intéresser des aliens venus d’on ne sait où. Tout commence dans l’observatoire de la petite ville de Grizzlown au Canada lorsque le jeune handicapé Josh et son ami scientifique Jorgen Wood captent la réponse à un signal émis depuis 20 ans en direction d’un trou noir. De quoi mettre en émoi toute la petite communauté d’autant que le signal est de plus en plus intense et donc de plus en plus proche de la Terre. Il pourrait venir d’un engin spatial qui aurait parcouru 25 0000 années-lumière en quelques heures et risque maintenant d’entrer en collision avec la Terre. Pour les plus jeunes… (Metanoïde, de Plati et Boriau. Glénat. 16,90€)

Bolchoi Arena, de Boulet et Aseyn nous embarque assez habilement dans l’univers du monde virtuel. Les premières pages du premier volet paru en septembre 2018 sont à cet égard assez bluffantes, déstabilisantes, le lecteur ne sachant plus très bien sur quel niveau d’imaginaire il se trouve. Dans un futur proche, internet n’est plus. Mais pas de panique les geeks, le réseau mondial de réalité virtuelle, le Bolchoi, l’a remplacé offrant des possibilités beaucoup plus infinies. Vous rêviez d’explorer l’espace aux commandes de votre propre vaisseau spatial ? Le Bolchoi vous le permet et sans bouger de votre canapé. Marje, jeune étudiante en astrophysique va y goûter et ne jamais s’en remettre. Une histoire bien ficelée, un trait léger, des couleurs pastel et une belle présentation avec jaquette transparente en rodoïde. Le tome 2 est sorti en janvier de cette année. (Bolchoi Arena, de Boulet et Aseyn. Delcourt. 19,99€)

C’est l’un des best-sellers de la bande dessinée de science-fiction, 20 ans d’existence, 20 albums au compteur, des centaines de milliers d’exemplaires vendus dans plusieurs langues, des séries parallèles… et un vingtième album essentiel qui dévoile enfin les origines de Nävis, l’héroïne de la série, seule humaine à bord du Sillage, un gigantesque convoi multiracial explorant l’espace à la recherche de planètes à coloniser. Un graphisme sublime, des planches d’une beauté plastique exemplaire, une narration sans faille, une héroïne toujours aussi attachante… De la très très très bonne SF made in France. (Sillage tome 20, de Buchet et Morvan. Delcourt. 14,50€

Eric Guillaud

28 Avr

le confinement déconfiné par l’auteur de BD saumurois Fortu

Peut-on rire de tout ? À cette question aussi vieille que l’humanité, Fortu apporte une réponse toute personnelle. Chaque jour, il met en ligne un dessin croquant avec un humour pinçant cette période sombre pour nous tous. À défaut de vaccin, voici déjà un bon remède à la morosité…

En France, on n’a pas de masques mais on a de l’humour! En tout cas, Fortu, auteur de bande dessinée installé du côté de Saumur, en a pour tout le monde. Et il a décidé de nous en faire profiter tous les jours de ce confinement en croquant des scènes de la vie quotidienne – confinée s’entend – qu’il partage sur les réseaux sociaux.

La suite ici

21 Avr

Le jardin de Rose : un souffle de douceur dans un monde confiné signé Hervé Duphot

C’est un jardin extraordinaire, un jardin blotti entre les tours HLM d’une banlieue parisienne, un jardin où l’on fait pousser des légumes et des fleurs sur un terreau d’amitié et de solidarité. C’est Le jardin de Rose, un lieu imaginé par Hervé Duphot pour cette chronique sociale hyper sensible…

L’aventure humaine se joue parfois au coin de la rue, dans un de ces petits jardins familiaux par exemple, autrefois appelés jardins ouvriers, coincés entre deux barres de béton et une autoroute. Un petit lopin de terre où se côtoient fleurs et légumes, chats et jardiniers, un endroit où le temps semble s’être arrêté, où le bonheur est simple comme un pied de tomates qui pousse.

