Confinés mais pas résignés, nous allons continuer à parler BD ici-même avec des bouquins d’ores et déjà disponibles au format numérique et à retrouver en format physique dès que cet épisode de coronavirus au très mauvais scénario nous aura définitivement quitté…
Si vous cherchez du léger, histoire de vous évader un peu du quotidien pesant que nous connaissons tous actuellement, ce n’est peut être pas l’album idéal, je le conçois, mais il pourrait tout de même vous permettre de relativiser un tant soit peu notre situation de confinés.
Les Oiseaux ne se retournent pas est un récit fort, poétique et poignant. Sur plus de 200 pages, l’auteure Nadia Nakhlé raconte le parcours d’une enfant sur la route de l’exil. Amel, qui signifie espoir en arabe, a 12 ans. Elle est orpheline, jusque-là élevée par ses grands parents. Mais la guerre n’en finit pas de ravager son pays. Pour la protéger, lui offrir un avenir, ses grands parents décident de la confier à la famille Hudhad qui cherche à rejoindre la France.
Avec ses souvenirs pour seul bagage, Amel entame un long et périlleux périple en suivant les conseils de sa grand-mère : avancer quoi qu’il arrive, ne pas montrer ses peurs, éviter les passeurs et les militaires, ne donner sa confiance à personne, ne pas parler de sa maison, ni de religion, ne jamais révéler son identité.
Et surtout ne jamais se retourner. Comme les oiseaux ! Dans ce périple, Amel perd de vue la famille Hudhad mais rencontre Bacem, un militaire déserteur et joueur de oud. Ensemble, ils vont partager leurs rêves d’une vie meilleure et se soutenir.
Que se passe-t-il dans la tête d’un enfant qui fuit la guerre ? Le périple est aussi intérieur. Avec un trait sombre, des planches à l’esthétisme très travaillé, Nadia Nakhlé nous glisse dans la peau de cette gamine nous rappelant au passage qu’un quart des personnes exilées en Europe sont des mineurs isolés.
« Ce projet est né d’une révolte et d’un désir, celui de porter l’espoir des enfants de l’exil, de dénoncer la situation actuelle tout en donnant son entière place à la poésie. »
Publié dans la collection Mirages des éditions Delcourt, ce bijou esthétique et poétique s’inscrit dans un projet transversal. Les Oiseaux ne se retournent pas est aussi un spectacle, entre roman graphique et concert performé, associant projections animées, musique et création sonore immersive, un spectacle créé et présenté en janvier dernier à Nantes.
Eric Guillaud
Les Oiseaux ne se retournent pas, de Nadia Nakhlé. Delcourt. 25,50€ (disponible en édition numérique)