Le manque de notoriété de la ‘Justice League’ en France n’est pas un hasard, tout comme le fait que son adaptation cinématographique (en salles depuis le 15 Novembre) qui n’est que le xième avatar de toute la série de portage ciné d’aventures de super-héros qui envahit désormais plusieurs fois par an depuis une décennie tous nos contrats, et ce alors que le public est proche de la saturation comme le prouvent quelques beaux récents gadins au box-office (Wonder-Woman). Un regroupement plutôt factice et trop hétéroclite pour vraiment convaincre d’héros de divers horizons cherchant clairement à faire de l’ombre aux ‘Avengers’ mais sans jamais y arriver. D’ailleurs, dans la longue intro de cette compilation de douze récits emblématiques de la série publiés initialement entre 1960 et 2017, on ne cherche même pas à cacher que le but initial de ce ‘crossover’ (aventure voyant plusieurs héros de séries différentes se croiser) était d’utiliser les poids lourds de la maison DC, Superman et Batman, pour attirer le chaland et lui faire découvrir ainsi au passage d’autres héros, disons, mineurs (plus grand monde ne se souvient de John Johns le Martien ou d’Extensiman si ?) qui n’avaient pas percé jusqu’à maintenant.
Pendant vingt-cinq ans, on a donc l’impression que la ‘Justice League’ était comme une sorte de vitrine promotionnelle un peu balourde où, d’ailleurs, l’homme chauve-souris et le natif de Krypton faisaient des apparitions de plus en plus épisodiques. Les patrons de DC semblent le reconnaître eux-mêmes car sur les douze épisodes de cette anthologie, seulement quatre datent d’avant 1992 (soit trente ans après sa création !) et ont clairement été inclus avant tout pour raisons, on va dire, historiques comme Starro, Le Conquérant parce que ce fut le tout premier ou Une Ligue Divisée parce qu’il permet de faire rencontrer la ‘vieille’ ligue et la ‘nouvelle’.
En fait, comme beaucoup d’autres, la ‘Justice League’ devra attendre les années 90 et l’entrée dans l’âge adulte des comics pour prendre, enfin, une tournure plus consistante. Les personnages prennent plus d’épaisseur et ne passent plus leur temps à bastonner à tout va alors que des thématiques plus ‘sérieuses’ (la quête d’identité, qu’est-on prêt à faire pour sauver le monde). Hier, Aujourd’hui, Demain (2006) se permet même, sous couvert de se lancer dans une sorte de résumé de leur histoire commune, de gros sous-entendu sur un éventuel triangle amoureux entre Batman, Superman et Wonder-Woman.
Comme les autres volumes de la série ‘DC Anthologie’, cette sélection très subjective reste quand même une excellente séance de rattrapage, même si les téléspectateurs qui n’ont découvert la ‘Justice League’ avec le film risquent d’être un chouia perdus, le tout restant quand même truffé de références plus ou moins cachées qui parleront avant tout aux fins connaisseurs de super-pouvoirs en tout genre. Cerise sur la gâteau quand même : cette couverture sublime, comme toujours dans le cas des DC Anthologies, signée Alex Ross.
Olivier Badin
DC Anthologie : Justice League, DC Comics/Urban Comics, 25€