10 Avr

La citadelle écarlate, une autre vision de Conan le barbare, plus posée, plus grand public et plus controversée aussi

Des cinq volumes de la série d’adaptation par des auteurs français des aventures du héros emblématique de l’heroic fantasy crée en 1932 par le texan Robert E. Howard sortis en un an, ce dernier avatar est peut-être le plus curieux…

Déjà à cause de son parti-pris graphique qui ne plaira pas forcément aux fans les plus conservateurs du barbare. Et ensuite parce que cette histoire, parue à la base en 1933, ose prendre le contre-pied en montrant un Conan vieillissant qui a abandonné sa carrière de mercenaire pour monter sur le trône d’Aquilonie où il règne non pas comme un tyran mais comme un homme proche des aspirations de son peuple. Un Conan presque plus humain donc, bien que souffrant clairement sous le poids de ses responsabilités.

Après, chassez le naturel… Car La Citadelle écarlate est l’histoire d’une traîtrise, celle des nobles locaux qui n’ont jamais accepté que ce va-nu-pieds se retrouve sur le trône, quitte à s’allier avec leurs ennemis de toujours pour lui ravir la place. Inutile de dire que rien ne se passe comme prévu et que le Cimmérien aura sa vengeance.

Dans cette série plutôt réussie jusqu’à maintenant, La Citadelle écarlate est paradoxalement peut-être celui que l’on conseillera le plus aux néophytes. Parce que malgré sa couverture explicite et guerrière, le trait y est plus doux, plus coloré aussi, limite grand public. Les deux auteurs se sont d’ailleurs permis quelques libertés avec le texte original pour en aplanir les attributs les plus nihilistes et sauvages et ainsi faciliter la lecture pour les non-convertis.

Leur approche de l’univers d’Howard est moins rugueux et plus dans un moule heroic fantasy et médiéval classique. Et c’est justement pour les mêmes raisons qu’à l’inverse on suggéra aux gardiens du temple de faire l’impasse, surtout qu’eux ont eu droit aux cours des décennies à quantités d’adaptations devenues légendaires depuis, avec en tête de gondole celle réalisée par l’immense John Buscema pour Marvel dans les années 70. Même si la première édition a droit en bonus à un cahier explicatif de dix pages assez touffu qui permet judicieusement de donner pas mal de clefs de lecture et autres références cachés dans le texte. Il est temps de choisir ton camp camarade !

Olivier Badin

La Citadelle écarlate par Luc Brunschwig et Etienne Le Roux d’après l’oeuvre de Robert E. Howard, Glénat, 14,95 euros

@ Glénat / Brunschwig Leroux & Robert E. Howard