29 Déc

Le privé d’Hollywood, de Berthet, Rivière et Bocquet. Editions Dupuis. 19 euros.

  

Les éditions Dupuis nous proposent une sympathique petite virée dans la plus célèbre capitale du cinéma au monde, Hollywood, avec une magnifique intégrale en noir et blanc reprenant les trois aventures du privé au flegme légendaire, le dénommé Hyppolyte Finn. Publiées dans le journal Spirou dès 1983, ces trois uniques histoires seront publiées en albums de 1985 à 1990 avec, dans l’ordre d’apparition, Le privé d’Hollywood, Amerika et Retour de flammes.  Trois petits tours et puis s’en vont ! Trois petits tours et puis reviennent. Car, il faut bien l’avouer, si les aventures du privé n’avaient peut-être pas rencontré leur public il y a vingt-cinq ans, un rapide petit coup d’oeil sur les planches suffit pour en percevoir aujourd’hui toute la finesse du graphisme et des ambiances, toute l’intelligence des scénarii qui mettent en scène un Los Angeles à deux faces : d’un côté, les villas de luxe, les stars, les sudios de cinéma, et d’un autre, la violence, les meurtres, les trahisons, les vengeances, les rivalités et autres sombres intrigues. Ce récit noir et élégant, complété par trois nouvelles et une préface signée Phillippe Vandooren, est un cadeau idéal pour tous les amoureux du polar américain ! E.G.

Houppeland, de Tronchet. Editions Dupuis. 17 euros.

  

Que serait Noël sans sa fameuse dinde aux marrons, sans ses petits présents échangés sous une pluie de remerciements, sans ses éclats de rire, parfois forcés, sans ses chansons, ses chapeaux pointus, ses cotillons et autres buches glacées  ? Rien ! En tout cas, ce ne serait pas Noël, et surtout pas ce Noël qu’on aime célèbrer à Houppeland. Et à Houppeland, justement, le Noël, on le célèbre tous les jours… Tous les jours, sans exception. Et ceux qui refusent de se plier à la tradition sont pris en charge par la brigade des Joyeux Drilles, une bande de gars qui ne plaisante franchement pas lorsqu’il s’agit de maintenir l’ordre festif…

Publié initialement en 1997, couronné par le Grand Prix de l’humour noir en 1998, Houppeland est un récit grinçant, très grinçant, qui, comme la plupart des oeuvres de Tronchet, caricature notre monde contemporain en appuyant là où ça fait mal. L’auteur des aventures intimes et délirantes de Raymond Calbuth et de Jean-Claude Tergal, des albums humoristiques La Bite à Urbain ou Sacré Jésus, signait ici son premier long récit avec un ton qui n’était plus ouvertement et uniquement comique. D’autres longs récits suivront, plus graves, plus poétiques, tels que Le Quartier évanoui ou là-bas. Cette nouvelle édition intégrale de Houppeland comprend en outre un cahier supplémentaire de 16 pages avec de nombreuses illustrations inédites et une interview de l’auteur. Parfait pour mettre au pied du sapin ! E.G.

Un Point rouge, de David A. Carter. Editions Gallimard jeunesse. 22 euros.

  

Ce n’est pas une nouveauté mais c’est toujours un événement ! Un Point rouge fait partie de ces livres passés dans le club très fermé et très prisé des grands classiques, ceux qui sont régulièrement réédités et rapidement épuisés. Ne cherchez donc pas le petit détail différent, il s’agit strictement du même album. Rien n’a changé parce que rien n’est à changer ! Un Point rouge, comme 2 Bleu et 600 Pastilles noires, les deux albums suivants de David A. Carter, est un pop-up absolument divin qui emmène le lecteur dans des sphères jamais atteintes dans ce domaine. Beau comme un tableau, Un Point rouge offre à chaque page une oeuvre d’art unique qui jaillit, se déploie et parfois crisse entre les mains des lecteurs. Il suffit alors d’admirer, d’observer et de retrouver le point rouge qui se cache dans chaque sculpture de papier. Car l’album, en plus d’être ethétique, est ludique. Un cadeau formidable pour les fêtes de fin d’année ! E.G.

