L’épée Excalibur, la convoitise de Luther Pendragon, Merlin l’enchanteur, tout ça… Vous croyiez tout savoir de la légende des chevaliers de la Table Ronde ? En voici une réinvention maline pleine de sang et de fureur.
La série Game Of Thrones est passée par là et cela se sent… Bien conscient qu’il tacle là un sujet déjà mille fois couvert en littérature, cinéma ou BD, ce premier tome (sur quatre prévus) s’attaque à un monument. Mais il a aussi décidé de marquer sa différence de deux façons : d’abord en resituant l’histoire au Vème siècle après notre ère plutôt qu’au Moyen-Âge. Et ensuite en recentrant le propos sur l’aspect politique et les manigances des uns et des autres. La saga devient donc ici bien plus qu’un conte initiatique : c’est désormais avant tout une quête de pouvoir où la religion, la guerre et surtout les hommes ne sont que pour servir les intérêts d’une poignée d’intrigants.
Forcément, les lettres de noblesse acquises tout récemment par le Jérôme Le Gris avec la série Lord Gravestone et surtout l’adaptation de la saga d’heroic fantasy de Michael Moorcock Hawkmoon aident beaucoup. Le scénariste aime avancer ses pions patiemment et jouer avec des personnages ne dévoilant pas leur jeu tout de suite et cela se sent. Tout comme les dessins, signés ici conjointement par Benoît Dellac et Paolo Martinello et clairement nourris à l’imagerie heroic fantasy moderne, c’est-à-dire pas aussi policée et bien sanglante que sa version de base.
Alors même si des noms comme Arthur ou Merlin ont beau nous être familiers, cette relecture quasi-complète de la montée au pouvoir du premier et du côté manipulateur de son mentor permet de complètement redécouvrir les légendes de la Table Ronde, devenues ici bien plus sauvages et cruelles. En mettant de côté le côté chevaleresque au profit de décors désolés, de héros pas si blancs que ça et de créatures magiques semblant sortir tout droit du Seigneur Des Anneaux, le ton est ici nettement plus tragique et violent. Reste juste à savoir si ces auteurs réussiront à tenir la tension sous-adjacente sur la durée, surtout que l’accent est ici mis sur les dialogues et les magouilles plus que sur l’action pure. Mais ça fait envie !
Olivier Badin
Pendragon – volume 1 : l’épée perdue de Jérôme Le Gris, Benoît Dellac et Paolo Martinello. Glénat