04 Jan

Le Château des ruisseaux, de Poincelet et Bernière. Editions Dupuis. 14,95 euros.

Des années d’errance et de souffrances, de petits et grands larcins, de mauvaises rencontres, de shoots dans des endroits sordides… et puis, un jour, un type qui meurt devant lui d’une overdose sur la cuvette en plastique d’une sanisette de la ville de Paris. C’en était trop ! Jean le toxico pensa un moment au suicide avant de se décider, finalement, à franchir la porte du Château des ruisseaux. Dans ce centre de traitement des addictions situé du côté de Soissons, on privilégie l’abstinence, l’entraide et la thérapie de groupe qui permet de travailler sur les émotions. Afin que les patients ne s’isolent pas, les walkmans, la télévision, les livres et même les relations amoureuses sont strictement interdits. Et ça semble marcher ! Pour certains du moins. Jean qui se croyait « junky un jour, junky toujours » comprend qu’un autre chemin est possible. Bientôt, comme les toxicos qui l’ont accueilli à son arrivée, il pourra s’enorgueillir d’être resté clean plusieurs jours. Le seul souci pour lui sera d’ordre sentimental. Jean est amoureux de Marie, arrivée le même jour que lui…

Pour son premier scénario de bande dessinée, Vincent Bernière, ancien addicte aux drogues, aujourd’hui directeur de collection aux éditions Delcourt, décrit avec un grand réalisme le long et douloureux processus qui attend les toxicos désireux de se sortir de la drogue. Et le résultat est aussi fort et utile qu’un documentaire audiovisuel ou cinématographique grâce notamment au fantastique travail graphique de Frédéric Poincelet, éternel agitateur du dessin contemporain, grand explorateur de l’intime, qui en supprimant le découpage traditionnel en vignettes invite véritablement le lecteur à toucher du doigt les douleurs, les doutes et les espoirs des protagonistes, tout en lui évitant une sensation de voyeurisme. Un témoignage essentiel ! E.G.