 

Mon beau sapin… Une sélection de livres jeunesse documentaires.

  

S’amuser, c’est bien. Apprendre c’est pas mal non plus ! Voici donc en cette veille de Noël quelques idées de cadeaux plus pédagogiques que ludiques…

Attaquons par la collection des Mémos découvertes. C’est tout nouveau et tout beau… deux titres pour commencer, 200 animaux du monde et 200 dates de l’histoire du monde, deux titres qui se présentent comme des livres chevalets au format très pratique, qu’il s’agisse de les transporter ou de les poser sur son bureau. Pour chacun des animaux ou des dates retenus, les deux livres offrent une mine d’informations essentielles (taille, longévité, alimentation… pour les animaux, conséquences, détails des illustrations… pour les dates), des textes clairs et concrets et des illustrations finement sélectionnées. Deux outils encyclopédiques pour les plus de six ans !

Le rêve américain, l’émancipation des femmes, le génocide arménien, la montée du nazisme, le seconde guerre mondiale, la libération de la France, la révolution cubaine, la pop music, la conquête spatiale, la génération hippie, la guerre du Vietnam, le coup d’état au Chili, la catastrophe de Tchernobyl, la guerre du golfe ou encore l’attentat du World Trade center, le XXe siècle en images revient sur quarante événements qui ont bouleversé le monde et ce, à travers les clichés de grands photographes comme Robert Capa, Henri Cartier-Bresson, Raymond Depardon, Alberto korda… Véritable hommage à ces hommes qui ont bien souvent agi au péril de leur vie, ce livre décrypte, analyse et replace chaque image dans son contexte pour mieux comprendre sa portée universelle. Passionnant !

13,7 milliards d’années, c’est l’âge probable de l’univers. 12,5%, c’est le pourcentage d’enfants pauvres dans les pays riches, soit 1 enfant sur 8. 1 300 000, c’est le nombre d’animaux connus sur terre. 4, c’est le nombre d’enfants qui naissent chaque seconde dans le monde…. Avec sa forme très originale, ronde comme la Terre, Le monde en chiffres aborde 60 thèmes différents, depuis la religion jusqu’au sport, en passant par la culture ou l’environnement, en associant un chiffre clé, souvent étonnant, et une photographie insolite. Un livre pour s’informer et réfléchir sur le monde, notre monde, à partir de 9 ans !

    

   

   

   

  

  

   

    

   

   

  

Après L’encyclopédie des cancres, les éditions Gallimard jeunesse proposent une nouvelle galerie de portraits autour cette fois des rebelles, insoumis et autres révolutionnaires qui ont changé le monde ou tenté de la faire… Ils ont pour nom Akhenaton, Spartacus, Louise Michel, Sitting Bull, Arthur Rimbaud, Marie Curie, Gandhi, Trotski, Che Guevara, Martin Luther King ou encore Marcel Duchamp. 25 portraits au total, drôles et informatifs, pour découvrir ceux qui, penseurs, scientifiques, soldats ou simples êtres humains, ont osé un jour dire non ! C’est L’Encyclopédie des rebelles et c’est publié chez Gallimard jeunesse.

Un peu de sport pour finir avec cette encylclopédie, L’Encyclo sport, parue aux éditions Casterman et qui propose sur près de cent pages un panorama du sport aujourd’hui. John et Valentine Palfrey, pour les textes, et Christophe Besse, pours les illustrations, ont opté pour un traitement thématique composé de trois grandes parties : le sport dans l’histoire, les grandes compétitions, sport et société. Les textes brefs sont accompagnés de chiffres clés, d’anecdotes, de records, de dates, de portraits et d’une abondante iconographie combinant photographies et dessins humoristiques. Un livre d’approche à la fois ludique et documentaire pour tout savoir sur la Coupe Davis, le Tour de France, le Tournoi des 5 nations, les 24 heures du Mans, mais aussi découvrir les liens entre le sport et l’argent, le sport et les médias, le sport et la violence… E.G.

