L’union fait la force ! Les deux frangins Harari qui se sont fait connaître pour l’un dans le septième art et pour l’autre dans le cinéma se retrouvent à la tête d’un projet commun, Le cas David Zimmerman, une bande dessinée qui fait assurément tourner la tête…
Se réveiller un beau jour dans le corps d’un autre et en l’occurrence dans un corps du sexe opposé. Le sujet est vieux comme le monde ou presque mais au-delà de ce qui pourrait relever du fantasme ou du gag à deux centimes d’euros, il y a une vraie question, une question d’identité, que les frères Harari, Lucas et Arthur, explorent avec bonheur dans cette première œuvre commune.
Les amoureux du neuvième art connaissent inévitablement Harari, prénom Lucas, pour ses albums L’Aimant et La Dernière rose de l’été, deux polars à la mécanique parfaitement huilée parus aux éditions Sarbacane. Quant aux cinéphiles, Harari, prénom Arthur, est à jamais associé à la Palme d’or du Festival de Cannes 2023, Anatomie d’une chute, un film réalisé par Justine Triet avec laquelle il a écrit le scénario.
Bref ! Autant dire que ce projet à deux têtes était pour le moins attendu, au point d’être soutenu par France Inter et de faire la couverture du magazine DBD du mois de novembre. Et les éloges sont une nouvelle fois unanimes ! Légitimement ?
Oui, légitimement ! Le cas David Zimmerman nous embarque dans un récit vertigineux de 360 pages dont l’intensité ne cesse de croître au fil des pages.
L’histoire ? David Zimmerman est parisien, trentenaire, photographe de profession, plutôt renfermé de caractère, limite déprimé et déprimant. Nous sommes le 31 décembre au soir, son ami Harry passe le prendre pour la soirée du Nouvel an, direction une méga-fête dans un immense appartement. Une nuit de beuverie plus tard, David se réveille avec un mal de tête épouvantable… et un corps de femme !
« C’est un cauchemar… Je vais me réveiller… »
Malheureusement pour lui, tout ceci n’est pas un cauchemar, ni l’effet de l’alcool ou des petites pilules magiques qu’il a ingurgitées la veille. Plus troublant encore, ce corps, ce visage, ces mains, appartiennent à une jeune femme avec laquelle il a eu une aventure dans la nuit. Alors commence pour David, après un moment de flottement bien légitime, la recherche de son corps d’origine…
Voici donc le point de départ de ce récit fantastique sans dynamique érotique ou comique. Les frères Harari voulaient une approche la plus réaliste possible, elle l’est, explorant les thématiques universelles et contemporaines liées à l’identité et bien au-delà de la seule identité de genre puisque la judéité est elle-même au centre du récit, comme la question sociale ou culturelle.
Avec un découpage surprenant, audacieux, des illustrations pleine page qui offrent de belles respirations au récit tout en l’inscrivant dans un Paris contemporain, Lucas et Arthur Harari signent ici un album d’une très grande maîtrise scénaristique et graphique, une intrigue captivante et un vrai plaisir visuel !
Eric Guillaud
Le cas David Zimmerman, de Lucas et Arthur Harari. Sarbacane. 35€