Que ce soit de ce côté-ci de l’Atlantique ou de l’autre, l’histoire des Apaches a principalement été écrite et transmise par l’homme blanc, à travers le cinéma mais aussi la littérature. C’est encore la cas ici avec Indeh, Ethan Hawke et Greg Ruth ne sont pas Apaches, mais le point de vue qu’ils ont choisi pour raconter cette histoire est justement celui de ces tribus amérindiennes. Et ça change tout…
« Pendant des décennies, la culture populaire américaine a prétendu parler en notre nom par le truchement de films, de livres et d’émissions télévisées », explique en préface l’artiste amérindien Douglas Miles, « Presque toujours, ces histoires nous resservent les mêmes clichés et suscitent un sentiment mêlé de tragédie, de pitié, de sauvagerie, non dépourvu d’arrières pensées commerciales ».
Aux innombrables films hollywoodiens qui ont contribué au mythe de l’Amérique conquérante et à la simplification de l’image de l’Indien par le recours massif aux clichés les plus basiques, où les gentils colons se voyaient attaqués par des hordes sauvages, Indeh répond en se mettant dans la peau et dans le regard des Apaches qui ne font que répondre à la violence par la violence, choisissant la guerre contre le gouvernement des États-Unis pour défendre leur liberté, leurs terres, leur culture, et s’opposer à la déportation des leurs dans des réserves.
Si l’histoire des Apaches ne lui appartient pas non plus, l’acteur de cinéma Etan Hawke a découvert très jeune que les films de cow-boys n’étaient qu’un tissu de mensonges. « Les fusillades qui les émaillaient… », écrit-il, « n’avaient rien d’accrochages héroïques et palpitants. Ce n’était que des massacres ».
Des années plus tard, devenu acteur de renom, Etan Hawke entame l’écriture d’un film inspiré par l’ouvrage de David Roberts sur les guerres apaches, Nous étions libres comme le vent, film qui ne verra finalement jamais le jour pour de sombres raisons de casting et d’argent.
De fil en aiguille, le script de ce qui devait être un film devient un scénario de bande dessinée avec au dessin un illustrateur américain réputé, Greg Ruth.
« J’avais été très sensible à son style, à sa puissance émotionnelle. Le script lui plaisait, mais il me fit comprendre que, si je cherchais simplement quelqu’un pour en faire un story-board, j’avais frappé à la mauvaise porte (…) Mais, si j’étais prêt à creuser encore et à faire en sorte de mettre ce matériau au service de la création d’une oeuvre originale dans ce médium, alors il serait partant pour travailler avec moi ».
A l’arrivée, Etan Hawke et Greg Ruth nous offrent un roman graphique absolument captivant, 240 pages en noir et blanc, une mise en scène époustouflante, un graphisme réaliste de caractère, un nouveau regard, plus objectif, sur le destin tragique des Apaches et sur le rôle de leur chef emblématique Geronimo.
« Geronimo représente le protagoniste parfait d’un récit épique, avec toute sa complexité, sa lumière et ses zone d’ombre – un véritable héros shakespearien ».
Sortie en librairie le 22 mars
Eric Guillaud
Indeh, une histoire des guerres apaches, De Ethan Hawke et Greg Ruth. Éditions Hachette Comics. 19,95€