Dans le détail :

200 animaux du monde et 200 dates de l’histoire du monde. Editions Gallimard jeunesse. 14,95 euros le volume.

Le XXe siècle en images, deJean-Michel Billioud. Editions Gallimard jeunesse. 18 euros.

Le monde en chiffres, de Elisabeth Combres. Editions Gallimard jeunesse. 14,95 euros.

L’encyclopédie des rebelles, de Francis Mizio, Anne Blanchard et Serge Bloch. Editions Gallimard jeunesse. 19,95 euros.

L’encyclo sport, de John et Valentine Palfrey. Editions Casterman. 19,50 euros.

Quand le livre jeunesse s’écoute…

  

Chez Gallimard jeunesse, on connaît la musique… La preuve avec ces deux nouveaux titres publiés dans la collection Mes premières découvertes de la musique : L’Orchestre et Le Jazz. Le principe est simple, chaque livre propose aux lecteurs de suivre une histoire mise en musique, un peu comme au cinéma, et de découvrir un genre musical, son histoire, ses instruments, ses musiciens… Une belle petite collection qui offrait déjà un voyage au pays du rock, des percussions, de la musique des gitans, de la musique russe ou encore de la musique du Maghreb. Chaque ouvrage comporte un livre et un cd, à regarder et écouter à la fois !

Toujours chez Gallimard jeunesse, sont sortis il y a quelques semaines deux   »livres lus » : L’Odyssée, de Homère, et Le Ballon et autres histoires du Petit Nicolas, de Sempé et Goscinny. Pas de musique cette fois, si ce n’est d’accompagnement, mais un texte lu, pour le premier par Clothilde de Bayser et Michel Vuillermoz de la Comédie française, pour le second par Benoît Poelevoorde, qu’on ne présente plus. Cette collection, plusieurs fois couronnée par le prix de l’Académie Charles Cros, propose une lecture d’oeuvres reconnues par des comédiens talentueux et sur des mises en scènes sonores particulièrement travaillées.

  

Chez Didier jeunesse maintenant, deux livres-disques à découvrir de toute urgence. Comptines et berceuses de Bretagne, tout d’abord, offre un florilège de 28 berceuses, comptines, danses ou complaintes en breton et en gallo. Après une introduction sur les langues de Bretagne, le livre reproduit toutes les paroles des différentes comptines et leur traduction française. Un grand moment musical en compagnie des plus belles voix de la Bretagne d’aujourd’hui et un beau voyage à travers l’univers graphique d’Aurélia Grandin, un univers très riche combinant peinture et collages. Swing café, ensuite, raconte l’histoire de Zazou, une petite brésilienne, qui part pour New York où elle va découvrir les débuts du jazz et notamment le swing. Aux pinceaux, l’excellente Rebeca Dautremer, à la plume, le non moins excellent Carl Norac et à la voix, pour raconter, la chanteuse Jeanne Balibar : un trio de choc pour un livre de poids rythmé par 12 morceaux musicaux signés Duke Ellington, Ella Fitzgerald, Mills Brothers, Carmen Miranda…  Sur le disque, 42 minutes de contes musical et 20 minutes de jazz. Ca risque de swinguer dans les chaumières ! E.G.

Dans le détail :

L’Orchestre et Le Jazz. Edtions Gallimard jeunesse. 13,50 euros le volume.

L’Odyssée et Le Ballon et autres histoires du Petit Nicolas. Editions Gallimard jeunesse. Respectivement 25 et 15 euros.

Swing café et Comptines et berceuses de Bretagne. Editions Didier jeunesse. 23,50 euros le volume.

