09 Avr

Les heures passées à contempler la mère : un récit introspectif signé Sébastien Vassant et Gilles Larher

Après L’accablante apathie des dimanches à rosbif et La Voix des hommes qui se mirent, le tandem Larher – Vassant signe Les Heures passées à contempler la mère, un très beau portrait de femme contemporaine…

« J’étais célèbre. Mieux encore… j’étais lue ». De retour d’une tournée de dédicaces à l’étranger pour son deuxième roman, Cassandra Page a l’ego « turgescent » comme elle le pense très fort. Pourtant, elle le sait, il y a moins de lettres dans « lue » que dans « désirée » ou « aimée ». Pour une femme, qui plus-est pour une femme de lettres, la nuance n’est pas mince. De quoi redescendre en douceur, se motiver pour écrire un troisième livre et pourquoi pas faire un enfant, le tout avec son amoureux Lazare Desmeaux, héritier de la maison d’édition qui publie ses livres.

Oui mais voilà. Cassandra va devoir redescendre de son nuage plus vite qu’elle ne le pensait. À peine de retour à Paris, Lazare lui annonce qu’il la quitte. Par courrier bien sûr. Une lettre tapée à l’ordinateur. Froide. Sans âme.

« Reprendre tant bien que mal sa trajectoire, jouer des courants et des flots avec tous les éléments rassurants de son univers brisés ou inutilisables… en ayant à jamais perdu la majeure partie de ses repères ».

La chute est brutale, vertigineuse, abyssale. Entre Paris et son village natal dans les Côtes d’Armor, Cassandra tente de se relever, difficilement, en mangeant du chocolat, beaucoup, en contemplant la mer, qu’on ne voit pas forcément danser, et en pleurant. « Pleurer sous la douche est une activité logique. Ontologique ? Les larmes se mêlent aux gouttes… Nul Dieu ne saurait y retrouver ses petits. C’est pratique et prophylactique ».

Finalement, Cassandra espère échapper à la spirale de la déprime en reprenant la plume et en se plongeant dans l’écriture d’un roman sur sa mère…

Intimiste et féministe, introspectif et contemplatif, ce très beau portrait de femme est signé par deux hommes, Sébastien Vassant et Gilles Larher, qui nous ont déjà démontré ensemble une belle exigence d’écriture et de graphisme dans deux albums, L’accablante apathie des dimanches à rosbif sorti en 2008, histoire d’un artiste comique malade en phase terminale, et La Voix des hommes qui se mirent en 2009, histoires – au pluriel cette fois – d’hommes qui se confient sur eux-mêmes et sur les femmes de leur vie.

Eric Guillaud

Les heures passées à contempler la mère, de Gilles Larher et Sébastien Vassant. Futuropolis. 27€.