Entre un mari peu investi dans la vie du foyer et un chômage qui s’éternise, Françoise, la cinquantaine passée, y a trouvé de quoi redonner des couleurs et des parfums à son quotidien. Jardiner est devenu son espace de liberté, elle qui a fui très jeune la campagne pour la ville et n’avait jusqu’alors jamais planté une graine de sa vie.

C’est un concours de circonstance qui l’a amené là, un concours de circonstance qui a pour nom Rose, une vieille dame de la cité, de sa cité, pour qui elle fait quelques courses parfois. Rose s’est vue attribuer une de ces parcelles. Des années après sa demande. Immobilisée par une mauvaise chute, elle a chargé Françoise de s’en occuper provisoirement. De quoi attraper le virus du jardinage pour cette dernière !

Mais au-delà du jardinage, Françoise découvre un monde fait d’amitié et de solidarité rompant avec son quotidien de quasi-confinée dans son appartement. Entre eux, les jardiniers parlent de leur passion bien sûr mais aussi de la vie, de leur vie, du temps qui passe, de leurs amours, de leurs emmerdes…

Le jardin de Rose est un album plein de tendresse et d’humanité aux planches d’une belle douceur graphique, avec des couleurs directes réalisées à l’aquarelle. Chaudement recommandé !

Eric Guillaud

Le jardin de Rose, d’Hervé Duphot. Delcourt. 17,50€ (disponible en édition numérique)

© Delcourt / Duphot

19 Avr

Les Mangeurs d’hommes de Zamboula, une histoire de Conan le Cimmérien signée Gess

Retour aux sources de l’héroic fantasy avec cette bande dessinée adaptée de l’oeuvre de Robert E. Howard et signée Stephane Girard, alias Gess, dessinateur notamment des huit premiers volets de Carmen Mc Callum ou de La Brigade chimérique

S’il a eu une vie pour le moins courte, 30 ans, Robert E. Howard a eu le temps de marquer la littérature mondiale en mettant en place les bases de l’heroic fantasy à travers les aventures de Kull le Conquérant puis de Conan le Cimmérien, également connu sous le nom de Conan le Barbare.

Depuis 2018, les éditions Glénat proposent l’adaptation en bande dessinée de ces dernières, vingt et une histoires au total. Les Mangeurs d’hommes de Zamboula est le neuvième titre.

Après Jean-David Morvan, Luc Brunshwig, Olivier Vatine ou encore Sylvain Runberg, c’est au tour de Gess de s’y coller. Le dessinateur des premiers récits de Carmen Mc Callum, mais aussi de La Brigade chimérique, des Contes de la Pieuvre ou de L’oeil de la nuit, amateur devant l’éternel des univers fantastiques, signe ici une magnifique adaptation de l’une des nouvelles les plus caricaturales de la série, « calibrée pour plaire à son éditeur », nous explique Patrice Louinet en  postface, après que l’auteur se soit vu refuser une nouvelle par la revue Weird Tales et qu’une précédente, Au-delà de la rivière noire, parut « sans tambour ni trompette, et surtout sans les honneurs de la couverture ».

Et tout ça pour une raison simple : ces deux récits plus expérimentaux que les autres, très sombres, ne mettaient pas en scène de jeunes femmes nues.

Avec Les Mangeurs d’hommes de Zamboula, Robert E. Howard se rattrape donc, mettant en scène sur quasiment toute la longueur du récit une jeune femmes nue que Conan sauve dès ale départ d’une fâcheuse posture. Elle le suivra dans toute cette aventure qui nous emmènera dans la mythique cité marchande de Zamboula et notamment dans la demeure d’Aram Baksh où Conan compte bien faire étape malgré les rumeurs persistantes de disparitions mystérieuses concernant tous les étrangers y séjournant.

Une belle adaptation avec la touche graphique reconnaissable entre toutes de Gess !

Eric Guillaud

Les Mangeurs d’hommes de Zamboula, Conan le Cimmérien, de Gess. Glénat. 14,95€ (disponible en édition numérique)