Pain d’alouette, de Lax. Editions Futuropolis. 16 euros.

Un matin d’avril 1919, quelque part dans le Nord-Pas-de-Calais. Le paysage présente encore les stigmates de la Grande guerre toute proche mais, déjà, la vie et la passion  tentent de reprendre le dessus sur la mort et la haine. A peine sortis des tranchées, quelques vaillants gamins ont en effet enfourché leurs vélos pour participer à l’une des courses cyclistes les plus mythiques du pays : le Paris-Roubaix ou l’Enfer du nord comme on la surnomme si justement. Quentin Ternois ne pouvait louper ça, lui, l’ancien du milieu. Même si aujourd’hui, il tente de survivre avec ce qui lui reste de poumon. Gazé, comme tant d’autres ! Il va se contenter de regarder les gars passer et de rêver au bon vieux temps avec son neuveu, un passionné de vélo lui aussi, malheureusement condamné à travailler dans les mines. Comme papa ! Pendant ce temps là, dans un orphelinat du Sud-ouest de la France, une fillette subit la violence du directeur. Elle s’appelle Reine Fario. C’est la fille d’Amédée Fario, un autre coureur cycliste tué sur le front… En apprenant son existence, un ami de ce dernier, Camille Peyroulet, va tout tenter pour la récupérer, l’adopter…

Lax est de retour ! Et le plaisir est toujours là. Immense. Entre deux aventures du Choucas (éd. Dupuis), il livre ici une suite à L’Aigle sans orteils (éd. Dupuis), un récit publié en 2005 et couvert de récompenses. « On y retrouve certains protagonistes, tout particulièrement Camille Peyroulet, le meilleur ami d’Amédée Fario… », précise l’auteur, « Le récit commence en avril 1919, au moment où fut organisé dans une région picarde dévastée par le conflit, le premier Paris-Roubaix d’après-guerre. La France avait alors un besoin pressant de retrouver une dignité, et cette course célèbre, véritable monument du patrimoine national , en resurgissant des ruines, était une formidable occasion de redresser la tête ». Pain d’alouette est un véritable hommage au monde du cyclisme mais aussi au monde ouvrier. « Si le contexte de mes livres est celui de la classe ouvrière, quelles que soient les époques, c’est que je viens de là. C’est le milieu social dans lequel j’ai grandi, qui a influencé mon éducation ». Et le lien entre le monde ouvrier et le cyclisme est évident pour l’auteur. « Le vélo fut et est encore un grand sport populaire, parce qu’il porte des valeurs que la classe laborieuse, le monde du travail, le prolétariat, les gens de peu (pour reprendre les mots du philosophe Pierre Sansot) connaissent, repsectent et cultivent […] Pour moi le parallèle est évident, et une course aussi inhumaine que Paris-Roubaix ne pouvait s’imposer que sur ce terreau de l’effort et de la souffrance, participant à façonner une aristocratie du monde ouvrier et du milieu sportif ». Pour ce magnifique récit, Lax à souhaité un graphisme rugueux qui colle à l’atmosphère d’après-guerre et à cet « Enfer du nord » qui peut tout autant décrire le Paris-Roubaix que le quotidien des mineurs. Lax a d’ailleurs, pour l’occasion, adapté son dessin. « En posant mes couleurs (encres et aquarelle) sur un trait volontairement tracé avec une encre soluble et elle-même colorée en fonction de la tonalité dominante, j’obtiens des mélanges plus ou moins hasardeux et plus ou moins sales, que je surcharge souvent avec du graphite, des pastels ou des épaisseurs de gouache. J’ai de la matière, surtout pour les scènes d’extérieur, et du coup rien n’apparaît propre et tranquille ». Et le résultat est tout simplement sublime ! E.G.

Bâtarde, Rani (tome 1), de Van Hamme, Alcante et Vallès. Editions Le Lombard. 13,50 euros.

