Frank Miller est un auteur de génie qui a marqué de son empreinte le Neuvième art. C’est incontestable. Mais son dernier album, Terreur Sainte paru chez Delcourt, ne peut que nous mettre mal à l’aise. Au point de se demander si Delcourt fait bien de le publier, la presse d’en parler et le lecteur au final de l’acheter. Graphiquement, aucun souci, les planches à l’italienne de l’album sont sublimes. Le découpage, le traitement graphique, la mise en scène, le noir et blanc… Frank Miller maîtrise ses pinceaux avec style, énergie, fureur même. Mais du côté de la plume, c’est une autre histoire. L’auteur entre autres de Sin City, 300, Batman: The Dark Knight Returns, a cru bon ici d’envoyer les super-héros se battre contre des terroristes islamistes. L’affaire se passe dans une ville imaginaire, certes, une ville nommée Empire City mais l’ennemi est lui bien identifié, Al Qaïda. L’éditeur à beau préciser qu’il s’agit là d’une « réponse hargneuse au 11 septembre… » et que « …malgré les positions radicales de l’auteur, Terreur Sainte se garde de condamner l’islamisme pour ne foudroyer que le terrorisme », on est en droit de rester circonspect. Et les dialogues sont loin de nous rassurer comme cet extrait : « Bon, Mohammed, tu m’excuseras si je t’appelle Mohammed mais tu admettras que les chances sont grandes pour que ce soit ton prénom… ». Et que dire de cet phrase d’ouverture que l’auteur attribue à Mahomet « Si tu croises l’infidèle, tue l’infidèle » ? C’est franchement limite et on ne voit pas un dessin, on ne lit pas une ligne qui nous autorise à penser que Frank Miller fait la part des choses entre l’intégrisme et l’islam. Au final, Terreur Sainte est un album ultra-violent et manichéen à lire – si vous y tenez vraiment – l’esprit éveillé ! EGuillaud
Terreur sainte, de Frank Miller. Editions Delcourt. 25,50 euros