Comme DC COMICS avec sa dernière série en date BATMAN ARKHAM, on sent bien que cela turbine sévère du côté des cellules grises de la maison MARVEL pour faire vivre leurs archives à coups de collections au concept plus ou moins légitimes. Là, pour Les Trésors de Marvel, l’idée est de réunir tous les deux mois dans un petit volume de 160 pages vendu à prix très abordable des histoires disparates dont le point commun est leur année de parution.
Sauf que le tout tient presque de la gageure, tant l’univers MARVEL est varié. Au point qu’il est difficile – voire impossible – dans certains cas de choisir une poignée d’épisodes capables de le représenter de façon juste à un instant t. Après, le choix de ce premier tome est intéressant car l’année 1982 est justement une année charnière, celle où la Maison des Idées telle qu’on l’a toujours surnommée était clairement en déclin, plus si courtisée qu’avant car emprisonnée dans des schémas scénaristiques un peu vieillot qui n’avaient pas vraiment changé depuis le milieu des années 60.
Justement, tout l’intérêt du présent volume est de faire la liaison entre l’ancien et le nouveau. Soit sept histoires tirées soit de séries qui étaient alors toujours coincées dans une certaine rengaine du ‘super-méchant-arrive-détruit-tout-New-York-super-héros-arrive-et-arrête-super-méchant-après-une-bataille-épique’, soit animées d’une envie d’entrer dans l’âge adulte tout en foutant un sacré coup de pied dans la fourmilière. Et ici, le leader révolutionnaire qui allait mettre le feu a un nom : Frank Miller.
© Marvel/Panini Comics
Oui, certains l’ont peut-être oublié mais le futur créateur de Sin City et de Batman : Dark Night a fait ses armes chez MARVEL. Lorsqu’il reprend Daredevil en 1979, c’est alors quasiment un inconnu à qui on confit un titre en perte de vitesse. Il en fera la matrice de toute son œuvre à venir, ultra-réaliste et violente, presque plus sur le plan psychologique que graphique, tout en développant son sens du cadrage, urbain et moderne à la fois. L’épisode choisi ici (Dernière Carte) est l’une des clefs de voûte de son œuvre : devenu aussi scénariste, en plus de tuer l’un de ses personnages, il se permet de tout centrer ici sur le tueur-à-gages psychotique Bullseye, reléguant le super-héros aveugle au second plan. Le résultat est d’une noirceur absolue et reste, encore aujourd’hui, un chef d’œuvre qui tranche nettement avec les autres productions de l’époque, comme le prouvent malgré eux les deux épisodes de Spider-Man choisis pour œuvre ce volume, terriblement prévisibles en comparaison.
© Marvel/Panini Comics
Même s’il est un chouia moins radical dans ses choix artistiques (c’est Chris Claremont, le taulier des X-Men alors, qui se charge du scénario ici), ce n’est pas pour rien non plus qu’on retrouve Miller aussi à la manœuvre derrière le premier épisode de Wolverine, également inclus ici. Et attendez, ce n’est pas fini avec aussi au générique Alex Ross pour la couverture et, entre autres, le canadien John Byrne, alors sur le point d’entamer un run historique à la tête des Quatre Fantastiques. Ça c’est du casting !
Après, difficile de savoir quel type de lecteur est ciblé ici. Le fan pur et dur possède sûrement déjà la majorité de son contenu alors que le novice, lui, hésitera peut-être à se plonger ainsi dans des histoires isolées de leurs séries respectives. Mais bon, à ce prix-là et rien que pour Dernière Carte si vous ne l’avez jamais lu, c’est plus que tentant…
Olivier Badin
Les Trésors de Marvel – Volume 1 : 1982, collectif. Marvel/Panini Comics. 7 €