   

Juin 1743, quelque part dans le Massif Central, loin des batailles qui ensanglantent l’Europe pour la succession d’Autriche. Philippe de Valcourt vient d’apprendre que son père, le marquis Charles de Valcourt, souhaitait léguer son château et ses dépendances à sa demi-soeur Jolanne, cette « petite bâtarde » comme il l’appelle, fille d’une « vulgaire gouvernante« . Mais ses gérémiades, ses insultes, n’y changeront rien. Le marquis a pris sa décision et le testament est déjà chez le notaire. Seule et unique solution pour Philippe de Valcourt : tuer son père, corrompre le notaire et tromper sa demi-soeur. Si la première étape est rudement et froidement menée, pour le reste, ce noble sans morale ni scrupules va devoir mettre les bouchées doubles question manigances …

Scénariste éclectique et prolifique, considéré comme l’un des plus grands maîtres du Neuvième art, auteur notamment des séries cultes que sont Thorgal, XIII, Largo Winch ou encore Les Maîtres de l’Orge, Jean Van Hamme a créé Rani pour la télévision avant de demander à un autre scénariste, le Belge Didier Alcante, d’en faire l’adaptation en BD. Le premier album est paru avant même la diffusion du premier épisode (prévue pour fin 2010, début 2011) et pose les fondations d’une aventure avec un grand A, exotique avec un grand E. Car après les intrigues liées à la mort et à l’héritage de Charles de Valcourt,  Jolanne va nous entraîner jusqu’aux Indes, à l’époque où les Français ont failli les conquérir. Et là-bas, Jolanne va devenir Rani. C’est la première fois en trente ans de carrière que Jean Van Hamme imagine pour héros une héroïne. « Lorsque j’ai débuté… », explique-t-il, « la femme n’existait pas du tout dans la bande dessinée, si ce n’est dans de rôles décoratifs et anecdotiques […] J’ai toujours eu un faible pour les femmes libérées ! ». Et Jolanne est une femme aussi libre et insoumise que belle et aventurière. Côté graphisme, c’est Francis Vallès qui s’en charge, un dessinateur qui a déjà travaillé avec Jean Van Hamme (Les Maîtres de l’Orge) et qui offre ici des planches d’un réalisme élégant, de plus en plus proche de la ligne claire. Le début d’une gande saga à la Van Hamme ! E.G.

L’info en +

Jusqu’au 9 janvier 2010, la médiathèque Jean Falala de Reims présente la première rétrospective dédiée à Jean Van Hamme avec près de 200 originaux exposés, planches, croquis, manuscrits, story-boards, films…

Pour toutes informations : jfalala@bm-reims.fr

Grandeur et humiliation, Ida (tome 1), de Chloé Cruchaudet. Editions Delcourt. 13,95 euros.

couv_idaCanton de Bâle, Suisse, 1887. Il n’y a que dans son lit et sous son énorme édredon à carreaux rouges et blancs que Mademoiselle Ida Von Erkentrud se sent bien. Et encore. Il lui faut sa dose régulière d’opium pour la soulager. Mais pour la soulager de quoi au juste ? Personne, pas même son médecin, ne le sait. Ida est surtout hypocondriaque. Ca, c’est une certitude ! Aussi lui recommande-t-on un séjour au bord de la mer. Elle qui n’a voyagé qu’une seule fois dans sa vie, à l’occasion de l’Exposition universelle de Paris, se retrouve subitement par monts et par  vaux, direction le sud de la France. Partie dans son élan, elle s’offre même une petite escapade à Valence avant de finalement embarquer pour Tanger. Et miracle, Ida n’a plus aucun des symptômes du mal qui la tétanisait dans sa Suisse natale. Elle redécouvre même son corps et prend goût aux voyages. Avec une amie, rencontrée en chemin, qui devient sa secrétaire, elle va silloner l’Afrique et vivre de belles aventures…

Remarquée par le public et les professionnels avec son album Groenland Manhattan (Prix Goscinny 2008, éd Decourt), histoire vraie d’un jeune esquimau ramené à New York par l’explorateur Robert Peary, la sémillante Chloé Cruchaudet revient avec une pure fiction cette fois même si le contexte est lui bien réel. « J’ai essayé de coller le plus possible à la vérité du contexte historique… », précise-t-elle, « je me suis beaucoup documentée sur l’Afrique de la fin du XIXè siècle, également sur l’Exposition universelle de Paris de 1867 qui a une grande importance dans le récit. Je voulais être libre de faire évoluer les héroïnes à ma guise pour raconter ce que je voulais ». Et ce que souhaite raconter Chloé ici, à travers Ida, c’est la vie d’une vieille fille hypocondriaque qui se retrouve sur les routes un peu marlgré elle et qui prend goût au voyage, à la découverte, à l’inconnu, à l’exotisme… « On a appelé le XIXe siècle le siècle ambulatoire ; le tourisme commençait à être à la mode, et certains faisaient preuve d’une audace folle en voyageant dans des zones inexplorées. On trouve dans ces voyageurs une poignée de femmes dont les vies m’ont passionnée… ». Loin des récits d’aventures habituels, Grandeur et humiliation, premier volet de Ida, est un récit rafraîchissant, plein de poésie et de drôlerie,  et emmené par un graphisme des plus élégants et par des ambiances doucâtres absolument divines. Bravo ! E.G.

Au pied du sapin… Quelques bandes dessinées pour toute la famille…

  

La torture des cadeaux de denrière minute… Tout le monde connait ! Compatissants que nous sommes, voici donc une petite sélection d’albums pour toute la famille, à glisser discrètement sous le sapin…

   Bon, pour commencer, la troisième saison de Paddock Les Coulisses de la F1 s’adresse, il est vrai, prioritairement à un lectorat… comment dire… plutôt passionné de F1 et donc masculin. Mais les gags en une page du scénariste Pat Perna et du dessinateur Juan restent malgré tout largement « grand public » et assez fins même si on y voit beaucoup de tôles froissées et de filles défroissées. Retour sur le paddock donc avec l’écurie Broken Arms et ses nouvelles couleurs, rose comme le papier hygiénique Cali-Net du nouveau sponsor. Fort heureusement, le champion Michaël Choumaker a rejoint l’écurie et risque bien de faire passer les bolides au rouge vif… Drôle et léger ! 

Si vous êtes plutôt du genre  »histoire de princesse et de pays merveilleux », alors, un conseil, oubliez ce livre ! D’ailleurs, l’héroïne nous prévient d’entrée dans une préface à multiples facettes. Façon intellectuel, ça donne : « On pourrait dire qu’il s’agit d’un opus introspectif. C’est le cas, n’est-ce pas, mais même si l’introspection reste le centre de mes préoccupations, j’ai toutefois ciblé mes recherches sur les objets affectifs de mon entourage.. qui ne sont pas moi (n’est-ce pas), mais qui, paradoxalement, me définissent ». Pour faire simple, l’auteure Hélène Bruller a décidé de ne plus parler d’elle comme dans Hélène Bruller est une vraie salope ou Je veux le prince charmant, mais de ses amis. Façon pédante, ça donne: « J’ai beaucoup parlé de moi dans mes précédents albums… Il est temps que je parle des autres… de mes amis… mes amis à moi… ». Et la voilà donc partie à brosser le portrait de son entourage, à sa façon, au vitriol. Et tout le monde en prend pour son grade : les voisins, les collègues de bureau, la famille… et nous tous ! Ca dynamite, ça disperse, ça ventile, ça éparpille façon puzzle…

Au scénario : un Lillois. Au dessin : un Rouennais. Résultat : Eclipse, un triptyque de science fiction qui vient de s’achever avec la sortie en octobre dernier du troisième volet intitulé Schwarz. Avec un style graphique beaucoup plus réaliste, sobre et élaboré que celui employé dans Mâchefer (éd. Vents D’Ouest), Sébastien Vastra offre une belle et dynamique mise en images du scénario d’Ozanam. L’histoire se déroule au XXIVe siècle et raconte les aventures et mésaventures intergallactiques de la jeune Mika lancée à la recherche de son père étrangement disparu. Les amateurs de science fiction tendance Verhoeven (Total Recall, Robocop, Hollow man…) se régaleront ! 

Dans le détail :

Paddock, Les Coulisses de la F1, de Pat Perna et Juan. Editions Vents d’ouest. 9,40 euros.

Love, de Hélène Bruller. Editions Drugstore. 13,90 euros.

Schwarz, Eclipse (tome 3), de Ozanam et Vastra. Editions Vents d’ouest. 13 euros.

Souvenirs de l’éternel présent, Les Cités obscures, de François Schuiten et Benoît Peeters. Editions Casterman. 18 euros.

  

Bienvenue à Taxandria. Ici vit Aimé, un enfant. Le dernier ! Il a une dizaine d’années, le crâne rasé et le monde qui l’entourre n’est plus qu’un amas de pierres et de ferrailles. Plus un oiseau, plus une fleur, pas d’eau, pas de vent, uniquement des ruines et des carcasses de machines inventées autrefois par les hommes. Quelques survivants aussi, contraints de subir l’éternité. Car Taxandria est  aujourd’hui, demain aussi, le pays de l’éternel présent. Le temps s’y est figé. Et Aimé a donc tout le loisir de se poser des questions sur ce monde pour le moins étrange. Et il s’en pose beaucoup ! Jusqu’au jour où il trouve enfin des débuts de réponses dans un grand  livre rouge qui conte l’histoire du grand cataclysme. Un livre absolument interdit ! Et ce que le jeune Aimé y découvre est stupéfiant. Au commencement de tous ces malheurs : les hommes de Taxandria bien sûr qui ont agi par orgueil et vanité. Ils ont voulu partout un monde à l’image de Taxandria. Il fallait dupliquer, dupliquer les mondes, dupliquer les hommes et pourquoi pas dupliquer le soleil. C’est justement ce qu’ils ont fait, déclenchant un processus irrémédiable : fonte des neiges, incendies, raz de marée, tremblement de terre… et l’éternité pour pleurer !

S’il s’inscrit parfaitement dans la série des Cités obscures, ce récit n’était pas destiné à l’origine à devenir un livre mais un film du cinéaste belge Raoul Servais, intitulé Taxandria. C’est ce que nous confient les auteurs, François Schuiten et Benoît Peeters, en fin d’album. Une bien longue histoire qui commença au début des années 70 avec les premiers éléments conçus par Raoul Servais lui-même. S’en suivit une multitude de péripéties, d’aventures et de mésaventures et, à l’arrivée, un film présenté en 1994 au festival de Gand que tout le monde a aujourd’hui oublié. Dès 1987, François Schuiten fut contacté pour concevoir graphiquement le monde de Taxandria. Il réalisa pour celà d’innombrables dessins qui ne trouvèrent jamais leur place dans le film.  « Depuis lors… », explique Benoît Peeters, « ce matériau était en attente. Nous ne savions trop comment l’aborder. Sans doute fallait-il d’abord que nous fassions le deuil de Taxandria pour regarder ces images avec un oeil neuf. Bien plus que du film achevé, c’est des premières versions du scénario, élaborées par le seul Raoul Servais, que s’est nourri Souvenirs de l’éternel présent… ». Dans la lignée graphique des albums précédents, Souvenirs de l’éternel présent permet aux auteurs d’aborder des thèmes qui leur sont chers comme l’ordre établi, la décadences de la société industrielle, l’environnement… Un très beau récit fantastique et un univers vraiment personnel ! E.G.